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Le laboratoire d’idées de la reconstruction écologique et républicaine

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Sommaire

    covid-19

    Derrière la Covid-19, l’état d’urgence écologique

    Depuis plusieurs mois, la crise sanitaire liée à la Covid-19 nous contraint dans nos vies à un état d’alerte permanent. Cette crise sanitaire n’est pas sans lien avec le dérèglement écologique et des événements similaires risquent à l’avenir de se multiplier du fait de l’activité humaine[1]: déforestation irrépressible, fonte du permafrost, migration des parasites, accélération des échanges commerciaux et humains etc. Récemment, un rapport[2] du groupe d’experts de l’ONU sur la biodiversité, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), alertait sur les risques de pandémie plus fréquentes et plus meurtrières si une transformation radicale de notre économie n’advient pas rapidement. En cause, la destruction de la biodiversité par l’homme qui ouvre la voie à d’immenses pandémies par des contacts plus fréquents et plus directs : il existerait 1,7 million de virus inconnus chez les mammifères et les oiseaux, et 540.000 à 850.000 d’entre eux « auraient la capacité d’infecter les humains » – selon l’estimation de la revue Science 2018 citée dans le rapport. Ces mêmes spécialistes appellent à des changements profonds pour prévenir les pandémies et ne plus seulement les guérir, en réduisant l’empreinte de l’activité humaine sur la nature. Ces recommandations rejoignent celles de la lutte contre le changement climatique. Or, nous suivons aujourd’hui et toujours l’une des pires trajectoires des scénarios du groupe international d’experts pour le climat (GIEC), celle d’un réchauffement d’une telle ampleur et d’une telle rapidité qu’il met en danger la survie d’une bonne partie de l’humanité. Cependant, tout est fait pour ne pas lier la pandémie au changement climatique, comme si l’urgence de sauver des vies nous empêchait de traiter l’urgence écologique. C’est pourtant elle qui prépare les crises de demain. Il nous faut aujourd’hui apprendre à faire face sur la durée aux risques de pandémies comme aux conséquences, inéluctables, du changement climatique en préparant notre résilience. Si l’on prend le risque de l’immobilisme, les coûts de gestion des catastrophes à venir atteindront des proportions inégalées. Les experts de l’IPBES affirment d’ailleurs qu’investir aujourd’hui pour éviter ces crises coûtera 100 fois moins cher que de les réparer, pointant le coût déjà annoncé de la Covid-19 entre 8.000 à 16.000 milliards de dollars à l’échelle mondiale, soit plus de 19% du PIB mondial. Il est donc essentiel aujourd’hui de lier préservation de la biodiversité et du climat, pandémies et crises économiques. A cet égard, l’IPBES formule plusieurs recommandations au plan international et notamment celle de lancer une concertation intergouvernementale sur la prévention des pandémies afin de mutualiser les connaissances scientifiques sur les risques à venir et les efforts communs d’action et de recherche à mener, tout en fixant des objectifs ambitieux de préservation du vivant et pour pallier les risques pandémiques dans tout nouveau projet de développement et d’aménagement territorial[3]. Il est vrai que cette dimension multilatérale manque jusqu’ici tant les pays ont géré isolément la pandémie. Mais les recommandations de l’IPBES sont nombreuses à pouvoir déjà prendre forme au niveau national et l’organisation recommande notamment d’incorporer le coût et le risque de potentielles pandémies dans chaque futur budget[4], de sorte que l’anticipation de tels coûts à venir oblige à mettre en place les moyens d’éviter ces catastrophes. Pour s’inscrire dans ces recommandations, obliger les entreprises à s’inscrire dans une trajectoire responsable est essentiel. A cet égard, le plan de relance et les futurs budgets sont des leviers utiles, à condition de porter des enjeux de transformation. Or, pour traiter l’urgence, l’argent public du récent plan de relance est aujourd’hui versé sans aucune contrepartie réelle de transformations. Comme le rappelle la note de l’Institut, il eut été nécessaire d’exclure les grandes entreprises qui, sans conditionnalité de l’aide, peuvent se financer seules afin de dégager des crédits pouvant être redéployés ailleurs. Par ailleurs, mettre en place des éco-conditionnalités climat est nécessaire pour que toute aide à une grande entreprise soumise au reporting extra-financier puisse être assortie de véritables éco-conditionnalités. C’est là le seul moyen pour que les entreprises aidées réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre. Concernant les secteurs pourtant fortement émetteurs, peu est fait pour les inscrire dans une trajectoire de transformation contrainte. Le cas le plus emblématique de ces pièges abscons est celui de la croissance de l’aviation dans son état actuel. Dès maintenant, obligeons les investissements vers les mobilités propres et excluons définitivement les fausses solutions telles que les biocarburants de premières générations dont les impacts environnementaux sont désastreux. Multiplions les investissements dans les domaines porteurs tels que le ferroviaire pour reconstruire un réseau dense et lancer une nouvelle génération de trains, fortement porteur d’emplois. De la même manière, dans l’automobile, nous devons opérer dès maintenant un net virage vers les mobilités propres en fixant des objectifs plus ambitieux pour l’industrie automobile[5] et en accompagnant plus fortement les conversions à travers des bouquets d’aides[6] significatives pour éviter les actuels restes à charge désincitatifs pour les ménages les plus modestes. Il n’est pas concevable aujourd’hui de verser autant d’aides aux entreprises sans contreparties sérieuses. Il est primordial d’organiser la résilience de notre pays en mettant en place une véritable politique ambitieuse et volontaire de relocalisation verte de la production en France et en Europe pour l’extraire d’une chaîne de dépendance internationale extrêmement variable. À cet égard, inspirons-nous du Japon qui réorganise ses chaînes d’approvisionnement en incitant ses industriels à relocaliser leur production, en multipliant les recherches sur les matériaux de substitution locaux. Soutenons prioritairement notre tissu de petites et moyennes entreprises à la forte emprise territoriale et non délocalisables. La baisse récemment actée des impôts de productions de 20 milliards d’euros du plan de relance, consistant en une baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sur deux ans, manque d’ailleurs sa cible puisqu’elle profitera avant tout aux grandes entreprises. En effet, plus de la moitié des entreprises ne contribuent qu’à la cotisation minimum. Cette mesure ne rapportera donc que très peu aux PME et rien aux TPE. Il eût été nécessaire d’exclure de cette baisse les très grandes entreprises

    Par Jeanson G.

    3 décembre 2020

    Dette publique : qui gardera les gardiens ?

    Ils n’ont pas rongé leur frein bien longtemps, les gardiens obsessionnels de la dette publique. Et ils ne sont pas prêts à accepter que le bel édifice de la dette patiemment bâti et consolidé depuis près de cinquante ans s’effondre d’un coup à cause d’un virus. Rappelons qu’aujourd’hui, 40 % de notre dette publique correspondent au seul remboursement des intérêts que nous acquittons aux marchés financiers. Si nous avions conservé le circuit du Trésor, légué notamment par François Bloch-Lainé, et qui a permis de reconstruire la France d’après-guerre en une génération, au lieu d’inscrire dans le marbre du Traité de Maastricht (qu’il faudra réviser tôt ou tard) l’assujettissement de la souveraineté d’un État aux caprices irrationnels des « marchés », nous n’aurions pas ou peu d’intérêts à payer sur notre dette. Celle-ci pourrait aujourd’hui s’élever à environ 72 % du PIB, au lieu des 120 % qu’elle va franchir en 2020. Ce ratio n’a, certes, aucun sens économique puisqu’il superpose un stock (la dette) sur un flux (le PIB) mais, depuis des décennies, il sert d’alibi à l’idée fausse que nous dépensons trop et qu’il est temps de vivre à la hauteur de nos (modestes) moyens. L’obligation de se financer sur les marchés présente un double avantage pour les partisans de l’austérité et de la financiarisation de l’économie : elle alimente les profits bancaires (et les dividendes de leurs actionnaires) et fait gonfler la dette elle-même, renforçant l’idée que, décidément, nous sommes impécunieux. À la place du circuit du Trésor, l’État a livré aux banques privées, via l’agence France Trésor, le soin de gérer notre dette publique sur les « marchés ». Résultat : 60 % de notre dette sont détenus par des non-résidents, ce qui met la France à la merci du bon vouloir des fonds de pension et des gérants d’actifs étrangers. En Italie, seuls 30 % de la dette publique sont détenus hors de la péninsule, et 5 % au Japon. Aujourd’hui, la dépense publique contribue à hauteur de 22% du PIB français (et non 56 % comme cela est répété à tort aussi bien par le Président de la République que le gouverneur de la Banque de France, qui, l’un comme l’autre, trahissent leur biais idéologique lorsqu’il s’agit de lire les comptes publics). Elle est stable depuis les années 1980 et il est grand temps que l’État prenne ses responsabilités en finançant la reconstruction sanitaire, écologique et sociale de notre pays. M. William Dab, l’ancien directeur général de la Santé, alerte d’ores et déjà sur notre incapacité industrielle à produire en masse le vaccin contre la COVID lorsque celui-ci sera disponible. Qu’attendons-nous pour financer l’investissement dans ces industries ? Il est vrai que nous sommes déjà à cours, à l’automne 2020, de vaccins… contre la grippe. Et qu’au lieu de sauver des vies, le gouvernement français semble vouloir à tout prix convaincre nos concitoyens que l’urgence est de réduire les services publics. Pour cela, rien de tel qu’une dette publique qui augmente. Le deuxième confinement (qui aurait pu être évité grâce à une meilleure anticipation) va provoquer vraisemblablement une perte additionnelle de revenus d’au moins une cinquantaine de milliards d’euros. Le PIB français devrait donc s’effondrer d’au moins 12 % en 2020, en grande partie du fait de l’incurie des autorités publiques. Rappelons que l’Allemagne va s’en sortir avec – 5,5 %, car ses dirigeants n’ont pas hésité à investir massivement. Le gouvernement ne semble pas s’en soucier, puisqu’il n’a strictement rien fait pendant l’été pour préparer la vague automnale du virus. Au contraire, le 29 août, il profitait de la torpeur estivale pour introduire un décret visant à restreindre les critères de vulnérabilité sanitaire ouvrant droit au chômage partiel[1]. À la bonne heure : la chute supplémentaire de nos revenus continue de gonfler le ratio dette publique/PIB et de justifier l’abandon des plus fragiles au motif qu’ils nous coûtent trop cher. Pour les gardiens de l’austérité budgétaire, toutefois, les derniers mois ont eu l’inconvénient majeur de contraindre les États, dont la France, à révéler qu’ils pouvaient emprunter sans délai des centaines de milliards à taux négatifs pour éviter l’effondrement immédiat. De son côté, la BCE doit continuer à affirmer, elle aussi, qu’il n’existe pas « d’argent magique » tout en créant ex nihilo pas loin de 1 800 milliards d’euros depuis le mois de mars à destination des banques privées. Dissonance entre le discours et la réalité ? C’est bien le moins que l’on puisse dire.Il ne faudrait cependant pas que cela dure trop longtemps : certes, les « chiens de garde », selon les termes de Paul Nizan, ont dû accepter de mettre en sourdine leur discours anti-dette (ou plutôt anti-État comme nous le verrons, car c’est bien l’État qui est visé in fine), mais il faut rapidement faire entendre que tout cela n’était que temporaire, une folie passagère induite par un virus réputé imprévisible (dont le retour, après les deux épisodes précédents de 2003 et 2012, avait été pourtant prévu et annoncé par l’OMS depuis sept ans). Même si le mot n’est jamais prononcé, il faudra donc très vite retourner à des politiques d’austérité. Ce fut d’abord la Cour des Comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques du 30 juin 2020 qui lança la première flèche : « au-delà de ces mesures de court terme, la France va devoir rebâtir une stratégie de finances publiques. Une action en profondeur est nécessaire afin d’ancrer la soutenabilité de la dette publique et de rehausser la qualité des politiques publiques ». Le message est clair : préparer l’austérité à moyen terme, après les mesures du plan de « relance » (qui n’en est pas un, ainsi que l’Institut Rousseau l’a montré dans une note récente[2]), et couper dans les dépenses publiques. On se rappelle ainsi la formule du gouverneur de la Banque de France qui, en juin dernier, après avoir estimé que 120 % constituait la limite absolue de tout endettement raisonnable[3], plaidait en faveur de « dépenses publiques enfin plus sélectives ». Ce fut aussi le message du FMI, puis des agences de notation, avec une étude de Standards and Poor publiée

    Par Giraud G., Dufrêne N., Wegner O.

    26 novembre 2020

    Un « séparatisme » peut en cacher un (ou des) autre(s)

    Il a bon dos le « séparatisme ». Une nouvelle fois, campagne contre le Front national oblige, le Gouvernement y va de sa petite loi pour fustiger le grand danger de l’islamisme. Ce dernier ne peut être nié et prend la forme d’un phénomène communautariste rendant perméables certaines parties de notre société à un discours fondamentaliste religieux qui mène souvent au repli et parfois à la violence. Mais il y a visiblement d’autres formes de séparatisme qui préoccupent moins le Gouvernement. Or, la défense de l’unité de la République est une cause globale, qui exige de la cohérence et qui s’accommode mal des séparatismes de toute nature. La République doit s’efforcer d’inclure par l’exemple, par la cohérence et par la solidarité, au lieu de stigmatiser par intérêt électoral. Est-ce la voie suivie par le Gouvernement quand il décide de faire disparaître la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), rattachée en juillet 2020 au ministère de l’Intérieur alors qu’elle dépendait auparavant du Premier ministre, et privée au passage de ses effectifs et de ses lignes téléphoniques ? Les pratiques des sectes sont-elles moins dangereuses que celles du fondamentalisme islamiste alors que l’on recense plus de 500 000 adeptes des sectes (dont environ 80 000 enfants) et plus de 2000 signalements pour dérives sectaires chaque année ? On connaît d’ailleurs le rôle joué par la scientologie, les évangéliques et autres mouvements « séparatistes » nord-américains qui, par le relais du rapport annuel du département d’État américain sur les libertés religieuses dans le monde, recommandent depuis près de 20 ans à la France, avec insistance, de supprimer la Miviludes au nom de la « liberté » religieuse[1]. Notre Gouvernement actuel aurait-il cédé à des pressions là où ses prédécesseurs avaient résisté ? Faut-il également parler du séparatisme des plus riches ? La richesse des milliardaires français a progressé de 439 % entre 2009 et 2020, selon le « Billionaires report» 2020 publié par la banque UBS et par le cabinet PWC, et ce mouvement s’est accru considérablement depuis…2017. Seule la Chine fait mieux. La fortune cumulée des plus riches de France représente ainsi près de 30 % du PIB du pays en 2020, contre 10 % en 2009. Une partie des élites financières et économiques fait ainsi déjà sécession, ainsi que les entreprises qu’ils dirigent. Ce n’est d’ailleurs pas propre à la France : aux États-Unis, l’indice boursier SP 500 a battu son record historique au mois de septembre 2020, alors que le pays compte plus de 200 000 morts liés au Covid-19 et que l’activité s’est fortement ralentie. Partout dans le monde, la finance s’est séparée du réel. Là où, dans les années 1930, l’industriel Henry Ford estimait que pour être « admissible », l’échelle des salaires au sein d’une entreprise ne devait pas dépasser 1 à 40, l’écart est aujourd’hui de plus de 1 à 300 dans certaines grandes entreprises françaises, sans compter les rémunérations annexes via les stock-options notamment. Et ceux qui menacent l’État de leurs visées séparatistes, en exerçant un chantage à la richesse et en organisant la libre-circulation des capitaux, obtiennent récompense avec l’instauration du prélèvement forfaitaire unique (PFU), qui conduit à ce que le capital soit moins taxé que le travail, et la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune. Et puis si l’on veut réellement lutter contre le ressentiment de certains à l’égard de la République, quand allons-nous nous décider à limiter à 10 ou 15 le nombre d’enfants par classe dans les quartiers difficiles ? Pourquoi le ministère de l’intérieur se voit attribuer la création de 1 369 postes, alors que le ministère du travail en perd 496 et l’enseignement scolaire 120 dans le PLF 2021 ? Pourquoi avoir supprimé plus de 300 000 contrats aidés en trois ans quand on connaît les difficultés d’entrée dans l’emploi de certains jeunes dans les quartiers ? Borgne sur le séparatisme religieux, le Gouvernement devient carrément aveugle face au séparatisme social. De nombreuses études pointent en outre le repli croissant des franges les plus aisées de la population sur un entre-soi délétère des classes supérieures : elles vivent de plus en plus dans des quartiers aux prix inabordable pour les classes moyennes et populaires[2] et veillent à ce que leurs enfants échappent à cette même mixité, en contournant la carte scolaire ou en les plaçant dans le privé. Même le monde du travail n’échappe pas à cette sécession : les travaux d’Olivier Godechot[3] ont montré que les professions supérieures travaillent de plus en plus dans des entreprises socialement homogènes, loin des ouvriers et des employés. Dans toutes les sphères de la société, la mixité sociale recule. Faut-il enfin, et surtout, regretter le « séparatisme » islamique, et supprimer les enseignements de langue et de culture d’origine dans l’objectif louable de rétablir un cadre national d’éducation, tout en préparant une loi, la loi 4D (décentralisation, déconcentration, différenciation et décomplexification – ce dernier terme n’existant ni dans le Larousse, ni dans notre langue et culture maternelle), qui va permettre un « séparatisme régionaliste » fondé sur la différenciation et la destruction de l’unité de la loi républicaine au nom d’une mystique des « territoires » derrière laquelle se cache trop souvent l’ambition d’un dépérissement de l’action publique ? Ainsi alors qu’Emmanuel Macron joue les républicains à Paris, son bras droit, la branche bretonne de LREM prône le séparatisme à Rennes à travers la mise en place d’un statut à particulier dès lors négociable si les électeurs lui font confiance aux régionales. Alors que le régionalisme embrase l’Espagne, l’Italie, la Belgique ou le Royaume-Uni, le Gouvernement reprend ce qui a conduit ailleurs à la catastrophe dans l’espoir de s’assurer un meilleur résultat aux élections. Par ailleurs, un premier texte organique devrait être bientôt examiné au Sénat pour permettre aux collectivités territoriales de proroger des expérimentations sans généralisation. Nous nous acheminons donc vers une France dans laquelle la loi ne sera plus la même pour tous, partout. L’air de rien, le Gouvernement revient sur l’un des principes premiers posés par la Révolution française lors de la nuit du 4 août. Que dirait-on si un maire issu

    Par Dufrêne N., Morel B.

    11 octobre 2020

    Garantir des traitements dignes aux animaux pour limiter le risque d’épidémie

    Le premier cas humain infecté par le Covid-19 a été détecté sur un marché d’animaux vivants destinés à la consommation à Wuhan en Chine le 17 novembre 2019[1]. Malgré l’imprécision sur la source épidémiologique d’origine du Covid-19, les scientifiques s’accordent sur le fait que l’animal est la source et le transmetteur. Le Covid-19 s’ajoute ainsi à la longue série de pandémies transmises des animaux aux hommes. L’Organisation mondiale pour la santé animale (OIE) souligne que les maladies infectieuses zoonotiques provenant des animaux, telles que la peste, la rage ou la tuberculose[2], représentent 60 % des maladies infectieuses humaines déjà existantes et qu’elles croissent. L’OIE estime que « 75 % des agents pathogènes des maladies infectieuses humaines émergentes, notamment Ebola, le VIH et la grippe aviaire, sont d’origine animale ». En effet, les dernières pandémies sanitaires internationales provenant directement des animaux sont nombreuses : le VIH, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dite maladie de la « vache folle », provenant de l’ESB, les coronavirus, les grippes aviaires (H7N9 et H5N1), la grippe porcine (H1N1) ou encore Ebola. Les pandémies questionnent à chaque fois notre rapport à l’animal, qu’il soit sauvage ou domestique, ainsi que notre modèle agricole et notre système de santé[3]. Cependant, jamais une zoonose n’avait autant désorganisé les sociétés que le Covid-19, conduisant au confinement massif de la population. La crise sanitaire, économique et sociale provoquée par le Covid-19 nous invite à repenser notre système agricole et nos régimes alimentaires pour améliorer la biosécurité. Cette dernière désigne l’ensemble des mesures sanitaires prises pour protéger en amont l’élevage de l’entrée d’éléments pathogènes, de la transmission au sein de l’élevage et de sa propagation à d’autres élevages ou à l’homme. Or, elle ne peut être envisagée seulement dans une perspective de traitement des crises. Elle doit davantage mettre l’accent sur la prévention. L’OIE établit un lien clair entre la santé animale et le bien-être animal et prône la prévention comme la solution « la plus efficace et la plus économique pour protéger l’homme »[4]. Une meilleure prise en compte du bien-être animal dans l’agriculture contribue à améliorer le bien-être et le revenu de l’éleveur, la qualité de l’alimentation et la santé publique, tout en répondant à l’urgence écologique. Il s’agit d’une solution humaniste, écologique et sociale. NB : La note se concentre sur l’élevage en France. La pêche et l’aquaculture ne sont pas traitées, bien que les enjeux sanitaires soient importants. Nous faisons le choix de nous concentrer sur la dissémination d’agents pathogènes de nature accidentelle et d’écarter la question du bioterrorisme. Cette note apporte des solutions pour réduire le risque d’émergence de zoonoses et prévenir la propagation.   I – La biosécurité dans les élevages comme garante de la santé publique 1. Les enjeux écologiques, économiques, sociaux et sanitaires de l’élevage intensif L’élevage intensif est vivement critiqué par rapport au bien-être animal, à la qualité de la viande, ainsi qu’aux conditions de travail des professionnels et à son modèle économique. En 2018, les Français consommaient en moyenne 87,5 kg de viande par an[5], ce qui les place parmi les plus gros consommateurs de viande au monde[6]. Or, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommande de ne pas manger plus de 500 grammes de viande par semaine, soit 26 kg par an, bien en-deçà de la consommation actuelle moyenne. Une consommation excessive de viande est jugée néfaste pour la santé selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) car elle favorise l’obésité, les maladies cardio-vasculaires et certains cancers. Les bénéfices de la viande pour la santé humaine sont également conditionnés par sa qualité, amoindrie lorsque l’animal est malade ou la viande transformée. Or, cette dernière représente 30 % des produits carnés consommés, principalement de la charcuterie industrielle ou des plats préparés[7]. Par ailleurs, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que la consommation mondiale de viande va augmenter de 60 % d’ici 2080, tirée notamment par les pays en développement, ce qui a pour conséquences d’augmenter les prix sur les ressources productives et de pousser les éleveurs vers l’agriculture intensive pour dégager des bénéfices[8]. En France, 80 % des animaux sont dans des élevages intensifs. Ce pourcentage est particulièrement haut pour les porcs (95 %) et les volailles (80 % des poulets de chair et 68 % des poules pondeuses)[9]. Au-delà du problème éthique et sanitaire, la mortalité des animaux dans les élevages représente aussi une perte économique pour les éleveurs. À titre d’exemple, pour l’élevage laitier, le manque à gagner s’élève en moyenne entre 2 000 à 4 000 euros pour 50 vêlages (mise à bas des veaux) par an. Les maladies animales provoquent une perte de production liée à la perte de bêtes ou au coût du traitement des agents pathogènes. Une telle perte de production perturbe les marchés locaux et internationaux puisque les conséquences économiques dépassent le territoire et les éleveurs. Des institutions comme la FAO ou l’OIE mettent en avant le fait qu’un cheptel en bonne santé et les pratiques liées au bien-être animal sont des facteurs de performance économique pour les éleveurs[10]. En outre, l’élevage intensif est aussi décrié du point de vue écologique car il pollue les sols et les eaux, notamment par les eaux usées ou le lisier comme nous pouvons le constater en Bretagne avec la prolifération des algues vertes. L’élevage intensif a également émis, en 2019, 18 % des gaz à effet de serre[11]. De plus, il est très consommateur d’eau[12] et de surfaces agricoles, notamment avec la production de céréales pour nourrir le bétail (40 % des céréales vont au bétail)[13], concurrençant la nourriture à destination directe des êtres humains. L’élevage intensif, par ses conséquences écologiques, économiques et sociales, nuit aux écosystèmes, à la santé des professionnels mais aussi à la santé publique. À ces critiques anciennes s’ajoute celle du risque sanitaire réactivé à chaque pandémie, comme celle que nous connaissons aujourd’hui.   2. Les facteurs de risque et conséquences des zoonoses   Le Covid-19 met en lumière le risque sanitaire de transmission des maladies animales à l’humain par les zoonoses ou les contaminations alimentaires. La contamination des humains par des

    Par Magat A.

    27 juin 2020

    Protéger la biodiversité pour préserver notre santé et notre environnement

    La crise sanitaire historique que nous vivons actuellement amène à repenser fondamentalement notre rapport aux écosystèmes et à promouvoir une protection plus importante de la biodiversité. Si les circonstances spécifiques d’apparition puis de transmission à l’espèce humaine du SARS-CoV-2 ne sont pas encore déterminées précisément (rôle de la chauve-souris puis de la civette et/ou du pangolin), le fait que l’homme empiète chaque jour davantage sur les zones de vie des animaux sauvages – pour les exploiter en déforestant par exemple – est un facteur de plus en plus important de pandémies. La multiplication des épidémies de zoonoses sont le résultat de la pression voire de l’emprise exercée par l’homme sur les habitats naturels des animaux et plus généralement sur la biodiversité. La relative indifférence des civilisations humaines envers la biodiversité au sens large engendre donc un double risque : l’extinction des espèces animales ou végétales et la propagation de pandémies. L’exemple du virus Nipah (on pourrait citer également le VIH ou Ebola, ce dernier provenant là encore d’une chauve-souris) est de ce point de vue topique. La déforestation (chaque année, 13 millions d’hectares de forêts disparaissent selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), l’altération des habitats forestiers, l’agriculture et l’élevage intensif en Malaisie ont ainsi créé les conditions de la transmission de ce virus (là aussi responsable d’une détresse respiratoire et d’encéphalites et mortel dans 40 % des cas) de la chauve-souris vers l’homme. La destruction de l’habitat naturel de ces mammifères – ou selon les mots du professeur d’écologie à l’University College de Londres Kate Jones, « le changement d’affectation des terres » – a rapproché ces derniers des activités humaines dont l’élevage de porcs, eux-mêmes vecteurs de transmission de pathogènes vers l’homme. Fondamentalement, la crise du SARS-CoV-2 est donc l’expression du rapport catastrophique qu’entretiennent les sociétés humaines avec la biodiversité végétale et animale. La France n’est pas encore, en la matière, un modèle de protection. La pandémie ne doit ainsi pas occulter le constat sans appel dressé par les scientifiques ces dernières années et qu’il faut rappeler brièvement (I) avant de préciser le cadre juridique relatif à la biodiversité (II) et d’évoquer quelques pistes d’amélioration de notre rapport à cette dernière (III).   I. Un effondrement massif de la biodiversité que soulignent de nombreuses études scientifiques   Puisque le temps est à l’écoute des scientifiques, faisons donc de nouveau rapidement le constat déjà maintes fois illustré par les travaux portant sur ces problématiques : plus de 75 % des insectes en Europe ont disparu en 40 ans[1] – et près de deux tiers des arthropodes (en termes de populations, de nombre d’espèces et de biomasse) ont disparu en 10 ans[2] -, tout comme 25 à 30 % des oiseaux (aux États-Unis comme en Europe[3]) et plus globalement 60 % des vertébrés sauvages (mammifères, poissons, oiseaux, reptiles et amphibiens) en un demi-siècle[4]. La modulation dans la répartition des populations de poissons a réduit drastiquement le potentiel de pêche et la question de la pérennité de certains écosystèmes marins est posée[5]. À titre d’exemple, les coraux ne résisteront pas à une hausse de plus de 2°C (75 % de disparition avec une augmentation de +1,5°C, 99 % avec une hausse de +2°C)[6]. Si la préservation des espèces animales est mise en avant dans le débat public, la disparition d’un certain nombre de végétaux est également préoccupante, notamment en raison de la vitesse d’extinction. Le taux d’extinction des plantes est ainsi deux fois plus élevé qu’il ne l’était en 1900[7] – et 500 fois plus rapide que le taux d’extinction spontané des espèces – et il est désormais plausible que la planète perde un huitième des espèces végétales d’ici 2050. Les causes de cette disparition sont les mêmes que pour les animaux et sont d’origine humaine : artificialisation des sols, destruction des zones sauvages, agriculture intensive, prolongement des zones urbaines et réchauffement climatique principalement. La France n’échappe pas à cette extinction planétaire puisqu’on estime par exemple que 15 % de sa flore vasculaire (plantes à fleurs, conifères et fougères) est menacée[8]. Le dernier rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), publié en mai 2019, pointe ainsi le fait qu’un million d’espèces animales et végétales (sur 8 millions estimés) sont éteintes ou en voie d’extinction actuellement, ce qui est sans précédent dans l’histoire de la planète sur une période si courte[9]. Le nombre d’espèces menacées d’extinction, voire éteintes, est de plus appelé à augmenter très rapidement car le nombre d’individus restants par espèce est très faible. De façon schématique, le rythme d’extinction des espèces est de 100 à 1 000 fois supérieur à ce qu’il était avant le début de l’ère industrielle il y a 150 ans. À ce bilan scientifique de la perte de la biodiversité et de l’accélération de l’extinction des espèces s’ajoute un constat dramatique du manque de protection des règles juridiques de cette biodiversité. Si quelques avancées ont vu le jour au cours des dernières années, force est de constater que le droit positif n’est que peu ou pas protecteur du vivant.   II. L’absence de protection réelle du vivant par les règles juridiques   Les menaces sur le vivant ne sont pas correctement appréhendées et intégrées par les acteurs juridiques, qu’ils s’agissent des législateurs, des gouvernements, des institutions de l’Union européenne ou bien (et surtout) des juges. Le cadre juridique textuel de la biodiversité – Constitution, droit de l’Union européenne, lois et actes réglementaires – est peu protecteur car schématiquement, il est largement anthropocentré et ne prend en compte faune et flore que de manière résiduelle. Le principe de précaution, inscrit notamment à l’article 5 de la Charte de l’environnement et également présent dans le droit de l’Union européenne, n’est en rien protecteur car, fondamentalement à géométrie variable, il laisse une trop grande marge d’appréciation aux juges qui l’appliquent. Les textes actuels, et singulièrement les directives (ainsi que les lois et actes réglementaires internes qui les transposent) et règlements de l’Union européenne, ne sont également pas adaptés à l’urgence de préservation car très peu contraignants. On pense ici évidemment au règlement REACH (Enregistrement, évaluation et autorisation des substances

    Par Guinard D.

    8 juin 2020

    Profiter de la crise pour réduire durablement nos émissions de CO2

    Au plus fort du confinement, la crise du Covid-19 aura généré une baisse ponctuelle de 17 % des émissions mondiales de CO2, nous ramenant temporairement à notre niveau d’émissions de l’année 2006. La réduction sur l’année entière est attendue autour de – 4 % à – 7 % par rapport à 2019, un chiffre absolument inédit depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, mais pas suffisant cependant pour nous placer sur une trajectoire de neutralité carbone à l’horizon de la seconde moitié du siècle, qui nous commande de réduire nos émissions de 7,6 % chaque année. Devons-nous en conclure que la transition bas carbone est de fait irréaliste et non souhaitable, sauf à vouloir le chômage de masse, la restriction de nos libertés et des milliers de morts ? Ce serait faire un redoutable contresens : car s’il est bien deux choses que la crise du Covid-19 doit nous enseigner sur les sujets liés au climat, c’est, d’une part, qu’il n’existe aucune comparaison possible entre la privation de liberté que nous avons subie et la société sobre en carbone qu’il nous faudra bâtir, et, d’autre part, qu’une transition bas carbone réussie nécessitera des transformations profondes de nos systèmes énergétiques et économiques et pas seulement une modification conjoncturelle de nos comportements individuels. La crise du Covid-19 constitue ainsi un moment de bascule : elle doit nous révéler que la neutralité carbone est un impératif physique non négociable, un attracteur autour duquel nos choix collectifs devront désormais graviter. La France a une empreinte carbone importante, une responsabilité historique élevée et les moyens d’agir : elle doit donc être exemplaire aux yeux de l’Europe et du reste du monde. Il est de notre devoir de nous organiser correctement et intelligemment pour faire advenir, en l’espace d’une trentaine d’années, une société française désirable et juste, sobre dans les usages, et libérée de toute forme d’énergie fossile.   I. Le Covid-19 ne réduira que marginalement et temporairement les émissions en France a) Covid-19, confinement : quel impact sur le climat ?   Plusieurs études récentes[1],[2],[3],[4] ont estimé l’impact de la crise du Covid-19 sur les émissions mondiales de CO2. Leurs résultats, cohérents entre eux, ont mis en évidence,: une baisse ponctuelle des émissions mondiales de l’ordre de 17 % au plus fort de la crise (7 avril), nous ramenant alors temporairement à notre niveau d’émissions de 20064, où l’économie tournait alors à plein régime ; une baisse sur les 4 premiers mois de l’année de l’ordre de 7 % par rapport à la même période l’année dernière3; une baisse sur l’ensemble de l’année 2020 prévue entre 4 % et 7 % par rapport à 2019, en fonction de l’évolution de la crise dans les prochains mois4. Au total, les émissions de 2020 risquent donc d’être entre 93 % et 96 % aussi élevées que celles de 2019. Émissions mondiales de CO2 depuis l’an 2000 (gauche) et depuis le début de l’année 2020 (droite). Le creux d’émissions se situe autour du 7 avril (- 17 %). Moyenné sur l’année et selon le scénario choisi, la baisse sera de 4 à 7 %. Source : Le Quéré et al ; Global Carbon Project.   En France, vers la fin du mois de mars, le confinement aura eu pour effet de baisser ponctuellement nos émissions de CO2 domestiques de pas moins de 30 % « en instantané » par rapport au même jour l’année précédente4. Les émissions totales françaises depuis le début de l’année jusqu’au déconfinement ont baissé de 5 %4, et il est probable que la réduction sur l’année entière soit de l’ordre de 5 à 15 %[5].   Émissions de CO2 en France entre le 1er janvier et la fin du mois de mars 2020. Source : Liu et al.   Or, pour limiter le réchauffement à + 1,5°C, c’est 80 % de nos émissions de gaz à effet de serre qui doivent disparaître d’ici à 2050, soit une baisse de 5,2 % chaque année jusqu’en 2050[6]. Le programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) fixe un objectif de – 7,6 %/an sur la période 2020-2030. Les ordres de grandeur étant similaires, il est tentant de résumer que l’effort à faire pour la lutte contre le dérèglement climatique correspond à un « Covid-19 supplémentaire par an ». Il faut bien voir ici que le mot « supplémentaire » fait toute la différence : un simple « Covid-19 tous les ans » ne reviendrait qu’à maintenir le même niveau d’émissions constaté cette année jusqu’en 2050 (une baisse de 7 % la première année, puis une stagnation des émissions, car la même situation ne ferait que se reproduire année après année). Pour tenir le rythme, il faut alors imaginer qu’en 2021, la situation dure deux fois plus longtemps qu’en 2020, six fois plus longtemps en 2025, soit pendant l’année entière (si l’on considère que 2020 connaîtra deux mois de confinement). Et 2050 devrait alors être l’année… des “trente Covid” ! Si la quantification de l’action climat en “nombre de Covid” a ses limites, c’est que cette baisse radicale d’émissions reste conjoncturelle, non souhaitable et non durable.   b) Aucune analogie ne saurait être faite entre l’expérience de confinement et la “sobriété carbone”   « Still a shitty way to cut CO2 emissions », déclarait sur Twitter le Dr Simon Evans, rédacteur en chef du média Carbon Brief[7], pour relativiser les conversations traitant de la baisse d’émissions dues au Covid-19[8]. Et pour cause : outre le drame humain et sanitaire, outre le fait que ces réductions ne sont absolument pas durables (il suffit de déconfiner pour revenir à la normale), la situation de privation que nous avons vécue au cours de ces derniers mois a joui d’un ratio contrainte/efficacité désastreux, loin de l’image de la sobriété des usages que nous devons bâtir. Cette privation de liberté (de mouvement et, dans une moindre mesure, de consommation) n’est une caractéristique ni nécessaire, ni suffisante d’une sobriété carbone digne de ce nom : elle ne lui est pas nécessaire, c’est-à-dire que la sensation de privation n’est pas consubstantielle à une sobriété réussie. Les changements de comportement les plus efficaces en termes de réduction de notre empreinte sont bien plus volontiers liés à un imaginaire

    Par Dugast C.

    1 juin 2020

    Gérer les grandes infrastructures dans l’intérêt commun en période de crise

    Essentielles dans le cadre du développement économique et social des sociétés industrialisées, les grandes infrastructures constituent un patrimoine collectif aujourd’hui invisible aux yeux des populations et dont les services délivrés sont devenus bien acquis. Pourtant, ces structures, points d’intérêt vital pour la nation française, le sont d’autant plus en période de crise car leur défaillance a souvent de tragiques conséquences et l’après-crise ne peut se faire sans elles. Cette dépendance accrue de nos sociétés pousse l’ensemble des acteurs de la chaîne à travailler sans cesse sur leur résilience, notamment en apprenant des différentes crises vécues. L’actuelle crise sanitaire ne déroge pas à la règle en portant son lot d’enseignements, notamment en neutralisant partiellement deux ressources critiques pour les grandes infrastructures que sont la disponibilité de ressources humaines et la pleine fonctionnalité du système d’informations. Ainsi, l’augmentation des investissements et une gestion publique de certaines infrastructures semblent apparaître comme des réponses évidentes et immédiates à l’après-crise. Néanmoins, elles ne dispensent pas les sociétés modernes de l’impératif de réfléchir plus globalement à la durabilité de leur modèle et la capacité des infrastructures à y répondre.   Les grandes infrastructures, notamment celles de réseaux (énergie, transports, téléphonie, eau, etc.), tiennent une place essentielle dans le développement économique de nos sociétés. Elles permettent la circulation des personnes, des marchandises, des capitaux, de l’information et constituent un levier de croissance dans de multiples secteurs. Depuis plusieurs années, la transition énergétique, le déploiement du très haut débit et la modernisation des réseaux de transport sont à ce titre au centre des politiques d’investissements de la plupart des pays européens. Elles ont également un rôle social déterminant, en assurant la fourniture de biens et de services contribuant à la qualité de vie des individus. En cela, elles représentent un patrimoine collectif au service de la vie de la nation et des activités humaines, pouvant être qualifiés de « biens communs ». « La France possède un des meilleurs réseaux d’infrastructures au monde » [1], affirmation corroborée par le rapport du World Economic Forum (WEF) de 2016 qui mesure la compétitivité globale de 144 pays à partir de 12 thématiques, et qui avait classé la France au dixième rang mondial pour la qualité de ses infrastructures et au deuxième rang des pays du G20. Héritière de grandes infrastructures de service public édifiées après-guerre grâce aux investissements massifs de l’État [2], la France a développé une forte capacité dans la conception, la gestion et l’entretien de ses infrastructures, se positionnant dans les « premiers pays exportateurs » en la matière [3]. Les infrastructures présentent aujourd’hui un niveau d’intégration tel, avec un fonctionnement régulier, qu’elles disparaissent aux yeux de la population, transformant le service délivré en bien acquis pour l’usager. Cette invisibilité, parfois opportune, véhicule pourtant de nombreux écueils, parmi lesquels l’absence de sensibilisation de la population aux différents enjeux (sécuritaires, financiers, environnementaux, techniques…) attachés à la gestion de ces équipements. Ces derniers réapparaissent à la défaveur d’événements exceptionnels, parfois tragiques [4], qui mettent en lumière la vulnérabilité voire la dangerosité de certaines infrastructures. Afin de se prémunir contre de nouvelles catastrophes, les pouvoirs publics ont conçu et déployé des politiques de prévention et gestion des risques visant à réduire les impacts : des risques d’origine naturelle (crues, séismes, mouvements de terrain, changement climatique sur le plus long terme) ; de la dépendance à d’autres infrastructures et réseaux ; des éléments intrinsèques à leur conception (matériaux, vieillissement, etc.) ; d’exploitation liée à la gestion de flux. Pourtant, il apparaît que le fonctionnement même des sociétés industrialisées rend les infrastructures de réseaux de plus en plus vulnérables aux différents risques : concurrence internationale accrue, méthodes de flux tendus (du « juste à temps » à la limitation des stocks), forte baisse des financements de l’État menée dans une logique d’économies budgétaires [5], etc. L’impératif de continuité d’activité en toutes circonstances interroge quant aux usages et à la dépendance des sociétés industrialisées aux grandes infrastructures.   Table des matières I – L’impérieuse nécessité d’assurer le fonctionnement des grandes infrastructures en période de crise Les infrastructures de réseaux reconnues comme « Point d’Importance Vitale » (PIV) Des vulnérabilités émergentes à la faveur d’une crise inédite II – Les enseignements à tirer de la crise pour un fonctionnement optimisé des grandes infrastructures de réseaux Une gouvernance publique à conforter économiquement dans la gestion des grandes infrastructures Une sobriété des usages à développer pour garantir la résilience des grandes infrastructures     I – L’impérieuse nécessité d’assurer le fonctionnement des grandes infrastructures en période de crise   Les différents types de risques ou catastrophes mettent en jeu de façon constante la résilience des infrastructures et de leurs réseaux.   1. Les infrastructures de réseaux reconnues comme « Point d’Importance Vitale » (PIV)   La définition de la résilience, donnée lors de la définition du cadre d’action de Sendaï [6], est « la capacité d’un système, d’une communauté ou d’une société exposée aux risques de résister, d’absorber, d’accueillir et de corriger les effets d’un danger, en temps opportun et de manière efficace, notamment par la préservation et la restauration de ses structures essentielles et de ses fonctions de base » [7]. C’est précisément parce que les infrastructures de réseaux sont reconnues comme des « structures essentielles » qui concourent aux « fonctions de base » (production, distribution de biens et services indispensables à l’exercice de l’autorité de l’État, fonctionnement de l’économie, maintien du potentiel de défense ou à la sécurité de la nation) qu’ils sont considérés comme « d’importance vitale » [8]. Le dispositif de sécurité des activités d’importance vitale (SAIV) constitue le cadre permettant d’analyser les risques et d’appliquer les mesures cohérentes avec les décisions des pouvoirs publics. Au sein de ce dispositif sont référencés les opérateurs d’importance vitale (OIV), lesquels détiennent des points d’importance vitale (PIV) tels que des établissements, des ouvrages ou des installations fournissant les services et les biens indispensables à la vie de la nation [9]. La délimitation du PIV permet une mise en œuvre plus efficiente du dispositif de SAIV entre l’opérateur et le préfet de département concernant des composants névralgiques indispensables au bon fonctionnement des infrastructures

    Par Liguori L.

    10 mai 2020

    Pour une couverture totale de l’activité partielle

    L’activité partielle constitue un des dispositifs les plus anciens de la politique publique de l’emploi. Il consiste à verser une partie de leur salaire à des employés qui cessent le travail, tout en maintenant leur lien contractuel avec l’employeur. Il apparaît formellement avec le décret du 19 avril 1918, qui institue des caisses publiques départementales de secours « contre le chômage résultant de la crise du ravitaillement, des matières premières et du charbon pour les industries » – un chômage conjoncturel partiel, administré par des offices paritaires départementaux et municipaux. La plupart des caisses syndicales, parfois abondées par subvention publique, prévoient alors aussi ce type d’aide. Une série de décrets, circulaires et ordonnances cimentent le dispositif entre 1931 et 1958. Un accord national interprofessionnel de 1968 entérine le caractère national et homogène du dispositif, sans requérir d’accords de branche. Ce dispositif à caractère préventif répond aux intérêts de plusieurs groupes sociaux. Du côté des salariés, il évite leur paupérisation, leur déqualification et la perte de statut social qu’engendre le chômage total. Il écarte le risque de licenciement, en échange d’une réduction provisoire de salaire. Du côté des employeurs, il limite les coûts de réembauche, la perte de potentiel productif avec les salariés les mieux formés et la dilapidation des frais de formation consentis. Une autre motivation, du côté de l’administration publique et des décideurs politiques, concerne l’information sur le marché de l’emploi. Un outil d’activité partielle attractif pour les employeurs leur apparaît nécessaire pour mesurer le temps d’emploi réel en entreprise et, ainsi, constituer des statistiques fiables de l’activité, sa variation et sa répartition entre branches. Ce souci est illustré par les anciens participants au Front populaire, concepteurs de la loi des 40 heures, marqués par leur difficulté à analyser, alors, le temps d’emploi par secteur et taille d’entreprise (Mendès-France, 1966). En somme, l’activité partielle est censée réunir un ensemble d’objectifs apparemment contradictoires : « en même temps conserver un potentiel de main-d’œuvre productif, garantir la pérennité du lien salarial et de Ia protection sociale pour les salariés et diminuer significativement les conflits » (Lallement, Lefèvre, 1997, p. 26). Toutefois, cet équilibre entre groupes sociaux se disloque dans la crise du Covid-19, où les usages de l’activité partielle apparaissent particulièrement ambigus et problématiques. Cette situation appelle une réforme de l’activité partielle, pour l’adapter aux enjeux contemporains et aux défis à venir. Cette note présente les limites du dispositif en termes de couverture (1), d’indemnisation (2) et de contrôle des abus (3) avant d’en proposer plusieurs pistes de réformes (4).   1. Un dispositif qui couvre mal les travailleurs précarisés L’une des limites les plus saillantes du dispositif est la couverture incomplète qu’il fournit. Un ensemble de salariés sont en effet laissés en dehors du dispositif : indépendants, salariés en contrats courts (intérimaires, CDD, saisonniers), chômeurs en fin de droits et démissionnaires.   Un dispositif qui exclut structurellement les travailleurs indépendants   Le dispositif d’activité partielle ne concerne, par définition, que les salariés, laissant de côté les indépendants. Certains ont pu affronter le confinement sereinement, soit parce qu’ils ont pu poursuivre leur activité, soit parce qu’ils disposaient d’une épargne de précaution conséquente, fréquente chez les indépendants (Lamarche et Romani, 2015). Mais un autre segment de ce groupe social s’est trouvé, lui, privé d’activité sans disposer de réserves financières conséquentes. Au premier rang de ceux-ci, on trouve une population dont le statut d’indépendant est contestable, qui exerce le plus souvent sous le statut d’auto-entrepreneurs : chauffeurs de plateformes, ouvriers du BTP, livreurs, etc., dont l’activité est fortement – voire totalement – dépendante d’un donneur d’ordre.   Une prise en charge éphémère des précaires en contrats courts   Pour les salariés en contrats courts, le dispositif s’applique théoriquement. En pratique, de nombreux employeurs ne les ont pas inclus dans leur demande et ont rompu le contrat de manière anticipée, le plus souvent en appliquant – de manière abusive – la clause de force majeure. De ce point de vue, le refus du gouvernement de contrôler, même provisoirement, les licenciements s’est payé par des destructions massives et immédiates d’emplois. Pour les salariés concernés, cela se traduit par une perte de revenus importante, le taux de remplacement de l’assurance-chômage étant moins élevé que celui de l’activité partielle (71 % en moyenne contre 84 %, et 100 % au niveau du SMIC). Mais même lorsque l’activité partielle a été appliquée à ces salariés, ils n’ont été indemnisés que jusqu’à échéance du contrat. Au-delà, ils basculent vers l’assurance-chômage. Outre la complexité d’une démarche administrative supplémentaire pour les nouveaux chômeurs, ce basculement ne peut s’opérer que sous réserve d’ouverture de droits. Cela exclut notamment les travailleurs précaires de type saisonnier, pour lesquels les allocations-chômage font partie du cycle ordinaire de l’année laborieuse, mais s’étendent démesurément en 2020 faute d’opportunité de réembauche.   Chômeurs et travailleurs de l’économie informelle livrés à eux-mêmes   D’une manière générale, l’ensemble des chômeurs ayant épuisé leurs droits se sont retrouvés privés de toute perspective d’embauche, sans pour autant que l’accès à l’assurance-chômage leur soit réouvert. Problématique a aussi été la situation des travailleurs en inter-contrats, ayant démissionné d’un emploi avant la crise en vue de prendre un nouveau poste dans le courant des mois d’avril ou de mars. Nombre d’entre eux ont vu leur embauche repoussée sine die, quand elle n’a pas été purement et simplement annulée, les laissant sans revenus pendant toute la période du confinement, et probablement au-delà. À l’ensemble de ces catégories bien connues des politiques de l’emploi s’ajoute celle des travailleurs de l’économie informelle. S’il n’est pas possible, par définition, d’en donner une évaluation précise, le travail au noir représente un volume d’activité considérable : on peut estimer à 1,9 million le nombre de salariés concernés (Gubian, Hagneré, Mahieu, 2019), dont plus de la moitié ne vivent que du travail informel. Plusieurs travaux scientifiques ont montré que ce dernier tenait une place importante dans l’économie locale de territoires touchés par le chômage de masse, que ce soit dans les territoires urbains comme ruraux (Coquard, 2019). Pour ces

    Par Clouet H.

    5 mai 2020

    Covid-19 : un coup de projecteur sur l’invisibilisation des maladies professionnelles

    Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, l’a affirmé très clairement : « Nos soignants paient un lourd tribut pour sauver des vies. Tous les soignants malades seront reconnus au titre des maladies professionnelles, sans exception ». Il l’a confirmé le 21 avril à l’Assemblée nationale en réponse à une question au gouvernement, tout en indiquant que l’automaticité reconnue aux soignants ne le sera pas aux autres professions qui devront prouver un « lien direct et essentiel entre leur exposition professionnelle et la maladie ». Selon les règles établies par les Comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) chargés de traiter les dossiers de ce type, le requérant doit aussi faire la preuve que la maladie résulte de son travail habituel. Toutefois la question de l’indemnisation des premiers de corvée (caissières de supermarché, ripeurs, employés des transports en commun, métiers de la sécurité, etc.) sera loin d’être résolue. C’est grâce à leur action, leur engagement, leur courage que la société a réussi à continuer à fonctionner et plusieurs d’entre eux y ont déjà laissé la vie. Que dire des travailleurs des activités non essentielles (certaines usines automobiles, l’aéronautique, etc.) qui ont été contraints de poursuivre leur activité et qui y ont été contaminés ? Quels sont les éléments qui pourraient justifier que leurs maladies ne soient pas reconnues comme professionnelles ? Le fonctionnement des CRRMP jusqu’à présent a été extrêmement restrictif et on imagine très bien l’argument facile selon lequel, dans un contexte de pandémie, la contamination a pu intervenir n’importe où (dans les transports, à domicile, dans la rue…). Et la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie est essentielle, car il ouvre droit à une prise en charge à 100 % des frais de santé et à une indemnisation de la perte de revenu (indemnités journalières en cas d’incapacité temporaire de travail et rentes en cas d’incapacité permanente) plus favorable que pour les autres maladies. Au-delà du coronavirus, ce sont les limites et les injustices du système de reconnaissance des maladies professionnelles qui sont mises en évidence. Les cancers professionnels en donnent une bonne illustration. Bon an mal an, l’Assurance maladie Risques professionnels reconnaît environ 1800 cas de cancers professionnels. La très grande majorité de ces reconnaissances correspondent à des pathologies liées à l’amiante, cancers du poumon et mésothéliomes, à l’issue souvent fatale. Arrêtons-nous d’abord sur les 1409 cancers liés à l’amiante, reconnus en maladies professionnelles en 2016. Les spécialistes s’accordent généralement pour considérer un déficit de reconnaissance de moitié, lié majoritairement à un déficit de déclarations : les malades et leurs familles, mal informés, occupés à se battre contre une maladie douloureuse, ayant rarement les moyens de reconstituer leurs expositions professionnelles ne s’engagent pas dans des démarches administratives complexes pour lesquelles le soutien d’une association de victimes s’avère souvent indispensable. Voilà autant de soins pris en charge par la branche Maladie de la Sécurité sociale, qui devraient être imputés à la branche Risques professionnels financée par les seuls employeurs. Voilà autant de rentes qui ne sont pas versées aux victimes ou à leurs ayants droit. Ce n’est qu’un aspect de la question. Une agence d’État (Santé publique France) a réalisé une étude, publiée en 2016, sur la part de cancers attribuables aux expositions professionnelles à quatre cancérogènes professionnels (amiante, silice, benzène et trichloréthylène) et calculé le nombre de décès correspondants. À partir d’une matrice emploi-expositions (qui évalue les expositions professionnelles en fonction des travaux effectués), l’auteure a évalué les bornes inférieures et supérieures du nombre de cancers dus à certains agents toxiques. Ainsi pour l’amiante déjà cité, en intégrant les cancers du larynx et de l’ovaire non listés dans les tableaux de maladies professionnelles amiante, elle obtient une mortalité comprise entre 2439 et 6184 hommes et 250 et 437 femmes, soient entre 2689 et 6621 personnes. Pour la silice, selon la même étude, on devrait aboutir à un nombre de reconnaissances en maladies professionnelles entre 200 et 1186 cas tous les ans. Pourtant il dépasse rarement la dizaine dans le même laps de temps. Pour le benzène, on attendrait entre 82 et 392 cas réparés au titre des maladies professionnelles. Le nombre de reconnaissances n’a jamais dépassé quelques (très peu nombreuses) dizaines. Pour le trichloréthylène, on attendrait une reconnaissance d’entre 141 et 452 cancers du rein annuellement. Il n’existe même pas de tableau de maladie professionnelle relatif au cancer du rein en lien avec une exposition professionnelle au trichloréthylène… Cette étude qui démontre déjà la très nette sous-déclaration des cancers professionnels est encore en deçà de la réalité puisqu’elle ne tient pas compte des études les plus récentes qui font le lien entre l’organisation du travail (les horaires décalés et en particulier le travail de nuit) et les cancers du sein ou de la prostate. Nous sommes confrontés à un processus d’invisibilisation des effets du travail sur la santé. On proclame la mobilisation générale pour diminuer le nombre d’accidents mortels et on passe complètement sous silence les milliers de morts liés à l’exposition à des agents cancérogènes au poste de travail. Pire, on ne se donne pas les moyens de les reconnaître, et d’indemniser les victimes ou leurs ayants droit. Ni du coup de mettre en place une prévention des risques conséquente, ni de faire payer ceux qui en sont responsables. Les pouvoirs publics sont tellement peu dupes de ces charges assurées par la branche Maladie au lieu de la branche Risques professionnels qu’ils ont institué un transfert financier d’un milliard d’euros par an de la deuxième vers la première. On retire de cela l’impression que la mort des premiers de corvée (souvent des ouvriers) est finalement dans la norme et qu’il n’y a pas de raison de s’en offusquer : comme si c’étaient les risques du métier ou plus exactement de la condition ouvrière. De la même façon, le « scandale de l’amiante » n’a acquis sa pleine visibilité qu’au milieu des années 1990 seulement parce que l’opinion publique a pris conscience que la large utilisation de ces fibres était susceptible de

    Par Pevar L.

    29 avril 2020

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