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Le laboratoire d’idées de la reconstruction écologique et républicaine

Anastasia Magat

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    Anastasia Magat

    Anastasia Magat

    Conseil d’administrationDirectrice générale adjointe

    Biographie

    Doctorante en sociologie à l’Université de Grenoble Alpes, Anastasia Magat travaille sur l’image des quartiers prioritaires sur les réseaux sociaux. Diplômée de Sciences Po Grenoble en études d’opinion, elle s’intéresse à la sociologie électorale.

    Elle est la Directrice adjointe de l’Institut et est en charge des études autour des médias et des réseaux sociaux.

    Notes publiées

    Comment améliorer le traitement des enjeux écologiques dans les médias ?

    Introduction générale Les crises écologiques engendrent déjà de nombreux bouleversements. Le GIEC estime que 3,3 à 3,6 milliards d’individus sont déjà en situation de vulnérabilité. Entre le 1er juin et le 22 août 2022, l’INSEE évalue à 11 000 la surmortalité en France vraisemblablement liée aux vagues de chaleur successives, par rapport à la même période en 2019. Au Pakistan, selon le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), 33 millions de Pakistanais ont été touchés par les inondations dévastatrices de ce même été, provoquant 8 millions de déplacés climatiques, 1500 disparus, 3,5 millions d’hectares de cultures perdus et la destruction de nombreuses infrastructures. Face au coût exorbitant de l’inaction, l’impérieuse nécessité d’agir n’est plus à démontrer. L’ordre mondial se trouve donc fragilisé par des crises s’amplifiant rapidement pour lesquelles notre capacité d’anticipation, et donc de protection, diminue. Face à ces bascules importantes, les médias ne sont pas à la hauteur de l’urgence écologique. Seulement 3,6 % des contenus médiatiques pendant la campagne électorale présidentielle de 2022 portaient sur les questions climatiques.[1] À titre de comparaison, le Covid-19 a occupé jusqu’à 74,9 % du temps d’antenne[2]. De même, dans le secteur audiovisuel, seuls 0,8% des reportages ont été consacrés aux enjeux écologiques depuis 2013[3]. Bien que le traitement médiatique de l’écologie ait triplé depuis les années 1990[4], cette proportion apparaît encore insuffisante au regard des faits et enjeux liés au franchissement des limites planétaires (dérèglement climatique, érosion vertigineuse de la biodiversité, perturbation des cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore, changements d’utilisation des sols, acidification des océans, utilisation mondiale de l’eau, appauvrissement de l’ozone stratosphérique, augmentation des aérosols dans l’atmosphère, introduction d’entités nouvelles dans la biosphère) et à la raréfaction des ressources déjà à l’œuvre. À cela s’ajoute le cadrage médiatique des enjeux écologiques, souvent cantonné à des rubriques dédiées. Si cette organisation en silos est censée faciliter l’accès à l’information thématique, elle contribue néanmoins à isoler l’information et à ne la transmettre qu’à une portion réduite et déjà sensibilisée de la population. Par ailleurs, ce traitement va à l’encontre de la dimension systémique des enjeux écologiques, possédant des ramifications transversales dans diverses rubriques (économie, politique, société, agriculture, santé, etc…). De plus, de nombreux médias français favorisent la fabrique du doute en ne distinguant pas les faits des opinions. Cela a notamment pu alimenter “une polarisation de l’opinion publique, avec des répercussions négatives pour la politique climatique”, expliquent les membres du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Il souligne ainsi le rôle majeur des médias : “Les médias peuvent avoir un  impact significatif pour faire progresser la conscience climatique et la légitimité des actions engagées. Ils cadrent et transmettent les informations sur le changement climatique, ils ont un rôle crucial dans la perception qu’en a le public, sa compréhension et sa volonté d’agir”. Les médias, par leur mission d’informer les citoyens sont, à ce titre, des acteurs démocratiques essentiels pour la reconstruction écologique de nos sociétés. Il est impératif que chaque citoyen, quels que soient les médias qu’il consulte, puisse avoir accès à un niveau d’information suffisant et qualitatif sur des enjeux aussi vitaux. Or, l’édition 2022 de l’étude “Fractures Françaises” (Ipsos-Sopra Steria) révèle que si 90 % des Français considèrent que “nous sommes en train de vivre un changement climatique”, 39 % doutent encore de l’origine anthropique de cette crise. Il existe pourtant un consensus scientifique mondial sur cette question. Il y a donc urgence à informer davantage et mieux. En outre, de nombreux médias français publient des contenus éditoriaux contradictoires. En parallèle de la publication d’articles, de reportages et d’émissions traitant des enjeux écologiques, ils publient des contenus relatifs à des modes de vie ou des imaginaires allant à l’encontre des préconisations scientifiques permettant de faire face à l’urgence. Ces contenus éditoriaux sont également insatisfaisants dans la façon dont ils font le lien entre les causes de la crise écologique et ses effets.  Au-delà des contenus éditoriaux, les contenus publicitaires faisant la promotion de biens ou de services défavorables à l’environnement, nuancent la portée des messages transmis concernant l’urgence écologique. Cette inadéquation entre contenus éditoriaux et publicitaires, contribue à une dissonance cognitive portant préjudice à la compréhension et la perception des enjeux. Ce traitement déséquilibré des enjeux délégitime les décisions publiques et met à mal l’engagement citoyen. La transformation des médias se justifie doublement, à la fois dans l’intérêt public mais également dans l’intérêt du public. L’intérêt public, général, n’est plus à démontrer tant les conséquences de la crise écologique sont manifestes et tangibles. Or, les médias offrent souvent une analyse des faits partielle, voire erronée, comme nous avons pu le voir ces précédentes années avec le traitement des vagues de chaleur en France. Malgré leurs conséquences sanitaires (mortalité), agricoles et économiques, ces catastrophes sont encore traitées avec une connotation positive dans les médias[5]. L’intérêt du public est bien présent puisque les Français font de l’environnement leur seconde priorité, tout en estimant que les médias et les journalistes n’accordent “pas assez de place” aux questions posées par le changement climatique et l’environnement. Il est donc urgent que le traitement médiatique des enjeux écologiques progresse. Des évolutions sont d’ores-et-déjà perceptibles. En septembre 2022, Radio France a annoncé son « Tournant » écologique engageant à la fois la formation des journalistes, la transformation des contenus éditoriaux et publicitaires et l’amélioration de la performance écologique interne. Le 14 septembre 2022, un collectif de journalistes a publié une Charte “Pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique”, composée de 13 engagements. La charte a été signée par plus de 1 500 journalistes et 120 rédactions, attestant du souhait de la profession d’améliorer ses pratiques en matière d’écologie. Retrouvez ici la proposition de loi relative à la responsabilité des médias dans le traitement des enjeux environnementaux et de durabilité Tout en saluant les récents engagements des journalistes en faveur d’un traitement médiatique plus sérieux de la crise écologique, la réponse à cet enjeu ne peut reposer que sur le seul volontariat. La réglementation est l’un des outils les plus adéquats pour garantir aux

    Par Prosperi J., Ramos P., Vernières A., Morel E., Magat A., Dufrêne N.

    19 juillet 2023

    Proposition de loi relative à la responsabilité des médias dans le traitement des enjeux environnementaux et de durabilité

    EXPOSÉ DES MOTIFS Les crises écologiques engendrent déjà de nombreux bouleversements. Le GIEC estime que 3,3 à 3,6 milliards d’individus sont déjà en situation de vulnérabilité. Entre le 1er juin et le 22 août 2022, l’INSEE évalue à 11 000 la surmortalité en France vraisemblablement liée aux vagues de chaleur successives, par rapport à la même période en 2019. Au Pakistan, selon le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), 33 millions de Pakistanais ont été touchés par les inondations dévastatrices de ce même été, provoquant 8 millions de déplacés climatiques, 1500 disparus, 3,5 millions d’hectares de cultures perdus et la destruction de nombreuses infrastructures. Face au coût exorbitant de l’inaction, l’impérieuse nécessité d’agir n’est plus à démontrer. L’ordre mondial se trouve donc fragilisé par des crises s’amplifiant rapidement pour lesquelles notre capacité d’anticipation, et donc de protection, diminue. Face à ces bascules importantes, les médias ne sont pas à la hauteur de l’urgence écologique. Seulement 3,6 % des contenus médiatiques pendant la campagne électorale présidentielle de 2022 portaient sur les questions climatiques.[1] À titre de comparaison, le Covid-19 a occupé jusqu’à 74,9 % du temps d’antenne[2]. De même, dans le secteur audiovisuel, seuls 0,8% des reportages ont été consacrés aux enjeux écologiques depuis 2013[3]. Bien que le traitement médiatique de l’écologie ait triplé depuis les années 1990[4], cette proportion apparaît encore insuffisante au regard des faits et enjeux liés au franchissement des limites planétaires (dérèglement climatique, érosion vertigineuse de la biodiversité, perturbation des cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore, changements d’utilisation des sols, acidification des océans, utilisation mondiale de l’eau, appauvrissement de l’ozone stratosphérique, augmentation des aérosols dans l’atmosphère, introduction d’entités nouvelles dans la biosphère) et à la raréfaction des ressources déjà à l’oeuvre. À cela s’ajoute le cadrage médiatique des enjeux écologiques, souvent cantonné à des rubriques dédiées. Si cette organisation en silos est censée faciliter l’accès à l’information thématique, elle contribue néanmoins à isoler l’information et à ne la transmettre qu’à une portion réduite et déjà sensibilisée de la population. Par ailleurs, ce traitement va à l’encontre de la dimension systémique des enjeux écologiques, possédant des ramifications transversales dans diverses rubriques (économie, politique, société, agriculture, santé, etc…). De plus, de nombreux médias français favorisent la fabrique du doute en ne distinguant pas les faits des opinions. Cela a notamment pu alimenter “une polarisation de l’opinion publique, avec des répercussions négatives pour la politique climatique”, expliquent les membres du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Il souligne ainsi le rôle majeur des médias : “Les médias peuvent avoir un  impact significatif pour faire progresser la conscience climatique et la légitimité des actions engagées. Ils cadrent et transmettent les informations sur le changement climatique, ils ont un rôle crucial dans la perception qu’en a le public, sa compréhension et sa volonté d’agir”. Les médias, par leur mission d’informer les citoyens sont, à ce titre, des acteurs démocratiques essentiels pour la reconstruction écologique de nos sociétés. Il est impératif que chaque citoyen, quels que soient les médias qu’il consulte, puisse avoir accès à un niveau d’information suffisant et qualitatif sur des enjeux aussi vitaux. Or, l’édition 2022 de l’étude “Fractures Françaises” (Ipsos-Sopra Steria) révèle que si 90 % des Français considèrent que “nous sommes en train de vivre un changement climatique”, 39% doutent encore de l’origine anthropique de cette crise. Il existe pourtant un consensus scientifique mondial sur cette question. Il y a donc urgence à informer davantage et mieux. En outre, de nombreux médias français publient des contenus éditoriaux contradictoires. En parallèle de la publication d’articles, de reportages et d’émissions traitant des enjeux écologiques, ils publient des contenus relatifs à des modes de vie ou des imaginaires allant à l’encontre des préconisations scientifiques permettant de faire face à l’urgence. Ces contenus éditoriaux sont également insatisfaisants dans la façon dont ils font le lien entre les causes de la crise écologique et ses effets.  Au-delà des contenus éditoriaux, les contenus publicitaires faisant la promotion de biens ou de services défavorables à l’environnement, nuancent la portée des messages transmis concernant l’urgence écologique. Cette inadéquation entre contenus éditoriaux et publicitaires, contribue à une dissonance cognitive portant préjudice à la compréhension et la perception des enjeux. Ce traitement déséquilibré des enjeux délégitime les décisions publiques et met à mal l’engagement citoyen. La transformation des médias se justifie doublement, à la fois dans l’intérêt public mais également dans l’intérêt du public. L’intérêt public, général, n’est plus à démontrer tant les conséquences de la crise écologique sont manifestes et tangibles. Or, les médias offrent souvent une analyse des faits partielle, voire erronée, comme nous avons pu le voir ces précédentes années avec le traitement des vagues de chaleur en France. Malgré leurs conséquences sanitaires (mortalité), agricoles et économiques, ces catastrophes sont encore traitées avec une connotation positive dans les médias[5]. L’intérêt du public est bien présent puisque les Français font de l’environnement leur seconde priorité, tout en estimant que les médias et les journalistes n’accordent “pas assez de place” aux questions posées par le changement climatique et l’environnement. Il est donc urgent que le traitement médiatique des enjeux écologiques progresse. Des évolutions sont d’ores-et-déjà perceptibles. En septembre 2022, Radio France a annoncé son « Tournant » écologique engageant à la fois la formation des journalistes, la transformation des contenus éditoriaux et publicitaires et l’amélioration de la performance écologique interne. Le 14 septembre 2022, un collectif de journalistes a publié une Charte “Pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique”, composée de 13 engagements. La charte a été signée par plus de 1 500 journalistes et 120 rédactions, attestant du souhait de la profession d’améliorer ses pratiques en matière d’écologie. Tout en saluant les récents engagements des journalistes en faveur d’un traitement médiatique plus sérieux de la crise écologique, la réponse à cet enjeu ne peut reposer que sur le seul volontariat. La réglementation est l’un des outils les plus adéquats pour garantir aux individus le droit à l’information sur l’environnement, un droit à valeur constitutionnelle. Aussi, notre Constitution affirme le caractère inaliénable de la

    Par Prosperi J., Ramos P., Vernières A., Morel E., Magat A., Dufrêne N.

    19 juillet 2023

    Réforme des retraites, rapport du GIEC et Road to net Zero L'éditorial d'avril 2023

    L’actualité du mois de mars a été rythmée par le projet de réforme des retraites porté par le gouvernement et la mobilisation d’ampleur qui s’y oppose. L’Institut Rousseau a participé à cette dernière en montrant qu’une autre réforme des retraites est pourtant possible ! Nous avons porté 3 propositions dans ce sens : un droit à la retraite attaché à la personne, calculé en neutralisant les périodes d’inactivité subies, et non plus à la carrière professionnelle pour sortir du « piège de la carrière » aujourd’hui caduque ; une cotisation retraite appliquée sur l’intégralité de la valeur ajoutée sur le montant des dividendes versés qui ira à un fonds retraite spécifique ; un revenu d’engagement senior comme réponse non marchande fondée sur le pari de l’engagement des seniors pour des activités à forte utilité sociale et écologique. De même, cette séquence politique, avec le recours au 49.3, puis la motion de censure rejetée, souligne la nécessité de repenser les institutions démocratiques pour mieux prendre en compte les citoyens, ce à quoi Benjamin Morel nous invitait déjà en 2020. L’autre actualité marquante, et pourtant trop silencieuse, est la publication du 6ème rapport du GIEC qui acte explicitement l’urgence d’une « planification et une mise en œuvre flexibles, multisectorielles, inclusives et à long terme des mesures d’adaptation ». L’Institut Rousseau n’a de cesse depuis sa création d’œuvrer dans ce sens, pour promouvoir des politiques publiques ambitieuses, à la hauteur du défi. À l’invitation de Sciences Po Alumni, nous avons présenté le rapport « 2% pour 2°C », qui chiffre la reconstruction écologique à 2,3 % du PIB pour atteindre les objectifs de neutralité carbone.

    Par Magat A.

    17 avril 2023

    Comment améliorer le traitement des enjeux écologiques dans les médias ?

    Introduction générale Les crises écologiques engendrent déjà de nombreux bouleversements. Le GIEC estime que 3,3 à 3,6 milliards d’individus sont déjà en situation de vulnérabilité. Entre le 1er juin et le 22 août 2022, l’INSEE évalue à 11 000 la surmortalité en France vraisemblablement liée aux vagues de chaleur successives, par rapport à la même période en 2019. Au Pakistan, selon le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), 33 millions de Pakistanais ont été touchés par les inondations dévastatrices de ce même été, provoquant 8 millions de déplacés climatiques, 1500 disparus, 3,5 millions d’hectares de cultures perdus et la destruction de nombreuses infrastructures. Face au coût exorbitant de l’inaction, l’impérieuse nécessité d’agir n’est plus à démontrer. L’ordre mondial se trouve donc fragilisé par des crises s’amplifiant rapidement pour lesquelles notre capacité d’anticipation, et donc de protection, diminue. Face à ces bascules importantes, les médias ne sont pas à la hauteur de l’urgence écologique. Seulement 3,6 % des contenus médiatiques pendant la campagne électorale présidentielle de 2022 portaient sur les questions climatiques.[1] À titre de comparaison, le Covid-19 a occupé jusqu’à 74,9 % du temps d’antenne[2]. De même, dans le secteur audiovisuel, seuls 0,8% des reportages ont été consacrés aux enjeux écologiques depuis 2013[3]. Bien que le traitement médiatique de l’écologie ait triplé depuis les années 1990[4], cette proportion apparaît encore insuffisante au regard des faits et enjeux liés au franchissement des limites planétaires (dérèglement climatique, érosion vertigineuse de la biodiversité, perturbation des cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore, changements d’utilisation des sols, acidification des océans, utilisation mondiale de l’eau, appauvrissement de l’ozone stratosphérique, augmentation des aérosols dans l’atmosphère, introduction d’entités nouvelles dans la biosphère) et à la raréfaction des ressources déjà à l’œuvre. À cela s’ajoute le cadrage médiatique des enjeux écologiques, souvent cantonné à des rubriques dédiées. Si cette organisation en silos est censée faciliter l’accès à l’information thématique, elle contribue néanmoins à isoler l’information et à ne la transmettre qu’à une portion réduite et déjà sensibilisée de la population. Par ailleurs, ce traitement va à l’encontre de la dimension systémique des enjeux écologiques, possédant des ramifications transversales dans diverses rubriques (économie, politique, société, agriculture, santé, etc…). De plus, de nombreux médias français favorisent la fabrique du doute en ne distinguant pas les faits des opinions. Cela a notamment pu alimenter “une polarisation de l’opinion publique, avec des répercussions négatives pour la politique climatique”, expliquent les membres du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Il souligne ainsi le rôle majeur des médias : “Les médias peuvent avoir un  impact significatif pour faire progresser la conscience climatique et la légitimité des actions engagées. Ils cadrent et transmettent les informations sur le changement climatique, ils ont un rôle crucial dans la perception qu’en a le public, sa compréhension et sa volonté d’agir”. Les médias, par leur mission d’informer les citoyens sont, à ce titre, des acteurs démocratiques essentiels pour la reconstruction écologique de nos sociétés. Il est impératif que chaque citoyen, quels que soient les médias qu’il consulte, puisse avoir accès à un niveau d’information suffisant et qualitatif sur des enjeux aussi vitaux. Or, l’édition 2022 de l’étude “Fractures Françaises” (Ipsos-Sopra Steria) révèle que si 90 % des Français considèrent que “nous sommes en train de vivre un changement climatique”, 39 % doutent encore de l’origine anthropique de cette crise. Il existe pourtant un consensus scientifique mondial sur cette question. Il y a donc urgence à informer davantage et mieux. En outre, de nombreux médias français publient des contenus éditoriaux contradictoires. En parallèle de la publication d’articles, de reportages et d’émissions traitant des enjeux écologiques, ils publient des contenus relatifs à des modes de vie ou des imaginaires allant à l’encontre des préconisations scientifiques permettant de faire face à l’urgence. Ces contenus éditoriaux sont également insatisfaisants dans la façon dont ils font le lien entre les causes de la crise écologique et ses effets.  Au-delà des contenus éditoriaux, les contenus publicitaires faisant la promotion de biens ou de services défavorables à l’environnement, nuancent la portée des messages transmis concernant l’urgence écologique. Cette inadéquation entre contenus éditoriaux et publicitaires, contribue à une dissonance cognitive portant préjudice à la compréhension et la perception des enjeux. Ce traitement déséquilibré des enjeux délégitime les décisions publiques et met à mal l’engagement citoyen. La transformation des médias se justifie doublement, à la fois dans l’intérêt public mais également dans l’intérêt du public. L’intérêt public, général, n’est plus à démontrer tant les conséquences de la crise écologique sont manifestes et tangibles. Or, les médias offrent souvent une analyse des faits partielle, voire erronée, comme nous avons pu le voir ces précédentes années avec le traitement des vagues de chaleur en France. Malgré leurs conséquences sanitaires (mortalité), agricoles et économiques, ces catastrophes sont encore traitées avec une connotation positive dans les médias[5]. L’intérêt du public est bien présent puisque les Français font de l’environnement leur seconde priorité, tout en estimant que les médias et les journalistes n’accordent “pas assez de place” aux questions posées par le changement climatique et l’environnement. Il est donc urgent que le traitement médiatique des enjeux écologiques progresse. Des évolutions sont d’ores-et-déjà perceptibles. En septembre 2022, Radio France a annoncé son « Tournant » écologique engageant à la fois la formation des journalistes, la transformation des contenus éditoriaux et publicitaires et l’amélioration de la performance écologique interne. Le 14 septembre 2022, un collectif de journalistes a publié une Charte “Pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique”, composée de 13 engagements. La charte a été signée par plus de 1 500 journalistes et 120 rédactions, attestant du souhait de la profession d’améliorer ses pratiques en matière d’écologie. Retrouvez ici la proposition de loi relative à la responsabilité des médias dans le traitement des enjeux environnementaux et de durabilité Tout en saluant les récents engagements des journalistes en faveur d’un traitement médiatique plus sérieux de la crise écologique, la réponse à cet enjeu ne peut reposer que sur le seul volontariat. La réglementation est l’un des outils les plus adéquats pour garantir aux

    Par Prosperi J., Ramos P., Vernières A., Morel E., Magat A., Dufrêne N.

    22 juin 2021

    Proposition de loi relative à la responsabilité des médias dans le traitement des enjeux environnementaux et de durabilité

    EXPOSÉ DES MOTIFS Les crises écologiques engendrent déjà de nombreux bouleversements. Le GIEC estime que 3,3 à 3,6 milliards d’individus sont déjà en situation de vulnérabilité. Entre le 1er juin et le 22 août 2022, l’INSEE évalue à 11 000 la surmortalité en France vraisemblablement liée aux vagues de chaleur successives, par rapport à la même période en 2019. Au Pakistan, selon le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR), 33 millions de Pakistanais ont été touchés par les inondations dévastatrices de ce même été, provoquant 8 millions de déplacés climatiques, 1500 disparus, 3,5 millions d’hectares de cultures perdus et la destruction de nombreuses infrastructures. Face au coût exorbitant de l’inaction, l’impérieuse nécessité d’agir n’est plus à démontrer. L’ordre mondial se trouve donc fragilisé par des crises s’amplifiant rapidement pour lesquelles notre capacité d’anticipation, et donc de protection, diminue. Face à ces bascules importantes, les médias ne sont pas à la hauteur de l’urgence écologique. Seulement 3,6 % des contenus médiatiques pendant la campagne électorale présidentielle de 2022 portaient sur les questions climatiques.[1] À titre de comparaison, le Covid-19 a occupé jusqu’à 74,9 % du temps d’antenne[2]. De même, dans le secteur audiovisuel, seuls 0,8% des reportages ont été consacrés aux enjeux écologiques depuis 2013[3]. Bien que le traitement médiatique de l’écologie ait triplé depuis les années 1990[4], cette proportion apparaît encore insuffisante au regard des faits et enjeux liés au franchissement des limites planétaires (dérèglement climatique, érosion vertigineuse de la biodiversité, perturbation des cycles biogéochimiques de l’azote et du phosphore, changements d’utilisation des sols, acidification des océans, utilisation mondiale de l’eau, appauvrissement de l’ozone stratosphérique, augmentation des aérosols dans l’atmosphère, introduction d’entités nouvelles dans la biosphère) et à la raréfaction des ressources déjà à l’oeuvre. À cela s’ajoute le cadrage médiatique des enjeux écologiques, souvent cantonné à des rubriques dédiées. Si cette organisation en silos est censée faciliter l’accès à l’information thématique, elle contribue néanmoins à isoler l’information et à ne la transmettre qu’à une portion réduite et déjà sensibilisée de la population. Par ailleurs, ce traitement va à l’encontre de la dimension systémique des enjeux écologiques, possédant des ramifications transversales dans diverses rubriques (économie, politique, société, agriculture, santé, etc…). De plus, de nombreux médias français favorisent la fabrique du doute en ne distinguant pas les faits des opinions. Cela a notamment pu alimenter “une polarisation de l’opinion publique, avec des répercussions négatives pour la politique climatique”, expliquent les membres du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Il souligne ainsi le rôle majeur des médias : “Les médias peuvent avoir un  impact significatif pour faire progresser la conscience climatique et la légitimité des actions engagées. Ils cadrent et transmettent les informations sur le changement climatique, ils ont un rôle crucial dans la perception qu’en a le public, sa compréhension et sa volonté d’agir”. Les médias, par leur mission d’informer les citoyens sont, à ce titre, des acteurs démocratiques essentiels pour la reconstruction écologique de nos sociétés. Il est impératif que chaque citoyen, quels que soient les médias qu’il consulte, puisse avoir accès à un niveau d’information suffisant et qualitatif sur des enjeux aussi vitaux. Or, l’édition 2022 de l’étude “Fractures Françaises” (Ipsos-Sopra Steria) révèle que si 90 % des Français considèrent que “nous sommes en train de vivre un changement climatique”, 39% doutent encore de l’origine anthropique de cette crise. Il existe pourtant un consensus scientifique mondial sur cette question. Il y a donc urgence à informer davantage et mieux. En outre, de nombreux médias français publient des contenus éditoriaux contradictoires. En parallèle de la publication d’articles, de reportages et d’émissions traitant des enjeux écologiques, ils publient des contenus relatifs à des modes de vie ou des imaginaires allant à l’encontre des préconisations scientifiques permettant de faire face à l’urgence. Ces contenus éditoriaux sont également insatisfaisants dans la façon dont ils font le lien entre les causes de la crise écologique et ses effets.  Au-delà des contenus éditoriaux, les contenus publicitaires faisant la promotion de biens ou de services défavorables à l’environnement, nuancent la portée des messages transmis concernant l’urgence écologique. Cette inadéquation entre contenus éditoriaux et publicitaires, contribue à une dissonance cognitive portant préjudice à la compréhension et la perception des enjeux. Ce traitement déséquilibré des enjeux délégitime les décisions publiques et met à mal l’engagement citoyen. La transformation des médias se justifie doublement, à la fois dans l’intérêt public mais également dans l’intérêt du public. L’intérêt public, général, n’est plus à démontrer tant les conséquences de la crise écologique sont manifestes et tangibles. Or, les médias offrent souvent une analyse des faits partielle, voire erronée, comme nous avons pu le voir ces précédentes années avec le traitement des vagues de chaleur en France. Malgré leurs conséquences sanitaires (mortalité), agricoles et économiques, ces catastrophes sont encore traitées avec une connotation positive dans les médias[5]. L’intérêt du public est bien présent puisque les Français font de l’environnement leur seconde priorité, tout en estimant que les médias et les journalistes n’accordent “pas assez de place” aux questions posées par le changement climatique et l’environnement. Il est donc urgent que le traitement médiatique des enjeux écologiques progresse. Des évolutions sont d’ores-et-déjà perceptibles. En septembre 2022, Radio France a annoncé son « Tournant » écologique engageant à la fois la formation des journalistes, la transformation des contenus éditoriaux et publicitaires et l’amélioration de la performance écologique interne. Le 14 septembre 2022, un collectif de journalistes a publié une Charte “Pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique”, composée de 13 engagements. La charte a été signée par plus de 1 500 journalistes et 120 rédactions, attestant du souhait de la profession d’améliorer ses pratiques en matière d’écologie. Tout en saluant les récents engagements des journalistes en faveur d’un traitement médiatique plus sérieux de la crise écologique, la réponse à cet enjeu ne peut reposer que sur le seul volontariat. La réglementation est l’un des outils les plus adéquats pour garantir aux individus le droit à l’information sur l’environnement, un droit à valeur constitutionnelle. Aussi, notre Constitution affirme le caractère inaliénable de la

    Par Prosperi J., Ramos P., Vernières A., Morel E., Magat A., Dufrêne N.

    22 juin 2021

    Travaux externes

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