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Pour une écologie sociale et juste, contre le spectre de l’écologie « punitive »

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Pour une écologie sociale et juste, contre le spectre de l’écologie « punitive »

I. Un peu de contexte : quel est le problème ?

Sur la question écologique, les opposants au changement agitent souvent le spectre de l’écologie « punitive », qui priverait les français de leur liberté individuelle ou de leur liberté de consommer. Ce concept ou slogan empêche tout débat et condamne a priori toute contrainte réglementaire. 

Le problème n’est pas l’écologie. La science nous dit au contraire que c’est avant tout l’inaction écologique et ses conséquences catastrophiques qui risquent d’être punitives et liberticides. 

Le problème, c’est l’écologie telle qu’elle est conçue et pratiquée ces dernières années par les libéraux au pouvoir. Mises en place sans réels débats, les mesures proposées se sont révélées socialement injustes, notamment car elles ne prévoient pas l’accompagnement de la majorité des ménages aux revenus modestes et moyens.

On peut citer les exemples de la taxe sur les carburants sans alternative – à l’origine de la crise des « gilets jaunes » –, des zones à faibles émissions (ZFE) – qui interdisent de facto les ménages modestes de circuler dans les centres villes – ou encore des normes pesant sur nos agriculteurs ou nos industriels mais pas sur les produits importés, ce qui crée une concurrence déloyale.

Ces débats mal posés jouent un rôle central dans le statu quo actuel : repoussoir légitime pour une part importante de la population, ils aggravent le fossé entre l’opinion publique et la nécessité d’agir face aux enjeux écologiques et climatiques. Ils permettent aux décideurs publics de justifier leur inaction, voire un recul de l’action publique sur ces questions. À l’inverse, les sondages montrent que la grande majorité des français est favorable à une politique écologique et prête à faire des efforts, du moment que cet effort est ressenti comme partagé et justement réparti.

Il est urgent de réconcilier l’écologie et la justice sociale, sans quoi il n’y aura ni l’un ni l’autre.

II. Que propose-t-on ?

  • Établir un moratoire à toute mesure socialement injuste.
  • Passer toute politique publique écologique au filtre de la justice sociale, notamment en prévoyant l’accompagnement des populations les plus défavorisées et des ménages aux revenus moyens.
  • Passer de restrictions trop générales, généralement inutiles, à des contraintes plus ciblées qui bénéficient à la majorité. 

Quelques exemples de mesures :

  • Tripler les malus au poids à l’achat d’un véhicule pour pénaliser les véhicules lourds (typiquement les SUVs, qui concernent à plus de 90 % des ménages aisés et des entreprises), utiliser les recettes de ces malus pour financer des alternatives pour la majorité de la population et revenir sur les zones à faibles émissions (ZFE), qui pénalisent les ménages modestes.
  • Restreindre le logement « occasionnel » dans les zones tendues (ex. locations touristiques, résidences secondaires) plutôt que le logement neuf, qui doit rester abordable. L’explosion des logements « occasionnels » ces dernières années augmente inutilement les besoins de constructions neuves (qui représentent environ un tiers des émissions de l’industrie française) et empêche une majorité des ménages des agglomérations et littoraux d’avoir accès à un logement abordable.
  • Imposer les mêmes normes écologiques aux importations que celles auxquelles nos entreprises et nos agriculteurs sont soumis. Par exemple, limiter les importations issues de l’élevage intensif plutôt que l’élevage extensif local.

 

Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet :

  • Assurer l’isolation complète des logements, en renforçant les aides pour tous les ménages et garantissant leur prise en charge complète pour les ménages modestes (p.9)
  • L’encadrement des loyers de manière obligatoire dans les zones tendues ainsi que des prix du foncier (p.13)
  • Interdire l’importation de toute production agricole ne respectant pas nos normes sociales et environnementales (p.17)

III. Que peuvent y gagner les citoyens ?

  • Plus de justice sociale, économique et fiscale. Le sentiment que l’effort demandé est partagé, proportionné et non uniquement concentré sur les plus précaires.
  • Des ressources fiscales nouvelles permettant de rendre plus accessibles des alternatives écologiques pour la majorité de la population.
  • En conséquence, une plus grande adhésion de la société française aux politiques écologiques, condition sine qua non à la prise d’actions rapides et ambitieuses face au changement climatique, l’effondrement de la biodiversité et la raréfaction des ressources.
  • L’atténuation d’une partie des conséquences potentiellement catastrophiques du réchauffement climatique, de l’effondrement de la biodiversité et de la raréfaction des ressources. Une meilleure qualité de vie, une plus grande stabilité sociale et politique dans les décennies à venir.

IV. Pourquoi l’extrême-droite n’est pas la solution ?

  • Le RN dénonce souvent les contraintes « punitives », mais ne propose aucune mesure réglementaire ou fiscale qui permettrait de diminuer notre dépendance extérieure aux fossiles de manière directe (en réduisant les activités les plus énergivores) ou indirecte (en finançant des alternatives pour la majorité « contrainte » de la population)
  • Le RN s’est opposé récemment au rééquilibrage de l’imposition des locations, en défendant les privilèges fiscaux des locations courtes et des multipropriétaires, au détriment du pouvoir d’achat et de l’accès au logement des classes moyennes dans les zones tendues.
  • Par son refus a priori de tout débat et donc de toute anticipation, le RN fait obstacle à l’accompagnement des personnes les plus pauvres, premières personnes touchées par le changement climatique ou des agriculteurs confrontés à des événements climatiques extrêmes (vagues de chaleur, pluies torrentielles, sécheresses) plus fréquents et plus intenses.

V. Pour aller plus loin dans la réflexion 

Face aux pièges de l’écologie « punitive », quelles restrictions les plus efficaces et justes ? – Institut Rousseau 

Road 2 Net Zero – Institut Rousseau

Publié le 20 juin 2024

Pour une écologie sociale et juste, contre le spectre de l’écologie « punitive »

Auteurs

Nicolas Desquinabo
Nicolas Desquinabo, expert indépendant en évaluation de politiques publiques, ancien directeur du Master Evaluation et suivi des politiques publiques de Sciences-Po Lyon.

Guillaume Kerlero de Rosbo
Ingénieur diplômé de l'Agro Paris et des Mines de Paris, Guillaume Kerlero de Rosbo est expert de la transition énergétique et écologique, après 10 ans de conseil en stratégie sur ces questions. Il est également passionné par les enjeux de justice sociale, qui ne peuvent être traitées séparément des enjeux écologiques. Il dirige les études autour des questions écologiques au sein de l'institut.

I. Un peu de contexte : quel est le problème ?

Sur la question écologique, les opposants au changement agitent souvent le spectre de l’écologie « punitive », qui priverait les français de leur liberté individuelle ou de leur liberté de consommer. Ce concept ou slogan empêche tout débat et condamne a priori toute contrainte réglementaire. 

Le problème n’est pas l’écologie. La science nous dit au contraire que c’est avant tout l’inaction écologique et ses conséquences catastrophiques qui risquent d’être punitives et liberticides. 

Le problème, c’est l’écologie telle qu’elle est conçue et pratiquée ces dernières années par les libéraux au pouvoir. Mises en place sans réels débats, les mesures proposées se sont révélées socialement injustes, notamment car elles ne prévoient pas l’accompagnement de la majorité des ménages aux revenus modestes et moyens.

On peut citer les exemples de la taxe sur les carburants sans alternative – à l’origine de la crise des « gilets jaunes » –, des zones à faibles émissions (ZFE) – qui interdisent de facto les ménages modestes de circuler dans les centres villes – ou encore des normes pesant sur nos agriculteurs ou nos industriels mais pas sur les produits importés, ce qui crée une concurrence déloyale.

Ces débats mal posés jouent un rôle central dans le statu quo actuel : repoussoir légitime pour une part importante de la population, ils aggravent le fossé entre l’opinion publique et la nécessité d’agir face aux enjeux écologiques et climatiques. Ils permettent aux décideurs publics de justifier leur inaction, voire un recul de l’action publique sur ces questions. À l’inverse, les sondages montrent que la grande majorité des français est favorable à une politique écologique et prête à faire des efforts, du moment que cet effort est ressenti comme partagé et justement réparti.

Il est urgent de réconcilier l’écologie et la justice sociale, sans quoi il n’y aura ni l’un ni l’autre.

II. Que propose-t-on ?

  • Établir un moratoire à toute mesure socialement injuste.
  • Passer toute politique publique écologique au filtre de la justice sociale, notamment en prévoyant l’accompagnement des populations les plus défavorisées et des ménages aux revenus moyens.
  • Passer de restrictions trop générales, généralement inutiles, à des contraintes plus ciblées qui bénéficient à la majorité. 

Quelques exemples de mesures :

  • Tripler les malus au poids à l’achat d’un véhicule pour pénaliser les véhicules lourds (typiquement les SUVs, qui concernent à plus de 90 % des ménages aisés et des entreprises), utiliser les recettes de ces malus pour financer des alternatives pour la majorité de la population et revenir sur les zones à faibles émissions (ZFE), qui pénalisent les ménages modestes.
  • Restreindre le logement « occasionnel » dans les zones tendues (ex. locations touristiques, résidences secondaires) plutôt que le logement neuf, qui doit rester abordable. L’explosion des logements « occasionnels » ces dernières années augmente inutilement les besoins de constructions neuves (qui représentent environ un tiers des émissions de l’industrie française) et empêche une majorité des ménages des agglomérations et littoraux d’avoir accès à un logement abordable.
  • Imposer les mêmes normes écologiques aux importations que celles auxquelles nos entreprises et nos agriculteurs sont soumis. Par exemple, limiter les importations issues de l’élevage intensif plutôt que l’élevage extensif local.

 

Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet :

  • Assurer l’isolation complète des logements, en renforçant les aides pour tous les ménages et garantissant leur prise en charge complète pour les ménages modestes (p.9)
  • L’encadrement des loyers de manière obligatoire dans les zones tendues ainsi que des prix du foncier (p.13)
  • Interdire l’importation de toute production agricole ne respectant pas nos normes sociales et environnementales (p.17)

III. Que peuvent y gagner les citoyens ?

  • Plus de justice sociale, économique et fiscale. Le sentiment que l’effort demandé est partagé, proportionné et non uniquement concentré sur les plus précaires.
  • Des ressources fiscales nouvelles permettant de rendre plus accessibles des alternatives écologiques pour la majorité de la population.
  • En conséquence, une plus grande adhésion de la société française aux politiques écologiques, condition sine qua non à la prise d’actions rapides et ambitieuses face au changement climatique, l’effondrement de la biodiversité et la raréfaction des ressources.
  • L’atténuation d’une partie des conséquences potentiellement catastrophiques du réchauffement climatique, de l’effondrement de la biodiversité et de la raréfaction des ressources. Une meilleure qualité de vie, une plus grande stabilité sociale et politique dans les décennies à venir.

IV. Pourquoi l’extrême-droite n’est pas la solution ?

  • Le RN dénonce souvent les contraintes « punitives », mais ne propose aucune mesure réglementaire ou fiscale qui permettrait de diminuer notre dépendance extérieure aux fossiles de manière directe (en réduisant les activités les plus énergivores) ou indirecte (en finançant des alternatives pour la majorité « contrainte » de la population)
  • Le RN s’est opposé récemment au rééquilibrage de l’imposition des locations, en défendant les privilèges fiscaux des locations courtes et des multipropriétaires, au détriment du pouvoir d’achat et de l’accès au logement des classes moyennes dans les zones tendues.
  • Par son refus a priori de tout débat et donc de toute anticipation, le RN fait obstacle à l’accompagnement des personnes les plus pauvres, premières personnes touchées par le changement climatique ou des agriculteurs confrontés à des événements climatiques extrêmes (vagues de chaleur, pluies torrentielles, sécheresses) plus fréquents et plus intenses.

V. Pour aller plus loin dans la réflexion 

Face aux pièges de l’écologie « punitive », quelles restrictions les plus efficaces et justes ? – Institut Rousseau 

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