Législatives, Aristophane et démocratie mature L'éditorial d'avril 2022
Les résultats du premier tour des élections présidentielles semblent témoigner d’un paradoxe. Le monde n’a jamais changé aussi vite que ces cinq dernières années. De crise en crise, la France et le monde ont connu des ruptures fondamentales dont nous ne faisons que commencer à apprécier la portée. Pourtant… Pourtant, l’image du second tour de cette élection est la même qu’il y a cinq ans. Bien sûr, les acteurs ont un peu adapté leurs discours, ils ont amendé leurs images. Comme un metteur en scène monte différemment une vieille pièce d’Aristophane, le décor est moderne, mais les spectateurs connaissent déjà le texte. Somme-nous collectivement comptables de cette réédition d’un vieux match ? Peut-être. Depuis deux ans, l’Institut Rousseau toutefois tente de porter une vision alternative permettant de sortir de l’opposition stérile à laquelle nous sommes à nouveau condamnés. La vision d’une écologie de projets qui non seulement n’empêche pas, mais porte le développement économique et la prospérité collectivité, alors que le GIEC nous rappelle encore l’urgence climatique. La vision d’un progrès social toujours fait de conquêtes, alors que seule cette perspective peut permettre de garantir demain l’adhésion de la population à un projet politique collectif. Gageons que ce projet, fondé sur ces trois piliers, peut être majoritaire ; qu’il l’est en fait déjà. Durant les cinq années qui viennent, nous continuerons de le défendre. Au mois de mars et d’avril, l’Institut a ainsi fait montre d’une activité particulière pour accompagner les débats qui ont émaillé cette élection. On notera notamment la note de Philippe Moutenet sur la santé et celle d’Elie Picard et Victor Barel sur l’École. S’ils furent aux avant-postes des crises que nous avons traversées, nos services publics ont été bien maltraités par les débats présidentiels. Ces travaux constituent des bases solides pour en reconsidérer l’organisation et le rôle au cœur du projet républicain. Nos travaux ont également tâché d’apprécier les dangers de la situation géopolique à venir. Ainsi, la note de Frédéric Galois évalue la situation après la fin de l’opération Barkhane ; celle de Jean-Paul Delahaye interroge le rôle des cryptomonnaies dans le conflit ukrainien. Ce qui caractérise une démocratie mature, c’est qu’elle parie sur l’intelligence, et non sur les peurs et réflexes des électeurs. Alors que le monde de demain est plus incertain et plus effrayant que celui d’hier, à travers nos travaux et leur libre diffusion, nous continuerons à faire le pari de l’intelligence citoyenne.
Par Morel B.
17 avril 2022