Le laboratoire d’idées de la reconstruction écologique et républicaine

Notes

Dette publique : qui gardera les gardiens ?

Ils n’ont pas rongé leur frein bien longtemps, les gardiens obsessionnels de la dette publique. Et ils ne sont pas prêts à accepter que le bel édifice de la dette patiemment bâti et consolidé depuis près de cinquante ans s’effondre d’un coup à cause d’un virus. Rappelons qu’aujourd’hui, 40 % de notre dette publique correspondent au seul remboursement des intérêts que nous acquittons aux marchés financiers. Si nous avions conservé le circuit du Trésor, légué notamment par François Bloch-Lainé, et qui a permis de reconstruire la France d’après-guerre en une génération, au lieu d’inscrire dans le marbre du Traité de Maastricht (qu’il faudra réviser tôt ou tard) l’assujettissement de la souveraineté d’un État aux caprices irrationnels des « marchés », nous n’aurions pas ou peu d’intérêts à payer sur notre dette. Celle-ci pourrait aujourd’hui s’élever à environ 72 % du PIB, au lieu des 120 % qu’elle va franchir en 2020. Ce ratio n’a, certes, aucun sens économique puisqu’il superpose un stock (la dette) sur un flux (le PIB) mais, depuis des décennies, il sert d’alibi à l’idée fausse que nous dépensons trop et qu’il est temps de vivre à la hauteur de nos (modestes) moyens. L’obligation de se financer sur les marchés présente un double avantage pour les partisans de l’austérité et de la financiarisation de l’économie : elle alimente les profits bancaires (et les dividendes de leurs actionnaires) et fait gonfler la dette elle-même, renforçant l’idée que, décidément, nous sommes impécunieux. À la place du circuit du Trésor, l’État a livré aux banques privées, via l’agence France Trésor, le soin de gérer notre dette publique sur les « marchés ». Résultat : 60 % de notre dette sont détenus par des non-résidents, ce qui met la France à la merci du bon vouloir des fonds de pension et des gérants d’actifs étrangers. En Italie, seuls 30 % de la dette publique sont détenus hors de la péninsule, et 5 % au Japon. Aujourd’hui, la dépense publique contribue à hauteur de 22% du PIB français (et non 56 % comme cela est répété à tort aussi bien par le Président de la République que le gouverneur de la Banque de France, qui, l’un comme l’autre, trahissent leur biais idéologique lorsqu’il s’agit de lire les comptes publics). Elle est stable depuis les années 1980 et il est grand temps que l’État prenne ses responsabilités en finançant la reconstruction sanitaire, écologique et sociale de notre pays. M. William Dab, l’ancien directeur général de la Santé, alerte d’ores et déjà sur notre incapacité industrielle à produire en masse le vaccin contre la COVID lorsque celui-ci sera disponible. Qu’attendons-nous pour financer l’investissement dans ces industries ? Il est vrai que nous sommes déjà à cours, à l’automne 2020, de vaccins… contre la grippe. Et qu’au lieu de sauver des vies, le gouvernement français semble vouloir à tout prix convaincre nos concitoyens que l’urgence est de réduire les services publics. Pour cela, rien de tel qu’une dette publique qui augmente. Le deuxième confinement (qui aurait pu être évité grâce à une meilleure anticipation) va provoquer vraisemblablement une perte additionnelle de revenus d’au moins une cinquantaine de milliards d’euros. Le PIB français devrait donc s’effondrer d’au moins 12 % en 2020, en grande partie du fait de l’incurie des autorités publiques. Rappelons que l’Allemagne va s’en sortir avec – 5,5 %, car ses dirigeants n’ont pas hésité à investir massivement. Le gouvernement ne semble pas s’en soucier, puisqu’il n’a strictement rien fait pendant l’été pour préparer la vague automnale du virus. Au contraire, le 29 août, il profitait de la torpeur estivale pour introduire un décret visant à restreindre les critères de vulnérabilité sanitaire ouvrant droit au chômage partiel[1]. À la bonne heure : la chute supplémentaire de nos revenus continue de gonfler le ratio dette publique/PIB et de justifier l’abandon des plus fragiles au motif qu’ils nous coûtent trop cher. Pour les gardiens de l’austérité budgétaire, toutefois, les derniers mois ont eu l’inconvénient majeur de contraindre les États, dont la France, à révéler qu’ils pouvaient emprunter sans délai des centaines de milliards à taux négatifs pour éviter l’effondrement immédiat. De son côté, la BCE doit continuer à affirmer, elle aussi, qu’il n’existe pas « d’argent magique » tout en créant ex nihilo pas loin de 1 800 milliards d’euros depuis le mois de mars à destination des banques privées. Dissonance entre le discours et la réalité ? C’est bien le moins que l’on puisse dire.Il ne faudrait cependant pas que cela dure trop longtemps : certes, les « chiens de garde », selon les termes de Paul Nizan, ont dû accepter de mettre en sourdine leur discours anti-dette (ou plutôt anti-État comme nous le verrons, car c’est bien l’État qui est visé in fine), mais il faut rapidement faire entendre que tout cela n’était que temporaire, une folie passagère induite par un virus réputé imprévisible (dont le retour, après les deux épisodes précédents de 2003 et 2012, avait été pourtant prévu et annoncé par l’OMS depuis sept ans). Même si le mot n’est jamais prononcé, il faudra donc très vite retourner à des politiques d’austérité. Ce fut d’abord la Cour des Comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques du 30 juin 2020 qui lança la première flèche : « au-delà de ces mesures de court terme, la France va devoir rebâtir une stratégie de finances publiques. Une action en profondeur est nécessaire afin d’ancrer la soutenabilité de la dette publique et de rehausser la qualité des politiques publiques ». Le message est clair : préparer l’austérité à moyen terme, après les mesures du plan de « relance » (qui n’en est pas un, ainsi que l’Institut Rousseau l’a montré dans une note récente[2]), et couper dans les dépenses publiques. On se rappelle ainsi la formule du gouverneur de la Banque de France qui, en juin dernier, après avoir estimé que 120 % constituait la limite absolue de tout endettement raisonnable[3], plaidait en faveur de « dépenses publiques enfin plus sélectives ». Ce fut aussi le message du FMI, puis des agences de notation, avec une étude de Standards and Poor publiée

Par Giraud G., Dufrêne N., Wegner O.

26 novembre 2020

Une nouvelle République des citoyens 50 propositions pour renouveler nos institutions

« On fait campagne en vers, mais l’on gouverne en prose », dit l’adage prêté à l’ancien gouverneur de l’État de New York Mario M. Cuomo[1]. De tribunes de campagne en grands-messes devant le Congrès, les poètes de la politique aiment à parler de nouvelle ère démocratique impliquant la transformation de nos institutions. Au pouvoir, et ayant goûté au confort qu’elles procurent à celui qui les contrôle, ils se veulent ensuite des prosateurs réalistes et timides en la matière. Le diagnostic des dysfonctionnements du régime semble pourtant aujourd’hui assez largement partagé. La cinquième République souffre d’une concentration excessive des pouvoirs et de respirations démocratiques trop rares en dehors des élections présidentielles. À quoi bon donc produire une note se répandant une nouvelle fois en études et en revue de littérature sur ce qui fait consensus jusqu’au sein même de la famille gaulliste ? Pourtant, les propositions concrètes de réformes finissent, quand elles existent, immanquablement au fond d’un tiroir[2]. Plus qu’une nouvelle critique du fonctionnement de la Cinquième République, cette note se veut le mode d’emploi d’une réforme opérationnelle et réalisable. Sa visée est donc plus pratique que théorique. Il s’agit certes de repenser l’équilibre de nos institutions, mais de le repenser en prose en impulsant un meilleur équilibre des pouvoirs et une inclusion plus forte du peuple dans les processus de décision.   Table des matières I. Diagnostic des dysfonctionnements de la Cinquième République. II. Faut-il une VIe République ou une Ve République bis ? III. Comment changer les institutions ? IV. Limites de l’analyse Cinq objectifs pour refonder notre République : Objectif 1 : Refaire du Parlement un organe légitime et représentatif Sous-objectif 1a : Rendre l’Assemblée nationale plus représentative grâce à la proportionnelle Des arguments non conclusifs contre la proportionnelle La mise en place de la proportionnelle est aisée. Sous-objectif 1b : Rééquilibrer le collège des grands électeurs sénatoriaux Objectif 2 : Desserrer l’étau du parlementarisme rationalisé Sous-objectif 2a : Revaloriser l’initiative parlementaire Sous-objectif 2b : Rendre plus effectif le contrôle parlementaire Sous-objectif 2c : Redonner aux parlementaires le temps de leurs missions Sous-objectif 2d : Accorder au Parlement les moyens de remplir son rôle Objectif 3 : Retrouver le sens de l’institution présidentielle Sous-objectif 3a : Repenser l’élection présidentielle Sous-objectif 3b : Repenser la répartition des pouvoirs entre Président de la République et Gouvernement. Objectif 4 : Redonner la parole au Peuple au sein des institutions Sous-objectif 4a : Promouvoir la démocratie délibérative Sous-objectif 4b : Favoriser la démocratie directe Le RIC peut prendre deux formes La principale limite au RIC provient de la mobilisation Objectif 5 : Redonner de la force au contrôle de constitutionnalité Sous-objectif 5a : Réviser le mode de nomination des membres Sous-objectif 5b : Faire du Conseil constitutionnel un gardien plus effectif de la Constitution I. Diagnostic des dysfonctionnements de la Cinquième République   Avant d’approcher le sujet de façon concrète et originale, il est impératif de rappeler brièvement le diagnostic aujourd’hui assez largement partagé du déséquilibre des pouvoirs sous la Cinquième. Le pouvoir disproportionné de l’exécutif repose d’abord sur un vice originel. Michel Debré souhaitait en effet bâtir un régime à l’anglaise, dont le Premier ministre serait le mur porteur. Toutefois, devant l’impossibilité d’imposer à l’Élysée et aux partis, un suffrage majoritaire à un tour, il craignait une forte instabilité parlementaire[3]. Aussi la Constitution a-t-elle été pensée pour dompter un Parlement récalcitrant. Or, le fait majoritaire va transformer les tempêtes parlementaires de jadis en mer d’huile. Sa conjonction avec les dispositifs de rationalisation va alors aboutir à faire du Parlement français le moins puissant de toutes les grandes démocraties occidentales[4]. Le général de Gaulle voulait pour sa part donner un sens bonapartiste au nouveau régime. L’élection au suffrage universel direct du Président, à la suite du référendum du 28 octobre 1962, a transformé les partis en écuries présidentielles. Élu par le peuple, le Président n’est conçu comme responsable que devant lui. Cette responsabilité extra-juridique est au cœur du Gaullisme comme régime de légitimité politique. Ainsi le général de Gaulle ne fait pas de « caprices » en menaçant de démissionner à chaque élection législative ou à chaque référendum… avant de s’exécuter en 1969. Si dans les faits, le pouvoir du chef de l’État est bien supérieur à celui que lui accorde le texte de la Constitution[5], c’est grâce à ce lien direct. S’il est rompu, alors ce qui rend légitime cette primauté s’effondre. Ce mode de mise en jeu de la responsabilité n’est toutefois guère fonctionnel, dès lors que la légitimité charismatique du Général n’est qu’imparfaitement transmissible à ses successeurs[6]. Certes, l’élection au suffrage universel permet de donner l’illusion du sacre populaire d’un sauveur, mais la légitimité qui y est inhérente n’est que de courte durée. Le système va alors progressivement dysfonctionner. Alors que De Gaulle ne pouvait envisager de subir une cohabitation, Valéry Giscard d’Estaing exclut de démissionner à la veille des législatives de 1978. Alors que la responsabilité politique du président était jugée par lui comme engagée en cas de dissolution ou de référendum, Jacques Chirac se maintient en 1997 puis en 2005. Ainsi aboutit-on à un pouvoir présidentiel omnipotent, mais sans responsabilité établie, ni par le droit ni par la pratique. Sa légitimité est entamée et, avec elle, celle de l’ensemble des institutions. Dès lors, référendums et élections sont jugés comme déstabilisateurs. Le quinquennat met fin aux élections législatives en cours de mandat, alors que les référendums se raréfient. Là où de Gaulle usa de l’article 11 de la Constitution pour faire appel au Peuple contre le Parlement, ses successeurs usent systématiquement de la convocation du Congrès pour contourner le Peuple. La Cinquième, pensée comme un régime faisant abondamment appel au Peuple, en vient à se calfeutrer pour se garder de tout vent électoral.

Par Morel B.

9 novembre 2020

Stop à la neutralité carbone en trompe-l’oeil L’empreinte carbone au service d’une nouvelle stratégie industrielle

Le Haut conseil pour le climat (HCC) a publié le 6 octobre 2020 un rapport intitulé « Maîtriser l’empreinte carbone de la France ». Ce rapport, issu d’une commande parlementaire, a pour objectif de produire une étude sur l’empreinte carbone française et ses déterminants sur la base d’un constat : les émissions liées au commerce international sont une partie importante de la contribution de la France aux émissions de gaz à effet de serre (GES). Ces émissions « importées » sont paradoxalement et largement sous les radars des engagements internationaux et des politiques publiques, puisque le principal outil politique de lutte contre les émissions carbones – la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) – n’en tient pas compte. En se concentrant sur l’indicateur-clef qu’est « l’empreinte carbone », le HCC rappelle ce qui devrait être une évidence : la contribution de la France au réchauffement climatique ne se limite pas aux émissions de gaz à effet de serre produites sur son territoire (6,7 tonnes équivalent CO2 par habitant) mais elle inclut aussi celles produites ailleurs pour la consommation des français : émissions importées (6,4 tonnes équivalent CO2 par habitant en 2018), et liées au transport international (24,4 millions de tonnes équivalent CO2 en 2019 pour la France). Ce rapport du HCC éclaire donc un problème de cadrage coupable dans les politiques publiques : la non prise en compte des émissions de GES liées au commerce international. En mettant en évidence les acteurs qui consomment ces importations (acteurs économiques, entreprises comme ménages) le HCC montre l’existence de leviers d’action, certes indirects, à la disposition des pouvoirs publics. En effet, « la réduction des émissions importées ne repose pour le moment que sur les engagements de réduction des autres pays du monde, pour l’instant insuffisants en regard des objectifs de l’accord de Paris » (p.23). Une politique volontariste est possible sous réserve de la construction d’indicateurs opérationnels notamment en ce qui concerne les grands partenaires commerciaux extra-européens de la France, et de l’intégration de ces émissions dans la SNBC. Toutefois, les recommandations du rapport portant sur l’actualisation d’une stratégie industrielle, laquelle permettrait, en relocalisant, de réduire les émissions importées tout en construisant une industrie nationale et européenne plus durable, sont timides. L’empreinte carbone est pourtant un indicateur au coeur des réflexions sur les ajustements carbone aux frontières et sa réduction un argument fort en faveur d’une reprise en main des chaînes de production.   I. Qu’est ce que l’empreinte carbone ?   L’empreinte carbone est un indicateur national agrégé qui mesure, pour chaque secteur, les émissions produites en amont de la demande finale. L’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) la définit comme l’ensemble des « pressions sur le climat de la demande intérieure française, quelle que soit l’origine géographique des produits consommés ». Cela intègre les émissions liées à la production des biens et services consommés en France, en plus des émissions liées à leur usage : l’ensemble des GES émis pendant la fabrication, puis l’assemblage, en Asie par exemple, puis le transport d’un produit jusqu’à la distribution au consommateur final français sont comptabilisés dans l’empreinte carbone de la France. Cet indicateur ne prend pas en compte les émissions liées à la fin de vie des produits (recyclage et traitement), à la différence des « analyses en cycle de vie » (ACV), réalisées à l’échelle de produits particuliers, dans le cadre d’un mode de production donné[1]. Il ne prend pas non plus en compte les émissions liées aux produits fabriqués en France et exportés pour être consommés à l’étranger. Toutefois, le HCC fait le choix de les évoquer dans son rapport pour donner une vision plus complète des émissions liées au commerce international. L’actualité nous rappelle d’ailleurs leur importance : ce lundi 12 octobre, Bruno Le Maire annonçait une série de mesures pour verdir les aides à l’exportation françaises, en excluant toutefois de s’attaquer au soutien à des méga-projets d’exploitation de gaz jusqu’en 2035, à l’image du projet de Total en Arctique, incompatible avec le respect de l’accord de Paris[2]. L’empreinte carbone est donc un indicateur précieux, puisqu’il comptabilise l’ensemble des GES émis au service de la consommation des français. Par opposition, la Stratégie nationale bas carbone utilise aujourd’hui un autre indicateur : les émissions territoriales de la France, c’est-à-dire l’ensemble des émissions réalisées sur le territoire français. Cela comprend la production de biens destinés à l’export, mais laisse de côté les émissions des produits fabriqués à l’étranger pour la consommation française, ainsi que les émissions du transport international. Le choix de l’indicateur est bien entendu crucial pour guider l’action politique : si on ne considère que les émissions domestiques françaises par habitant, elles ont diminué de 30% entre 1995 et 2018, mais l’empreinte carbone, qui prend en compte l’accroissement des émissions importées (+78 % depuis 1995), montre une augmentation de l’émission de CO2 de la France sur la période, qui représente aujourd’hui 11,5 t éqCO2/hab.   II. Réaffirmer la responsabilité climatique de l’État dans les échanges internationaux   L’empreinte carbone se distingue donc des inventaires d’émissions nationales établis dans le cadre de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Ces derniers ne considèrent que la responsabilité d’émission de GES sur le territoire, alors que l’empreinte carbone intègre la responsabilité de consommation[3] des français. Les objectifs de réduction que la France s’est fixée, dans le cadre de la contribution déterminée au niveau national (CDN) à l’accord de Paris soumis par l’Union européenne (UE), ou dans celui de sa SNBC, portent sur ses seules émissions territoriales. La question qui se pose est ici éminemment politique : à qui va la responsabilité des émissions de GES entre le pays producteur et le pays consommateur/importateur dans le marché mondial ? L’empreinte carbone, en posant la question de la « responsabilité des émissions », dénonce la vision véhiculée par les sommets internationaux où se rencontreraient selon la nouvelle terminologie des « pays en voie de décarbonation » (épigone du terme « pays développés ») et de « pays en retard » sur cette transition. La prise en compte du commerce international, point d’achoppement des négociations pour le

Par Gonon M.

25 octobre 2020

Illusions et impasses du budget 2021 et du plan de relance sur la question écologique : nos pistes pour faire autrement

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2021, comprenant le plan de relance, a été présenté le 28 septembre dernier. Malgré de grands effets d’annonce, dont les fameux 32 milliards supplémentaires « pour l’écologie », une analyse plus détaillée révèle que le compte n’y est pas et que ce budget est largement insuffisant pour amorcer une restructuration en profondeur de notre économie à la hauteur de nos engagements climatiques (seuls 6,6 milliards d’euros de crédits en faveur de l’écologie seront réellement décaissés en 2021). Si des progrès sont à souligner, tels que, entre autres, le plan hydrogène ou le renforcement du plan vélo, des incohérences subsistent puisque les activités polluantes demeurent largement subventionnées en parallèle des dépenses supplémentaires, quoique très insuffisantes, pour le verdissement de l’appareil de production et la maîtrise de nos dépenses d’énergie. En outre, sur le plan de la fiscalité et de la transposition des propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), on constate peu d’avancées et quelques reculs. Il faut, toutefois, saluer le fait qu’il s’agit du premier budget qui procède à une classification systématique des dépenses de l’État en fonction de leur impact sur l’environnement comme cela était prévu par l’article 179 de la loi n°2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020[1]. Le résultat laisse cependant songeur : sur un volume de dépenses totales des ministères représentant près de 378 milliards d’euros, seuls 53 milliards d’euros de dépenses sont identifiés comme ayant un impact sur l’environnement, dont 42,8 milliards d’euros ont été évalués comme favorables à l’environnement contre 10 milliards d’euros jugés défavorables. On découvre avec étonnement que toutes les aides au secteur numérique, y compris le soutien à la 5G, ou encore la baisse de 20 milliards d’euros des impôts de production n’ont aucun effet environnemental, mais que les 118 millions d’euros d’aides à la presse sont en revanche considérés comme défavorables à l’environnement. Bercy reconnaît également que les dépenses immobilières ou de fonctionnement (notamment les carburants) ne sont pour l’instant pas intégrées à l’exercice d’évaluation, ce qui devrait être corrigé par la suite. Le premier constat est donc celui-ci : si le travail d’évaluation du budget vert est éminemment louable, celui-ci demeure largement perfectible. Néanmoins, les critiques principales que l’on peut adresser à ce budget « vert » portent sur le volume et sur le contenu des dépenses. I. Un volume de dépenses en trompe-l’œil et loin des enjeux Concernant le plan de relance, il convient ainsi de signaler que les 100 milliards d’euros annoncés (sur deux ans) se sont transformés in fine en 22 milliards d’euros de crédits de paiement pour 2021, dont seulement 6,6 milliards pour la transition écologique, auquel il convient d’ajouter 10 milliards d’euros en dépenses fiscales pour la baisse des impôts de production. Pour atteindre les 100 milliards sur deux ans, le plan de relance inclut en réalité des dépenses déjà votées en lois de finances rectificatives pour 2020 (par exemple la dotation de soutien à l’investissement local de 5 milliards d’euros) et renvoie le reste à 2022 ou au-delà. Cela a une conséquence directe : le soutien public à l’économie va nettement se restreindre en 2021 par rapport à 2020, alors même que la crise est loin d’être terminée. Avec un volume total de dépenses prévues de 378,7 milliards d’euros pour 2021, le budget se situera nettement en dessous des 394,7 milliards d’euros de dépenses prévues par la troisième loi de finances rectificatives pour 2020 votée en juillet 2020. Cela signifie que l’extinction progressive des mesures instaurées en 2020 en faveur du soutien d’ensemble à l’économie (et notamment l’activité partielle, le fonds de solidarité pour les TPE ou les avances remboursables pour PME et ETI), ne sera qu’à moitié compensée, en 2021, par des dépenses supplémentaires issues du plan de relance. Quand on prévoit une récession pour 2020 d’environ 10 % du PIB, soit plus de 250 milliards d’euros de pertes de revenus, on peut s’interroger sur ce recul global des dépenses publiques, qui est certainement précipité et motivé par l’objectif de revenir rapidement sous la barre des 3 % de déficit. On peut aussi se demander pourquoi le Gouvernement tient tant à faire reculer le déficit public de 10 à 6 % du PIB entre 2020 et 2021 alors que l’État emprunte à – 0,2 % sur 10 ans et à seulement 0,4 % sur 30 ans ? Nous commençons en effet à peine à apercevoir les dégâts souterrains sur l’économie qui seront provoqués par la montée du chômage et la multiplication des défaillances d’entreprises. Tout se passe donc comme si le Gouvernement prévoyait une reprise en V (avec un chiffre exagérément optimiste de 8 % de croissance en 2021 qui a été épinglé par le Haut Conseil des finances publiques dans son avis sur le budget) alors que la reprise sera certainement en K avec un plongeon initial de l’ensemble de l’économie, puis une reprise rapide de certaines branches d’activités (numérique, énergie, luxe) quand la descente aux enfers va se poursuivre pour d’autres secteurs. Il est ainsi à craindre que le retrait trop rapide des mesures de soutien à l’économie, et l’absence de mesures de soutien à la consommation (pas de baisse de la TVA, pas de hausse du SMIC, pas de dégel du point d’indice de la fonction publique) n’handicapent sérieusement la reprise. En outre, même en ce qui concerne les mesures structurelles, il faut rappeler que, avant même la crise du Covid-19, France Stratégie, I4CE, l’Agence de la transition écologique (ex-ADEME) ou encore la Cour des comptes européenne avançaient un besoin de financements supplémentaires pour la transition d’un ordre de grandeur compris entre 15 et 40 milliards d’euros par an, par rapport à ce qui est investi actuellement (environ 40 milliards). Transition agroécologique et plan de circularisation de l’économie compris, c’est sans doute quelques 75 à 100 milliards d’euros supplémentaires que la puissance publique devrait investir chaque année. Or, comme souligné, sur les 22 milliards de crédits de paiement du plan de relance, seuls 6,6 milliards viendront alimenter des dépenses favorables à l’écologie. Le premier

Par Dufrêne N., Gilbert P.

18 octobre 2020

Câbles sous-marins : les nouveaux pouvoirs des géants du numérique

Début août, une grue sous-marine travaillant à la collecte de sable dans la baie de Kuakata a heurté un câble sous-marin de télécommunications, se traduisant par une perte de 40 % de la vitesse du réseau internet du Bangladesh. En juillet dernier, la Somalie a été totalement privée d’Internet pendant plusieurs heures en raison d’une opération de maintenance à distance du câble sous-marin dénommé « EASSy » qui relie la côte est-africaine au réseau. Ces événements ne sont pas anodins à l’échelle d’un pays : les banques, les compagnies aériennes, les entreprises, les médias et certains services gouvernementaux sont dépendants d’Internet pour fournir leurs services. Aujourd’hui, 98 % des données numériques mondiales circulent par les câbles sous-marins. C’est par exemple le cas du principal système d’échanges de la finance mondiale de la Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunications (SWIFT) qui dépend de la vitesse de ces câbles à fibre optique. Le numérique repose ainsi sur une infrastructure bien réelle : on dénombre aujourd’hui 436 câbles sous-marins de télécommunication, dont 25 traversent l’océan Atlantique et 22 le Pacifique[1]. Passerelles intercontinentales entre les différents réseaux filaires nationaux, les câbles sous-marins débouchent sur des stations d’atterrissement situées en région côtière. La France compte, par exemple, 13 stations d’atterrissement sur son territoire côtier connectant les réseaux filaires nationaux à 23 câbles sous-marins. Ces “routes du fond des mers”, selon l’expression de Florence Smits et Tristan Lecoq en 2017[2], sont les héritiers des premiers câbles télégraphiques du XIXe siècle dont l’emploi permit, en 1858, l’envoi du premier message télégraphique officiel par la reine Victoria au président américain James Buchanan. Le message de 509 lettres avait alors mis 17 heures et 40 minutes à traverser l’océan Atlantique. Aujourd’hui, la fibre optique permet un acheminement de l’information en temps quasi-réel. L’importance qu’a prise l’activité numérique dans nos sociétés contemporaines fait inévitablement des câbles sous-marins des infrastructures vitales au niveau mondial. Pourtant, les chantiers de construction, le développement et l’égalité d’accès au réseau ne font l’objet d’aucune décision multilatérale. Ces infrastructures essentielles sont la propriété d’entreprises qui louent des capacités de bande passante aux acteurs gérant les réseaux télécoms nationaux. Soumis aux aléas du marché et à la loi du plus fort, les câbles sous-marins deviennent progressivement la propriété d’une minorité d’acteurs qui disposent ainsi d’un pouvoir et d’une influence grandissantes sur les États et les entreprises. L’émergence de nouveaux acteurs est d’ailleurs venue bouleverser les équilibres. Si les propriétaires historiques des câbles sous-marins étaient les entreprises privées ou publiques des télécoms, les géants du numérique ont, depuis 2016, massivement investi et possèdent ou louent aujourd’hui plus de la moitié de la capacité des câbles sous-marin. En outre, la stratégie de développement des géants du numérique diffèrent des collectifs traditionnels. Aux grands consortiums, ceux-ci préfèrent des regroupements plus réduits qui leur permettent de conserver le monopole décisionnel. Alors que le projet Africa Coast to Europe (ACE), ouvert en 2012, appartient à un consortium de 19 entreprises des télécoms, le câble MAREA reliant les États-Unis à l’Espagne n’appartient qu’à Facebook, Microsoft et Telxius. Le chantier colossal 2Africa de Facebook et déployé sur tout le pourtour du continent africain n’est porté que par huit acteurs. Google va encore plus loin : le géant a aujourd’hui les capacités financières et techniques de faire construire ses propres câbles. Ainsi, le câble Dunant qui relie depuis janvier 2020 les États-Unis et la France appartient en totalité à Google. L’entreprise déploie également le titanesque câble Equiano qui bordera toute la côte ouest du continent africain, faisant ainsi concurrence au projet 2Africa. Google possède ainsi le service et l’infrastructure qui le sous-tend, créant des situations de forte dépendance technologique pour les États, les entreprises et les usagers. Les géants américains ne sont d’ailleurs pas les seuls à user d’une stratégie de conquête sous-marine. Le chinois Hengtong a pu compter sur le soutien des banques et entreprises nationales chinoises, dont la China Construction Bank, pour lancer son projet Pakistan & East Africa Connecting Europe (PEACE) qui reliera le Pakistan, la côte est africaine à la rive sud de la Méditerranée par le canal de Suez, pour finalement atterrir à Marseille. PEACE permettra aux géants chinois Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi de développer leurs activités en Afrique et en Europe. Ces stratégies de développement préfigurent un nouveau pouvoir pour les géants du numérique : ils acquièrent à la fois l’accès à un marché industriel gigantesque ainsi qu’une capacité d’influence importante sur les États et sur les entreprises des pays qui ont un accès précaire à ces infrastructures aujourd’hui. L’Afrique et le Moyen-Orient représentent dès lors pour les géants du numérique un potentiel de développement considérable. En effet, ces pays n’ont que très peu accès aux câbles, ce qui les rend vulnérables en cas de rupture de ceux-ci. En apportant sur le continent africain des infrastructures facilitant leur accès aux activités numériques, Equiano et 2Africa sont considérés comme d’importants leviers de développement économique. Mais dans le même temps, ils acquièrent la capacité d’influencer directement l’offre de services numériques dans ces pays. S’imposent ainsi des acteurs hégémoniques dotés d’un monopole technologique et infrastructurel inédit à l’échelle mondiale. Ce monopole sert les capacités de négociations et d’influence de ces entreprises dont les cabinets de lobbying sont déjà implantés dans tous les centres de pouvoirs politiques et économiques. À l’échelle de l’Union européenne, Microsoft (Havas, Com, Publics, Plead), Google (Commstrat, Image7) ou encore Facebook (Burson Marsteller I&E, Lighthouse Europe) sont en discussion constante avec le législateur en matière de droit du numérique[3]. Cette configuration de concurrence monopolistique s’inscrit en contre de la théorie libérale d’un marché qui s’équilibre par défaut, et accentue au contraire un phénomène de « capture » du régulateur. Ciblant d’abord les politiques en matière de numérique, leur influence s’étend progressivement vers d’autres secteurs clés où leurs technologies se développent : la sécurité, la défense ou encore le domaine de la santé[4]. Cette prédation doit nous alerter et nous amener à réduire, dans chaque domaine où cela est possible, le pouvoir d’influence de ces acteurs privés sur les États et

Par Ophélie Coelho

26 août 2020

Faire atterrir le grand déménagement du monde : vers une mobilité post-carbone

Introduction Pour l’historien des pandémies Patrice Bourdelais, le doublement du trafic aérien entre 2006 et 2018, avec 4,3 milliards de passagers par an, est « l’une des variables essentielles de tous les modèles épidémiologiques »[1]. Le « grand déménagement du monde », en plus d’avoir pour corollaire une explosion des émissions de gaz à effet de serre, est donc un facteur de vulnérabilité inédit. Le rythme des échanges, d’hommes comme de matières, prend de court nos défenses immunitaires et nos systèmes de santé. Transporter moins et mieux : telle est une des grandes orientations que devrait prendre « le monde d’après ». Il convient dès lors de dégager des pistes de politique publique réalistes visant à la transition qualitative du secteur du transport, afin de diminuer au maximum son impact environnemental, tout en favorisant l’emploi et la résilience économique de nos acteurs nationaux. Les transports représentent un quart des émissions mondiales de CO2 en 2016, d’après les chiffres de l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE). Les trois quarts des émissions liées au transport sont dues aux camions, bus et voitures. La route a ainsi généré 5,85 gigatonnes de CO2 en 2016, selon l’AIE. Une hausse de 77 % depuis 1990. Avec 0,91 gigatonne par an, l’avion arrive deuxième. Le transport aérien est donc globalement responsable de 2,8 % des émissions de CO2 dans le monde[2]. En France, le secteur du transport est le plus polluant avec 30 % des émissions de CO2[3], loin devant le bâtiment résidentiel et tertiaire (20%)[4]. Ce chiffre est par ailleurs en hausse de 12 % entre 1990 et 2016, là où nos propres objectifs, énoncés dans la dernière SNBC (Stratégie Nationale Bas Carbone) sont de diminuer de 31 % les émissions du secteur à l’horizon 2033[5]. L’empreinte carbone des Français s’élève 11,2 tonnes de CO2 par habitant[6]. Cette empreinte comprend les émissions directes produites sur le territoire national – moins le CO2 généré pour les produits d’exportations – plus les émissions importées, c’est-à-dire le CO2 émis indirectement par nos importations (fabrication, fret, etc.). Si l’on considérait seulement les émissions directes du territoire français, nous n’en serions qu’à 6,6 tonnes de CO2 par habitant, sans compter les émissions de GES des secteurs des transports maritimes et aériens internationaux. Autrement dit, plus de 40% de nos émissions sont importées. D’ailleurs, si nos émissions nationales ont légèrement diminué depuis les années 1990, notre empreinte carbone globale a augmenté[7]. Au niveau européen, les émissions importées représentent un peu moins de 20 % de l’empreinte carbone totale du continent, selon les calculs d’Eurostat. Mais cette part augmente d’année en année. C’est là la conséquence climatique directe de l’élan de mondialisation inhérent au néolibéralisme thermo-industriel. Le taux d’ouverture économique, c’est-à-dire le rapport de l’activité extérieure (importations et exportations) par rapport au PIB, a triplé depuis les années 60 pour atteindre 34 % en 2007, tant en volume qu’en valeur. Il s’est replié avec la crise de 2008 puis s’est redressé pour atteindre 32% en 2016. Derrière ces chiffres se cache une réalité physique : les capacités de transport mondial explosent. Le nombre de navires, d’avions et autres véhicules atteint des sommets, facilitant d’autant le transit des pathogènes. Selon le cabinet Carbone 4, que ce soit par voie maritime, aérienne ou terrestre, le pétrole assure 95 % des besoins du transport de marchandises dans le monde. La consommation pétrolière du secteur du transport de marchandises a pratiquement doublé depuis 1973, et le transport en général est responsable des deux tiers de la consommation mondiale de brut[8]. En France, sur la totalité du volume des produits pétroliers importés, qui grèvent d’ailleurs notre balance commerciale à hauteur de 35 milliards d’euros[9], plus de la moitié se destine au domaine du transport. Selon la Cour des comptes européenne, il sera nécessaire d’investir chaque année, entre 2021 et 2030, 1115 milliards d’euros pour atteindre les objectifs de l’Union européenne en matière de climat. Cette somme se divise ainsi : 736 milliards d’euros dans le secteur des transports, 282 milliards dans le secteur résidentiel et dans le secteur des services, 78 milliards dans les réseaux et la production énergétique, et 19 milliards d’euros dans l’industrie. Le secteur du transport est donc de loin le plus gourmand en capital. L’effort est de fait particulièrement intense en termes d’adaptation des infrastructures publiques, d’aménagement du territoire et d’acquisition de matériel. Un ensemble d’activités qui peuvent structurer un regain de dynamisme global pour notre économie et nos emplois, si la puissance publique se donne les moyens d’un plan de relance ambitieux et articulé à nos impératifs climatiques[10]. Dans cette note sur les mobilités, nous cherchons à définir les pistes de sortie de crise à privilégier, au sein des secteurs spécifiques que sont le transport maritime et fluvial, ferroviaire, aérien, automobile et des mobilités dites « douces » comme le vélo. Ces pistes doivent aussi être articulées avec le reste des propositions de l’Institut Rousseau, particulièrement avec un mouvement de relocalisation rapide d’un ensemble de productions stratégiques, inscrit dans un effort de circularisation de l’économie. Pourquoi ? Parce que sans une baisse globale du volume de marchandises transportées, il sera difficile de tenir nos objectifs climatiques. C’est d’ailleurs ce que souhaite très largement la population française, puisque 89% de nos concitoyens souhaitent une relocalisation de l’industrie, « même si cela augmente les prix », et 87% souhaitent un renforcement de la politique écologique.[11] Table des matières I) Transport maritime : redimensionner la flotte mondiale et atténuer son impact A) Un secteur en crise B) Un impact environnemental et sanitaire à réguler C) Organiser la conversion bas carbone de la flotte mondiale II) Ferroviaire : une montée en puissance rapide du rail A) Le rail abandonné au profit du camion B) Systématiser le fret ferroviaire C) Reconstruire un réseau dense et lancer une nouvelle génération de trains III) Automobile : vers une route post-pétrole A) Sortir de l’imaginaire SUV B) Lancer aujourd’hui la conception et la construction des voitures de demain C) Pousser le véhicule hydrogène D) Une infrastructure routière à adapter IV) Aérien : faire atterrir le kérosène pour mieux redécoller A) Rendre les alternatives à l’avion faciles et systématiques

Par Gilbert P.

27 juillet 2020

Garantir des traitements dignes aux animaux pour limiter le risque d’épidémie

Le premier cas humain infecté par le Covid-19 a été détecté sur un marché d’animaux vivants destinés à la consommation à Wuhan en Chine le 17 novembre 2019[1]. Malgré l’imprécision sur la source épidémiologique d’origine du Covid-19, les scientifiques s’accordent sur le fait que l’animal est la source et le transmetteur. Le Covid-19 s’ajoute ainsi à la longue série de pandémies transmises des animaux aux hommes. L’Organisation mondiale pour la santé animale (OIE) souligne que les maladies infectieuses zoonotiques provenant des animaux, telles que la peste, la rage ou la tuberculose[2], représentent 60 % des maladies infectieuses humaines déjà existantes et qu’elles croissent. L’OIE estime que « 75 % des agents pathogènes des maladies infectieuses humaines émergentes, notamment Ebola, le VIH et la grippe aviaire, sont d’origine animale ». En effet, les dernières pandémies sanitaires internationales provenant directement des animaux sont nombreuses : le VIH, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dite maladie de la « vache folle », provenant de l’ESB, les coronavirus, les grippes aviaires (H7N9 et H5N1), la grippe porcine (H1N1) ou encore Ebola. Les pandémies questionnent à chaque fois notre rapport à l’animal, qu’il soit sauvage ou domestique, ainsi que notre modèle agricole et notre système de santé[3]. Cependant, jamais une zoonose n’avait autant désorganisé les sociétés que le Covid-19, conduisant au confinement massif de la population. La crise sanitaire, économique et sociale provoquée par le Covid-19 nous invite à repenser notre système agricole et nos régimes alimentaires pour améliorer la biosécurité. Cette dernière désigne l’ensemble des mesures sanitaires prises pour protéger en amont l’élevage de l’entrée d’éléments pathogènes, de la transmission au sein de l’élevage et de sa propagation à d’autres élevages ou à l’homme. Or, elle ne peut être envisagée seulement dans une perspective de traitement des crises. Elle doit davantage mettre l’accent sur la prévention. L’OIE établit un lien clair entre la santé animale et le bien-être animal et prône la prévention comme la solution « la plus efficace et la plus économique pour protéger l’homme »[4]. Une meilleure prise en compte du bien-être animal dans l’agriculture contribue à améliorer le bien-être et le revenu de l’éleveur, la qualité de l’alimentation et la santé publique, tout en répondant à l’urgence écologique. Il s’agit d’une solution humaniste, écologique et sociale. NB : La note se concentre sur l’élevage en France. La pêche et l’aquaculture ne sont pas traitées, bien que les enjeux sanitaires soient importants. Nous faisons le choix de nous concentrer sur la dissémination d’agents pathogènes de nature accidentelle et d’écarter la question du bioterrorisme. Cette note apporte des solutions pour réduire le risque d’émergence de zoonoses et prévenir la propagation.   I – La biosécurité dans les élevages comme garante de la santé publique 1. Les enjeux écologiques, économiques, sociaux et sanitaires de l’élevage intensif L’élevage intensif est vivement critiqué par rapport au bien-être animal, à la qualité de la viande, ainsi qu’aux conditions de travail des professionnels et à son modèle économique. En 2018, les Français consommaient en moyenne 87,5 kg de viande par an[5], ce qui les place parmi les plus gros consommateurs de viande au monde[6]. Or, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommande de ne pas manger plus de 500 grammes de viande par semaine, soit 26 kg par an, bien en-deçà de la consommation actuelle moyenne. Une consommation excessive de viande est jugée néfaste pour la santé selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) car elle favorise l’obésité, les maladies cardio-vasculaires et certains cancers. Les bénéfices de la viande pour la santé humaine sont également conditionnés par sa qualité, amoindrie lorsque l’animal est malade ou la viande transformée. Or, cette dernière représente 30 % des produits carnés consommés, principalement de la charcuterie industrielle ou des plats préparés[7]. Par ailleurs, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que la consommation mondiale de viande va augmenter de 60 % d’ici 2080, tirée notamment par les pays en développement, ce qui a pour conséquences d’augmenter les prix sur les ressources productives et de pousser les éleveurs vers l’agriculture intensive pour dégager des bénéfices[8]. En France, 80 % des animaux sont dans des élevages intensifs. Ce pourcentage est particulièrement haut pour les porcs (95 %) et les volailles (80 % des poulets de chair et 68 % des poules pondeuses)[9]. Au-delà du problème éthique et sanitaire, la mortalité des animaux dans les élevages représente aussi une perte économique pour les éleveurs. À titre d’exemple, pour l’élevage laitier, le manque à gagner s’élève en moyenne entre 2 000 à 4 000 euros pour 50 vêlages (mise à bas des veaux) par an. Les maladies animales provoquent une perte de production liée à la perte de bêtes ou au coût du traitement des agents pathogènes. Une telle perte de production perturbe les marchés locaux et internationaux puisque les conséquences économiques dépassent le territoire et les éleveurs. Des institutions comme la FAO ou l’OIE mettent en avant le fait qu’un cheptel en bonne santé et les pratiques liées au bien-être animal sont des facteurs de performance économique pour les éleveurs[10]. En outre, l’élevage intensif est aussi décrié du point de vue écologique car il pollue les sols et les eaux, notamment par les eaux usées ou le lisier comme nous pouvons le constater en Bretagne avec la prolifération des algues vertes. L’élevage intensif a également émis, en 2019, 18 % des gaz à effet de serre[11]. De plus, il est très consommateur d’eau[12] et de surfaces agricoles, notamment avec la production de céréales pour nourrir le bétail (40 % des céréales vont au bétail)[13], concurrençant la nourriture à destination directe des êtres humains. L’élevage intensif, par ses conséquences écologiques, économiques et sociales, nuit aux écosystèmes, à la santé des professionnels mais aussi à la santé publique. À ces critiques anciennes s’ajoute celle du risque sanitaire réactivé à chaque pandémie, comme celle que nous connaissons aujourd’hui.   2. Les facteurs de risque et conséquences des zoonoses   Le Covid-19 met en lumière le risque sanitaire de transmission des maladies animales à l’humain par les zoonoses ou les contaminations alimentaires. La contamination des humains par des

Par Magat A.

27 juin 2020

Démondialisation, relocalisation et régulation publique : pourquoi et comment

La mondialisation néolibérale est un phénomène qui ne connaît aucun précédent historique. Elle ne se caractérise pas simplement par l’importance du volume des échanges internationaux de marchandises et de capitaux, un indicateur trop limité qui permet à certains analystes d’opérer des rapprochements avec « d’autres mondialisations » qui ont eu lieu à d’autres périodes de l’histoire. Ce qui la caractérise avant tout, c’est une division internationale du travail et une dérégulation publique sans précédent. En d’autres termes, c’est un ordre commercial libre-échangiste qui sert les intérêts d’entreprises multinationales cherchant à bénéficier d’un maximum de libertés d’installation et de circulation. Son caractère inédit réside dans cette capacité des grandes entreprises privées, dans la plupart des secteurs d’activité, à penser leur stratégie et leur organisation à l’échelle de la planète en s’affranchissant de plus en plus ouvertement des régulations nationales. Dans le discours commun (et jusque dans la presse économique), on entend souvent dire que « la France achète à la Chine » ou que « l’Espagne achète à l’Allemagne », donnant ainsi le sentiment que les transactions s’opèrent entre pays.Ces formules entretiennent des illusions. En fait, commande publique mise à part, ce sont des entreprises françaises (ou implantées en France) qui achètent des produits à des entreprises chinoises (ou implantées en Chine) et les distribuent sur le territoire national (ou les transforment pour les réexporter). La dérégulation vise justement à ce que ces transactions s’opèrent avec le moins d’interventions publiques possibles : suppression des « obstacles » tarifaires et non-tarifaires, réduction drastique des contrôles des flux de marchandises et de capitaux… Dans le premier port français, celui du Havre, le nombre de conteneurs ouverts est d’à peine plus d’un pour mille. En 2000, 500 douaniers y travaillaient pour surveiller 1 million de conteneurs par an. En 2019, les effectifs sont tombés à 350 pour 2,9 millions de conteneurs[1]. Il n’entre pas ici dans notre propos de nous attarder sur les conséquences visibles de cet ordre commercial libre-échangiste : délocalisations vers les pays à bas coût de main d’œuvre, désindustrialisation ailleurs, hyperspécialisation qui engendre une concentration dangereuse de productions clés dans un petit nombre de pays, évasion des profits des multinationales vers des paradis fiscaux… Ces questions apparaissent régulièrement dans l’actualité. Il est en revanche plus important d’insister sur l’impuissance auto-organisée des États qui, pour la plupart, ont renoncé aux principauxmoyens dont ils disposaient pour contrôler ou orienter la production, pour prélever et redistribuer les richesses, pour mener des stratégies d’investissements publics. Si quelques gouvernements parmi les plus puissants (Chine, États-Unis, Japon) continuent à protéger leur marché intérieur de façon plus ou moins déguisée, c’est avant tout pour favoriser leurs grandes entreprises nationales dans la concurrence internationale et non pour développer leurs services publics ou contraindre le secteur privé à mieux traiter les salariés. Un bon exemple d’impuissance des pouvoirs publics nous est donné par la politique européenne de lutte contre le changement climatique. Au milieu des années 2000, l’Union a mis en place un marché du carbone, peu contraignant pour les grandes entreprises, mais qui a tout de même suscité des résistances de certaines d’entre elles. Arcelor Mittal, notamment, a exercé un chantage à l’emploi auprès des gouvernements français et belge : soit la nouvelle contrainte de quotas carbone qui devait s’imposer à elle était assouplie, soit la firme allait délocaliser hors de l’Union européenne. Les gouvernements et l’Union finirent par céder et l’absence de « contrainte carbone » fut très officiellement étendue à tous les secteurs exposés à des risques de délocalisation. Or, c’est bien parce que les grandes entreprises peuvent délocaliser (ou choisir librement leurs sous-traitants dans les pays à bas coût de main d’œuvre) qu’aucune politique publique n’est suffisamment efficace pour résoudre la crise environnementale. C’est bien parce que les capitaux circulent librement que les États ne peuvent plus compter que sur leur « attractivité » pour les attirer et disposer d’un minimum de recettes et de ressources budgétaires. Face à ce constat, certains en appellent à une régulation mondiale. Mais compte tenu des rapports de force, impossible d’y compter à court ou moyen terme. Si l’on veut exercer un contrôle démocratique sur la production, il faut donc sortir de cet ordre commercial libre-échangiste, c’est-à-dire relocaliser des activités qui ont quitté le territoire et empêcher que d’autres continuent à partir. Cette relocalisation doit être multisectorielle : il n’est pas question de relocaliser l’alimentation, par exemple, tout en laissant la France continuer à se désindustrialiser. C’est une approche globale de la relocalisation qu’il convient de développer.   I. Relocaliser pour être en mesure de contrôler la production et d’agir sur la distribution des richesses   Il faut lever tout malentendu sur les raisons qui nous amènent à prôner la relocalisation. À quoi cela servirait-il de « produire français » à mode de production constant et dans un ordre économique international globalement inchangé ? Éventuellement à réduire le chômage, ce qui n’est pas rien. Peut-être à réduire des émissions de gaz à effet de serre liées au transport international, à supposer que ce « produire français » concerne un nombre suffisant de secteurs d’activité et serve à alimenter le marché intérieur plutôt qu’à réexporter. Mais ce type de relocalisation resterait dépendant d’une logique mercantiliste et laisserait les choix et modes de production entièrement aux mains des grandes entreprises privées. Elle n’apporterait aucune garantie d’une meilleure répartition de la valeur ajoutée entre capital et travail. Elle poursuivrait l’exploitation des pays du Sud pour l’approvisionnement en matières premières, étant entendu que jamais l’industrie extractive ne sera largement relocalisée et qu’il sera difficile de couvrir les campagnes françaises de champs de coton, par exemple, pour produire du textile. Elle laisserait enfin en place l’économie productiviste qui nous mène tout droit vers la catastrophe environnementale. L’enjeu est donc bien de relocaliser pour changer les choix et modes de production, la distribution des richesses et les relations internationales. Il s’agit de remettre du politique (des objectifs sociaux, environnementaux, de coopération internationale…) dans l’économie nationale et dans les échanges commerciaux là où, précisément, le capitalisme a réussi à l’évacuer grâce à la mondialisation néolibérale. Cette clarification est nécessaire car deux visions de la relocalisation et du

Par Bernier A.

17 juin 2020

À la reconquête d’une souveraineté alimentaire paysanne et démocratique

La crise sanitaire due au Covid-19 a mis en lumière l’importance de l’autonomie, sacrifiée sur l’autel du marché. Nos dirigeants ont appris à leurs (et à nos) dépens qu’il ne suffisait pas de passer commande pour obtenir le produit désiré et qu’être en mesure de produire soi-même peut faire la différence entre subir une crise et la surmonter. À cette règle, l’agriculture ne fait pas exception. En perturbant les rouages de l’économie agricole mondialisée dont nous dépendons pour notre alimentation, la pandémie que nous traversons semble avoir engendré une prise de conscience quant à l’importance de retrouver notre souveraineté alimentaire[1].   Introduction Depuis le mois de mars, de nombreux pays ont ralenti leurs exportations en raison d’une diminution de la production, de difficultés dans la logistique de transport et de vente ou encore d’une volonté de sécuriser les approvisionnements nationaux. C’est notamment le cas de l’Italie et de l’Espagne, principaux producteurs de fruits et légumes européens, qui ont tous deux été durement touchés par le Covid-19. Les effets de la crise sanitaire (confinement, difficultés logistiques pour la récolte et l’acheminement) ont entraîné des baisses de récolte en Italie. En Espagne, où ils ont fait suite à un hiver trop doux et à des tempêtes de grêle printanières, on estime que la production fruitière a chuté d’environ 35 % à 40 %. Or, la France dépend largement de ces deux pays pour son approvisionnement en fruits et légumes. D’ores et déjà, les prix des fruits et légumes ont augmenté de 10 % en moyenne depuis le début du confinement et, au vu des productions en baisse chez nous comme chez nos voisins, il paraît inévitable qu’il y ait dans les prochaines semaines et les prochains mois des tensions dans l’approvisionnement. Les prix devraient continuer d’augmenter, compliquant l’accès à ces aliments, pourtant essentiels à la santé, pour une partie de la population dont la situation économique s’aggrave. Alors que des voix s’élèvent pour s’émouvoir de cette perte de souveraineté alimentaire, y compris parmi ceux qui en portent directement la responsabilité (politiques libéraux et fleurons de la grande distribution en tête), il paraît important de rappeler les choix politiques qui ont eu raison de cette souveraineté dans les dernières décennies. Car si la relocalisation des productions abandonnées par la politique agricole française est évidemment la voie d’avenir, elle ne pourra avoir lieu sans remettre en question la logique de compétition internationale, de libre-échange et de marché unique.   I. Relocaliser pour reprendre le contrôle de nos modes de production Au cours des dernières décennies, plusieurs productions pourtant indispensables à notre alimentation ou à celle de nos animaux d’élevage ont été délaissées. C’est en particulier le cas des fruits, des légumes et des protéagineux[2] pour la culture desquels les producteurs français sont jugés non-compétitifs sur le marché international, face notamment aux fruits et légumes d’Europe du Sud et au soja sud- et nord-américain. Ces produits doivent donc aujourd’hui être massivement importés pour répondre à nos besoins. Or la délocalisation de ces productions n’est pas seulement un fardeau pour notre bilan écologique : au transport polluant nécessaire à l’acheminement de ces produits (souvent du Sud de l’Europe pour les fruits et légumes, ducontinent américain pour les protéagineux) s’ajoute le fait que nous n’en maîtrisons ni les conditions sociales ni les conditions environnementales de production. Pourtant, parce que nous, consommateurs français, en sommes les destinataires finaux, leur impact social et environnemental est le nôtre : notre déforestation pour la culture du soja en Amazonie, nos cultures de soja OGM en Amérique du Nord, nos travailleurs étrangers sans-papiers exploités pour les cultures intensives de légumes. C’est là le grand paradoxe de notre économie mondialisée : nous décidons plus ou moins démocratiquement des règles de fonctionnement de notre société et fermons les yeux lorsque ces règles sont bafouées pour remplir nos assiettes. Le cas des plantes génétiquement modifiées est sur ce point emblématique : alors que leur culture est aujourd’hui interdite sur le territoire français et que les citoyens y sont massivement opposés, la France en importe 3,5 millions de tonnes par an afin d’approvisionner les élevages de volailles, porcs, bovins et poissons[3]. C’est notamment pour répondre à ce paradoxe que de nombreuses organisations de paysans, de citoyens et de consommateurs appellent aujourd’hui à reconquérir notre souveraineté – et pas simplement notre autosuffisance – alimentaire[4]. En effet, contrairement à la notion d’autosuffisance qui n’implique qu’un objectif quantitatif de production, celle de souveraineté sous-entend un processus démocratique quant aux modes de production, de transformation et de consommation. Mais pour que le souhait de souveraineté, qui implique de relocaliser ces productions sur notre territoire, ne soit pas qu’un vœu pieux, il est impératif de rappeler les causes de cette perte de souveraineté. Et d’agir dessus.   II. Aux racines de notre perte de souveraineté alimentaire   Nous importons aujourd’hui plus de 50 % des fruits et 35 % des légumes que nous consommons. Nous sommes passés d’une situation d’autosuffisance à une situation de dépendance en à peine 30 ans. On estime avoir perdu la moitié de nos exploitations fruitières ou légumières depuis 30 ans[5]. Si pour le maraîchage, le déclin s’est ralenti ces dernières années (grâce ou à cause de la mécanisation qui a permis de réduire les coûts de main d’œuvre), il s’est au contraire accru pour l’arboriculture : 30 % des exploitations fruitières qui existaient en 2010 avaient disparu six ans plus tard. Cela correspond à une disparition de 3 000 hectares de vergers par an en moyenne. Or d’après les calculs de la Fédération nationale des producteurs de fruits (FNPF), l’abandon de deux hectares fait disparaître un emploi équivalent temps-plein (ETP) dans les vergers, ce qui entraîne la suppression d’un autre ETP dans la filière. Ce sont donc autour de 30 000 ETP qui auraient été supprimés en production fruitière dans les seules 10 dernières années. Partout en France, des coopératives et des ateliers de transformation ont fermé leurs portes. Ces centaines de milliers d’arbres arrachés, ces dizaines de milliers de salariés licenciés, ces milliers de fermes détruites et d’outils de production abandonnés sont le résultat d’une politique agricole

Par Lugassy L.

12 juin 2020

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