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Le laboratoire d’idées de la reconstruction écologique et républicaine

Notes

Faire atterrir le grand déménagement du monde : vers une mobilité post-carbone

Introduction Pour l’historien des pandémies Patrice Bourdelais, le doublement du trafic aérien entre 2006 et 2018, avec 4,3 milliards de passagers par an, est « l’une des variables essentielles de tous les modèles épidémiologiques »[1]. Le « grand déménagement du monde », en plus d’avoir pour corollaire une explosion des émissions de gaz à effet de serre, est donc un facteur de vulnérabilité inédit. Le rythme des échanges, d’hommes comme de matières, prend de court nos défenses immunitaires et nos systèmes de santé. Transporter moins et mieux : telle est une des grandes orientations que devrait prendre « le monde d’après ». Il convient dès lors de dégager des pistes de politique publique réalistes visant à la transition qualitative du secteur du transport, afin de diminuer au maximum son impact environnemental, tout en favorisant l’emploi et la résilience économique de nos acteurs nationaux. Les transports représentent un quart des émissions mondiales de CO2 en 2016, d’après les chiffres de l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE). Les trois quarts des émissions liées au transport sont dues aux camions, bus et voitures. La route a ainsi généré 5,85 gigatonnes de CO2 en 2016, selon l’AIE. Une hausse de 77 % depuis 1990. Avec 0,91 gigatonne par an, l’avion arrive deuxième. Le transport aérien est donc globalement responsable de 2,8 % des émissions de CO2 dans le monde[2]. En France, le secteur du transport est le plus polluant avec 30 % des émissions de CO2[3], loin devant le bâtiment résidentiel et tertiaire (20%)[4]. Ce chiffre est par ailleurs en hausse de 12 % entre 1990 et 2016, là où nos propres objectifs, énoncés dans la dernière SNBC (Stratégie Nationale Bas Carbone) sont de diminuer de 31 % les émissions du secteur à l’horizon 2033[5]. L’empreinte carbone des Français s’élève 11,2 tonnes de CO2 par habitant[6]. Cette empreinte comprend les émissions directes produites sur le territoire national – moins le CO2 généré pour les produits d’exportations – plus les émissions importées, c’est-à-dire le CO2 émis indirectement par nos importations (fabrication, fret, etc.). Si l’on considérait seulement les émissions directes du territoire français, nous n’en serions qu’à 6,6 tonnes de CO2 par habitant, sans compter les émissions de GES des secteurs des transports maritimes et aériens internationaux. Autrement dit, plus de 40% de nos émissions sont importées. D’ailleurs, si nos émissions nationales ont légèrement diminué depuis les années 1990, notre empreinte carbone globale a augmenté[7]. Au niveau européen, les émissions importées représentent un peu moins de 20 % de l’empreinte carbone totale du continent, selon les calculs d’Eurostat. Mais cette part augmente d’année en année. C’est là la conséquence climatique directe de l’élan de mondialisation inhérent au néolibéralisme thermo-industriel. Le taux d’ouverture économique, c’est-à-dire le rapport de l’activité extérieure (importations et exportations) par rapport au PIB, a triplé depuis les années 60 pour atteindre 34 % en 2007, tant en volume qu’en valeur. Il s’est replié avec la crise de 2008 puis s’est redressé pour atteindre 32% en 2016. Derrière ces chiffres se cache une réalité physique : les capacités de transport mondial explosent. Le nombre de navires, d’avions et autres véhicules atteint des sommets, facilitant d’autant le transit des pathogènes. Selon le cabinet Carbone 4, que ce soit par voie maritime, aérienne ou terrestre, le pétrole assure 95 % des besoins du transport de marchandises dans le monde. La consommation pétrolière du secteur du transport de marchandises a pratiquement doublé depuis 1973, et le transport en général est responsable des deux tiers de la consommation mondiale de brut[8]. En France, sur la totalité du volume des produits pétroliers importés, qui grèvent d’ailleurs notre balance commerciale à hauteur de 35 milliards d’euros[9], plus de la moitié se destine au domaine du transport. Selon la Cour des comptes européenne, il sera nécessaire d’investir chaque année, entre 2021 et 2030, 1115 milliards d’euros pour atteindre les objectifs de l’Union européenne en matière de climat. Cette somme se divise ainsi : 736 milliards d’euros dans le secteur des transports, 282 milliards dans le secteur résidentiel et dans le secteur des services, 78 milliards dans les réseaux et la production énergétique, et 19 milliards d’euros dans l’industrie. Le secteur du transport est donc de loin le plus gourmand en capital. L’effort est de fait particulièrement intense en termes d’adaptation des infrastructures publiques, d’aménagement du territoire et d’acquisition de matériel. Un ensemble d’activités qui peuvent structurer un regain de dynamisme global pour notre économie et nos emplois, si la puissance publique se donne les moyens d’un plan de relance ambitieux et articulé à nos impératifs climatiques[10]. Dans cette note sur les mobilités, nous cherchons à définir les pistes de sortie de crise à privilégier, au sein des secteurs spécifiques que sont le transport maritime et fluvial, ferroviaire, aérien, automobile et des mobilités dites « douces » comme le vélo. Ces pistes doivent aussi être articulées avec le reste des propositions de l’Institut Rousseau, particulièrement avec un mouvement de relocalisation rapide d’un ensemble de productions stratégiques, inscrit dans un effort de circularisation de l’économie. Pourquoi ? Parce que sans une baisse globale du volume de marchandises transportées, il sera difficile de tenir nos objectifs climatiques. C’est d’ailleurs ce que souhaite très largement la population française, puisque 89% de nos concitoyens souhaitent une relocalisation de l’industrie, « même si cela augmente les prix », et 87% souhaitent un renforcement de la politique écologique.[11] Table des matières I) Transport maritime : redimensionner la flotte mondiale et atténuer son impact A) Un secteur en crise B) Un impact environnemental et sanitaire à réguler C) Organiser la conversion bas carbone de la flotte mondiale II) Ferroviaire : une montée en puissance rapide du rail A) Le rail abandonné au profit du camion B) Systématiser le fret ferroviaire C) Reconstruire un réseau dense et lancer une nouvelle génération de trains III) Automobile : vers une route post-pétrole A) Sortir de l’imaginaire SUV B) Lancer aujourd’hui la conception et la construction des voitures de demain C) Pousser le véhicule hydrogène D) Une infrastructure routière à adapter IV) Aérien : faire atterrir le kérosène pour mieux redécoller A) Rendre les alternatives à l’avion faciles et systématiques

Par Gilbert P.

27 juillet 2020

Garantir des traitements dignes aux animaux pour limiter le risque d’épidémie

Le premier cas humain infecté par le Covid-19 a été détecté sur un marché d’animaux vivants destinés à la consommation à Wuhan en Chine le 17 novembre 2019[1]. Malgré l’imprécision sur la source épidémiologique d’origine du Covid-19, les scientifiques s’accordent sur le fait que l’animal est la source et le transmetteur. Le Covid-19 s’ajoute ainsi à la longue série de pandémies transmises des animaux aux hommes. L’Organisation mondiale pour la santé animale (OIE) souligne que les maladies infectieuses zoonotiques provenant des animaux, telles que la peste, la rage ou la tuberculose[2], représentent 60 % des maladies infectieuses humaines déjà existantes et qu’elles croissent. L’OIE estime que « 75 % des agents pathogènes des maladies infectieuses humaines émergentes, notamment Ebola, le VIH et la grippe aviaire, sont d’origine animale ». En effet, les dernières pandémies sanitaires internationales provenant directement des animaux sont nombreuses : le VIH, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dite maladie de la « vache folle », provenant de l’ESB, les coronavirus, les grippes aviaires (H7N9 et H5N1), la grippe porcine (H1N1) ou encore Ebola. Les pandémies questionnent à chaque fois notre rapport à l’animal, qu’il soit sauvage ou domestique, ainsi que notre modèle agricole et notre système de santé[3]. Cependant, jamais une zoonose n’avait autant désorganisé les sociétés que le Covid-19, conduisant au confinement massif de la population. La crise sanitaire, économique et sociale provoquée par le Covid-19 nous invite à repenser notre système agricole et nos régimes alimentaires pour améliorer la biosécurité. Cette dernière désigne l’ensemble des mesures sanitaires prises pour protéger en amont l’élevage de l’entrée d’éléments pathogènes, de la transmission au sein de l’élevage et de sa propagation à d’autres élevages ou à l’homme. Or, elle ne peut être envisagée seulement dans une perspective de traitement des crises. Elle doit davantage mettre l’accent sur la prévention. L’OIE établit un lien clair entre la santé animale et le bien-être animal et prône la prévention comme la solution « la plus efficace et la plus économique pour protéger l’homme »[4]. Une meilleure prise en compte du bien-être animal dans l’agriculture contribue à améliorer le bien-être et le revenu de l’éleveur, la qualité de l’alimentation et la santé publique, tout en répondant à l’urgence écologique. Il s’agit d’une solution humaniste, écologique et sociale. NB : La note se concentre sur l’élevage en France. La pêche et l’aquaculture ne sont pas traitées, bien que les enjeux sanitaires soient importants. Nous faisons le choix de nous concentrer sur la dissémination d’agents pathogènes de nature accidentelle et d’écarter la question du bioterrorisme. Cette note apporte des solutions pour réduire le risque d’émergence de zoonoses et prévenir la propagation.   I – La biosécurité dans les élevages comme garante de la santé publique 1. Les enjeux écologiques, économiques, sociaux et sanitaires de l’élevage intensif L’élevage intensif est vivement critiqué par rapport au bien-être animal, à la qualité de la viande, ainsi qu’aux conditions de travail des professionnels et à son modèle économique. En 2018, les Français consommaient en moyenne 87,5 kg de viande par an[5], ce qui les place parmi les plus gros consommateurs de viande au monde[6]. Or, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommande de ne pas manger plus de 500 grammes de viande par semaine, soit 26 kg par an, bien en-deçà de la consommation actuelle moyenne. Une consommation excessive de viande est jugée néfaste pour la santé selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS) car elle favorise l’obésité, les maladies cardio-vasculaires et certains cancers. Les bénéfices de la viande pour la santé humaine sont également conditionnés par sa qualité, amoindrie lorsque l’animal est malade ou la viande transformée. Or, cette dernière représente 30 % des produits carnés consommés, principalement de la charcuterie industrielle ou des plats préparés[7]. Par ailleurs, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime que la consommation mondiale de viande va augmenter de 60 % d’ici 2080, tirée notamment par les pays en développement, ce qui a pour conséquences d’augmenter les prix sur les ressources productives et de pousser les éleveurs vers l’agriculture intensive pour dégager des bénéfices[8]. En France, 80 % des animaux sont dans des élevages intensifs. Ce pourcentage est particulièrement haut pour les porcs (95 %) et les volailles (80 % des poulets de chair et 68 % des poules pondeuses)[9]. Au-delà du problème éthique et sanitaire, la mortalité des animaux dans les élevages représente aussi une perte économique pour les éleveurs. À titre d’exemple, pour l’élevage laitier, le manque à gagner s’élève en moyenne entre 2 000 à 4 000 euros pour 50 vêlages (mise à bas des veaux) par an. Les maladies animales provoquent une perte de production liée à la perte de bêtes ou au coût du traitement des agents pathogènes. Une telle perte de production perturbe les marchés locaux et internationaux puisque les conséquences économiques dépassent le territoire et les éleveurs. Des institutions comme la FAO ou l’OIE mettent en avant le fait qu’un cheptel en bonne santé et les pratiques liées au bien-être animal sont des facteurs de performance économique pour les éleveurs[10]. En outre, l’élevage intensif est aussi décrié du point de vue écologique car il pollue les sols et les eaux, notamment par les eaux usées ou le lisier comme nous pouvons le constater en Bretagne avec la prolifération des algues vertes. L’élevage intensif a également émis, en 2019, 18 % des gaz à effet de serre[11]. De plus, il est très consommateur d’eau[12] et de surfaces agricoles, notamment avec la production de céréales pour nourrir le bétail (40 % des céréales vont au bétail)[13], concurrençant la nourriture à destination directe des êtres humains. L’élevage intensif, par ses conséquences écologiques, économiques et sociales, nuit aux écosystèmes, à la santé des professionnels mais aussi à la santé publique. À ces critiques anciennes s’ajoute celle du risque sanitaire réactivé à chaque pandémie, comme celle que nous connaissons aujourd’hui.   2. Les facteurs de risque et conséquences des zoonoses   Le Covid-19 met en lumière le risque sanitaire de transmission des maladies animales à l’humain par les zoonoses ou les contaminations alimentaires. La contamination des humains par des

Par Magat A.

27 juin 2020

Démondialisation, relocalisation et régulation publique : pourquoi et comment

La mondialisation néolibérale est un phénomène qui ne connaît aucun précédent historique. Elle ne se caractérise pas simplement par l’importance du volume des échanges internationaux de marchandises et de capitaux, un indicateur trop limité qui permet à certains analystes d’opérer des rapprochements avec « d’autres mondialisations » qui ont eu lieu à d’autres périodes de l’histoire. Ce qui la caractérise avant tout, c’est une division internationale du travail et une dérégulation publique sans précédent. En d’autres termes, c’est un ordre commercial libre-échangiste qui sert les intérêts d’entreprises multinationales cherchant à bénéficier d’un maximum de libertés d’installation et de circulation. Son caractère inédit réside dans cette capacité des grandes entreprises privées, dans la plupart des secteurs d’activité, à penser leur stratégie et leur organisation à l’échelle de la planète en s’affranchissant de plus en plus ouvertement des régulations nationales. Dans le discours commun (et jusque dans la presse économique), on entend souvent dire que « la France achète à la Chine » ou que « l’Espagne achète à l’Allemagne », donnant ainsi le sentiment que les transactions s’opèrent entre pays.Ces formules entretiennent des illusions. En fait, commande publique mise à part, ce sont des entreprises françaises (ou implantées en France) qui achètent des produits à des entreprises chinoises (ou implantées en Chine) et les distribuent sur le territoire national (ou les transforment pour les réexporter). La dérégulation vise justement à ce que ces transactions s’opèrent avec le moins d’interventions publiques possibles : suppression des « obstacles » tarifaires et non-tarifaires, réduction drastique des contrôles des flux de marchandises et de capitaux… Dans le premier port français, celui du Havre, le nombre de conteneurs ouverts est d’à peine plus d’un pour mille. En 2000, 500 douaniers y travaillaient pour surveiller 1 million de conteneurs par an. En 2019, les effectifs sont tombés à 350 pour 2,9 millions de conteneurs[1]. Il n’entre pas ici dans notre propos de nous attarder sur les conséquences visibles de cet ordre commercial libre-échangiste : délocalisations vers les pays à bas coût de main d’œuvre, désindustrialisation ailleurs, hyperspécialisation qui engendre une concentration dangereuse de productions clés dans un petit nombre de pays, évasion des profits des multinationales vers des paradis fiscaux… Ces questions apparaissent régulièrement dans l’actualité. Il est en revanche plus important d’insister sur l’impuissance auto-organisée des États qui, pour la plupart, ont renoncé aux principauxmoyens dont ils disposaient pour contrôler ou orienter la production, pour prélever et redistribuer les richesses, pour mener des stratégies d’investissements publics. Si quelques gouvernements parmi les plus puissants (Chine, États-Unis, Japon) continuent à protéger leur marché intérieur de façon plus ou moins déguisée, c’est avant tout pour favoriser leurs grandes entreprises nationales dans la concurrence internationale et non pour développer leurs services publics ou contraindre le secteur privé à mieux traiter les salariés. Un bon exemple d’impuissance des pouvoirs publics nous est donné par la politique européenne de lutte contre le changement climatique. Au milieu des années 2000, l’Union a mis en place un marché du carbone, peu contraignant pour les grandes entreprises, mais qui a tout de même suscité des résistances de certaines d’entre elles. Arcelor Mittal, notamment, a exercé un chantage à l’emploi auprès des gouvernements français et belge : soit la nouvelle contrainte de quotas carbone qui devait s’imposer à elle était assouplie, soit la firme allait délocaliser hors de l’Union européenne. Les gouvernements et l’Union finirent par céder et l’absence de « contrainte carbone » fut très officiellement étendue à tous les secteurs exposés à des risques de délocalisation. Or, c’est bien parce que les grandes entreprises peuvent délocaliser (ou choisir librement leurs sous-traitants dans les pays à bas coût de main d’œuvre) qu’aucune politique publique n’est suffisamment efficace pour résoudre la crise environnementale. C’est bien parce que les capitaux circulent librement que les États ne peuvent plus compter que sur leur « attractivité » pour les attirer et disposer d’un minimum de recettes et de ressources budgétaires. Face à ce constat, certains en appellent à une régulation mondiale. Mais compte tenu des rapports de force, impossible d’y compter à court ou moyen terme. Si l’on veut exercer un contrôle démocratique sur la production, il faut donc sortir de cet ordre commercial libre-échangiste, c’est-à-dire relocaliser des activités qui ont quitté le territoire et empêcher que d’autres continuent à partir. Cette relocalisation doit être multisectorielle : il n’est pas question de relocaliser l’alimentation, par exemple, tout en laissant la France continuer à se désindustrialiser. C’est une approche globale de la relocalisation qu’il convient de développer.   I. Relocaliser pour être en mesure de contrôler la production et d’agir sur la distribution des richesses   Il faut lever tout malentendu sur les raisons qui nous amènent à prôner la relocalisation. À quoi cela servirait-il de « produire français » à mode de production constant et dans un ordre économique international globalement inchangé ? Éventuellement à réduire le chômage, ce qui n’est pas rien. Peut-être à réduire des émissions de gaz à effet de serre liées au transport international, à supposer que ce « produire français » concerne un nombre suffisant de secteurs d’activité et serve à alimenter le marché intérieur plutôt qu’à réexporter. Mais ce type de relocalisation resterait dépendant d’une logique mercantiliste et laisserait les choix et modes de production entièrement aux mains des grandes entreprises privées. Elle n’apporterait aucune garantie d’une meilleure répartition de la valeur ajoutée entre capital et travail. Elle poursuivrait l’exploitation des pays du Sud pour l’approvisionnement en matières premières, étant entendu que jamais l’industrie extractive ne sera largement relocalisée et qu’il sera difficile de couvrir les campagnes françaises de champs de coton, par exemple, pour produire du textile. Elle laisserait enfin en place l’économie productiviste qui nous mène tout droit vers la catastrophe environnementale. L’enjeu est donc bien de relocaliser pour changer les choix et modes de production, la distribution des richesses et les relations internationales. Il s’agit de remettre du politique (des objectifs sociaux, environnementaux, de coopération internationale…) dans l’économie nationale et dans les échanges commerciaux là où, précisément, le capitalisme a réussi à l’évacuer grâce à la mondialisation néolibérale. Cette clarification est nécessaire car deux visions de la relocalisation et du

Par Bernier A.

17 juin 2020

À la reconquête d’une souveraineté alimentaire paysanne et démocratique

La crise sanitaire due au Covid-19 a mis en lumière l’importance de l’autonomie, sacrifiée sur l’autel du marché. Nos dirigeants ont appris à leurs (et à nos) dépens qu’il ne suffisait pas de passer commande pour obtenir le produit désiré et qu’être en mesure de produire soi-même peut faire la différence entre subir une crise et la surmonter. À cette règle, l’agriculture ne fait pas exception. En perturbant les rouages de l’économie agricole mondialisée dont nous dépendons pour notre alimentation, la pandémie que nous traversons semble avoir engendré une prise de conscience quant à l’importance de retrouver notre souveraineté alimentaire[1].   Introduction Depuis le mois de mars, de nombreux pays ont ralenti leurs exportations en raison d’une diminution de la production, de difficultés dans la logistique de transport et de vente ou encore d’une volonté de sécuriser les approvisionnements nationaux. C’est notamment le cas de l’Italie et de l’Espagne, principaux producteurs de fruits et légumes européens, qui ont tous deux été durement touchés par le Covid-19. Les effets de la crise sanitaire (confinement, difficultés logistiques pour la récolte et l’acheminement) ont entraîné des baisses de récolte en Italie. En Espagne, où ils ont fait suite à un hiver trop doux et à des tempêtes de grêle printanières, on estime que la production fruitière a chuté d’environ 35 % à 40 %. Or, la France dépend largement de ces deux pays pour son approvisionnement en fruits et légumes. D’ores et déjà, les prix des fruits et légumes ont augmenté de 10 % en moyenne depuis le début du confinement et, au vu des productions en baisse chez nous comme chez nos voisins, il paraît inévitable qu’il y ait dans les prochaines semaines et les prochains mois des tensions dans l’approvisionnement. Les prix devraient continuer d’augmenter, compliquant l’accès à ces aliments, pourtant essentiels à la santé, pour une partie de la population dont la situation économique s’aggrave. Alors que des voix s’élèvent pour s’émouvoir de cette perte de souveraineté alimentaire, y compris parmi ceux qui en portent directement la responsabilité (politiques libéraux et fleurons de la grande distribution en tête), il paraît important de rappeler les choix politiques qui ont eu raison de cette souveraineté dans les dernières décennies. Car si la relocalisation des productions abandonnées par la politique agricole française est évidemment la voie d’avenir, elle ne pourra avoir lieu sans remettre en question la logique de compétition internationale, de libre-échange et de marché unique.   I. Relocaliser pour reprendre le contrôle de nos modes de production Au cours des dernières décennies, plusieurs productions pourtant indispensables à notre alimentation ou à celle de nos animaux d’élevage ont été délaissées. C’est en particulier le cas des fruits, des légumes et des protéagineux[2] pour la culture desquels les producteurs français sont jugés non-compétitifs sur le marché international, face notamment aux fruits et légumes d’Europe du Sud et au soja sud- et nord-américain. Ces produits doivent donc aujourd’hui être massivement importés pour répondre à nos besoins. Or la délocalisation de ces productions n’est pas seulement un fardeau pour notre bilan écologique : au transport polluant nécessaire à l’acheminement de ces produits (souvent du Sud de l’Europe pour les fruits et légumes, ducontinent américain pour les protéagineux) s’ajoute le fait que nous n’en maîtrisons ni les conditions sociales ni les conditions environnementales de production. Pourtant, parce que nous, consommateurs français, en sommes les destinataires finaux, leur impact social et environnemental est le nôtre : notre déforestation pour la culture du soja en Amazonie, nos cultures de soja OGM en Amérique du Nord, nos travailleurs étrangers sans-papiers exploités pour les cultures intensives de légumes. C’est là le grand paradoxe de notre économie mondialisée : nous décidons plus ou moins démocratiquement des règles de fonctionnement de notre société et fermons les yeux lorsque ces règles sont bafouées pour remplir nos assiettes. Le cas des plantes génétiquement modifiées est sur ce point emblématique : alors que leur culture est aujourd’hui interdite sur le territoire français et que les citoyens y sont massivement opposés, la France en importe 3,5 millions de tonnes par an afin d’approvisionner les élevages de volailles, porcs, bovins et poissons[3]. C’est notamment pour répondre à ce paradoxe que de nombreuses organisations de paysans, de citoyens et de consommateurs appellent aujourd’hui à reconquérir notre souveraineté – et pas simplement notre autosuffisance – alimentaire[4]. En effet, contrairement à la notion d’autosuffisance qui n’implique qu’un objectif quantitatif de production, celle de souveraineté sous-entend un processus démocratique quant aux modes de production, de transformation et de consommation. Mais pour que le souhait de souveraineté, qui implique de relocaliser ces productions sur notre territoire, ne soit pas qu’un vœu pieux, il est impératif de rappeler les causes de cette perte de souveraineté. Et d’agir dessus.   II. Aux racines de notre perte de souveraineté alimentaire   Nous importons aujourd’hui plus de 50 % des fruits et 35 % des légumes que nous consommons. Nous sommes passés d’une situation d’autosuffisance à une situation de dépendance en à peine 30 ans. On estime avoir perdu la moitié de nos exploitations fruitières ou légumières depuis 30 ans[5]. Si pour le maraîchage, le déclin s’est ralenti ces dernières années (grâce ou à cause de la mécanisation qui a permis de réduire les coûts de main d’œuvre), il s’est au contraire accru pour l’arboriculture : 30 % des exploitations fruitières qui existaient en 2010 avaient disparu six ans plus tard. Cela correspond à une disparition de 3 000 hectares de vergers par an en moyenne. Or d’après les calculs de la Fédération nationale des producteurs de fruits (FNPF), l’abandon de deux hectares fait disparaître un emploi équivalent temps-plein (ETP) dans les vergers, ce qui entraîne la suppression d’un autre ETP dans la filière. Ce sont donc autour de 30 000 ETP qui auraient été supprimés en production fruitière dans les seules 10 dernières années. Partout en France, des coopératives et des ateliers de transformation ont fermé leurs portes. Ces centaines de milliers d’arbres arrachés, ces dizaines de milliers de salariés licenciés, ces milliers de fermes détruites et d’outils de production abandonnés sont le résultat d’une politique agricole

Par Lugassy L.

12 juin 2020

Protéger la biodiversité pour préserver notre santé et notre environnement

La crise sanitaire historique que nous vivons actuellement amène à repenser fondamentalement notre rapport aux écosystèmes et à promouvoir une protection plus importante de la biodiversité. Si les circonstances spécifiques d’apparition puis de transmission à l’espèce humaine du SARS-CoV-2 ne sont pas encore déterminées précisément (rôle de la chauve-souris puis de la civette et/ou du pangolin), le fait que l’homme empiète chaque jour davantage sur les zones de vie des animaux sauvages – pour les exploiter en déforestant par exemple – est un facteur de plus en plus important de pandémies. La multiplication des épidémies de zoonoses sont le résultat de la pression voire de l’emprise exercée par l’homme sur les habitats naturels des animaux et plus généralement sur la biodiversité. La relative indifférence des civilisations humaines envers la biodiversité au sens large engendre donc un double risque : l’extinction des espèces animales ou végétales et la propagation de pandémies. L’exemple du virus Nipah (on pourrait citer également le VIH ou Ebola, ce dernier provenant là encore d’une chauve-souris) est de ce point de vue topique. La déforestation (chaque année, 13 millions d’hectares de forêts disparaissent selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), l’altération des habitats forestiers, l’agriculture et l’élevage intensif en Malaisie ont ainsi créé les conditions de la transmission de ce virus (là aussi responsable d’une détresse respiratoire et d’encéphalites et mortel dans 40 % des cas) de la chauve-souris vers l’homme. La destruction de l’habitat naturel de ces mammifères – ou selon les mots du professeur d’écologie à l’University College de Londres Kate Jones, « le changement d’affectation des terres » – a rapproché ces derniers des activités humaines dont l’élevage de porcs, eux-mêmes vecteurs de transmission de pathogènes vers l’homme. Fondamentalement, la crise du SARS-CoV-2 est donc l’expression du rapport catastrophique qu’entretiennent les sociétés humaines avec la biodiversité végétale et animale. La France n’est pas encore, en la matière, un modèle de protection. La pandémie ne doit ainsi pas occulter le constat sans appel dressé par les scientifiques ces dernières années et qu’il faut rappeler brièvement (I) avant de préciser le cadre juridique relatif à la biodiversité (II) et d’évoquer quelques pistes d’amélioration de notre rapport à cette dernière (III).   I. Un effondrement massif de la biodiversité que soulignent de nombreuses études scientifiques   Puisque le temps est à l’écoute des scientifiques, faisons donc de nouveau rapidement le constat déjà maintes fois illustré par les travaux portant sur ces problématiques : plus de 75 % des insectes en Europe ont disparu en 40 ans[1] – et près de deux tiers des arthropodes (en termes de populations, de nombre d’espèces et de biomasse) ont disparu en 10 ans[2] -, tout comme 25 à 30 % des oiseaux (aux États-Unis comme en Europe[3]) et plus globalement 60 % des vertébrés sauvages (mammifères, poissons, oiseaux, reptiles et amphibiens) en un demi-siècle[4]. La modulation dans la répartition des populations de poissons a réduit drastiquement le potentiel de pêche et la question de la pérennité de certains écosystèmes marins est posée[5]. À titre d’exemple, les coraux ne résisteront pas à une hausse de plus de 2°C (75 % de disparition avec une augmentation de +1,5°C, 99 % avec une hausse de +2°C)[6]. Si la préservation des espèces animales est mise en avant dans le débat public, la disparition d’un certain nombre de végétaux est également préoccupante, notamment en raison de la vitesse d’extinction. Le taux d’extinction des plantes est ainsi deux fois plus élevé qu’il ne l’était en 1900[7] – et 500 fois plus rapide que le taux d’extinction spontané des espèces – et il est désormais plausible que la planète perde un huitième des espèces végétales d’ici 2050. Les causes de cette disparition sont les mêmes que pour les animaux et sont d’origine humaine : artificialisation des sols, destruction des zones sauvages, agriculture intensive, prolongement des zones urbaines et réchauffement climatique principalement. La France n’échappe pas à cette extinction planétaire puisqu’on estime par exemple que 15 % de sa flore vasculaire (plantes à fleurs, conifères et fougères) est menacée[8]. Le dernier rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), publié en mai 2019, pointe ainsi le fait qu’un million d’espèces animales et végétales (sur 8 millions estimés) sont éteintes ou en voie d’extinction actuellement, ce qui est sans précédent dans l’histoire de la planète sur une période si courte[9]. Le nombre d’espèces menacées d’extinction, voire éteintes, est de plus appelé à augmenter très rapidement car le nombre d’individus restants par espèce est très faible. De façon schématique, le rythme d’extinction des espèces est de 100 à 1 000 fois supérieur à ce qu’il était avant le début de l’ère industrielle il y a 150 ans. À ce bilan scientifique de la perte de la biodiversité et de l’accélération de l’extinction des espèces s’ajoute un constat dramatique du manque de protection des règles juridiques de cette biodiversité. Si quelques avancées ont vu le jour au cours des dernières années, force est de constater que le droit positif n’est que peu ou pas protecteur du vivant.   II. L’absence de protection réelle du vivant par les règles juridiques   Les menaces sur le vivant ne sont pas correctement appréhendées et intégrées par les acteurs juridiques, qu’ils s’agissent des législateurs, des gouvernements, des institutions de l’Union européenne ou bien (et surtout) des juges. Le cadre juridique textuel de la biodiversité – Constitution, droit de l’Union européenne, lois et actes réglementaires – est peu protecteur car schématiquement, il est largement anthropocentré et ne prend en compte faune et flore que de manière résiduelle. Le principe de précaution, inscrit notamment à l’article 5 de la Charte de l’environnement et également présent dans le droit de l’Union européenne, n’est en rien protecteur car, fondamentalement à géométrie variable, il laisse une trop grande marge d’appréciation aux juges qui l’appliquent. Les textes actuels, et singulièrement les directives (ainsi que les lois et actes réglementaires internes qui les transposent) et règlements de l’Union européenne, ne sont également pas adaptés à l’urgence de préservation car très peu contraignants. On pense ici évidemment au règlement REACH (Enregistrement, évaluation et autorisation des substances

Par Guinard D.

8 juin 2020

Faire évoluer les outils comptables pour « réencastrer » l’activité économique dans son environnement

« La santé des écosystèmes dont nous dépendons, ainsi que toutes les autres espèces, se dégrade plus vite que jamais. Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes de nos économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier ». Ce sont les mots de Sir Robert Watson en mai 2019 à l’occasion de la sortie du rapport annuel de l’IPBES, qu’il préside. Les données sont alarmantes : plus de 500 000 espèces terrestres ont désormais un habitat insuffisant pour leur survie à long terme, 75 % du milieu terrestre et 40 % du milieu marin sont sévèrement altérés à ce jour par les activités humaines, 60 milliards de tonnes de ressources renouvelables et non renouvelables sont extraites chaque année dans le monde, une quantité qui a presque doublé depuis 1980. Aujourd’hui ces informations résonnent particulièrement : si les circonstances spécifiques d’apparition puis de transmission à l’espèce humaine du SARS-Cov-2 ne sont pas encore déterminées précisément, la réduction de l’habitat naturel des espèces par l’homme a été clairement identifiée comme un facteur de pandémies, par le passage de la barrière d’espèce des agents pathogènes qu’il permet. « La santé des écosystèmes dont nous dépendons » est une vision anthropocentrée du problème, mais convaincante : la protection et la restauration des écosystèmes répond aux besoins de conserver les services indispensables qu’ils fournissent aux sociétés humaines. En insistant sur l’érosion de ces services, Sir Robert Waltson entend promouvoir la préservation de la biodiversité non pas au regard de l’éthique mais bien d’un calcul coût-bénéfice pour les sociétés humaines. Cette perspective est défendue par les organisations internationales comme l’ONU et la Banque mondiale à travers les notions de services écosystémiques et de capital naturel. Malgré des définitions parfois variables selon les institutions, nous pourrions définir le capital naturel comme « une métaphore anthropocentrique qui illustre le rôle de la nature dans l’économie et le bien-être des êtres humains, mais ne rend pas compte de la valeur intrinsèque de la nature ».Il désigne « l’ensemble des richesses naturelles qui offrent à la société des ressources renouvelables et non renouvelables, ainsi que des services écosystémiques »[1]. De ce capital naturel dérivent des services indispensables pour les sociétés humaines, appelés services écosystémiques. Ces services sont donc un « objet frontière »[2] qui exprime la diversité des relations entre les communautés humaines et leur environnement naturel, irréductible à un fait strictement social ou écologique. Une des solutions envisagées pour améliorer la prise en compte de la biodiversité et impulser des actions ambitieuses de protection et de restauration est de remédier à l’illusion de la gratuité de ces services, d’abord en les évaluant puis en les incluant dans les systèmes de comptabilité. Ainsi la dépendance de l’activité économique au bon fonctionnement des écosystèmes serait mise en valeur et l’arbitrage entre impératif économique et protection des écosystèmes prendrait un tout autre sens. Il ne s’agit pas de monétiser, encore moins de privatiser, la biodiversité mais de définir la part de la richesse produite qui dépend directement de son existence. Mettre en perspective notre système économique au regard de ce qu’il doit au bon fonctionnement des écosystèmes est une nécessité : nous avons besoin d’un système d’information qui tienne compte des valeurs de subsistance. Il ne s’agit pas seulement de donner une équivalence dans un langage institutionnel pour faciliter la prise en compte de ces problématiques, mais de modifier notre référentiel d’analyse. Si le chantier est ambitieux, il ne doit pas faire oublier que l’évaluation du capital naturel et des services écosystémiques et son incorporation dans des systèmes de comptabilité privée ou nationale ne se substitue pas aux changements de politiques publiques, de cadre juridique (voir la note de Dorian Guinard dans ce dossier) et de systèmes productifs qu’il faut prioritairement mettre en œuvre. Ces évaluations viennent au contraire accompagner ces transformations, en modifiant les analyses prospectives et de gestion des risques ou en permettant le suivi dans le temps des mesures mises en place via l’évolution de la valeur. La valorisation n’agit pas d’elle-même, n’auto-régule pas les usages, elle n’est qu’un outil, mais un outil nécessaire, pour justifier une action ambitieuse de protection et de restauration des écosystèmes.   I. Illustrer la dépendance de l’activité économique à son environnement et remédier à une analyse économique « dématérialisée »   La tension entre la rareté de la ressource et le développement est au fondement de l’analyse économique. Dans l’analyse des classiques, la terre disponible détermine d’abord la richesse, puis les conditions de son accumulation, elle contient l’économie. David Ricardo (1772-1823) théorisait « l’état stationnaire »[3] : l’accumulation du capital s’arrête par le rendement décroissant des terres. Les Physiocrates à la même époque – et notamment François Quesnay – proposaient une vision intégrée, conscients que la première richesse est celle de la nature, source de toute production. La question des ressources naturelles devient plus importante encore à la révolution industrielle. Parmi les analyses les plus connues, William Stanley Jevons (1835-1882) publie en 1865 The Coal question. Il montre le rôle moteur joué par le charbon dans la révolution industrielle. À partir de cette analyse, Jevons avance que l’extraction de quantités croissantes du charbon entraînera un coût de plus en plus important. À terme, la compétitivité des produits britanniques pourrait être affectée. Selon Antonin Pottier[4], il s’agit là de la continuité de l’état stationnaire de Ricardo mais “en version souterraine”. C’est avec les néoclassiques que le processus économique s’émancipe, dans l’analyse, de son environnement direct. L’analyse se dématérialise[5] et se recentre sur deux facteurs de production : le capital et le travail. Les ressources, entendues au sens large comme l’ensemble des ressources naturelles pouvant intervenir directement ou indirectement dans le processus de production, comprenant les ressources hors marché, disparaissent du champ visible de l’économie. L’analyse de l’activité économique au XXe siècle se fait majoritairement « toutes choses égales par ailleurs », sans considération de l’écosystème dans lequel elle s’insère. De fait, les considérations environnementales deviennent des externalités. L’environnement n’est pas considéré comme nécessaire au développement économique, sa protection est externe et, pour des raisons non économiques, nous pourrions dire éthiques, le prix peut être modifié pour éviter, ou dédommager,

Par Gonon M., Métadier B.

4 juin 2020

Profiter de la crise pour réduire durablement nos émissions de CO2

Au plus fort du confinement, la crise du Covid-19 aura généré une baisse ponctuelle de 17 % des émissions mondiales de CO2, nous ramenant temporairement à notre niveau d’émissions de l’année 2006. La réduction sur l’année entière est attendue autour de – 4 % à – 7 % par rapport à 2019, un chiffre absolument inédit depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, mais pas suffisant cependant pour nous placer sur une trajectoire de neutralité carbone à l’horizon de la seconde moitié du siècle, qui nous commande de réduire nos émissions de 7,6 % chaque année. Devons-nous en conclure que la transition bas carbone est de fait irréaliste et non souhaitable, sauf à vouloir le chômage de masse, la restriction de nos libertés et des milliers de morts ? Ce serait faire un redoutable contresens : car s’il est bien deux choses que la crise du Covid-19 doit nous enseigner sur les sujets liés au climat, c’est, d’une part, qu’il n’existe aucune comparaison possible entre la privation de liberté que nous avons subie et la société sobre en carbone qu’il nous faudra bâtir, et, d’autre part, qu’une transition bas carbone réussie nécessitera des transformations profondes de nos systèmes énergétiques et économiques et pas seulement une modification conjoncturelle de nos comportements individuels. La crise du Covid-19 constitue ainsi un moment de bascule : elle doit nous révéler que la neutralité carbone est un impératif physique non négociable, un attracteur autour duquel nos choix collectifs devront désormais graviter. La France a une empreinte carbone importante, une responsabilité historique élevée et les moyens d’agir : elle doit donc être exemplaire aux yeux de l’Europe et du reste du monde. Il est de notre devoir de nous organiser correctement et intelligemment pour faire advenir, en l’espace d’une trentaine d’années, une société française désirable et juste, sobre dans les usages, et libérée de toute forme d’énergie fossile.   I. Le Covid-19 ne réduira que marginalement et temporairement les émissions en France a) Covid-19, confinement : quel impact sur le climat ?   Plusieurs études récentes[1],[2],[3],[4] ont estimé l’impact de la crise du Covid-19 sur les émissions mondiales de CO2. Leurs résultats, cohérents entre eux, ont mis en évidence,: une baisse ponctuelle des émissions mondiales de l’ordre de 17 % au plus fort de la crise (7 avril), nous ramenant alors temporairement à notre niveau d’émissions de 20064, où l’économie tournait alors à plein régime ; une baisse sur les 4 premiers mois de l’année de l’ordre de 7 % par rapport à la même période l’année dernière3; une baisse sur l’ensemble de l’année 2020 prévue entre 4 % et 7 % par rapport à 2019, en fonction de l’évolution de la crise dans les prochains mois4. Au total, les émissions de 2020 risquent donc d’être entre 93 % et 96 % aussi élevées que celles de 2019. Émissions mondiales de CO2 depuis l’an 2000 (gauche) et depuis le début de l’année 2020 (droite). Le creux d’émissions se situe autour du 7 avril (- 17 %). Moyenné sur l’année et selon le scénario choisi, la baisse sera de 4 à 7 %. Source : Le Quéré et al ; Global Carbon Project.   En France, vers la fin du mois de mars, le confinement aura eu pour effet de baisser ponctuellement nos émissions de CO2 domestiques de pas moins de 30 % « en instantané » par rapport au même jour l’année précédente4. Les émissions totales françaises depuis le début de l’année jusqu’au déconfinement ont baissé de 5 %4, et il est probable que la réduction sur l’année entière soit de l’ordre de 5 à 15 %[5].   Émissions de CO2 en France entre le 1er janvier et la fin du mois de mars 2020. Source : Liu et al.   Or, pour limiter le réchauffement à + 1,5°C, c’est 80 % de nos émissions de gaz à effet de serre qui doivent disparaître d’ici à 2050, soit une baisse de 5,2 % chaque année jusqu’en 2050[6]. Le programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) fixe un objectif de – 7,6 %/an sur la période 2020-2030. Les ordres de grandeur étant similaires, il est tentant de résumer que l’effort à faire pour la lutte contre le dérèglement climatique correspond à un « Covid-19 supplémentaire par an ». Il faut bien voir ici que le mot « supplémentaire » fait toute la différence : un simple « Covid-19 tous les ans » ne reviendrait qu’à maintenir le même niveau d’émissions constaté cette année jusqu’en 2050 (une baisse de 7 % la première année, puis une stagnation des émissions, car la même situation ne ferait que se reproduire année après année). Pour tenir le rythme, il faut alors imaginer qu’en 2021, la situation dure deux fois plus longtemps qu’en 2020, six fois plus longtemps en 2025, soit pendant l’année entière (si l’on considère que 2020 connaîtra deux mois de confinement). Et 2050 devrait alors être l’année… des “trente Covid” ! Si la quantification de l’action climat en “nombre de Covid” a ses limites, c’est que cette baisse radicale d’émissions reste conjoncturelle, non souhaitable et non durable.   b) Aucune analogie ne saurait être faite entre l’expérience de confinement et la “sobriété carbone”   « Still a shitty way to cut CO2 emissions », déclarait sur Twitter le Dr Simon Evans, rédacteur en chef du média Carbon Brief[7], pour relativiser les conversations traitant de la baisse d’émissions dues au Covid-19[8]. Et pour cause : outre le drame humain et sanitaire, outre le fait que ces réductions ne sont absolument pas durables (il suffit de déconfiner pour revenir à la normale), la situation de privation que nous avons vécue au cours de ces derniers mois a joui d’un ratio contrainte/efficacité désastreux, loin de l’image de la sobriété des usages que nous devons bâtir. Cette privation de liberté (de mouvement et, dans une moindre mesure, de consommation) n’est une caractéristique ni nécessaire, ni suffisante d’une sobriété carbone digne de ce nom : elle ne lui est pas nécessaire, c’est-à-dire que la sensation de privation n’est pas consubstantielle à une sobriété réussie. Les changements de comportement les plus efficaces en termes de réduction de notre empreinte sont bien plus volontiers liés à un imaginaire

Par Dugast C.

1 juin 2020

L’économie circulaire, un élément d’une politique de reconstruction écologique Le point de vue des conditions de travail et des risques professionnels

À la lecture de l’article Comment financer une politique ambitieuse de reconstruction écologique publié par Gaël Giraud, Nicolas Dufrêne et Pierre Gilbert sur le site de l’Institut Rousseau[1], ce ne sont pas tant ses aspects économiques que nous avons retenus (ils ne sont pas dans notre domaine de compétences) que l’utilisation du terme reconstruction. Il y a là en effet un écho aux réflexions que nous avait inspirées la réalisation récente d’un exercice de prospective consacré à l’économie circulaire (EC). Cette EC qui à coup sûr serait un des éléments importants dans la reconstruction écologique appelée de leurs vœux par les auteurs de l’Institut Rousseau. Nous nous proposons dans cet article, après un bref aperçu de ce que cette notion d’EC recouvre, de décrire les principaux bouleversements qui résulteraient de ce changement dans les modes et méthodes de production. La prévention des risques professionnels étant notre métier, nous insisterons également sur les évolutions des conditions de travail et leurs conséquences en termes d’accidents et de maladies professionnelles. Nous n’aborderons pas ici des considérations économiques comme le coût de la transition : à notre connaissance, les données sont très lacunaires (les auteurs de l’Institut Rousseau estiment entre 70 et 100 milliards d’euros par an les besoins annuels d’investissement supplémentaires pour mener une politique ambitieuse de reconstruction écologique en France). En revanche, il existe quelques chiffres sur les questions d’emploi. Une étude[2] estime à 600 000 le nombre d’emplois déjà liés à cette forme d’économie. Avec un potentiel supplémentaire de 200 000 à 400 000 grâce à des mesures relativement simples visant à diminuer la consommation de matières premières et d’énergie. Au Royaume-Uni, d’autres études aboutissent à 500 000. On voit donc que les conséquences humaines sont loin d’être négligeables.   Economie linéaire vs économie circulaire Les sociétés vivent principalement selon un schéma économique linéaire résumé ainsi par Rémy Le Moigne[3] : « Notre économie est ainsi basée sur le modèle linéaire qui se résume à « extraire ̶̶̶ fabriquer ̶̶̶ consommer ̶̶̶ jeter », qui consomme des ressources naturelles et de l’énergie pour fabriquer des produits qui deviendront, en fin de compte, des déchets ». En raison de ses conséquences écologiques (en particulier climatiques et environnementales) et de sa forte consommation de ressources naturelles et d’énergie, ce modèle apparaît comme peu soutenable sur le long, voire sur le moyen terme. Certains, dans une logique de protection de l’environnement, proposent de lui substituer progressivement un modèle dit d’économie circulaire, schématisé sur la Figure 1 : Figure 1 – Economie circulaire selon le schéma proposé par l’Ademe[4] Ce schéma montre clairement que la démarche va bien au-delà du simple recyclage de matière, mais concerne aussi l’organisation du tissu industriel, la conception des biens, les modes de consommation, etc.   Une reconstruction de la production Dans une logique d’économie circulaire, il devient nécessaire de concevoir autrement pour de multiples raisons : pour réduire autant que faire se peut l’utilisation de matières premières non renouvelables, pour que les biens soient plus durables et puissent être réparés au cours de leur cycle de vie (rupture en particulier avec le concept d’obsolescence programmée), pour que leur fabrication et leur utilisation nécessitent le moins d’énergie possible, pour qu’ils se prêtent à d’autres types de consommation, tels que l’économie de la fonctionnalité qui passe de la fourniture d’un bien à celui d’un service (incitant ainsi le producteur à concevoir des biens plus durables), ou la consommation collaborative (qui voit plusieurs utilisateurs se partager l’utilisation d’un même bien), pour permettre l’utilisation de matières secondaires (issues du recyclage, donc souvent d’un degré de pureté inférieur aux matières premières) ou la réutilisation d’éléments après déconstruction de biens en fin de vie, en contrepartie, les biens doivent être conçus pour que des éléments ou des parties puissent être déconstruits facilement et que si cela n’est pas possible, leurs matières soient facilement recyclables.   Une part de l’appareil de production pourra certainement être adaptée à cette nouvelle donne, mais la relocalisation de certaines productions (afin de diminuer l’empreinte carbone due aux transports) nécessitera la création de nouvelles installations. Ces installations devront intégrer dès la conception des mesures de prévention, en particulier pour toutes les opérations de maintenance, de remplacement d’éléments prévus par l’allongement de la durée de vie des outils et la recyclabilité des composants du process. Le développement de l’écologie industrielle et territoriale se donnant pour objectif la gestion en commun des flux (les déchets d’une entreprise deviennent la matière première d’une ou plusieurs autres, de préférence à proximité immédiate afin de limiter la dépense énergétique liée aux transports) pourrait aussi remodeler de façon significative le tissu industriel.   La recréation et la relocalisation de nouvelles activités Une durée de vie accrue des biens de consommation implique le développement d’activités de maintenance pour leur entretien ou leur réparation. Il faut donc que la conception ait intégré ce nouveau paramètre, mais aussi qu’une réflexion ait été menée sur la formation et les conditions de travail des travailleurs impliqués, donc sur la conception des installations dans lesquelles s’effectueront leurs interventions. Afin de diminuer la consommation énergétique, des productions devront être relocalisées : il ne sera plus possible d’expédier à l’étranger des déchets pour leur recyclage. Actuellement, la délocalisation de la fabrication de principes actifs pharmaceutiques ou celle du recyclage de métaux ferreux et non ferreux n’est pas seulement due à des questions de coût, mais aussi à des considérations de préservation de l’environnement des pays développés et de la santé et sécurité au travail de leurs travailleurs. Il est plus économique non seulement de faire travailler dans un pays sous-traitant, mais aussi d’exporter la pollution vers le territoire de ce pays sous-traitant et d’ignorer les conditions de travail des employés. Dans une logique d’économie circulaire, les nouvelles installations devront être rentables économiquement, mais également performantes pour l’environnement au sens large.   Des besoins accrus en technologies Les dernières décennies ont été marquées par une automatisation croissante des activités industrielles, mais aussi des services (à l’exception des services à la personne qui ont assez largement compensé la destruction des emplois industriels dans les pays développés). Aucun indice ne conduit

Par Héry M., Malenfer M.

29 mai 2020

Accélérer la réalisation d’une économie véritablement circulaire à grande échelle

La crise du Covid-19 vient de démontrer cruellement notre dépendance aux importations de produits stratégiques (masques, médicaments, kits de tests PCR, etc.) et renforce ce qui était identifié de longue date pour l’ensemble de nos ressources. Bien que cela ne soit qu’une de ses nombreuses vertus, l’économie circulaire a depuis quelques années été identifiée comme un moyen de réduire cette dépendance. En 2014, Janez Potočnik, ex-Commissaire européen pour l’Environnement, écrivait ainsi : « L’Europe est très dépendante des importations pour la plupart de ses ressources et les prix de ces dernières vont continuer à augmenter et devenir de plus en plus volatiles. Il y a donc un intérêt économique manifeste à utiliser plus efficacement les ressources et à réutiliser les matières – au sein d’une économie circulaire. »[1]En 2018, on peut lire dans la Feuille de route pour l’économie circulaire (FREC) française : « L’économie circulaire, c’est aussi la réduction de la dépendance de la France aux importations de matières premières et aux aléas économiques mondiaux ». L’expérience de cette crise sanitaire a également montré que la puissance publique a gardé un pouvoir essentiel, capable qu’elle a été de ralentir – certes indirectement – une machine économique réputée incontrôlable. Un système économique que l’on sait étroitement imbriqué aux systèmes politique, sociologique et technique pour former un hyper-système global complexe, soumis à des changements environnementaux (climat, biodiversité) induits aussi bien que subis. Le constat est désormais connu : ce système n’est pas viable et a atteint voiredépassé certaines limites planétaires[2]. La cause principale en est aussi identifiée : une économie dite linéaire, consistant à extraire, fabriquer, consommer et jeter. L’économie circulaire est pensée dès l’origine comme une alternative au système économique linéaire, un changement systémique volontariste permettant de revenir dans l’enveloppe de ces limites planétaires et de viabiliser notre système global. En Europe et en France ont été lancées depuis une dizaine d’années des politiques visant à sortir de l’économie linéaire, mais nous semblons aujourd’hui « coincés » à un stade précoce de l’économie circulaire. Un stade trop précoce car porteur d’un possible effet pervers : servir de façade à la poursuite du « business as usual » de l’économie linéaire. La crise de 2020 peut-elle être un catalyseur de l’accélération vers plus de circularité véritable ? Nous allons tenter de répondre à cette question en posant, dans un premier temps, les éléments d’une définition complète de l’économie circulaire, indispensable à la préservation du concept fondateur (I), en exposant les étapes théoriques de mise en place de l’économie circulaire (II), en précisant le stade actuel de cette mise en place en Europe et en France (III), en analysant les causes de son ralentissement à un stade encore trop précoce (IV), en identifiant les domaines déterminants d’une accélération souhaitée (V) et l’acteur-clé que constitue l’État (VI) et enfin en examinant la question spécifique de la relocalisation d’activités industrielles (VII). Au fil du texte, nous formulerons des propositions qui nous semblent essentielles pour accélérer la réalisation d’une économie véritablement circulaire à grande échelle. Pour une définition complète de l’économie circulaire   L’économie circulaire est un concept ayant émergé à la toute fin des années 1980[3] comme une alternative, inspirée par le fonctionnement des écosystèmes, à l’économie linéaire extractive et prédatrice. Il n’a cessé d’évoluer depuis et, probablement à cause de sa relative jeunesse, n’est pas encore stabilisé, ni en théorie, ni en pratique, ce qui lui fait courir le risque d’être mal interprété voire détourné[4]. Kirchherr et collaborateurs démontrent en particulier que le concept d’économie circulaire est trop souvent réduit à deux dimensions : le recyclage des déchets et la prospérité économique. L’économie circulaire, dans cette formulation « faible », ne répond plus alors à ses objectifs premiers de soutenabilité et d’équité intergénérationnelle.   Proposition 1 : Adopter collectivement une définition claire, complète et « forte » de l’économie circulaire, associée à la réduction des flux (en particulier à la réduction de la consommation des ressources) dans l’objectif, à terme, d’un retour à l’intérieur des limites planétaires et ne permettant pas une interprétation « faible » légitimant la poursuite d’un modèle qui resterait essentiellement linéaire. Proposition 2 : Inscrire cette définition dans un cadre stratégique national aussi bien qu’européen, avec des objectifs chiffrés explicites mettant l’accent sur la réduction de la consommation des ressources. Nous proposons ci-dessous les éléments que toute définition complète du concept devrait inclure en nous inspirant du travail de Kirchherr et collaborateurs et en y apportant quelques compléments. Les objectifs de l’économie circulaire en termes de soutenabilité : aller vers une économie sobre en ressources naturelles difficilement ou non renouvelables (dans le cadre d’un modèle de soutenabilité dite «faible[5] »), voire totalement dénuée de prélèvements de ressources non renouvelables (dans le cadre d’un modèle de soutenabilité dite « forte »), sobre en énergie, à bas carbone et à faible impact sur les écosystèmes, jusqu’à revenir dans le domaine intérieur des limites planétaires (empreinte écologique ne dépassant pas une planète) ; en assurant la prospérité économique nécessaire au bien-être des citoyens, en particulier en termes de santé, d’emploi et de sécurisation des sources d’approvisionnement; en garantissant la justice sociale[6]; en préservant la qualité de vie des générations futures.   Les principes opérationnels de l’économie circulaire : le cadre hiérarchisé de la gestion des déchets, permettant de boucler les cycles de matière et de réduire la consommation des ressources : par ordre de préférence (1) réduction des déchets et du gaspillage, (2) extension de la durée de vie des produits par réparation et maintenance, réutilisation et réemploi[7], (3) valorisation des matières par recyclage[8], (4) valorisation énergétique[9]. Ce cadre hiérarchique est souvent représenté comme une série de “R” (pour réduire, réparer, réutiliser, recycler, etc.) dont le nombre varie d’une publication à l’autre ; l’approche systémique multi-échelle: mise en œuvre de la circularité à l’échelle (1) des micro-systèmes (échelle des entreprises, des produits, des consommateurs), (2) des méso-systèmes (échelle des villes, des territoires, des plateformes industrielles, des régions), (3) des macro-systèmes (échelle nationale, continentale et globale)[10].   Les acteurs de la mise en œuvre de l’économie circulaire : les pouvoirs publics, par leur rôle normatif et incitatif à l’échelle nationale et de mise en œuvre à l’échelle descollectivités

Par Duquennoi C.

29 mai 2020

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