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Un plan d’urgence pour l’agriculture française et pour une alimentation saine et abordable

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Un plan d’urgence pour l’agriculture française et pour une alimentation saine et abordable

Fiche thématique de résistance et de proposition n°9

I. Un peu de contexte : quel est le problème ?

Les exploitants agricoles sont en majorité précaires : 1/3 ont des revenus inférieurs à 12 000 €/an sur la dernière décennie et la majorité n’atteint pas le Smic horaire, même si les écarts sont importants entre les types et tailles d’exploitations (voir la synthèse des revenus agricoles de l’INRAE).

Or les aides de la politique agricole commune (PAC) baissent fortement en euros constants par rapport à la période 2014-2020 (elles n’ont pas évolué malgré une inflation de 30% des prix depuis). La PAC baisse également dans le budget de l’Union européenne (UE), de 66% du budget au début des années 1980 à 31% pour la dernière période 2021-2027. Ces aides, essentiellement distribuées en fonction des surfaces cultivées, sont très inégalement réparties : en France, les 20% plus importants bénéficiaires – qui sont les plus gros exploitants – ont perçu plus de 50% de ces aides bé(voir diagnostic PSN pp. 3 et 7). Ce système favorise ainsi une agriculture agro-industrielle intensive employant peu de main-d’œuvre, au détriment des pratiques plus respectueuses de l’environnement.

De plus, les agriculteurs français sont exposés à une hausse des importations qui ne respectent pas les mêmes normes environnementales et/ou sociales, notamment de pays tiers autorisant l’usage d’intrants (pesticides, médicaments, etc.) interdits en Europe, mais aussi de certains pays de l’UE (principalement en raison des préférences « low cost » des industriels et de la restauration collective).  

Ces trop faibles soutiens publics, cette concurrence déloyale et l’absence de régulation des prix freinent la diffusion des pratiques agro-écologiques. Pourtant, les dernières recherches de l’INRAE montrent que l’agroécologie est plus résiliente face au changement climatique (sécheresses croissantes, pluies intenses, etc.). Elle est aussi plus respectueuse de la biodiversité (qui a chuté de 80% en 30 ans pour les insectes, principalement à cause des pesticides) et de la santé humaine, notamment des agriculteurs.

II. Que propose-t-on ?

  • Augmenter l’enveloppe de la PAC de +30% (+3 Mds/an pour la France à partir de 2028) en doublant les aides aux pratiques agro-écologiques pour s’aligner sur les montants d’aides des pays européens ou l’agriculture biologique est la plus développée (e.g. plusieurs régions d’Italie, le Danemark ou le Portugal).
  • Revaloriser les aides aux revenus des agriculteurs (en prenant en compte l’inflation depuis 2020) et les distribuer non plus en fonction de la surface mais de la quantité de main-d’œuvre afin de favoriser les petites et moyennes exploitations ainsi que les modes de production les plus agro-écologiques qui créent davantage d’emplois.
  • Subventionner la nourriture saine pour la rendre plus abordable pour tous, en diffusant progressivement des « chèques alimentation de qualité ». Ces aides doivent être réservées aux aliments bio ou extensifs, aux prix conventionnés, produits en France ou à proximité. Le montant des chèques doit être indexé sur le revenu et la taille des ménages.
  • Systématiser l’utilisation des clauses de sauvegarde et l’étiquetage de l’ensemble des lieux de production agro-industriels, afin d’interdire en France et dans les pays importateurs les produits les plus dangereux et/ou polluants.
  • Réguler les marges des intermédiaires de l’industrie agro-alimentaire (en forte hausse depuis 2022) et de la grande distribution, en s’appuyant sur les prix de référence de l’Observatoire des prix et marges.

 

Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet :  

  • Engager les négociations commerciales en garantissant un prix plancher et rémunérateur aux agriculteurs et en taxant les superprofits des agro-industriels et de la grande distribution (p.4) 
  • Proposer une réforme de la PAC (p.5 et p.22)
  • Défendre les zones agricoles, naturelles et les zones humides, doubler et améliorer la protection des aires maritimes protégées (p.17)
  • Pour une agriculture écologique et paysanne (p.18)
  • Annuler l’accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (CETA) ; renoncer à l’accord du Mercosur et protéger nos agriculteurs de la concurrence déloyale
  • Interdire l’importation de toute production agricole ne respectant pas nos normes sociales et environnementales
  • Lutter contre l’accaparement des terres et permettre à chaque agriculteur qui souhaite s’installer d’accéder à une exploitation pour préserver le modèle agricole familial
  • Soutenir la filière du bio et l’agroécologie, encourager la conversion en bio des exploitations en reprenant leur dette dans une caisse nationale et garantir un débouché aux produits bio dans la restauration collective
  • Rétablir le plan Écophyto, interdire le glyphosate et les néonicotinoïdes avec accompagnement financier des paysans concernés

III. Que peuvent y gagner les citoyens ?

  • Une augmentation des revenus de la majorité des agriculteurs, en particulier des éleveurs et des petites et moyennes exploitations.
  • Une forte diffusion des aliments sains et de qualité et la réduction des aliments ultra-transformés, dont les impacts sanitaires sont majeurs (diabète, cancers, etc.) et qui dépassent déjà 40% de l’alimentation des ménages modestes et des jeunes.
  • La revitalisation des territoires ruraux et le développement de centaines de milliers d’emplois agricoles grâce à la plus forte densité en main d’œuvre des pratiques agro-écologiques (+10 à +20% d’emplois à pratique et taille égale, selon Agreste 2016 et Bertin & al 2016).
  • Une plus grande souveraineté alimentaire, en réduisant fortement la dépendance extérieure en matière d’importation d’aliments (en forte hausse), mais également d’engrais et de soja nécessaires aux pratiques intensives (une dépendance croissante soulignée notamment par le Haut Commissariat au Plan en 2021).

IV. Pourquoi l’extrême-droite n’est pas la solution ? 

  • Le RN ne remet pas en cause la distribution des aides de la PAC en fonction de la surface et soutient donc les plus gros exploitants (notamment céréaliers) au détriment des éleveurs et des petits exploitants.
  • En dehors des « 80% de produits français dans les cantines », les propositions « agriculture » ne sont pas précisées dans les 22 mesures pour 2022 de Marine Le Pen. 
  • Aucune proposition pour soutenir les agriculteurs dans la transition écologique et faire face aux changements climatiques (sécheresse, inondations etc.). 
  • Aucune proposition pour protéger la santé des agriculteurs et des consommateurs face aux pesticides.
  • Aucune proposition pour faire face à l’effondrement de la biodiversité.

V. Pour aller plus loin dans la réflexion 

 

Publié le 3 juillet 2024

Un plan d’urgence pour l’agriculture française et pour une alimentation saine et abordable

Auteurs

Guillaume Kerlero de Rosbo
Ingénieur diplômé de l'Agro Paris et des Mines de Paris, Guillaume Kerlero de Rosbo est expert de la transition énergétique et écologique, après 10 ans de conseil en stratégie sur ces questions. Il est également passionné par les enjeux de justice sociale, qui ne peuvent être traitées séparément des enjeux écologiques. Il dirige les études autour des questions écologiques au sein de l'institut.

Nicolas Desquinabo
Nicolas Desquinabo, expert indépendant en évaluation de politiques publiques, ancien directeur du Master Evaluation et suivi des politiques publiques de Sciences-Po Lyon.

Fiche thématique de résistance et de proposition n°9

I. Un peu de contexte : quel est le problème ?

Les exploitants agricoles sont en majorité précaires : 1/3 ont des revenus inférieurs à 12 000 €/an sur la dernière décennie et la majorité n’atteint pas le Smic horaire, même si les écarts sont importants entre les types et tailles d’exploitations (voir la synthèse des revenus agricoles de l’INRAE).

Or les aides de la politique agricole commune (PAC) baissent fortement en euros constants par rapport à la période 2014-2020 (elles n’ont pas évolué malgré une inflation de 30% des prix depuis). La PAC baisse également dans le budget de l’Union européenne (UE), de 66% du budget au début des années 1980 à 31% pour la dernière période 2021-2027. Ces aides, essentiellement distribuées en fonction des surfaces cultivées, sont très inégalement réparties : en France, les 20% plus importants bénéficiaires – qui sont les plus gros exploitants – ont perçu plus de 50% de ces aides bé(voir diagnostic PSN pp. 3 et 7). Ce système favorise ainsi une agriculture agro-industrielle intensive employant peu de main-d’œuvre, au détriment des pratiques plus respectueuses de l’environnement.

De plus, les agriculteurs français sont exposés à une hausse des importations qui ne respectent pas les mêmes normes environnementales et/ou sociales, notamment de pays tiers autorisant l’usage d’intrants (pesticides, médicaments, etc.) interdits en Europe, mais aussi de certains pays de l’UE (principalement en raison des préférences « low cost » des industriels et de la restauration collective).  

Ces trop faibles soutiens publics, cette concurrence déloyale et l’absence de régulation des prix freinent la diffusion des pratiques agro-écologiques. Pourtant, les dernières recherches de l’INRAE montrent que l’agroécologie est plus résiliente face au changement climatique (sécheresses croissantes, pluies intenses, etc.). Elle est aussi plus respectueuse de la biodiversité (qui a chuté de 80% en 30 ans pour les insectes, principalement à cause des pesticides) et de la santé humaine, notamment des agriculteurs.

II. Que propose-t-on ?

  • Augmenter l’enveloppe de la PAC de +30% (+3 Mds/an pour la France à partir de 2028) en doublant les aides aux pratiques agro-écologiques pour s’aligner sur les montants d’aides des pays européens ou l’agriculture biologique est la plus développée (e.g. plusieurs régions d’Italie, le Danemark ou le Portugal).
  • Revaloriser les aides aux revenus des agriculteurs (en prenant en compte l’inflation depuis 2020) et les distribuer non plus en fonction de la surface mais de la quantité de main-d’œuvre afin de favoriser les petites et moyennes exploitations ainsi que les modes de production les plus agro-écologiques qui créent davantage d’emplois.
  • Subventionner la nourriture saine pour la rendre plus abordable pour tous, en diffusant progressivement des « chèques alimentation de qualité ». Ces aides doivent être réservées aux aliments bio ou extensifs, aux prix conventionnés, produits en France ou à proximité. Le montant des chèques doit être indexé sur le revenu et la taille des ménages.
  • Systématiser l’utilisation des clauses de sauvegarde et l’étiquetage de l’ensemble des lieux de production agro-industriels, afin d’interdire en France et dans les pays importateurs les produits les plus dangereux et/ou polluants.
  • Réguler les marges des intermédiaires de l’industrie agro-alimentaire (en forte hausse depuis 2022) et de la grande distribution, en s’appuyant sur les prix de référence de l’Observatoire des prix et marges.

 

Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet :  

  • Engager les négociations commerciales en garantissant un prix plancher et rémunérateur aux agriculteurs et en taxant les superprofits des agro-industriels et de la grande distribution (p.4) 
  • Proposer une réforme de la PAC (p.5 et p.22)
  • Défendre les zones agricoles, naturelles et les zones humides, doubler et améliorer la protection des aires maritimes protégées (p.17)
  • Pour une agriculture écologique et paysanne (p.18)
  • Annuler l’accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (CETA) ; renoncer à l’accord du Mercosur et protéger nos agriculteurs de la concurrence déloyale
  • Interdire l’importation de toute production agricole ne respectant pas nos normes sociales et environnementales
  • Lutter contre l’accaparement des terres et permettre à chaque agriculteur qui souhaite s’installer d’accéder à une exploitation pour préserver le modèle agricole familial
  • Soutenir la filière du bio et l’agroécologie, encourager la conversion en bio des exploitations en reprenant leur dette dans une caisse nationale et garantir un débouché aux produits bio dans la restauration collective
  • Rétablir le plan Écophyto, interdire le glyphosate et les néonicotinoïdes avec accompagnement financier des paysans concernés

III. Que peuvent y gagner les citoyens ?

  • Une augmentation des revenus de la majorité des agriculteurs, en particulier des éleveurs et des petites et moyennes exploitations.
  • Une forte diffusion des aliments sains et de qualité et la réduction des aliments ultra-transformés, dont les impacts sanitaires sont majeurs (diabète, cancers, etc.) et qui dépassent déjà 40% de l’alimentation des ménages modestes et des jeunes.
  • La revitalisation des territoires ruraux et le développement de centaines de milliers d’emplois agricoles grâce à la plus forte densité en main d’œuvre des pratiques agro-écologiques (+10 à +20% d’emplois à pratique et taille égale, selon Agreste 2016 et Bertin & al 2016).
  • Une plus grande souveraineté alimentaire, en réduisant fortement la dépendance extérieure en matière d’importation d’aliments (en forte hausse), mais également d’engrais et de soja nécessaires aux pratiques intensives (une dépendance croissante soulignée notamment par le Haut Commissariat au Plan en 2021).

IV. Pourquoi l’extrême-droite n’est pas la solution ? 

  • Le RN ne remet pas en cause la distribution des aides de la PAC en fonction de la surface et soutient donc les plus gros exploitants (notamment céréaliers) au détriment des éleveurs et des petits exploitants.
  • En dehors des « 80% de produits français dans les cantines », les propositions « agriculture » ne sont pas précisées dans les 22 mesures pour 2022 de Marine Le Pen. 
  • Aucune proposition pour soutenir les agriculteurs dans la transition écologique et faire face aux changements climatiques (sécheresse, inondations etc.). 
  • Aucune proposition pour protéger la santé des agriculteurs et des consommateurs face aux pesticides.
  • Aucune proposition pour faire face à l’effondrement de la biodiversité.

V. Pour aller plus loin dans la réflexion 

 

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