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Le laboratoire d’idées de la reconstruction écologique et républicaine

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Transformer et revaloriser la police pour renouer la confiance avec les citoyens

Fiche thématique de résistance et de proposition n°7 I. Un peu de contexte : quel est le problème ? Ces dernières années ont vu progresser la défiance de la population envers l’institution policière. En particulier, un jeune sur deux n’a plus confiance en sa police. Ce rejet s’explique notamment par le choix politique d’un modèle répressif de sécurité publique par les gouvernements successifs, matérialisé par la militarisation des forces de l’ordre, et par l’imposition d’une doctrine de maintien de l’ordre répressive. Ces politiques, inefficaces quant à leurs effets sur la délinquance, ont en revanche contribué à alimenter les tensions avec les citoyens et ont constitué un terreau fertile à la progression des violences policières, problématique de nature institutionnelle. Le traitement insuffisant de ces violences illégitimes alimente par ailleurs la défiance des citoyens dans l’institution. Dans le même temps, l’application du paradigme néolibéral à la police, via la politique du chiffre et les coupes budgétaires, a profondément déprécié les fonctions policières, suscitant du mal-être chez les forces de l’ordre et une inadéquation des moyens aux besoins de la lutte contre la criminalité. II. Que propose-t-on ? Renouer la confiance avec les citoyens en rétablissant la police de proximité; Renouveler la doctrine de maintien de l’ordre et mieux lutter contre les violences policières; Mieux allouer les personnels et les moyens pour améliorer l’attractivité des fonctions et l’efficacité de l’action. Pour atteindre ces objectifs, nous proposer de mettre en place les mesures suivantes : Renouer la confiance avec les citoyens Rétablir la police de proximité, supprimée en 2003 alors qu’elle était plébiscitée par les élus, pour qu’elle redevienne un “capteur d’information” permettant une meilleure connaissance du terrain et des habitants par les forces de l’ordre ; Les effectifs de cette police de proximité proviendront de nouveaux recrutements, mais également de l’intégration des polices municipales au sein de la police nationale. Cette réforme sera accompagnée de la suppression des brigades anti-criminalité, dont l’action est contre-productive. Mettre en place le récépissé lors des contrôles d’identité, les enquêtes de terrain ayant objectivé l’existence de discriminations à l’égard des personnes racisées à l’occasion de ces contrôles. La mise en place du récépissé, sur le modèle espagnol, s’impose pour garantir les droits des citoyens. Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet : Rétablir de la police de proximité Mettre en place les récépissés pour les contrôles d’identité 2- Renouveler la doctrine de maintien de l’ordre et mieux lutter contre les violences policières Revoir la doctrine de maintien de l’ordre : une nouvelle doctrine de maintien de l’ordre sera élaborée, s’inspirant de modèles étrangers (projet GODIAC) et de principes oubliés tels que la désescalade ou la mise à distance. Elle reposera sur les piliers suivants : Choisir le maintien à distance avec les manifestants plutôt que la maximisation des interpellations; Imposer, en matière de maintien de l’ordre, un juste niveau d’emploi de la force, notamment par l’interdiction du lanceur de balles de défense, la suspension de l’utilisation des grenades, la dissolution des BRAV-M, et la hausse des effectifs de CRS et d’EGM. Créer une autorité indépendante extérieure chargée de la déontologie policière, ayant vocation à remplacer l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) et l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), trop dépendantes à l’égard du pouvoir exécutif ; Améliorer le traitement judiciaire des violences policières, par la pratique plus fréquente du dépaysement et de l’ouverture d’une information judiciaire, permettant une plus grande indépendance à l’égard du pouvoir exécutif. Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet : Mettre en place un nouveau code de déontologie, supprimer l’IGPN et l’IGGN 3- Mieux affecter les moyens pour améliorer l’attractivité de fonctions et l’efficacité de l’action Améliorer la qualité de la formation et du recrutement en reconstituant une Direction centrale du recrutement et de la formation au sein de la Direction générale de la police nationale, en développant les partenariats avec les instituts de recherche en sciences humaines et sociales, et en renforçant la place de la déontologie et des libertés fondamentales dans la formation initiale et continue ; Améliorer la vie des policiers en augmentant les indemnités et en facilitant l’accès au logement en cas d’affectation en zone sensible ; Favoriser le déploiement du cycle de travail “vacation forte” dans la police, accordant aux agents un week-end sur deux de repos contre une sur six pour le cycle classique; Assurer une répartition optimale des effectifs de forces de l’ordre sur le territoire, par une procédure d’affectation permettant une plus grande transparence et se fondant sur l’étude des indicateurs de délinquance, pour éviter les sous-effectifs ; Rompre définitivement avec la politique du chiffre, en révisant le mode de calcul de l’indemnité de responsabilité et de performance, pour cesser de sacraliser le nombre d’interpellations et faire en sorte qu’il devienne plus intéressant d’enquêter sur le haut du spectre de la délinquance que d’arrêter des petits revendeurs de produits stupéfiants ; Revenir sur la réforme de la police judiciaire de 2023, pour rendre leur autonomie et leur indépendance aux unités de police judiciaire par rapport à la voie publique, et sacraliser les moyens consacrés à la filière investigation. Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet : Supprimer la réforme Darmanin de la police judiciaire et augmenter les effectifs de police judiciaire III. Que peuvent y gagner les citoyens ? Le Rassemblement national propose d’introduire une présomption de légitime défense en faveur des policiers et des gendarmes : cela rendrait beaucoup plus complexe le travail de la justice, mais surtout entraînerait la multiplication des tirs et des homicides policiers en décomplexant l’usage des armes ; Le RN défend le retour des peines planchers et le recours massif à des courtes peines d’emprisonnement : contraires au principe d’individualisation des peines, celles-ci interdisent aux magistrats d’adapter au mieux la peine à la situation des prévenus. Il a été démontré que ces peines favorisent la récidive en désinsérant les condamnés ; Le RN préconise la fin de l’aménagement des peines : là encore, cette proposition

Par Coué H., Lefebvre F.

28 juin 2024

Une fiscalité réformée et délibérative pour assurer la justice sociale

Fiche thématique de résistance et de proposition n°6 I. Un peu de contexte : quel est le problème ? La progressivité du système fiscal français, et singulièrement de l’impôt sur le revenu, n’est plus assurée en raison de plus de 400 dispositifs d’optimisation fiscale, de crédits d’impôt et de niches fiscales, dont certains bénéficient même spécifiquement aux activités fossiles. De plus, la possibilité depuis 2018 de sortir les revenus du capital du barème progressif participe à ce décalage. Enfin, l’existence de tranches arbitraires au lieu d’un impôt continu réduit la possibilité d’une réelle progressivité et mène à des effets de seuil juste avant le changement de tranche. La fiscalité souffre également d’une grande complexité dans son fonctionnement et d’une grande opacité dans sa détermination qui obèrent tant son efficacité que son appropriation légitime et démocratique par les citoyens et le débat public à son sujet, comme l’illustre la confusion entre taux marginal (s’appliquant sur la tranche) et taux effectif (sur l’ensemble de l’assiette fiscale). La concentration des prélèvements obligatoires sur les classes moyennes et le travail conduit par ailleurs à négliger des sources de revenus potentiels issus du capital et de ses revenus, ainsi que des plus aisés, et conduit à un sous-financement des services publics. Par conséquent, l’État est contraint à des mesures de restriction budgétaire et d’endettement, lesquelles sont également limitées par les traités européens. II. Que propose-t-on ? 1) Réformer l’impôt sur le revenu en lui substituant un impôt abc. Cet impôt sans tranche mais continu, proposé par l’Institut Rousseau en 2021, se fonde sur un taux effectif déterminé par seulement trois paramètres : « a » (taux d’imposition effectif maximum), « b » (revenu imposable minimum) et « c » (coefficient déterminant la progressivité de l’impôt) – simulateur disponible. Son caractère continu le rend particulièrement juste, en individualisant le barème à chaque contribuable et en assurant une progressivité pleine et entière, tout en évitant les effets de seuil. Par ailleurs, contrairement à l’impôt actuel, il n’assure pas seulement une progressivité faible en assurant que le taux effectif ne peut pas baisser avec le revenu, mais également une progressivité forte, le taux marginal ne pouvant pas diminuer non plus. Ce barème peut être appliqué à tout type d’impôt : droits de succession, impôt sur les sociétés, ou bien encore impôt sur les plus-values financières qui aujourd’hui est une flat tax. Sa grande modularité permet toute répartition de la charge fiscale. À titre d’exemple, l’Institut Rousseau propose comme réforme fiscale pour l’impôt sur le revenu avec abc (50 % pour le taux d’imposition effectif maximum, 1421 € pour le revenu imposable minimum) permettant d’obtenir un impôt bien plus progressif, et progressif au sens fort, se concentrant sur les hauts revenus, pour une recette fiscale équivalente à celle de 2021 : 2) Niches fiscales, revenus du capital, taxe sur les transactions financières et impôt universel « anti-évasion » Réévaluer et supprimer une grande majorité des plus de 400 niches fiscales qui nuisent à l’effet redistributif. En priorité, celles faisant que la moitié des allègements ait été captée par 9 % des contribuables en 2019 – soit 7 milliards sur 14 milliards – ainsi que les 15,9 milliards d’euros de dépenses fiscales en 2019 défavorables au climat (pour 2,9 milliards de dépenses favorables, (I4CE, 2019)) afin de créer des incitations pour la transition écologique. Introduire, à travers l’impôt abc, de la progressivité dans l’imposition des revenus du capital, notamment des plus-values de biens mobiliers, en substitut au prélèvement forfaitaire unique (PFU), flat tax de 12,8 % qui permet la sortie des revenus du capital du barème progressif alors même que ces derniers représentent 80 % des revenus des 0,01 % les plus riches. Augmenter le taux de la taxe sur les transactions financières (TTF, dite « taxe Tobin ») de 0,3 % à 0,5 %, à l’image du Royaume-Uni où cette taxe existe depuis des siècles sans avoir nui à la City tout en ayant un important effet redistributif avec peu de distorsions (Capelle-Blancard, 2023). De plus, l’appliquer aux produits dérivés ainsi qu’aux transactions intra-quotidiennes (60 % à 70 % des transactions) et non pas seulement aux transferts de propriété augmenterait les recettes en plus de renforcer la transparence sur les marchés financiers (appliqué au G20, cela représenterait pour la France un produit de 10,7 milliards). Enfin, doubler le taux sur les transactions de gré à gré, comme l’Italie, réduirait les risques financiers. Enfin, appliquer un impôt universel sur la nationalité, « anti-évasion » à l’image des États-Unis depuis la guerre de Sécession et permis par la coopération internationale entre les administrations fiscales, abattrait la barrière floue entre exil fiscal et optimisation fiscale, en addition au redéploiement de l’exit tax. Pour ne pas être redondant, il consisterait en la différence entre l’imposition étrangère et le taux effectif français, avec une exemption nationale en cas d’impôt étranger supérieur. Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet : Refuser les contraintes austéritaires du pacte budgétaire Adopter un projet de loi de financement rectificative le 4 août, pour se doter d’une politique fiscale juste avec notamment les mesures suivantes Accroître la progressivité de l’impôt sur le revenu à 14 tranches Rendre la CSG progressive Rétablir un impôt de solidarité sur la fortune (ISF) renforcé avec un volet climatique Supprimer la flat tax et rétablir l’exit tax Supprimer les niches fiscales inefficaces, injustes et polluantes Réformer l’impôt sur l’héritage pour le rendre plus progressif en ciblant les plus hauts patrimoines et instaurer un héritage maximum Instaurer une taxe kilométrique sur les produits importés Taxer les plus riches au niveau européen pour augmenter les ressources propres du budget de l’Union européenne Généraliser de la taxation des superprofits au niveau européen Passer au vote à la majorité qualifiée au conseil pour les questions fiscales III. Que peuvent y gagner les citoyens ? Une réduction de la charge fiscale des classes moyennes et une répartition bien plus juste, progressive et plus efficace de l’impôt, pour des recettes fiscales équivalentes ou supérieures et sans

Par Souffron C., Hannat P.

25 juin 2024

Reconstruire l’école pour les citoyens

Fiche thématique de résistance et de proposition n°5 I. Un peu de contexte : quel est le problème ? Une formation scolaire de qualité est essentielle pour le développement du pays et la construction d’une nation faite de citoyens émancipés, responsables et capables de prendre en main leur avenir collectif. Le métier d’enseignant connaît une crise de recrutement sans précédent, dûe notamment à la détérioration progressive de son attractivité depuis plusieurs années et à des réformes successives. Celles-ci furent imposées sans concertation et ont abîmé le sens du métier tout comme la relation à l’institution : Le personnel éducatif, et particulièrement les enseignants, a vu son pouvoir d’achat drastiquement baisser depuis 40 ans. Ils sont désormais les fonctionnaires les moins bien rémunérés de la fonction publique (en 2023, un enseignant touchait en moyenne 969 € net de moins qu’un fonctionnaire d’État de même catégorie), malgré leur mission des plus essentielles. Ils sont en outre payés nettement moins en France qu’en moyenne dans l’OCDE (-7 % en salaire statutaire brut en début de carrière, -22 % en milieu de carrière tous corps confondus, avec d’importantes disparités). Le trop grand nombre d’élèves par classe nuit à l’apprentissage et aux conditions de travail des enseignants (moyenne de 26 élèves par classe au collège, contre 21 en moyenne dans l’Union européenne). La réforme du lycée et celle du choc des savoirs réduisent la liberté pédagogique des enseignants et réduisent le métier d’enseignant à une fonction d’exécutant, aggravant la crise de confiance entre le personnel éducatif et leur hiérarchie. Le contrôle continu au lycée a aussi fracturé le lien entre enseignants et parents, soumettant les premiers aux pressions des seconds. La formation des enseignants, initiale comme continue, est très en deçà des besoins et de ce qui se fait dans les autres pays européens. En parallèle, le système éducatif devient de plus en plus inégalitaire et souffre d’un séparatisme social important, qui nuit à la cohésion sociale et nationale. Il pénalise ainsi les élèves issus des familles les plus défavorisées ; il reproduit et creuse les inégalités.On sait que la proportion des élèves issus des catégories populaires est nettement plus importante dans le lycée professionnel (avec un indice de position sociale de 87 en 2022) que dans le lycée général et technologique (IPS de 114 en 2022). Ce phénomène se matérialise notamment à travers la scolarisation des élèves dans les établissements privés sous contrat pour échapper aux mesures de mixité scolaire. La part d’enfants issus de familles favorisées est deux fois plus importante dans les établissements privés sous contrat que dans les établissements publics. Un tel phénomène peut cependant être combattu, les établissements privés sous contrats étant financés aux trois quarts par l’argent public. La plateforme Parcoursup, qui définit l’orientation post-bac des étudiants selon un fonctionnement totalement opaque, a de plus aggravé le tri social des élèves dans le supérieur. Enfin, l’offre de formation est actuellement insuffisante et inadaptée aux défis de la réindustrialisation de la France et de la transition écologique. II. Que propose-t-on ? 1- Améliorer les conditions d’enseignement et les salaires, revaloriser le métier d’enseignant Affirmer la volonté de la réussite de tous les élèves, leur épanouissement et garantir la liberté pédagogique des enseignants. Reconnaître leur expertise et redonner du sens au métier de professeur. Soutenir cette vision en rénovant la formation initiale sur la base de l’expérience des enseignants et des travaux de recherche scientifique. Mettre en place une formation continue des enseignants et une entrée dans le métier plus progressive. Revaloriser le salaire des enseignants, avec une refonte de la grille indiciaire qui établit le salaire des fonctionnaires en fonction de leur grade et de leur ancienneté. Le salaire enseignant doit, d’ici la fin de la législature, atteindre la rémunération moyenne des autres fonctionnaires de catégorie A (3050€ net en moyenne contre 2700€ pour les enseignants selon des chiffres de l’INSEE de 2023). Il faut également indexer le salaire de tous les fonctionnaires sur l’inflation. Réduire le nombre d’élèves par classe pour améliorer les conditions de travail des enseignants. L’objectif serait d’atteindre les moyennes européennes (19 élèves par classe dans l’élémentaire, 21 au collège) Au lycée, où le nombre d’élèves par classe atteint généralement les 35 voire plus, il serait bon de fixer un plafond de 30 élèves. Créer des places et des postes dans l’enseignement supérieur.   2 – Lutter efficacement contre la ségrégation scolaire Mener une politique publique de lutte contre la ségrégation en favorisant la mixité sociale à l’aide de la carte scolaire, en respectant les spécificités territoriales et en mobilisant l’ensemble des acteurs éducatifs (parents, enseignants, rectorat, élus locaux). Développer des secteurs multi-collèges pour favoriser la mixité scolaire, comme le permet la loi du 8 juillet 2013. Un tel dispositif de création de secteurs communs à plusieurs établissements scolaires est déjà mené à Paris depuis 2017 et connaît un bilan positif. Réviser les conventions régissant les établissements privés sous contrat. Moduler les dotations et financement public en fonction du respect d’obligations et d’objectifs de mixité sociale. Abroger Parcoursup. Rétablir comme unique critère de sélection pour l’entrée dans les études supérieures le baccalauréat, examen égalitaire et impartial (ce qu’il a cessé d’être depuis l’instauration du contrôle continu). Abroger la loi « choc des savoirs » qui va transformer les collèges en usines à gaz ingouvernables et qui entérine le séparatisme scolaire et social.   3 – Construire une école qui répond aux grands enjeux contemporains Mettre le lycée professionnel au cœur de la formation des métiers de la transition écologique. Le valoriser en tant que filière essentielle, d’excellence et de plein choix et non comme une orientation par défaut. Rétablir des heures d’enseignement général au sein des séries professionnelles, dans un objectif éducatif et civique et pour ne pas donner à ces élèves le sentiment d’être des citoyens de seconde zone. Augmenter le nombre de places et créer de nouvelles filières en lien avec la réindustrialisation et la transition écologique.   Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet : Redonner à l’école

Par Varenne D., Coué H., Gani D.

25 juin 2024

Réforme de notre système de soins : remaillage de l’offre de premier recours et de proximité sur le territoire autour de l’hôpital de proximité

Fiche thématique de résistance et de proposition n°4 I. Le contexte L’engorgement des services des urgences hospitalières s’explique par une situation critique des services d’urgence mais aussi par une offre de premier recours déficiente au regard des besoins en santé de la population. Faute d’une réponse satisfaisante en amont, « les urgences sont devenues le premier recours médical de nombreuses personnes » selon le professeur André Grimaldi. Le cap des 20 millions de passages par an aux urgences a été franchi en 2019 dont « plus de la moitié sont injustifiés et auraient dû logiquement trouver une réponse en médecine de ville ». L’application à l’hôpital de méthodes de management issues du monde de l’entreprise et la transformation de « l’hôpital de stock à l’hôpital de flux », se sont traduites par la suppression de 100 000 lits sur 20 ans. La saturation des services d’urgence se traduit par des heures passées sur des brancards à attendre, alors qu’il s’agit là d’une cause établie de surmortalité et des morts qualifiées d’« inattendues », relatives à un défaut de prise en charge dans les services d’accueil des urgences. » La situation de la médecine de ville est plus que préoccupante : 7 millions de personnes n’ont pas de médecins traitants dont 700 000 sont en affection de longue durée (ALD). Un généraliste sur deux refuse aujourd’hui des nouveaux patients et 30 % de la population vit en zone sous-dotée contre 8 % en 2012 (Que choisir, 2019). Le diagnostic posé sur la médecine de ville par le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) est édifiant : « nous sommes dans une situation de crise » et il y a « urgence à agir ». Le taux de participation des médecins libéraux aux gardes la nuit et les jours fériés n’est que de 38,5 % (Conseil de l’ordre des médecins, 2021). Plus de la moitié des départements n’ont pas de sites dédiés aux gardes ou dans moins de la moitié de leurs secteurs. Dans 35 départements, il n’y a pas de système de garde mobile pour s’occuper des patients qui ne peuvent pas quitter leur domicile ou qui sont hébergés dans des EHPAD. Enfin, notre système de couverture santé organise dans les faits une inégalité financière d’accès aux soins en faisant une large place aux complémentaires. C’est plus de 1,6 million de personnes qui seraient ainsi touchées par le phénomène de renoncement aux soins pour des raisons financières. II. Ce que nous proposons Trois grands principes fondateurs doivent guider la réforme de notre système de soins : Partir des besoins du patient qui doit être replacé au cœur de la réflexion sur la réforme et à qui il faut proposer une prise en charge cohérente sur le territoire. S’appuyer sur les deux piliers de la réforme que sont l’hospitalier et l’ambulatoire, qu’il faut cesser d’opposer. Dans un contexte de démographie médicale encore défavorable dans les 10 prochaines années, améliorer les dispositifs existants tout en s’appuyant sur eux. Cela suppose : De redonner les moyens à la médecine ambulatoire de proposer une offre de premier recours et de proximité capable de répondre aux besoins en matière de soins non programmés et de permanence des soins (gardes les nuits et les jours fériés). C’est une condition essentielle pour soulager l’hôpital d’une charge qui ne doit pas lui revenir. De recentrer l’hôpital public sur son cœur de métier : les urgences vitales, la réalisation d’actes techniques de pointe, les maladies aigües graves, la complexité médicale et la formation des médecins. Recommandation 1 : Remailler sur le territoire l’offre de soins de premier recours selon une architecture tripartite dont le centre de gravité est l’hôpital de proximité : des hôpitaux de proximité (gouvernance partagée), qui constituent le cœur névralgique du système de soins, dotés des moyens pour offrir : des consultations externes pour les différentes spécialités, des lits de médecine aiguë notamment pour les pathologies gériatriques, des lits de soins palliatifs, des lits de convalescence et de soins de suite rééducation, une maison médicale de garde ouverte de 20 heures à minuit, une chambre de garde pour les effecteurs mobiles ; des structures permettant l’exercice collectif de la médecine : cabinets de groupes d’au moins 5 médecins, centres de santé et maisons pluridisciplinaires de santé avec des infirmières de pratique avancée notamment pour assurer le suivi de certaines ALD comme les diabétiques, des assistantes sociales et enfin des assistantes médicales. Il faut donner à ces structures les moyens d’investir en matériel et de se doter d’un secrétariat médical qui constitue un maillon indispensable. Ce qui suppose de porter le prix de la consultation non pas à 35 euros comme prévu d’ici la fin de l’année mais à 46 euros dont 20 pour financer les investissements nécessaires en contrepartie d’un cahier des charges contractualisé avec l’Assurance Maladie, précisant les engagements en termes d’investissements, de prise en charge des soins non programmés et de participation à l’effort de garde ; d’EHPAD dotés chacun d’au moins 2 lits d’urgence médico-social pour des besoins médicaux-sociaux aigus ne méritant pas une hospitalisation. Recommandation 2 : organiser un plan de sauvetage pour répondre sans délai à la crise sans retarder une nécessaire refondation de l’hôpital public Renforcer l’attractivité du métier, ce qui suppose d’agir sur la charge de travail en visant un ratio de personnel cohérent avec une prise en charge de qualité des patients et sur les salaires en revalorisant prioritairement ceux des infirmières et des aides-soignantes : respectivement 2000 euros en début de carrière contre 1500 et 1600 euros contre le SMIC. Revoir le financement des hôpitaux en réservant la tarification à l’activité (T2A) à des actes techniques et les soins programmés. Pour le reste, prévoir une enveloppe globale dont la gestion et le suivi seraient placés sous la supervision d’un comité des sages avec une gouvernance partagée : agence régionale de santé (ARS), hôpital. Dans cette perspective, il est essentiel de redonner aux ARS un vrai pouvoir régional dans leur relation de travail avec les CHU et CH de leur région. Recommandation 3 :

Par Moutenet P.

23 juin 2024

Plan massif de rénovation des bâtiments et de lutte contre la précarité énergétique et le mal logement

Fiche thématique de résistance et de proposition n°3 I. Un peu de contexte : quel est le problème ? Le coût du logement est passé de 20 % à plus de 30 % des revenus de la majorité des locataires et accédants à la propriété. De plus, les délais d’attente pour un logement social s’allongent dans la plupart des métropoles. Plus de 8 millions de personnes sont sans logement personnel, sans confort minimum ou en sur-occupation (chiffres du mal-logement p.47), en raison des pénuries de logements abordables dans certaines zones « tendues ». De l’autre côté, de nombreux territoires subissent une vacance croissante et peinent à revitaliser leurs centres-villes, notamment car la réhabilitation des bâtiments est encore difficile. Les changements de chauffage sont financièrement privilégiés au détriment des rénovations énergétiques complètes et performantes, alors qu’elles seules permettent une réduction des factures, comme l’ont montré des expériences locales de massification des rénovations avec isolation. II. Que propose-t-on ? Lutter contre les locations occasionnelles (type Airbnb) et la spéculation immobilière s’y rapportant en doublant leur niveau d’imposition pour les rendre moins rentables. À l’inverse, diminuer l’imposition des locations abordables pour l’habitation longue durée (i.e. au loyer proche du loyer local en général et proche du loyer social dans les zones tendues). Rendre les réhabilitations de logements vacants moins coûteuses que le neuf, en particulier dans les zones peu tendues, grâce à (1) des aides renforcées pour les travaux lourds, complétées par (2) un rééquilibrage territorial des services publics (formations, hôpitaux, etc., cf. fiche « services publics ») dans les villes moyennes et territoires ruraux. Réorienter les aides aux rénovations vers l’isolation des logements anciens, avec une prise en charge de 50 % en moyenne, modulée selon le degré de performance des travaux et les revenus des bénéficiaires (ou leur taille s’agissant des collectivités et entreprises). Garantir un accompagnement gratuit et indépendant à tous les ménages afin de les aider dans le choix des travaux et de les protéger des fraudes et surfacturations. Maintenir une politique de rénovation ambitieuse sur la durée afin d’apporter de la visibilité à toute la filière, des artisans aux banques. Renforcer les moyens de contrôle et les sanctions des principales fraudes (e.g. locations courtes non déclarées, dépassement des loyers encadrés dans les zones tendues, fraudes aux rénovations, location de logements indignes, etc.). Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet : « Assurer l’isolation complète des logements en renforçant les aides pour tous les ménages et garantissant leur prise en charge complète pour les ménages modestes (…) Accélérer la rénovation des bâtiments publics » (p.9) « Construire 200 000 logements publics par an pendant cinq ans aux normes écologiques les plus ambitieuses (p.9) « en revenant sur les coupes de 1,4 Md €/an » (p.3) Encadrer les loyers dans les zones tendues (…) ouvrir le prêt à taux zéro à tous les ménages primo-accédants » (p.13) III. Que peuvent y gagner les citoyens ? Une forte réduction des factures énergétiques des ménages, des entreprises et des administrations publiques (de -40 % à -80 % selon l’état initial des bâtiments). Une augmentation de l’offre de logements abordables et durables, grâce à la production de logements abordables ainsi qu’à la remobilisation des logements vacants et occasionnels. La revitalisation des territoires qui subissent une vacance élevée des bâtiments. Des logements plus confortables tant en hiver qu’en été dans le contexte où les épisodes de canicule ont tendance à être plus longs et plus fréquents. Une meilleure santé publique. D’après un rapport de l’Assemblée nationale, la mauvaise isolation du bâti engendre des maladies liées à l’humidité et à une insuffisance de chauffage, qui touchent principalement les classes de population les plus défavorisées. Coût pour la sécurité sociale : 666 millions d’euros par an. Un développement progressif de plusieurs centaines de milliers d’emplois de qualité, non délocalisables, dans l’isolation et la réhabilitation des bâtiments. Une forte réduction des besoins de « pointe » électrique en hiver et de la dépendance aux importations de gaz et de fioul, et donc aux hausses de prix importées. IV. Pourquoi l’extrême-droite n’est pas la solution ? Le RN défend les avantages aux multipropriétaires et s’est opposé récemment au rééquilibrage de l’imposition des locations, au profit des locations courtes et au détriment du pouvoir d’achat et de l’accès au logement des classes moyennes dans les zones tendues. La proposition de « 100 000 logements sociaux par an » est très éloignée des besoins. Le RN a annoncé être favorable à la diffusion de rénovations énergétiques performantes mais sans précision sur le rythme ni le niveau de prise en charge (cf. les 22 mesures pour 2022 de Marine Le Pen). V. Liens vers les travaux de l’Institut permettant d’aller plus loin dans la réflexion Quelle stratégie pour un logement abordable et durable ? – Institut Rousseau Un quinquennat qui aura amplifié la crise du logement – Institut Rousseau Road 2 Net Zero – Institut Rousseau AdhérezFaire un don

Par Desquinabo N., Ramos P.

22 juin 2024

L’entreprise de demain, un bien commun au service de l’intérêt général

I. Le contexte La démocratie s’est arrêtée aux portes de l’entreprise. Le capital est prédominant dans la prise de décision, les droits politiques au sein de l’entreprise étant dépendants de l’apport en capital financier. Or, les actionnaires et leurs représentants au sein du conseil d’administration ne défendent que leurs propres intérêts : celui de la maximisation de la valeur actionnariale et des versements de dividendes. Au cours des quarante dernières années, cette tendance s’est exacerbée avec la financiarisation croissante de l’économie ; le partage de la valeur ajoutée (VA) se fait de plus en plus en faveur des actionnaires. Ainsi, l’augmentation des revenus du travail n’est plus indexée sur celle de la productivité. De leur côté, la rémunération des actionnaires atteint des niveaux indécents (les sociétés du CAC 40 ont versé 67 milliards d’euros de dividendes purs en 2023. Les rachats d’actions par les entreprises, ayant souvent pour objectif d’augmenter leur valeur grâce à une diminution de leur nombre, ont représenté 30 milliards d’euros). Les actionnaires stables ont laissé la place à des fonds de capitalisation vautours : les actionnaires sont très souvent aujourd’hui extérieurs à l’entreprise. Ces fonds sont intéressés au seul rendement court-terme, au détriment de la vision stratégique de l’entreprise : la part des investissements dans la valeur ajoutée a ainsi nettement baissé (Durand, Gueuder, 2018). Cela conduit à une double impasse, ce mode de gouvernance d’entreprise étant devenu absolument incompatible avec les enjeux auxquels nous faisons face et avec les tendances de fond imprégnant le monde du travail. D’abord avec l’impossibilité de mettre en place les investissements nécessaires à la transition écologique et climatique, pourtant indispensable. Ensuite, du fait de la crise de légitimité de l’entreprise capitaliste : d’abord parce que le rapport au travail a profondément changé (évolution portée en particulier par les jeunes générations qui expriment des attentes nouvelles sur le sens du travail, leur place et leur rôle dans l’entreprise). Ensuite parce qu’un mouvement de fond attribue à l’entreprise une responsabilité sociale et environnementale, voire un rôle citoyen. Enfin, parce que la concentration du pouvoir aux mains des actionnaires est devenue un anti-modèle, il semble donc nécessaire d’aller plus loin que la présence de contre-pouvoirs représentant les salariés face à la direction. Il est donc temps de reconnaître la qualité des salariés « investisseurs en travail » à l’égal de celles des actionnaires, « investisseurs en capital ». Nous proposons de refonder la gouvernance d’entreprise en ne visant pas qu’un partage plus équitable des profits générés mais bien celui du pouvoir. Mettre en œuvre ces propositions nous semble absolument nécessaire, car l’entreprise actionnariale actuelle ne changera jamais d’elle-même. II. Permettre le partage du pouvoir Créer un nouveau statut d’entreprise, l’entreprise à responsabilité sociale partagée, visant à devenir un modèle alternatif crédible à l’entreprise actionnariale, afin de répartir égalitairement le pouvoir entre actionnaires et salariés (considérés comme parties constituantes de l’entreprise). Le programme du NFP propose qu’un tiers des sièges reviennent aux salariés : cette proposition amorce une trajectoire positive que nous souhaitons plus ambitieuse pour aboutir à un véritable changement du cadre de référence de l’entreprise actionnariale. Nous proposons donc que le pouvoir soit réparti égalitairement (50/50). Inclure dans le statut de l’entreprise que son objectif premier est de privilégier une mission spécifique et non la maximisation du profit. Fonder la rémunération des dirigeants aussi sur la performance sociale et environnementale et la réalisation d’objectifs définis en rapport avec la « mission » de l’entreprise, et non plus seulement sur la performance économique de l’entreprise. La création d’un comité des sages avec un rôle de surveillance. Il sera composé des autres parties prenantes de l’entreprise : les collectivités territoriales, les ONG concernées. Ce comité des sages sera doté d’un large pouvoir d’investigation et disposera de la possibilité de déclencher l’équivalent d’une procédure d’alerte en cas de dérives importantes par rapport à la mission. Son rapport annuel ferait partie des états financiers, objet de la certification des comptes, à côté du reporting ESG relatif aux domaines environnementaux, sociaux et de gouvernance. Réconcilier les investisseurs avec la logique de long terme : Conditionner la rémunération des actionnaires à leur implication dans l’entreprise en favorisant les actionnaires durables : l’idée est d’attribuer des droits de vote et des dividendes variables en fonction de la durée de détention des actions, le droit de vote serait assujetti à une durée de détention minimale. Créer un livret d’épargne « entreprise responsable » présentant les mêmes avantages fiscaux pour les épargnants que le livret A. L’épargne collectée viendrait alimenter un fonds « entreprise responsable », dont la gestion serait co-assurée par la Caisse des Dépôts et un comité des représentants des épargnants désignés par les titulaires. Nécessité de mettre en place un organisme de contrôle, évitant que ces financements ne se dirigent vers des entreprises ne remplissant pas les critères présentés. Orienter la commande et les aides publiques vers les entreprises à responsabilité sociale partagée : nous proposons de réserver ainsi 20 % de la commande publique (son montant est estimé à 110 milliards en 2019), et autour de 25 % des aides publiques (le montant de ces aides est compris entre 165 milliards et 200 milliards). III. Que peuvent y gagner les citoyens ? Un réel partage du pouvoir au sein de l’entreprise permettrait aux salariés d’avoir un impact sur leurs conditions de travail, leur rémunération et le sens de leur activité. (On peut également relever une souffrance au travail liée à la réalisation de tâches vides de sens et à une impossibilité pour les employés de réaliser correctement leur travail). Cela permettrait également des trajectoires professionnelles durables, de bénéficier de formations qualifiantes pour les jeunes, une politique d’emploi des seniors, etc. Il s’agirait également de permettre une remise en cause des normes managériales qui aujourd’hui sont à l’origine d’une intensification du travail. Faire de l’entreprise un lieu d’exercice de la démocratie. Parce que le partage du pouvoir serait de 50/50. Et parce que ce partage égalitaire du pouvoir permettrait de faire émerger un processus de discussions entre

Par Kleman J., Prosperi J., Bonnevay R., Moutenet P.

22 juin 2024

Pour une écologie sociale et juste, contre le spectre de l’écologie « punitive »

I. Un peu de contexte : quel est le problème ? Sur la question écologique, les opposants au changement agitent souvent le spectre de l’écologie « punitive », qui priverait les français de leur liberté individuelle ou de leur liberté de consommer. Ce concept ou slogan empêche tout débat et condamne a priori toute contrainte réglementaire. Le problème n’est pas l’écologie. La science nous dit au contraire que c’est avant tout l’inaction écologique et ses conséquences catastrophiques qui risquent d’être punitives et liberticides. Le problème, c’est l’écologie telle qu’elle est conçue et pratiquée ces dernières années par les libéraux au pouvoir. Mises en place sans réels débats, les mesures proposées se sont révélées socialement injustes, notamment car elles ne prévoient pas l’accompagnement de la majorité des ménages aux revenus modestes et moyens. On peut citer les exemples de la taxe sur les carburants sans alternative – à l’origine de la crise des « gilets jaunes » –, des zones à faibles émissions (ZFE) – qui interdisent de facto les ménages modestes de circuler dans les centres villes – ou encore des normes pesant sur nos agriculteurs ou nos industriels mais pas sur les produits importés, ce qui crée une concurrence déloyale. Ces débats mal posés jouent un rôle central dans le statu quo actuel : repoussoir légitime pour une part importante de la population, ils aggravent le fossé entre l’opinion publique et la nécessité d’agir face aux enjeux écologiques et climatiques. Ils permettent aux décideurs publics de justifier leur inaction, voire un recul de l’action publique sur ces questions. À l’inverse, les sondages montrent que la grande majorité des français est favorable à une politique écologique et prête à faire des efforts, du moment que cet effort est ressenti comme partagé et justement réparti. Il est urgent de réconcilier l’écologie et la justice sociale, sans quoi il n’y aura ni l’un ni l’autre. II. Que propose-t-on ? Établir un moratoire à toute mesure socialement injuste. Passer toute politique publique écologique au filtre de la justice sociale, notamment en prévoyant l’accompagnement des populations les plus défavorisées et des ménages aux revenus moyens. Passer de restrictions trop générales, généralement inutiles, à des contraintes plus ciblées qui bénéficient à la majorité. Quelques exemples de mesures : Tripler les malus au poids à l’achat d’un véhicule pour pénaliser les véhicules lourds (typiquement les SUVs, qui concernent à plus de 90 % des ménages aisés et des entreprises), utiliser les recettes de ces malus pour financer des alternatives pour la majorité de la population et revenir sur les zones à faibles émissions (ZFE), qui pénalisent les ménages modestes. Restreindre le logement « occasionnel » dans les zones tendues (ex. locations touristiques, résidences secondaires) plutôt que le logement neuf, qui doit rester abordable. L’explosion des logements « occasionnels » ces dernières années augmente inutilement les besoins de constructions neuves (qui représentent environ un tiers des émissions de l’industrie française) et empêche une majorité des ménages des agglomérations et littoraux d’avoir accès à un logement abordable. Imposer les mêmes normes écologiques aux importations que celles auxquelles nos entreprises et nos agriculteurs sont soumis. Par exemple, limiter les importations issues de l’élevage intensif plutôt que l’élevage extensif local.   Ce que dit le programme du Front Populaire à ce sujet : Assurer l’isolation complète des logements, en renforçant les aides pour tous les ménages et garantissant leur prise en charge complète pour les ménages modestes (p.9) L’encadrement des loyers de manière obligatoire dans les zones tendues ainsi que des prix du foncier (p.13) Interdire l’importation de toute production agricole ne respectant pas nos normes sociales et environnementales (p.17) III. Que peuvent y gagner les citoyens ? Plus de justice sociale, économique et fiscale. Le sentiment que l’effort demandé est partagé, proportionné et non uniquement concentré sur les plus précaires. Des ressources fiscales nouvelles permettant de rendre plus accessibles des alternatives écologiques pour la majorité de la population. En conséquence, une plus grande adhésion de la société française aux politiques écologiques, condition sine qua non à la prise d’actions rapides et ambitieuses face au changement climatique, l’effondrement de la biodiversité et la raréfaction des ressources. L’atténuation d’une partie des conséquences potentiellement catastrophiques du réchauffement climatique, de l’effondrement de la biodiversité et de la raréfaction des ressources. Une meilleure qualité de vie, une plus grande stabilité sociale et politique dans les décennies à venir. IV. Pourquoi l’extrême-droite n’est pas la solution ? Le RN dénonce souvent les contraintes « punitives », mais ne propose aucune mesure réglementaire ou fiscale qui permettrait de diminuer notre dépendance extérieure aux fossiles de manière directe (en réduisant les activités les plus énergivores) ou indirecte (en finançant des alternatives pour la majorité « contrainte » de la population) Le RN s’est opposé récemment au rééquilibrage de l’imposition des locations, en défendant les privilèges fiscaux des locations courtes et des multipropriétaires, au détriment du pouvoir d’achat et de l’accès au logement des classes moyennes dans les zones tendues. Par son refus a priori de tout débat et donc de toute anticipation, le RN fait obstacle à l’accompagnement des personnes les plus pauvres, premières personnes touchées par le changement climatique ou des agriculteurs confrontés à des événements climatiques extrêmes (vagues de chaleur, pluies torrentielles, sécheresses) plus fréquents et plus intenses. V. Pour aller plus loin dans la réflexion Face aux pièges de l’écologie « punitive », quelles restrictions les plus efficaces et justes ? – Institut Rousseau – Road 2 Net Zero – Institut Rousseau AdhérezFaire un don

Par Desquinabo N., Kerlero de Rosbo G.

20 juin 2024

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