Inflation, pouvoir d’achat et crise sociale L'éditorial de mai 2022
Alors que l’inflation est autour de 5 % en France, qu’elle pourrait encore accélérer durant les mois à venir et que la question du pouvoir d’achat, pourtant au cœur des préoccupations des Français, a été en grande partie négligée lors de la campagne présidentielle, le prochain gouvernement ne pourra faire l’impasse sur cette thématique. L’épisode inflationniste que nous vivons actuellement est particulier pour de nombreuses raisons sur lesquelles nous ne reviendrons pas ici, mais notons surtout qu’il frappe davantage les Français modestes. A fin avril 2022, les prix des produits alimentaires dans leur ensemble enregistraient une hausse de +3,8 % sur un an, plus particulièrement les produits frais avec +6,6 % et ceux de l’énergie ont quant à eux bondi de 26,6 %. Or les 20 % des ménages les plus modestes consacrent 54 % de leurs dépenses aux transports, à l’alimentation et au logement (loyers, eau, électricité etc.) contre seulement 44 % pour les 20 % des ménages les plus aisés. Conséquence immédiate, les Français ont d’ores et déjà modifié leurs achats : ils consomment moins, ils achètent notamment moins de viande/poisson, de légumes frais, etc. Certains ont même recours au crédit afin de garder pied. Que faire alors ? De nombreuses options sont sur la table pour tenter de préserver le pouvoir d’achats des Français : indexation des salaires, blocage des prix, hausse du SMIC, hausse des impôts sur certaines entreprises ou ménages fortunés afin de financer des subventions (e.g. chèques énergie), baisse de la TVA, etc. Indépendamment de la qualité supposée de chacune de ces options, de leur faisabilité ou de leur compatibilité avec les règles budgétaires, l’Etat doit agir rapidement pour protéger les ménages les plus modestes. Il doit aussi plancher pour mettre en place des politiques économiques et industrielles afin d’éviter de nouvelles crises de ce type à l’avenir. D’autant plus que les risques s’amoncèlent également sur l’activité économique (la croissance économique était de 0 % au premier trimestre). Difficile d’imaginer une société qui accepte sagement une résurgence forte du chômage et perte de pouvoir d’achat. Ne rien faire dans le contexte actuel pourrait augmenter le risque d’instabilité sociale dans le pays et s’avérer être une faute politique.
Par Kuhanathan A.
16 mai 2022