fbpx

Le laboratoire d’idées de la reconstruction écologique et républicaine

Notes

Les cryptomonnaies dans la guerre d’Ukraine ?

L’idée que les cryptomonnaies sont des monnaies libres et indépendantes de tout État suggère qu’en cas de conflit, elles pourraient prendre le relais des autres monnaies et rendre possible la poursuite du commerce en même temps qu’elles assureraient une protection de la valeur de ce que chacun détient et qui risque de fondre ou même de disparaitre dans le tumulte engendré par les combats et les troubles de toutes sortes perturbant les réseaux. L’invasion de l’Ukraine par la Russie en mars 2022 a créé une situation permettant d’évaluer sur un exemple dramatique mais significatif l’intérêt de l’existence des cryptomonnaies et les usages possibles qu’il peut en être fait en cas conflit ou de crises majeures[1]. C’est cette évaluation que nous nous proposons de faire. L’analyse de ce qui s’est passé en Ukraine montre que le rôle des cryptomonnaies a concerné divers aspects des évènements, mais qu’il est finalement resté relativement modéré. Il est intéressant de comprendre jusqu’à quel point et pourquoi. Pour cela nous allons examiner de près les différents usages possibles des cryptomonnaies selon les endroits concernés, les acteurs impliqués et les buts poursuivis. Notons avant tout que dans le cas de la guerre d’Ukraine, l’évolution des cours montre que les cryptomonnaies n’ont pas joué un rôle de valeur refuge équivalent à celui de l’or. Par exemple, entre le 1er janvier 2022 et le 14 mars 2022, le cours du Bitcoin a perdu 18,7 % de sa valeur, passant de 44730 $ à 38773 $, pendant que l’once d’or gagnait 8,1 % passant de 1828 $ à 1977 $. Le cours de l’or a donc confirmé son rôle millénaire de valeur refuge, que le Bitcoin malgré ce qu’en disent ses défenseurs n’a pas su rejoindre. Un examen attentif des courbes des cours du Bitcoin et de l’or le 24 février 2022, jour du début de l’invasion russe, montre d’ailleurs très clairement un pic en hauteur pour l’or, et un trou pour le Bitcoin qui a donc eu exactement le comportement inverse de l’or. Le républicain libertarien américain Ron Paul, pourtant défenseur acharné du Bitcoin, en accord avec de nombreux observateurs a d’ailleurs fait la remarque que depuis plusieurs mois le Bitcoin se comporte davantage comme une action étroitement corrélée au marché boursier, que comme une couverture contre l’incertitude des marchés[2]. Pour analyser le rôle des cryptomonnaies lors de ce conflit nous allons traiter à part l’Ukraine et la Russie. Précisons que nous menons notre analyse le 24 mars 2022 alors bien sûr que les combats qui durent depuis presque un mois sont loin d’être terminés. En Ukraine A. Apporter de l’aide à l’Ukraine Une partie du soutien extérieur à l’Ukraine s’est opérée par l’envoi de cryptomonnaies au gouvernement ukrainien. Pour faciliter l’envoi de dons en cryptomonnaies, le gouvernement ukrainien a lancé un site en partenariat avec deux plateformes d’échange. L’une FTX est américaine, l’autre Everstake est à Kiev[3]. Le gouvernement peut ainsi recevoir des bitcoins, des éthers, et 8 autres cryptomonnaies. Le 24 mars, il avait reçu par ces moyens plus de 100 millions de dollars et espérait arriver à 200 millions de dollars. Mis à part qu’il est peut-être plus rapide et plus facile pour quelqu’un qui détient des cryptomonnaies de faire des dons en utilisant des envois directs, l’intérêt des cryptomonnaies pour soutenir l’Ukraine reste un peu anecdotique puisqu’on peut aussi faire des dons à l’Ukraine en dollars ou en euros par l’intermédiaire de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, de la Fondation de France, du Secours Catholique, de l’UNICEF et bien d’autres organismes encore. Cela sera plus facile pour la grande majorité des donateurs qui n’ont pas de cryptomonnaies, et sera même préféré par ceux qui en possèdent et souhaitent les garder (puisqu’en général on en détient pour spéculer et qu’on les garde en espérant qu’elles vont monter !). La réalité est que ce soutien aux Ukrainiens par les cryptomonnaies concerne des montants assez faibles à l’échelle de l’État ukrainien dont le PIB est de 155 milliards d’euros, ou en comparaison au soutien de l’Union européenne — plus d’un milliard d’euros — ou des États-Unis — plus d’un milliard de dollars. Le 16 mars 2022, le président Volodymyr Zelensky, peut-être en prévision d’évolutions à venir concernant l’usage des cryptomonnaies dans la suite du conflit a cependant jugé utile de signer une loi qui en assouplit l’usage et en permet un meilleur contrôle[4]. La loi prévoit d’accorder aux plateformes d’échange de cryptomonnaies, ukrainiennes ou non, la possibilité d’opérer légalement dans le pays ; d’autoriser les banques nationales à ouvrir des comptes pour les entreprises liées aux cryptomonnaies ; de donner des droits aux cryptoactifs et à leurs détenteurs. B. Sortir avec de l’argent en quittant l’Ukraine Du côté des particuliers, qui en Ukraine étaient avant la guerre plus de 10% à détenir des cryptomonnaies, il est raisonnable de penser qu’elles ont un peu servi. Celui qui en Ukraine avant l’invasion russe en détenait en propre a pu effectivement quitter le pays en emportant son smartphone, son wallet physique, ou même seulement les clés de ses comptes, puis facilement retrouver ses cryptomonnaies une fois hors des frontières. Certaines familles ont certainement profité de cette opportunité. Les cryptomonnaies sont plus faciles à transporter et à cacher que les liasses de billets, les pièces ou les lingots d’or. De même celui qui détient des cryptomonnaies sur une plateforme d’échange de cryptomonnaies à l’étranger retrouve ses dépôts sans mal une fois hors du pays. Cependant, c’est le cas aussi pour des dépôts opérés sur des comptes bancaires classiques dans des banques hors d’Ukraine. En soi, les cryptomonnaies ne sont donc pas indispensables à celui qui avant l’invasion a souhaité protéger certaines sommes en ne les laissant pas sur des comptes ukrainiens. C. Envoyer de l’argent à l’extérieur pendant le conflit Les cryptomonnaies sont-elles utiles pour envoyer son argent à l’étranger de façon à le sécuriser une fois la guerre commencée ? Ceux qui en Ukraine n’avaient pas de cryptomonnaies avant le conflit, outre les difficultés à s’initier très rapidement à leur maniement, ont hésité à

Par Delahaye J.

31 mars 2022

Un sursaut pour l’école de la République

Plan : I. Il est urgent de mettre l’éducation au cœur du débat pour la présidentielle a) Une préoccupation majeure des Français b) Un sujet crucial pour l’avenir du pays c) Un thème laissé en friche par le pouvoir et les candidats II. Un constat d’urgence a) La chute du niveau, symptomatique d’un système à bout de souffle b) L’aggravation des inégalités scolaires, ou la faillite de la promesse républicaine c) Un malaise enseignant généralisé III. Un plan d’action concret pour le prochain quinquennat a) 10 mesures simples pour l’école b) Mettre en place les conditions institutionnelles de réussite et de suivi du plan c) Mettre en place les conditions budgétaires d’exécution du plan I. L’éducation est n’a pas la place qu’elle mérite dans les débats pour l’élection présidentielle L’éducation doit enfin être au cœur de la campagne présidentielle pour trois raisons : il s’agit à la fois d’une préoccupation majeure des Français, d’un sujet crucial pour l’avenir du pays et enfin d’un thème que le gouvernement sortant et nombre de candidats à la présidentielle n’ont que trop maltraité. A. Une préoccupation majeure des Français Contrairement à ce que le débat médiatique indigent sur le sujet pourrait laisser croire, l’éducation est une véritable préoccupation des Français. En août 2021, ce thème était jugé « tout à fait prioritaire » par 73 % des Français (proportion identique depuis avril 2021), en deuxième position derrière la santé et à égalité avec la sécurité[1]. Les citoyens concernés au premier chef sont bien entendu les parents d’élèves. La grande préoccupation des parents pour l’éducation de leurs enfants se traduit par des phénomènes ; observables notamment chez les classes moyennes et supérieures, qui signalent une perte de confiance dans l’école publique : mouvement de fond vers le privé à défaut de contournement de la carte scolaire, explosion du privé hors contrat[2], ou encore développement des cours particuliers[3]. Les classes populaires, qui n’ont pas accès à ces options, ne sont pas en reste. La fuite vers le périurbain des classes populaires traditionnelles s’explique en partie par des considérations scolaires[4]. Face à ces mouvements centrifuges vers les établissements jugés les moins « à problèmes », les revendications en faveur de la mixité sociale et ethnique dans des quartiers populaires où l’immigration extra-européenne est majoritaire montrent l’intérêt pour les questions scolaires de ces parents a priori les plus éloignés de l’institution scolaire, mais légitimement inquiets d’être la dernière roue du carrosse dans un système à plusieurs vitesses[5]. B. Un sujet crucial pour l’avenir du pays Parce qu’elle détermine l’avenir à moyen terme du pays, l’éducation est un thème central qui conditionne tous les sujets, civiques, sociaux et économiques. Il s’agit de former à la fois des citoyens émancipés, aptes à la vie démocratique et républicaine, et des individus qui trouvent leur place dans la société indépendamment des déterminismes de leur milieu d’origine et en concordance avec les bouleversements structurels à venir. Les questions des inégalités et de la mobilité sociale, de « l’archipélisation »[6] de la société française, de la transition écologique ou encore de la place de l’économie française dans la mondialisation sont ainsi toutes reliées à celle de l’éducation. À court terme, la crise éducative nourrit à la fois les fractures sociales et un risque de déclassement économique. À moyen terme, c’est notre souveraineté et la capacité d’adaptation de notre société qui sont en jeu : dans un monde menacé par le changement climatique et les risques environnementaux, marqué par une compétition exacerbée et des tensions croissantes, comment s’assurer de notre capacité collective à demeurer une démocratie saine et vivante ? L’incapacité de l’école à forger une culture commune fondée sur le jugement critique est une grave menace pour la démocratie. À rebours de l’utilitarisme éducatif en vogue, l’enseignement des humanités et des sciences sociales à tous les futurs citoyens est ainsi crucial, de manière indépendante des spécialisations et des qualifications professionnelles requises par le marché du travail. La crise éducative nourrit à la fois l’immobilité et “l’archipélisation” sociales. L’affaiblissement du niveau et l’augmentation de « l’inégalité des chances » se font avant tout au préjudice des enfants des classes populaires, dont les chances relatives de réussite scolaire vont décroissantes, et qui sont relégués dans des filières professionnelles dévalorisées, malgré leur utilité sociale. Le contrat républicain se retrouve ainsi brisé, entre d’un côté des classes moyennes et supérieures qui n’ont plus confiance dans l’école publique et de l’autre des classes populaires forcées de constater que sa promesse d’égalité est mensongère. Par ailleurs, d’un point de vue économique, une relation directe entre revenu moyen par habitant et niveau d’éducation de la population est bien établie à l’échelle internationale. Ainsi, sur la période 1960-2000, on peut prédire 75 % de la différence de croissance entre pays par le niveau en mathématiques et en sciences[7]. Cette relation ne peut que se renforcer à mesure que la demande de travail se déplace vers des emplois de plus en plus qualifiés, par exemple dans une industrie de plus en plus robotisée. La place d’un pays dans le monde au XXIe siècle dépend donc directement de la qualité de son système éducatif, ce qu’ont bien compris les pays asiatiques, en tête des classements scolaires. Notons bien qu’il n’est pas seulement question des secteurs de technologie de pointe comme le nucléaire ou l’IA, mais également des emplois intermédiaires dans les services[8] ou encore des emplois manuels’qualifiés cruciaux pour la transition écologique (pour rendre un plan d’isolation des logements possible, par exemple). La filière nucléaire – entre autres – a par exemple beaucoup souffert d’une pénurie de soudeurs très qualifiés[9]. Réindustrialiser la France passe aussi par un effort sur l’éducation et la formation de ces métiers techniques hautement qualifiés. Ce sont toutes ces raisons qui poussent par exemple un économiste comme Patrick Artus à affirmer que la « perte de compétence de la main-d’œuvre » est le problème auquel le prochain gouvernement devrait s’atteler en premier, puisqu’il conditionne tous les autres[10]. En particulier, la proportion considérable de NEET (ni en études, ni en formation, ni en emploi)[11] parmi les jeunes est un

Par Picard É., Barel V.

24 mars 2022

Fin de l’opération Barkhane : réflexions sur sept ans et demi d’engagement militaire

Emmanuel Macron a annoncé le 17 février 2022 le retrait des forces françaises du Mali, après avoir amorcé au cours de l’année 2021 une transformation profonde de l’opération Barkhane. De fait, celle-ci prend fin, après sept ans et demi d’existence. Le processus de retrait va prendre plusieurs mois, compte tenu de l’ampleur de la manœuvre logistique de désengagement. Il intervient dans un climat délétère, marqué par de fortes tensions avec les militaires putschistes au pouvoir à Bamako, qui ont expulsé l’ambassadeur de France, fait appel aux mercenaires russes de la société Wagner et attisé un sentiment antifrançais qui trouve des échos ailleurs au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Dans le même temps, les groupes armés islamistes combattus par les soldats français continuent de mener des attaques meurtrières au Mali, au Niger, au Burkina Faso et de plus en plus souvent dans des pays du golfe de Guinée comme la Côte d’Ivoire et le Bénin. Le retrait français n’est toutefois pas total. La France devrait maintenir des troupes au Niger et au Tchad, selon des modalités qui restent à préciser. Elle continuera par ailleurs d’être présente à travers son outil diplomatique et l’aide au développement. Mais une page se tourne et un premier bilan de l’opération Barkhane peut être fait. C’est le propos de cette note : analyser les décisions qui ont présidé à l’engagement militaire français ; mettre en évidence d’autres choix qui auraient pu être faits. Nous nous intéresserons ici d’abord à l’action militaire même s’il transparaîtra qu’elle ne peut pas être examinée isolément des dynamiques politiques, sociales et économiques. Les choix faits en 2013-2014 ont été structurants pour l’opération Barkhane L’opération Barkhane, née en août 2014, était l’héritière de l’opération Serval, lancée en janvier 2013 pour reprendre le contrôle du nord du Mali tombé aux mains de groupes armés islamistes. Elle a également absorbé l’opération Épervier, présente au Tchad depuis février 1986 pour contribuer à la stabilité de ce pays. Elle doit donc être analysée à la lumière des choix effectués en 2013 et 2014. Nous n’évoquerons pas ici la guerre de 2011 en Libye, conduite par une coalition dirigée notamment par la France, qui a favorisé la déstabilisation du Sahel mais a constitué du point de vue de l’opération Barkhane une donnée extrinsèque. Cette analyse de la genèse de l’opération Barkhane nous conduit à nous intéresser à quatre choix, pour certains répétés ensuite, qui se sont révélés structurants pour l’action militaire. 1.1. L’installation de la présence militaire au Sahel dans la durée L’opération Barkhane aurait très bien pu ne pas exister. Une fois l’opération Serval réussie et les groupes armés islamistes chassés des villes du nord du Mali, la décision aurait pu être prise de quitter ce pays et de n’entreprendre une nouvelle action militaire qu’en cas de péril imminent. Les forces spéciales auraient eu la possibilité de mener des opérations ponctuelles. Les autorités maliennes se seraient retrouvées en première ligne face à un ennemi fortement affaibli, et auraient sans doute été davantage incitées à faire de la lutte contre le terrorisme une priorité. La France aurait évité de paraître de plus en plus, à mesure que le temps passait, comme une partie du problème plutôt que de la solution. Cette hypothèse, qui paraît de bon sens a posteriori[1], nous renvoie aux limites des interventions militaires : une force expéditionnaire peut renverser une situation et un rapport de force dans un court laps de temps mais son caractère exogène et sa faiblesse numérique la pénalisent face à une guérilla qui s’inscrit dans la durée. Un choix différent a été fait, probablement à la fois parce que la situation semblait trop précaire et parce que les autorités françaises ont vu au Sahel un théâtre propre à affirmer la puissance nationale sur la scène mondiale. Cette deuxième raison mérite qu’on s’y arrête. Dans une mesure difficile à apprécier, les mobiles de la France au Sahel ne résidaient pas à Bamako, Niamey ou Kidal mais à New York, Bruxelles, Washington. La réaction très virulente à l’hypothèse d’une implication russe au Mali à l’automne 2021, avant même que celle-ci ne se matérialise, va dans le même sens : elle a été d’emblée analysée sous l’angle de la compétition entre puissances, après l’épisode centrafricain, accentuant l’impression que la France subissait quelques mois plus tard un revers du fait de son éviction par le groupe Wagner. Les autorités putschistes maliennes ont su instrumentaliser, à court terme du moins, les tensions stratégiques. L’opération Barkhane a ainsi été, pendant plusieurs années, la vitrine de nos capacités militaires et une source de capital politique confortant la place de la France sur la scène internationale, sa présence au Conseil de sécurité des Nations unies et son statut de plus vieil allié des États-Unis. Ce capital a en partie été réinvesti pour faire bouger les lignes stratégiques à partir du Sahel avec une efficacité difficile à évaluer. On peut par exemple se demander si l’activation, au bénéfice notamment de l’opération Barkhane, de la clause de défense mutuelle prévue à l’article 42-7 du traité sur l’Union européenne à la suite des attentats de novembre 2015, ou la création de la force multinationale européenne Takuba au Mali en mars 2020, ont marqué de vraies avancées pour la défense européenne. La réponse est probablement positive mais dans une mesure modeste. Il paraît assez clair en revanche qu’elles n’ont pas permis d’altérer la situation stratégique au Sahel. Le bilan de l’opération Barkhane sera dans la suite de cette note évalué à l’aune de son but affiché, c’est-à-dire la lutte contre les groupes armés islamistes sahéliens, mais il doit tout autant être fait à la lumière du positionnement de la France sur la scène internationale. La question est dès lors de savoir si le coût humain (près de soixante soldats tués dans les opérations Serval et Barkhane), financier (de l’ordre du milliard d’euros par an) et politique (lié à la montée du sentiment antifrançais et à un retrait plus contraint que souhaité) n’est pas trop cher payé. 1.2. La promotion d’une solution négociée à la

Par Galois F.

16 mars 2022

Pour une transition juste : Visions et attentes des travailleuses et travailleurs du secteur pétrolier et gazier en France Rapport publié par Les Amis de la Terre en partenariat avec l'Institut Veblen et l'Institut Rousseau

Les résultats complets sont à télécharger en PDF directement sur cette page en cliquant en haut à droite sur le bouton Télécharger. Nécessité de penser la transition du secteur Le secteur pétrolier et gazier français a subi une succession de crises depuis 2009 qui l’a affaibli. Les effectifs des entreprises parapétrolières et paragazières, dites « au service des énergies », ont chuté de 47 % depuis 2015. Les crises environnementales et climatiques et la finitude des ressources fossiles interrogent aujourd’hui l’avenir du secteur et de ses travailleuses et travailleurs. Pourtant, les plans de transition des entreprises sont soit inexistants, soit insatisfaisants au regard de l’urgence à agir. L’État, pourtant actionnaire de plusieurs entreprises françaises, tarde à mettre en place une vraie politique industrielle. Surtout, les salariées et salariés, premiers concernés et par l’instabilité du secteur et les transformations qu’il va inévitablement subir, ne sont pas consultés. C’est pourquoi les Amis de la Terre, l’Institut Rousseau et l’Institut Veblen ont mené une enquête auprès des travailleuses et travailleurs. Échantillon 266 salariées et salariés du secteur pétrolier et gazier ont répondu à notre enquête. ⅔ travaillent pour une entreprise parapétrolière ou paragazière, aussi appelée « au service des énergies », et ⅓ pour des entreprises de production et de fourniture d’énergie (par exemple TotalEnergies ou Engie). Malgré l’absence d’uniformité des chiffres sur le secteur et la difficulté à évaluer sa représentativité, on peut constater que l’échantillon se caractérise par un grand nombre de personnes à haut niveau de diplômes, de cadres, d’ingénieurs, ainsi que de salariées et salariés de grandes entreprises. Conscience partagée de la crise du secteur 71 % des personnes interrogées estiment que le secteur du pétrole et du gaz est en crise. Le sentiment de la crise est plus élevé chez les salariées et salariés des entreprises parapétrolières et paragazières (73 %) que chez leurs homologues des entreprises de production et de fourniture d’énergie (66 %). Il est également particulièrement élevé dans le secteur du raffinage. 79 % des personnes qui pensent que le secteur est en crise jugent qu’il existait des problèmes avant la pandémie de Covid-19. Les répondant·es évoquent notamment les exigences écologiques de sortie du pétrole et du gaz, des facteurs conjoncturels qui rendent les cours volatiles, un manque d’anticipation de la transition énergétique, mais aussi la priorité donnée à la rentabilité à court-terme. Forte conscience du changement climatique Les salariées et salariés du secteur pétro-gazier interrogé·es affichent un fort degré de conscience des problèmes liés au changement climatique : 95 % des répondants considèrent le changement climatique comme un problème. Ce sentiment est d’autant plus prononcé chez les jeunes (100 % des moins de 25 ans). 45 % des répondant·es pensent que leur emploi est menacé par le changement climatique et les politiques menées pour lutter contre celui-ci. Cette crainte est beaucoup plus forte chez les employé·es et ouvrier·es : 57 % d’entre elles et eux en sont convaincus, ce qui est de 12 points supérieur à la moyenne. Sur 10 salariées et salariés interrogés, près de 4 (38 %) estiment que leur entreprise ne prend pas le changement climatique et la lutte contre celui-ci au sérieux. 4 autres adhèrent à l’idée qu’elle les prend au sérieux avec nuance (« plutôt »), et seuls 2 en sont tout à fait convaincus. Propension à la reconversion Une vaste majorité (79 %) des répondants se dit prête à se reconvertir hors du secteur pétrolier et gazier. L’aspiration à se reconvertir est élevée dans toutes les catégories, mais on observe des variations significatives : elle décroît avec l’âge et l’ancienneté et est plus élevée chez les personnes travaillant dans le parapétrolier et paragazier. Chez les ouvriers et employés prêts, elle est inférieure de 14 points (65 %) à la moyenne générale et de 17,5 points à la moyenne des cadres. Les personnes ne souhaitant pas se reconvertir argumentent notamment sur le fait que l’industrie pétrogazière dispose des moyens techniques et économiques les plus appropriés pour réaliser la transition. Fort attrait pour les secteurs de l’énergie Les répondants affichent un fort intérêt pour une reconversion dans d’autres secteurs de l’énergie. 8 répondants prêts à se reconvertir hors du pétrole et du gaz sur 10 ont indiqué un intérêt pour au moins une des énergies proposées dans le questionnaire, ou mentionnent spontanément une autre énergie dans la question ouverte. Les trois secteurs ayant suscité la plus forte adhésion (géothermie, capture et stockage du carbone, éolien en mer) semblent correspondre aux activités hors pétrole et gaz actuellement privilégiées par les entreprises du secteur pour leur diversification, ce qui expliquerait une plus grande facilité à s’y projeter. Les passerelles entre les activités historiques et ces trois secteurs sont également plus évidentes à imaginer. L’éolien terrestre, le photovoltaïque, les batteries et le renforcement des réseaux électriques ont également suscité l’intérêt d’un nombre non négligeable de répondant·es (de 23 à 36 % en moyenne, avec de fortes variations en fonction de la profession et du domaine d’activités). Freins à la reconversion 43 % des répondant·es estiment devoir changer d’entreprise pour pouvoir se reconvertir hors du secteur pétrolier et gazier. Ce chiffre monte à 61 % pour les professions intermédiaires, tandis que les employé·es et ouvrier·es ne sont que 30 % à avoir confiance en la possibilité de se reconvertir au sein de leur entreprise. Actuellement, les reconversions de salarié·es du secteur sont principalement le fait de démarches individuelles, et un manque d’anticipation et d’organisation collective est constaté. Les répondants évoquent de nombreux freins à leur reconversion : le manque de formations, le coût et la difficulté de construire des passerelles due au cloisonnement entre les unités historiques et nouvelles au sein des entreprises. Certains répondants font également état d’une certaine défiance de la part des recruteurs d’autres secteurs. De fortes attentes vis-à-vis des pouvoirs publics Deux tiers des répondants estiment que les pouvoirs publics (État et régions) n’agissent pas suffisamment pour leur secteur. La proportion de personnes insatisfaites par l’action des pouvoirs publics est plus forte dans les entreprises parapétrolières et paragazières (71

Par Rebaud A., Compain G.

15 mars 2022

2% pour 2°C ! Les investissements publics et privés nécessaires pour atteindre la neutralité carbone de la France en 2050

Résumé exécutif du rapport 2 % pour 2°C : Les investissements publics et privés nécessaires pour atteindre la neutralité carbone de la France en 2050. La conférence de présentation du rapport peut-être visionnée entièrement sur notre chaîne YouTube. Le rapport complet est disponible en téléchargement. Au cours des dernières années, nous avons fixé des objectifs ambitieux pour le climat. Nous avons multiplié les accords internationaux, les lois et les stratégies nationales. Mais les résultats ne suivent pas : nos émissions baissent trop lentement. Une des causes principales de cet échec est que la reconstruction écologique de nos sociétés se heurte au mur de l’argent. Or, atteindre la neutralité carbone suppose, certains y verront un paradoxe au regard de l’impératif de sobriété, de nombreux investissements. Mais combien, exactement ? On pourrait imaginer que ce chiffrage existe déjà : en effet, comment penser des stratégies nationales bas carbone (SNBC) ou des programmations pluriannuelles pour l’énergie (PPE) sans aborder simultanément la question des moyens budgétaires et financiers nécessaires pour les atteindre ? Or, cela peut paraître surprenant, mais ce « recensement » n’existe tout simplement pas, malgré des tentatives éparses et incomplètes d’organismes publics ou privés de fournir des données. Cela nous conduit inévitablement à une forme de double discours en matière d’environnement : celui qui consiste à promettre beaucoup en matière d’objectifs, tout en mobilisant peu au niveau des financements. C’est à ce problème majeur pour la réussite de la transition bas-carbone et pour le débat démocratique et économique que ce rapport entreprend de s’attaquer. Notre objectif final, la raison d’être de ce rapport, est d’associer aux leviers de décarbonation de l’économie les moyens financiers nécessaires pour les réaliser. Nous chiffrons ces investissements, publics et privés confondus, à 182 milliards d’euros par an, dont 57 milliards d’euros par an en plus des investissements déjà prévus dans un scénario tendanciel, ce qui comprend aussi bien les dépenses « vertes » actuelles que celles dont nous pouvons anticiper la réorientation (par exemple les investissements actuels dans les véhicules thermiques seront transformés en investissements dans des véhicules électriques). Ces investissements supplémentaires représentent 2,3 % du PIB de la France en 2021. C’est ce qui donne le titre de notre rapport : 2 % du PIB d’investissements publics et privés supplémentaires sont nécessaires chaque année pour tenir notre engagement de neutralité carbone et faire notre juste part pour limiter le réchauffement à 2 degrés ! Précisons que ces « investissements » ne sont pas à considérer au sens économique strict du terme : il s’agit en réalité de l’ensemble des dépenses publiques et privées nécessaires pour atteindre les objectifs fixés et peuvent prendre la forme d’investissements durs, mais également de subventions, de crédits d’impôts, d’allégements fiscaux, d’aides à l’installation ou à la reforestation, de l’acquisition de biens par des ménages, etc. Sur ces 57 milliards d’euros supplémentaires, 36 milliards d’euros d’investissements devraient être pris en charge par l’État. 36 milliards d’euros par an d’argent public supplémentaire pour atteindre la neutralité carbone : qu’est-ce que c’est pour le budget de l’État ? C’est à peu près ce que paie chaque année l’État aux banques et autres investisseurs en remboursement des intérêts de sa dette publique (38 milliards d’euros pour 2022, plus de 40 milliards d’euros pendant les années 2010). C’est nettement moins que ce qu’on dépense chaque année pour la défense (50 milliards d’euros) ou que ce que les actionnaires privés ont perçu en dividendes en 2019 (49,2 milliards d’euros). Et c’est un peu moins que le premier plan d’urgence budgétaire mis en place dès le début de la pandémie en mars 2020 (42 milliards d’euros). Pour le climat aussi, il nous faut un plan d’urgence, dès maintenant et pour les années à venir. Quelques points de comparaison du surcoût public de l’ensemble des mesures proposées   Ces investissements publics et privés que nous requérons n’ont donc rien d’insurmontable : ils permettraient bien au contraire d’enclencher une dynamique vertueuse pour l’environnement, l’emploi, la santé et in fine la prospérité de nos concitoyens. Quelques précisions importantes pour bien comprendre le cadre de notre étude. Tout d’abord, cette dernière est centrée sur les investissements publics et privés qui permettront de réduire suffisamment les émissions de gaz à effet de serre de la France pour atteindre une neutralité carbone d’ici trente ans. Par conséquent, notre étude ne prend pas en compte l’ensemble des investissements qui seraient nécessaires à une politique complète de reconstruction écologique (préservation de la biodiversité et lutte contre la sixième extinction de masse que nous connaissons, reconstruction des réseaux d’eau, dépollution chimique des sols et des procédés, etc.), encore que plusieurs investissements étudiés contribuent aussi à agir sur ces fronts. Notre chiffrage constitue donc un plancher pour atteindre la neutralité carbone mais devrait être revu sensiblement à la hausse en intégrant les autres enjeux écologiques. Ce sera l’objet de travaux ultérieurs. En outre, nous avons évalué le coût de l’investissement en capital (le “Capex”) et avons donc laissé de côté les coûts opérationnels (les “Opex”), beaucoup plus difficiles à évaluer et anticiper. Ensuite, il est important de souligner que notre travail n’est pas d’ordre réglementaire mais plutôt budgétaire : nous ne nous préoccupons pas systématiquement des mesures législatives et réglementaires qui devront nécessairement accompagner le déploiement des investissements. Les mesures réglementaires les plus structurantes, ou constituant des prérequis aux investissements, sont cependant décrites. Enfin, si nous avons pleinement conscience de l’importance des enjeux liés au bon déploiement opérationnel d’une telle transition, l’ensemble des conditions nécessaires au bon déroulement de ce plan d’action chiffré n’est pas systématiquement décrit. Pour mettre en œuvre le plan d’investissement que nous proposons, nous recommandons, avec d’autres acteurs importants du débat, l’élaboration d’une loi de programmation pluriannuelle du financement de la reconstruction écologique (LPFRE), comme il en existe en matière de recherche et de défense, qui permettrait d’opérer une jonction étroite entre les objectifs fixés et les moyens de les atteindre. La plus-value et l’originalité de notre rapport est également de proposer une vision de ce que devrait contenir cette loi de programmation pluriannuelle de financement de la reconstruction écologique, secteur par secteur. Cette vision repose sur

Par Institut Rousseau, Giraud G., Dufrêne N., Nicol C., Kerlero de Rosbo G.

8 mars 2022

Il est urgent d’agir face au développement du marché des cryptoactifs et de séparer le bon grain de l’ivraie Tribune

Français 🇫🇷 | English 🇬🇧 | Deutsch 🇩🇪 | Italiano 🇮🇹 | Español 🇪🇸 Signée par plus de 170 économistes, informaticiens, experts et personnalités scientifiques, cette tribune a pour objectif d’alerter sur les risques croissants, en matière économique, financière, écologique et sociale, liés au développement anarchique des cryptoactifs. Face à l’inaction des États en cette matière, elle introduit également plusieurs principes de régulation pour maîtriser ces risques et poser les bases d’une utilisation saine et responsable des technologies innovantes sous-jacentes à ces cryptoactifs. Pour toute information supplémentaire au sujet de cette tribune et des travaux qui l’accompagnent, vous pouvez écrire à l’adresse : contact@institut-rousseau.fr. Vous souhaitez apporter votre soutien à notre démarche ? Vous pouvez remplir ce formulaire, vous serez ajouté aux signataires. Initiateurs : Nicolas Dufrêne, haut fonctionnaire, économiste et directeur de l’Institut Rousseau Jean-Michel Servet, professeur à l’Institut des hautes études internationales et du développement (Genève) Jean-Paul Delahaye, professeur à l’Université de Lille, informaticien et mathématicien Ont notamment soutenu la tribune : Gaël Giraud, directeur du programme de justice environnementale à l’Université de Georgetown et président d’honneur de l’Institut Rousseau Gérard Berry, Professeur émérite au Collège de France, médaille d’or du CNRS 2014 Michel Aglietta, professeur émérite université Paris Nanterre et conseiller scientifique au Cepii Jean-Louis Desvignes Président de l’Association des Réservistes du Chiffres et de la Sécurité de l’Information (ARCSI) Jean-Gabriel Ganascia, informaticien et philosophe, membre du comité national pilote d’éthique du numérique Alain Grandjean, économiste, entrepreneur et polytechnicien, membre du Haut Conseil pour le climat Serge Abiteboul, chercheur à l’Inria, Membre de l’Académie des Sciences Alain Supiot, juriste, professeur émérite au Collège de France Stéphane Ducasse, Directeur de recherche inria Rachid Guerraoui, professeur à l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), directeur du laboratoire de calcul distribué. Professeur invité sur la chaire annuelle Informatique et sciences numériques du Collège de France. Paul de Grauwe, London School of Economics, John Paulson Chair in European Political Economy Alexandre Rambaud, maître de conférences en comptabilité financière et écologique à AgroParisTech Jacques Dubochet, prof. hon. Université de Lausanne, prix Nobel, chimie 2017 Dominique Plihon, professeur émérite à l’Université Sorbonne Paris Nord François Morin, professeur émérite à l’Université Capitole de Toulouse Pierre Dockès, Professeur émérite de sciences économiques, université Lumière Lyon 2 Didier Roux, Membre de l’Académie des Sciences, Membre de l’Académie des Technologies Découvrir tous les signataires.   La tribune en langue française : Il est urgent d’agir face au développement du marché des cryptoactifs et de séparer le bon grain de l’ivraie Le monde monétaire et financier est actuellement bousculé par l’émergence des cryptoactifs. Avec plus de 2 000 milliards de dollars de capitalisation, ce marché compte désormais plus de 16 000 cryptoactifs et connaît une progression fulgurante depuis quelques années. La capitalisation du seul bitcoin, du fait de l’accroissement de son cours, est aujourd’hui à peu près égale à la masse monétaire du franc suisse. Le phénomène ne doit donc pas être pris à la légère. Par son volume, il questionne aujourd’hui directement l’ordre public financier et l’intérêt général. Or, les autorités n’ont jusqu’à présent pas pris la mesure des risques et des dommages que ce développement pourrait engendrer. Cette inaction s’explique sans doute par la difficulté à saisir la diversité du phénomène. En effet, les milliers de cryptoactifs existants ne sont pas de même nature et n’ont pas le même objet. Certains prétendent constituer des alternatives monétaires globales (Bitcoin) ; d’autres ne servent qu’à faciliter des paiements transfrontaliers (Ripple) ; d’autres encore ne sont que des amusements (Dogecoin). Le développement des actifs numériques permet certes de bousculer certaines pratiques et introduit des innovations utiles comme la possibilité de conclure des « contrats intelligents » grâce à la technologie des chaînes de blocs [blockchain], de se passer d’intermédiaires en matière de transferts de propriétés ou d’accélérer les paiements internationaux. Or, des cryptoactifs bien employés et bien régulés pourraient jouer le même rôle sans le caractère négatif majeur qui entache aujourd’hui, plus qu’il ne sert, leur essor. Car certains cryptoactifs, dont le bitcoin qui en est l’étendard, font courir des risques grandissants à nos sociétés. À cause de l’énergie qu’elles requièrent (près de 131 TWh, soit davantage que la Belgique et la Suisse), les blockchains utilisant un protocole de type « preuve de travail » provoquent un désastre écologique, qui va empirer. La forte volatilité du bitcoin porte atteinte à la stabilité financière car elle est opérée par des acteurs à la capitalisation parfois fragile et sans garde-fous, dans des marchés par ailleurs largement manipulés par quelques grands détenteurs de cryptoactifs. Enfin, la cohésion sociale et monétaire peut être menacée par les prétentions de certains d’encourager le développement de systèmes de paiement parallèles. Certains cryptoactifs font par ailleurs peser une lourde menace sur la sécurité des personnes et des États puisqu’ils facilitent les demandes de rançon, l’évasion fiscale ou le financement d’activités criminelles voire terroristes. Des cryptoactifs comme Monero, Dash ou Zcash ont même été pensés pour qu’il soit absolument impossible de suivre leurs opérations. Répondre à ces craintes légitimes en affirmant que le système bancaire et financier traditionnel n’est lui aussi pas exempt de reproches est hors de propos : ce dernier a évidemment aussi permis l’évasion fiscale et le financement du terrorisme, tout comme le financement d’activités polluantes mais les solutions sont connues : elles passent notamment par l’arraisonnement des chambres internationales de compensation par la justice, le renforcement des administrations fiscales, la réglementation du shadow banking… Alors que des efforts sont faits pour sortir de ces errements, pour les corriger et pour les punir, faut-il laisser apparaître un nouveau Far West financier non réglementé ? Faut-il, en recréant de nouveaux actifs polluants, spéculatifs et inégalitaires, anéantir les maigres efforts entrepris pour faciliter le partage des informations bancaires ? Faut-il également laisser se détourner une part significative de l’épargne d’investissements plus productifs ? La crainte de brider l’innovation ne doit pas freiner le besoin, légitime et urgent, de réglementation. La période dite de « bac à sable », dans laquelle les cryptoactifs pouvaient se développer anarchiquement sans

Par Institut Rousseau

8 février 2022

Les arguments en faveur de la preuve d’enjeu (POS) et contre la preuve de travail (POW) pour les chaînes de bloc

Aujourd’hui, un élément central des débats concernant les cryptoactifs[1] est la question de la méthode de sécurisation des chaînes de bloc (blockchains) publiques de type Bitcoin, Ethereum, Cardano, Solana, Polkadot, etc. Le problème principal est de savoir si l’utilisation d’un protocole « Preuve de travail » (« Proof of work », POW) est nécessaire pour assurer la sécurité du fonctionnement du réseau, ou si un protocole « Preuve d’enjeu » (« Proof of stake », POS) fait aussi bien. D’autres méthodes sont possibles (Proof of space, Proof of burn, etc.), mais toutes sans exception évitent la consommation électrique de la POW et sont donc, chacune à sa façon, plus proches de la POS que de la POW. Des défenseurs du Bitcoin soutiennent que la POW est meilleure et indispensable. Mon point de vue est diamétralement opposé ; la POS possède de multiples avantages sur la POW, qui n’est qu’une option choisie par Nakamoto pour s’opposer aux « attaques Sybil[2] », que la POS freine tout aussi bien. L’idée que la POW est une meilleure protection que la POS contre les attaques 51 % est encore un mythe qui ne résiste pas à l’examen (voir le paragraphe E, plus bas). Avec un recul de plusieurs années, on dispose aujourd’hui d’une large collection d’arguments convergents qui prouvent que la POS est préférable à la POW. L’idée que la POS est supérieure à la POW s’est maintenant largement imposée, sauf parmi ceux qui défendent que le protocole de Satoshi Nakamoto est né parfait et ne sera jamais ni égalé ni dépassé[3]. Or, si la régulation des cryptoactifs renvoie à d’autres dimensions monétaires et financières non traitées dans cette note, les enjeux écologiques et énergétiques de la POW sont au cœur des réflexions portant sur la sobriété énergétique.   A. L’argument principal en faveur de la POS se déduit d’une analyse de protocole L’argument principal en faveur de la POS provient d’une analyse de la différence des protocoles POW et POS. Il s’exprime en une phrase ; la POW est une POS qui confisque les mises. Autrement dit, qui entraîne un coût pour le validateur que le POS évite. Explications. Considérons un réseau pair-à-pair faisant fonctionner une cryptomonnaie (ou plutôt un cryptoactif) par le biais d’un registre (la « blockchain ») détenu par chacun des validateurs du réseau. Pour qu’il y ait des validateurs en nombre suffisant, le protocole prévoit une « incitation », c’est-à-dire une rémunération des validateurs. Cette rémunération peut provenir de la création de nouvelles unités de cryptomonnaie ou des commissions que les utilisateurs paient quand ils utilisent les services du réseau, ou des deux systèmes à la fois comme c’est le cas pour Bitcoin et Ethereum. Cette incitation doit être attribuée aux validateurs par un procédé précis et équitable. Il s’agit d’un problème délicat quand le réseau accepte l’anonymat des validateurs, ce qui est le cas pour Bitcoin et la plupart des blockchains publiques. Si l’incitation est distribuée fréquemment, le système peut l’attribuer à chaque période de fonctionnement (10 minutes pour le Bitcoin, 15 secondes pour Ethereum, etc.) à un seul validateur. Il sera choisi au hasard selon une méthode qui donnera des chances raisonnables à chaque validateur en proportion de son engagement, et cela en contournant les ruses d’éventuels tricheurs. Pour éviter les attaques Sybil, il faut mettre en œuvre une méthode qui annule les avantages que pourrait tirer celui qui multiplie ses pseudo-identités en utilisant de nombreux pseudonymes différents. La preuve de travail, POW, et la preuve d’enjeu, POS, sont les deux méthodes principales pour contrer les attaques Sybil. Avec la POW, la probabilité d’être choisi pour recevoir l’incitation à chaque période est proportionnelle à la capacité du validateur à mener un certain type de calcul (dans le cadre d’un concours de calcul organisé toutes les 10 minutes, par exemple pour le Bitcoin). Le travail de calcul mené par un validateur pour participer au concours de calcul se nomme le « minage ». On parle de machines qui « minent », et on les appelle « rigs de minage » ; il s’agit de machines spécialisées ne pouvant rien faire d’autre dans le cas du Bitcoin. Avec la POS, la probabilité d’être choisi pour recevoir l’incitation est proportionnelle à la somme qu’un validateur engage en la mettant sous séquestre, comme une mise placée au centre de la table d’une partie de poker. Cette somme engagée peut être confisquée s’il ne fait pas correctement le travail attendu de proposition d’une nouvelle page quand le choix tombe sur lui, ou s’il tente d’utiliser ses mises sur plusieurs blockchains parallèles quand il y a des duplications (« forks ») du registre. Cette méthode de punition est le « slashing » retenu par exemple par Ethereum pour son passage prévu de la POW à la POS. La somme engagée par un validateur est récupérée quand le validateur souhaite cesser sa participation. L’argent mis sous séquestre est donc risqué, mais n’est pas perdu ; il retourne aux validateurs si tout se passe normalement. Dans les deux cas un validateur engage des ressources — soit des capacités de calcul (POW), soit des fonds mis sous séquestre (POS). S’il multiplie ses pseudo-identités cela ne lui sert à rien car la probabilité d’être choisi est proportionnelle aux ressources engagées ; qu’il les engage sous plusieurs pseudonymes ou sous un seul ne change rien à ses gains. La POW et la POS sont donc des moyens parfaits rendant inopérantes les attaques Sybil. Il est clair que le problème de ces attaques a clairement été perçu par Satoshi Nakamoto et que c’est ce qui l’a conduit à utiliser la méthode de la POW. La différence entre la POW et la POS est qu’avec la POW, l’engagement d’un validateur est perdu. L’amortissement des machines engagées dans le concours de calcul, l’électricité achetée, ainsi que les frais de fonctionnement qu’entraîne le travail de « minage » sont définitivement perdus par les validateurs car ils ne sont, bien évidemment, pas récupérés quand les validateurs se retirent du jeu. Dans le cas de la POS, la somme mise sous séquestre pour participer durant une période plus ou moins longue est récupérée quand un validateur cesse de participer. On peut résumer la situation en disant

Par Delahaye J.

3 février 2022

Refonder l’organisation de l’État local et mettre fin à la libéralisation des politiques publiques environnementales consécutive aux vagues de décentralisation

Ce projet de note s’inscrit dans la continuité et en complément de celle publiée le 26 mars 2020 par l’Institut Rousseau et intitulée « Décentralisation et organisation territoriale : vers un retour de l’État ». Elle a pour objectif d’en poursuivre l’analyse sur les conséquences de la répartition actuelle des compétences au niveau local et de proposer, en réponse, des propositions quant à l’organisation territoriale de l’État et la répartition des compétences au niveau infra-régional. Le prisme principal de cette analyse est celui de l’aménagement du territoire et des politiques environnementales, qui sont parmi celles où la décentralisation a été la plus poussée, emportant avec elle des effets pervers aux conséquences désormais difficilement soutenables. Introduction Les politiques liées à l’aménagement du territoire (autrefois appelées planificatrices, terme désormais connoté comme trop dirigiste et ingérant), et plus largement liées à l’environnement font partie de celles qui ont été les premières et les plus décentralisées, de façon continue depuis bientôt 40 ans. Cette décentralisation dont il sera mis en évidence qu’elle s’est faite de façon incrémentielle, ni évaluée ni structurée a conduit à une situation actuelle d’une complexité difficilement descriptible et dont tous les acteurs, bien que pour des motifs différents, s’accordent à dire qu’elle n’est ni soutenable ni durable. Dans ce paysage devenu illisible et dans lequel l’intérêt général s’évalue généralement sous le seul prisme économique, l’État local relictuel est devenu le plus souvent spectateur de la mise en œuvre insatisfaisante des politiques pourtant décidées par le gouvernement et votées par le Parlement. Il tente ainsi maladroitement de continuer à exister en troquant sa casquette régalienne pour un rôle d’accompagnement coupable ou d’influenceur sur le déclin. Comme cela sera démontré et illustré plus loin à partir d’exemples, cet état de fait permet d’expliquer en grande partie l’échec des politiques nationales environnementales, politiques dont les objectifs sont, en toute conscience, fixés sans espoir de les atteindre car sans maîtrise des leviers d’actions par l’État ni contrôle de leur mise en œuvre effective par ceux qui en ont les compétences. C’est ainsi que nous constatons sur de nombreux domaines environnementaux des résultats médiocres, très éloignés des objectifs nationaux et encore davantage de ce que la situation exige. On peut citer de façon non exhaustive la réduction des pollutions des eaux, la réduction de l’artificialisation des sols, la réduction des déchets, la restauration écologique, la limitation des émissions de particules fines…objectifs dont certains valent à la France d’être rappelée à l’ordre ou en procédure contentieuse de l’UE [1][2]. Intégrant par postulat les propositions de la publication du 26 mars 2020 par l’IR et intitulée « Décentralisation et organisation territoriale : vers un retour de l’État », cet article vient les étayer et les compléter par d’autres propositions portant plus particulièrement sur la définition des politiques publiques liées à l’environnement et à l’aménagement du territoire, à la répartition de leurs compétences et à la réorganisation de l’État local. Il mettra en évidence que l’organisation actuelle ne peut garantir la mise en œuvre effective des mesures permettant d’atteindre les objectifs (dont certains sont déjà fixés et annoncés) concourant à la nécessaire « transition écologique » de la France. Plusieurs propositions y sont faites pour pallier ce problème en s’appuyant sur une révision de la décentralisation mais aussi une réforme à la fois pratique et de l’organisation de l’État local qui doit retrouver pleinement sa présence, sa légitimité et son utilité aux yeux d’élus locaux aux attentes différentes, partagés entre sentiment d’abandon et critique d’une verticalité trop marquée. I – De la décentralisation à la différenciation : la libéralisation des politiques publiques environnementales et d’aménagement du territoire   Les étapes du démantèlement et de la libéralisation des politiques publiques environnementales 1982, l’acte 1 : une opportunité à coût politique faible au sortir des Trente Glorieuses   La fin des Trente Glorieuses ne permettent plus à l’État de continuer son rôle de planificateur/constructeur Au sortir d’une guerre qui a ravagé le pays, mais qui l’a aussi soudé et obligé à revoir en profondeur ses institutions, sa structure sociale et ses interactions avec le reste le monde, la France se reconstruit et se modernise rapidement et dans un élan qui ne sera brisé que par les chocs pétroliers des années 1970. Les Trente Glorieuses sont l’apogée de l’État moderne planificateur et bâtisseur, l’époque des grandes avancées technologiques et des choix déterminants en particulier dans les domaines agricole, de l’énergie, des transports, de l’habitat… redéfinissant complètement l’aménagement du territoire. Ces choix se nourrissent alors d’une croissance économique continue et surtout d’énergies carbonées accessibles et facilement disponibles. Cette dépendance rend le pays très vulnérable aux chocs pétroliers (et gaziers) successifs qui ne font qu’initier le déclin d’un modèle qui, avec un recul critique maintenant évident mais difficilement audible dans le contexte de l’époque, ne pouvait perdurer. L’État commence alors à douter et à s’interroger sur ses propres missions face à ses premières difficultés financières depuis des décennies, à une concurrence internationale croissante, à une perte d’autonomie liée à l’intégration croissante des politiques au niveau européen et à une société de plus en plus accusatrice de ce qu’elle juge être des manquements de sa part. Les lois Deferre actent des principes généraux qui seront lourds de conséquence C’est dans ce contexte, qui en est en grande partie la cause, qu’intervient la première alternance de la Vème République avec l’arrivée de la gauche au pouvoir. Le constat d’un État qui a été probablement trop dirigiste et sûr de lui, en qui la confiance est écornée et qui ne peut plus s’affranchir du cadre européen et international ouvre la voie au début de la décentralisation dès l’entame de mandat en 1982 au travers des lois Deferre ; cette politique est soutenue idéologiquement par le nouvel exécutif. De ces premières d’une longue série de lois de décentralisation, on retient d’abord la création d’un nouvel échelon administratif territorial, les régions, avec les conséquences déjà développées dans une précédente note de l’Institut[3] sur lesquelles nous reviendrons. En corollaire est instauré le transfert de « blocs » de compétences (qui sont en réalité rarement des blocs, mais des portions) aux désormais trois

Par Delelys A.

27 janvier 2022

Droit du travail, droit zombie Comment reconquérir les zones de non-droit du travail ?

Introduction « Droit du travail, droit vivant » : c’est de cette manière peu académique que le Professeur Jean-Emmanuel Ray a intitulé son manuel de droit du travail. À juste titre d’ailleurs, puisqu’il est parvenu à rendre vivante cette matière réputée technique et austère. Ce faisant, il a grandement contribué à démocratiser le droit du travail qui, par nature, en a tout particulièrement besoin. Dans certains de ses écrits pourtant, ce même auteur fait imperceptiblement passer le droit du travail de vie à trépas pour toute une frange de la population des travailleurs. C’est par exemple le cas dans sa chronique au journal Le Monde datée du 3 mars 2021 et consacrée à une décision de la Cour suprême du Royaume-Uni sur le statut des travailleurs des plateformes numériques[1]. Il y écrit en particulier la phrase suivante : « N’en déplaise aux fanatiques du travail subordonné, idéal insurpassable, le « travail à la demande » correspond pour nombre d’entre eux – en particulier les jeunes – à une « demande de travail » flexible, quitte à en payer le prix : tel le loup face au chien de la fable de La Fontaine. » Dans cette fable, un loup préfère rester affamé et libre plutôt que de devenir comme le dogue, replet mais enchaîné. À y regarder de près, elle éclaire fort mal la position de la Cour suprême britannique, objet de la chronique : en effet, les juges y affirment que les travailleurs des plateformes sont en réalité beaucoup trop subordonnés pour qu’on puisse leur appliquer le statut de travailleur indépendant. On pourrait transposer ce jugement dans la fable de la manière suivante : le loup était tellement affamé qu’il s’est finalement laissé enchaîner, sans espoir d’acquérir un jour l’embonpoint de son compère le dogue. La fable a du moins le mérite de traduire le fond de la pensée de Jean-Emmanuel Ray dont la logique sous-jacente peut être résumée ainsi : puisque le droit du travail implique la subordination du travailleur, celui-ci peut s’en débarrasser en optant pour le statut de travailleur indépendant[2]. Nombreux sont ceux qui font le même raisonnement : c’est d’ailleurs celui qui a conféré aux plateformes une certaine légitimité aux yeux de l’opinion et des pouvoirs publics. Mais il tient en réalité du sophisme car l’idée que le droit du travail engendre la subordination n’est que le résultat d’une construction juridique qui se nourrit d’elle-même. La subordination juridique est en effet le critère retenu par la jurisprudence pour définir le champ d’application du droit du travail. Comme son nom l’indique, il s’agit d’un artifice purement juridique. Ce n’est pas le droit du travail qui crée la subordination : elle découle de la dépendance économique à laquelle les travailleurs se trouvent réduits à l’égard des donneurs d’ouvrage lorsqu’ils ne disposent ni des moyens de production (matériels ou financiers), ni d’un pouvoir d’organisation de l’activité, ni d’un accès direct à la clientèle. La subordination du travail est en réalité consubstantielle à l’économie capitaliste[3]. Le droit du travail intervient seulement pour empêcher que cette subordination ne s’exerce de manière absolue. Un salarié bénéficiant du droit du travail dispose souvent de plus de marge de manœuvre à l’égard de son employeur qu’un faux indépendant à l’égard de son donneur d’ordre[4]. Enterrer le droit du travail n’épargne donc pas aux travailleurs la subordination mais les prive seulement des protections qu’ils pouvaient en tirer. En tout état de cause, pour une partie non négligeable des travailleurs, le droit du travail est aujourd’hui plus mort que vivant[5]. Il est vrai qu’ils sont largement moins nombreux que ceux pour qui le droit du travail survit, malgré les coups de boutoirs de la flexibilisation. Mais rien ne garantit qu’un nombre croissant de salariés ne viendra pas grossir les cohortes de travailleurs « zombie » au regard du droit du travail. En effet, si on admet, que ce soit en théorie ou en pratique, que le droit du travail puisse ne plus s’appliquer à des travailleurs sans qualification, comment justifier qu’il continue de s’appliquer à des travailleurs objectivement plus autonomes ? Aujourd’hui les dérives de l’ubérisation sont dénoncées tant par des publications académiques[6] que par des articles de presse ou des documentaires[7]. Au-delà de l’ubérisation, les différentes formes d’éviction du droit du travail font également l’objet d’analyses critiques de plus en plus tranchantes[8] et la pertinence du critère de subordination juridique est questionnée de plus en plus directement[9]. Mais les années passent et la part zombie du droit du travail, qu’on peut aussi appeler le « non-droit du travail », ne reflue pas. Elle prospère même dans l’ombre, autorisant le développement de conditions de travail et d’emploi indignes d’une société évoluée. Notre étude entend s’attaquer à la question suivante : comment reconquérir de manière effective les zones de non-droit du travail, ces zones que personne ou presque ne trouve défendables une fois placées sous la lumière des projecteurs ? Pour y parvenir, deux écueils dans la compréhension du problème nous semblent devoir être levés : – Le premier concerne la focalisation sur l’ubérisation, dont l’une des principales spécificités est d’avoir assumé au grand jour l’éviction du droit du travail. Il ne s’agit en réalité que de la partie émergée de l’iceberg. L’ubérisation est l’aboutissement d’un phénomène bien plus ancien et bien plus étendu d’éviction du droit du travail qui, lui, est resté dans l’obscurité. – Le deuxième tient à l’amalgame dans lequel la question du statut des travailleurs indépendants s’est engluée. La plupart du temps, celle-ci est présentée comme un tout dont la solution consiste à rechercher la frontière juridique la plus adéquate entre les statuts de salarié et de travailleur indépendant. Or, pour les travailleurs faussement indépendants, on est en présence d’un problème de non-application abusive du droit du travail plutôt que d’un problème de définition de ses frontières, même si les deux sont imbriqués. Il n’y a donc pas lieu de traiter la situation des faux indépendants dans le même mouvement que les aspirations à l’autonomie de travailleurs hyperqualifiés ou que le rejet par les jeunes générations des organisations contraignantes (on peut du reste douter que ce rejet ait quelque chose à voir avec le droit

Par Euzier J.

20 décembre 2021

    Partager

    EmailFacebookTwitterLinkedInTelegram