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Les élus face au dilemme de l’achat public local

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      Les élus face au dilemme de l’achat public local

      « Pourquoi le maire n’a-t-il pas confié les travaux de la salle des fêtes à quelqu’un du coin ? » ; « Quitte à imprimer des tracts pour le marché de Noël, autant soutenir l’imprimeur local… » ; « Comment est-ce possible que la fabrication dordognaise de cartes vitales ait été délocalisée en Inde ? ». Régulièrement, les citoyens reprochent aux élus de ne pas dépenser localement l’argent public. Mais quelles sont vraiment les règles applicables ; ont-ils seulement le droit d’exprimer une telle préférence ?

      Le 27 janvier 1986, la commune de Ventenac-en-Minervois, située dans le département de l’Aube, décide de sélectionner une entreprise pour construire un bâtiment industriel à usage de pelleterie, c’est-à-dire spécialisé dans la préparation de fourrures. Elle indique dans l’avis d’appel d’offre sa préférence pour une entreprise locale, afin de soutenir l’emploi et les finances de la ville. À l’époque, la législation applicable laisse une marge de manœuvre importante aux acheteurs publics et le maire a toutes les raisons de penser qu’il agit dans l’intérêt des habitants de sa commune. Finalement, le marché public est bien attribué à une entreprise implantée à proximité, mais un concurrent évincé saisit le juge administratif, qui sanctionne l’usage du critère de préférence locale[1].

      Cette solution jurisprudentielle n’a pas pris une ride depuis et l’incompréhension demeure car l’impact économique de la commande publique n’est plus à démontrer[2] : pourquoi ne pas s’en servir pour soutenir l’emploi et le dynamisme des communes, départements et régions ?

      L’Institut Rousseau propose un état des lieux et des solutions pour favoriser la commande publique responsable et locale.

       

      1/ Aux origines de l’interdiction de la préférence locale

       

      Pour comprendre les raisons qui poussent le Conseil d’État à sanctionner la commune de Ventenac-en-Minervois en 1994, il faut se rappeler que, dès 1957, le Traité de Rome interdit toute discrimination en raison de la nationalité[3], qu’elle soit ostensible ou dissimulée[4]. Aucune réglementation nationale ne peut donc valablement réserver un pourcentage de marchés publics à des entreprises nationales ou régionales[5]. En 1992, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE), rebaptisée depuis le Traité de Lisbonne, en 2009, Cour de justice de l’Union européenne, pose également le principe d’interdiction de toute préférence locale : il est rigoureusement interdit d’attribuer un marché public sur la base d’un critère d’origine ou d’implantation géographique des candidats[6]. Plutôt que d’intervenir directement dans l’économie – en l’occurrence pour soutenir une entreprise au motif qu’elle est implantée localement – l’État s’efface et revendique sa neutralité.

      Cette solution d’inspiration néolibérale a été reprise dans l’Accord sur les marchés publics (AMP) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont la France est membre : il est interdit de discriminer en accordant une protection à des fournisseurs, marchandises ou services nationaux[7].

      Il existe néanmoins une exception, lorsque l’implantation géographique est nécessaire à la bonne exécution du contrat, par exemple pour intervenir rapidement[8]. Mais, outre le fait que les exemples sont rares, même dans ce cas, le critère géographique ne peut pas préexister à l’attribution du marché, c’est-à-dire qu’un candidat qui s’engage à s’implanter localement devra être considéré au même titre qu’un autre déjà présent sur place[9].

      Plusieurs principes – dits fondamentaux – assurent l’effectivité de la non-préférence locale. À travers la publicité du marché et la mise en concurrence des entreprises, les acheteurs publics assurent l’égalité d’accès. Tout au long de la procédure, ils traitent les candidats de la même manière et de façon transparente, ce qui leur permet, in fine, de choisir l’offre la plus avantageuse[10] en fonction des critères déterminés au départ[11]. Il faut dire, enfin, que l’existence d’une sanction pénale dissuade fortement de braver cette interdiction[12].

      Il est unanimement admis que la publicité, la mise en concurrence et la transparence des procédures ont amélioré l’efficacité de la commande publique et permis de mieux utiliser les deniers publics. Tout au long des dernières années, il faut saluer le travail de ceux qui ont œuvré pour que ces règles se généralisent dans les pratiques des acheteurs publics. Il n’en demeure pas moins que la non-préférence locale est un choix politique, qui pourrait évoluer sans remettre en cause tout ce mouvement de rationalisation.

       

      2/ L’approvisionnement auprès des entreprises de proximité

       

      En réalité, certaines évolutions ont déjà eu lieu ; des moyens existent dans le corpus de règles applicables pour favoriser, indirectement et subtilement, les entreprises de proximité. Réunie en septembre 2020 pour discuter du « retour en force du made in France dans la commande publique », l’Association pour l’achat dans les services publics (APASP), qui réunit plus de deux mille acheteurs, remarquait qu’il est difficile de déterminer ce qu’est un produit fabriqué en France. Il est vrai que la question mérite d’être posée et que l’étiquetage obligatoire des produits apparaît comme un préalable nécessaire au développement d’un véritable achat public local, au même titre – d’ailleurs – que pour tous les consommateurs[13]. Mais, même si cet étiquetage existait, comment concilier le soutien aux entreprises avec la prohibition de toute préférence locale ?

      2.1 – L’introduction de clauses environnementales et sociales

      Le premier élément de réponse a été introduit par une directive européenne de 2004[14], qui prévoit la possibilité de prescrire des caractéristiques environnementales et sociales dans les spécifications techniques des marchés publics.
      Concrètement, les acheteurs peuvent exprimer – avant la publicité – une préférence pour la méthode de production ou les caractéristiques environnementales des produits et des services qu’ils cherchent (limitation des émissions de gaz à effet de serre, qualité, fraîcheur, saisonnalité, par exemple). Ils peuvent aussi prendre en compte le nombre d’emplois créés[15] ou faire usage d’un écolabel, à condition que ces critères soient accessibles et disponibles à tous[16]. Pendant l’exécution, ils ont la faculté de favoriser l’emploi de personnes handicapées ou en difficulté, la formation des chômeurs ou des jeunes, et ce même au-delà de ce qui est exigé par la législation nationale[17].
      En 2012, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a consacré cette pratique, dans le cadre d’un marché public de thés et cafés issus du commerce équitable[18] et, depuis 2018, le développement durable – dans ses dimensions économique, sociale et environnementale – figure parmi les éléments pris en compte au moment de la définition des besoins[19].
      Aujourd’hui, l’acheteur public est donc juridiquement capable de soutenir telle ou telle façon de produire et d’exécuter son marché. En maniant bien ces critères, il peut – indirectement – orienter le choix vers les entreprises locales, sans pour autant faire de préférence locale. Le sourcing lui permet également de rechercher et d’évaluer ce qui existe autour, en amont de la procédure de passation, pour adapter ses demandes à ce qui est produit près de chez lui [20].

      Du moins en théorie, car, en pratique, le prix écrase bien souvent le reste.

      Le mécanisme de la pondération[21], qui consiste à affecter un coefficient à chaque critère, n’est pourtant pas encadré et la personne publique est libre de fixer le poids respectif de chaque élément, ce qui laisse une marge de manœuvre importante. Il n’en demeure pas moins que, dans les faits, « l’offre économiquement la plus avantageuse »[22] est souvent la moins chère, et ce constat amène à relativiser l’importance du mécanisme des clauses environnementales et sociales. Une évolution intéressante serait donc d’aller au-delà de l’incitation, en imposant, par exemple, que ces critères extra-financiers représentent un poids minimum dans la pondération.
      Par ailleurs, favoriser indirectement le local est risqué puisque l’acheteur ne peut pas recourir à des clauses d’exécution qui seraient plus difficilement satisfaites par les entreprises étrangères[23]. Outre la complexité pour définir le besoin, il faut donc avoir une conscience aiguë des règles applicables pour les manier habilement, sans compter la peur d’engager sa responsabilité pénale.
      Quand l’acheteur est suffisamment averti, les élus n’y sont pas forcément sensibles, et inversement. Si bien que l’achat de proximité est loin d’être une évidence, et qu’il est bien plus facile de traiter avec les grandes firmes multinationales. De fait, la part des petites et moyennes structures représente 60 % du nombre de marchés publics, mais seulement 30 % de leur montant total[24].

      Proposition n°1 : Diffuser un guide des bonnes pratiques, faire évoluer les habitudes des administrations et former les élus et les acheteurs publics, pour utiliser mieux et davantage les possibilités offertes par les clauses environnementales et sociales dans les critères de sélection des marchés publics, et ainsi orienter le choix vers les offres des entreprises locales.

      Proposition n°2 : Introduire à l’article L2111-1 du Code de la commande publique un poids minimum obligatoire dédié aux critères environnementaux et sociaux dans la pondération des marchés publics (limitation des émissions de gaz à effet de serre, nombre d’emplois créés, etc).

      2.2 – Restauration collective et circuits courts agricoles

      Une ancienne jurisprudence de la CJUE autorise la vente directe de produits s’il existe dans le périmètre proche de la collectivité une offre diversifiée et significative[25]. Depuis 2011, la France s’est donnée comme objectif de recourir à des produits en circuits courts de distribution pour ses services de restauration collective[26]. Mais attention, cela ne signifie pas que les acheteurs puissent directement solliciter des entreprises de proximité. Comme l’a rappelé récemment le ministère de l’Économie, la préférence locale est toujours strictement interdite et il n’est pas question de la remettre en cause[27].

      Il n’y a pas de définition officielle du circuit court, mais, pour l’administration, c’est un mode de vente, qui limite le nombre d’intermédiaires sans lien avec la proximité physique (c’est-à-dire le kilométrage)[28]. Un fournisseur étranger peut répondre valablement au marché s’il respecte cette exigence. Néanmoins, la mise en place de ce critère est un outil de plus, qui permet aux acheteurs de soutenir les agriculteurs locaux. Il serait intéressant d’étudier son application aux marchés publics de produits industriels et artisanaux.

      Dans le même temps, l’État incite les acheteurs à « favoriser l’ancrage territorial de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles »[29]. En 2016, le ministère de l’Agriculture a publié un guide pour « favoriser l’approvisionnement local » dans la restauration collective. Cette situation ne manque pas de créer un certain flou. D’autant qu’en 2019, le ministère de l’Économie indiquait au député Benoît Potterie que l’accès des entreprises locales aux marchés publics est un enjeu majeur « pour le développement économique des territoires et la croissance de nos petites et moyennes entreprises, qui représentent 99,9 % des entreprises françaises et 48,3 % de l’emploi salarié, et en particulier pour celles qui offrent des prestations de proximité ». L’esprit tranche avec la réponse qui avait été apportée à une question similaire du député PS Jean-Paul Dupré en 2016, preuve que les mentalités évoluent[30].

      Tout se passe, donc, comme si l’État et les collectivités territoriales étaient les premiers pénalisés par une règle qu’ils se sont eux-mêmes imposée.

      Proposition n°3 : Persévérer dans le recours aux circuits courts agricoles pour les marchés publics de restauration collective, qui permettent de soutenir efficacement – dès aujourd’hui – les agriculteurs français. Étudier l’application de la limitation du nombre d’intermédiaires également aux marchés publics de fourniture de produits industriels et artisanaux.

       

      3/ Soutenir le tissu économique local

      Faut-il faire de la pédagogie auprès des acheteurs publics pour qu’ils utilisent mieux les outils à leur disposition ou remettre en cause – même partiellement – l’interdiction de toute préférence locale ? Sans doute les deux.

      Il est certain que la règlementation européenne – et sa transposition dans le droit français – ne favorisent pas l’approvisionnement local, mais ils autorisent l’introduction de certains critères – trop peu connus – qui sont de nature à privilégier les circuits courts, de proximité et de qualité. Par peur du contentieux, les acheteurs définissent souvent leurs besoins trop largement[31]. S’agit-il d’un manque de professionnalisme ? Il faut admettre que les règles sont loin d’être évidentes, et qu’à force de les tordre pour faire dire l’inverse de ce qu’elles énoncent, leur application est difficile.

      Au printemps, alors que la France est ébranlée par une crise sanitaire sans précédent, les entreprises françaises, encouragées par les pouvoirs publics, investissent pour produire des masques sur l’ensemble du pays. Mais au début de l’été, ils déchantent : les commandes s’annulent au fur-et-à-mesure que les cargaisons asiatiques atterrissent et, manifestement, l’État se fournit à l’étranger[32]. Désormais, toutes les simulations existantes prédisent en 2021 une augmentation très forte des défaillances de très petites, petites et moyennes entreprises (TPE/PME) par rapport aux années précédentes[33]. Elles représentent pourtant près de la moitié de la valeur ajoutée[34]. Demain, lorsque le chômage partiel et les prêts bancaires garantis auront disparu, il faudra bien que la France protège son tissu économique local, déjà fragilisé ces dernières années par la concurrence étrangère à bas salaires.

      Alors, certains proposent – enfin – de se servir des milliards dépensés chaque année par les personnes publiques dans le cadre de la commande publique[35], pour soutenir les entreprises locales. D’ailleurs, cette idée n’est pas neuve. Déjà en 2008, le gouvernement avait décidé de rehausser le seuil des marchés passés sans publicité ni mise en concurrence de 4 000 euros à 20 000 euros[36]. On se rappelle que le Conseil d’État avait annulé cette disposition, au motif qu’elle contrevient à l’égalité d’accès des candidats et à la transparence des procédures[37]. Pourtant, le seuil a grimpé à 15 000 euros en 2011[38], puis 25 000 euros en 2015[39] et 40 000 euros en 2020[40]. Cette mesure vise particulièrement les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE/PME), qui ne disposent pas d’un service juridique structuré pour répondre aux lourdes formalités des marchés publics[41]. Les acheteurs doivent simplement veiller à ne pas contractualiser systématiquement avec la même entreprise quand il existe une pluralité d’offres correspondant aux besoins[42].

      La mise en place d’un seuil de 100 000 euros pour les achats publics innovants en 2018 est également une mesure intéressante, qui permet d’instaurer un dialogue avec les entreprises de taille modeste à l’origine d’une idée nouvelle qui va être – ou vient d’être – commercialisée. Le dispositif est en vigueur jusqu’au 25 décembre 2021[43].

      En juillet 2020, le gouvernement a décidé de rehausser exceptionnellement le seuil des marchés publics de travaux (70 000 euros) et des denrées alimentaires (100 000 euros) pour soutenir les entreprises du bâtiment et travaux publics (BTP) et les producteurs agricoles[44], très touchés par la crise de la Covid-19. Depuis, pour dynamiser et accélérer le rythme des commandes, le seuil des premiers a même été temporairement relevé à 100 000 euros[45].

      Il est donc possible aux acheteurs de contracter directement avec des entreprises locales, ce qui permettra de maintenir ou créer des emplois[46].

      Il faut également noter l’introduction récente[47] d’un « motif d’intérêt général » justifiant la passation de marchés sans publicité ni mise en concurrence[48], qui a donné lieu à de vives discussions au sein de l’hémicycle du Palais Bourbon. Certains considèrent que cette dérogation large ouvre la voie à des contrats opaques, conclus de gré à gré. Elle a pourtant été validée par le Conseil Constitutionnel[49] ; ses limites devraient être fixées bientôt par décret en Conseil d’État.


      Rehausser le seuil des marchés publics passés sans publicité ni mise en concurrence était nécessaire, dans la mesure où il n’existe pas – en l’état actuel du droit – de moyen de soutenir directement les entreprises locales. C’est pourtant prendre un risque : celui de voir de vrais délits de favoritisme, comme cela a trop souvent existé avant la mise en place des règles qui encadrent aujourd’hui la commande publique. Faut-il pour autant revenir à une situation de concurrence généralisée, qui paralyse les petites entreprises de proximité ? Certainement pas : il doit être possible de créer les conditions d’une concurrence qui valorise les particularités locales, tout en évitant de gré à gré, qui favorise l’opacité.


      Proposition n°4 : Conduire une action d’influence en faveur d’une modification des textes européens rendant possible – en l’encadrant – la préférence locale dans les marchés publics.
      Cette proposition suppose de remettre en cause l’interprétation constante qui a été faite par la Commission européenne et par la CJUE de l’actuel article 18 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui prohibe toute discrimination en raison de la nationalité (ancien article 7 du Traité de Rome). Elle conditionne l’évolution de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel et des juridictions françaises.

      Proposition n°5 : Conduire une action d’influence en faveur d’une modification de l’Accord sur les marchés publics de l’Organisation mondiale du commerce pour nuancer le principe de non-priorité aux fournisseurs, marchandises et services nationaux.

      Proposition n°6 : Plutôt que de rehausser le seuil des marchés publics sans publicité ni mise en concurrence, modifier l’article L3 du Code de la commande publique, en y indiquant que la liberté d’accès et l’égalité de traitement des candidats peut s’exercer à l’échelon local, national ou international, en tenant compte – pour des raisons à la fois sociales et écologiques – du lieu de fabrication des produits et de l’implantation géographique des candidats.

       

      Conclusion

       

      Consommer localement est toujours un acte militant, mais de plus en plus courant. D’où l’incompréhension croissante de ne pas voir les pouvoirs publics – qui agissent en vertu de la représentation[50] – montrer l’exemple. Une proposition de loi enregistrée en été 2020 au Sénat pourrait ouvrir la porte à une remise en cause plus générale de l’interdiction de la préférence locale[51], mais la Commission qui l’a examinée précise – à juste titre – dans son rapport que « les critères géographiques d’attribution des contrats de la commande publique sont très difficilement conciliables avec les règles tant constitutionnelles qu’européennes »[52]. Cette conciliation devra pourtant avoir lieu. Les règles actuelles permettent certes – si elles sont bien maniées – d’aboutir au même résultat, mais elles ne suffisent pas.

      En réalité, la préférence locale bénéficierait à tous. Les personnes publiques pourraient ainsi dynamiser leurs communes, départements et régions et les élus retrouveraient une certaine marge de manœuvre politique. Les entreprises s’appuieraient financièrement sur la commande publique, et leurs activités pourraient même être orientées indirectement au moyen des clauses environnementales et sociales. Enfin, les citoyens y trouveraient leur compte à la fois en tant qu’employés et en tant qu’habitants de leur collectivité.

      Il faut néanmoins rappeler deux choses :
      – d’une part, il n’a jamais été question dans ces développements de remettre en cause les principes de libre accès, de transparence et de mise en concurrence ; tout est une question d’échelle, de périmètre. Remettre en cause l’interdiction de toute préférence locale, ce n’est pas admettre un choix discrétionnaire, sur la base de la seule préférence locale. C’est, en revanche, pour des raisons à la fois sociales et écologiques, éviter d’acheter ailleurs quand on peut se fournir géographiquement proche.
      – d’autre part, dans un souci de bonne gestion des deniers publics, il est évident que le critère du prix est important. Acheter local ne doit pas se faire à n’importe quelle condition. En 1986, dans l’arrêt présenté en introduction de cette note, la commune de Ventenac-en-Minervois avait prévu un mécanisme intéressant, qui conditionnait l’attribution du marché à une entreprise locale si ses prix n’excédaient pas de 4 % ceux des éventuels concurrents.

      La transparence des procédures a des vertus ; elle est la garantie d’une bonne utilisation des deniers publics, parce qu’elle permet tout simplement d’acheter au meilleur prix et de savoir où l’argent est dépensé. Il est dommageable cependant que cette notion soit interprétée comme un droit de se substituer partout à n’importe quelle entreprise. En faisant disparaître toute référence à l’implantation géographique, l’achat public devient froid, aseptisé. Pour des raisons sociales et écologiques, l’heure de la préférence locale est arrivée et l’achat public deviendra ainsi – du moins partiellement – l’expression d’une politique publique.

       

      ____

      [1] CE, 29 juillet 1994, Commune de Ventenac-en-Minervois, af. 131562.

      [2] 87,5 milliards d’euros en 2019 (marchés publics et concessions), Baromètre de la commande publique de l’Assemblée des communautés de France et Banque des Territoires, 6 mars 2020. Soit un peu plus de 3,5 % du PIB en 2019 (INSEE).

      [3] Traité de Rome, instituant la Communauté économique européenne (CEE), 20 mars 1957 (art. 7).

      [4] C’est-à-dire qu’elle aboutisse, par application d’autres critères de distinction, au même résultat. CJCE, 5 décembre 1988, Commission c/ Italie, af. C-3/88, point n°8, rec. 4035.

      [5] CJCE, 20 mars 1990, Du Pont de Nemours, af. C-21/88, rec. p. I-889. La solution est réaffirmée un an plus tard dans la décision CJCE, 11 juillet 1991, Laboratori Bruneau SRL c/ Unità sanitaria locale RM/24 di Monterotondo, af. C351/88 (fondement art. 59 du Traité de Rome).

      [6] CJCE, 3 juin 1992, Commission c/ République Italienne, af. n°C-360/89.

      [7] Article 4 de l’AMP de l’OMC, signé en avril 1994, révisé en 2012.

      [8] Nécessité de disposer d’une équipe pouvant intervenir rapidement sur le lieu d’exécution du marché afin d’assurer la continuité du service public du réseau routier. CAA Bordeaux, 25 mai 2004, Société Probinord, af. 00BX02265.

      [9] CE, 14 janvier 1998, Société Martin-Fourquin, af. 168688.

      [10] Ces principes ont acquis valeur constitutionnelle : CC, 26 juin 2003, Loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit, af. 2003-473DC, sur le fondement des articles 6 et 14 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789. Ils figurent, depuis 2018, à l’art. L3 du code de la commande publique.

      [11] CJUE, 10 décembre 2009, Commission c/ France, af. C-299/08, rec. p. I-11587.

      [12] Le délit de favoritisme (art. 432-14 code pénal) est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Pour une application concrète, voir Cass. Crim. 22 janvier 2014, af. 13-80.759 : un maire avait, dès l’ouverture du marché, l’intention de favoriser un imprimeur local.

      [13] On pourra lire La schizophrénie de l’étiquetage des produits, publié le 5 décembre 2020 chez Hémisphère Gauche : https://hemispheregauche.fr/la-schizophrenie-de-letiquetage-des-produits

      [14] Directive 2004/18/CE du 31 mars 2004.

      [15] CE, 7ème et 2ème chambres réunies, 20 décembre 2019, af. n°428290.

      [16] Directive 2004/18/CE du 31 mars 2004, point n°29. Ces exigences figurent aujourd’hui aux art. R.2111-14 et R.2111-15 du Code de la commande publique.

      [17] Directive 2004/18/CE du 31 mars 2004, point n°33.

      [18] CJUE, 10 mai 2012, Commission européenne c/ royaume des Pays-Bas, af. C-368/10.

      [19] Art. L.2111-1 du Code de la commande publique, ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015.

      [20] Art. R.2111-1 du Code de la commande publique.

      [21] Obligatoire en procédure formalisée, art. R.2152-12 du Code de la commande publique.

      [22] Art. L.2152-7 du Code de la commande publique.

      [23] CJCE, 20 septembre 1988, Gebroeders Beentjes BV, af. C-31/87.

      [24] Guide de l’Observatoire de la commande publique, pour faciliter l’accès des TPE/PME à la commande publique, 12 août 2019. Pour définir une PME, la recommandation de la Commission européenne du 6 mai 2003 a dégagé trois critères : moins de 250 salariés, un chiffre d’affaire de moins de 50 millions d’euros et une autonomie (les parts détenues par les entreprises extérieures doivent être inférieures à 25 %).

      [25] CJCE, 25 octobre 1977, Metro Saba, af. C-26/76.

      [26] Loi n°2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche et décret n°2011-1000 du 25 août 2011.

      [27] Question du député Eric Girardin n°14384, publiée au JO de l’Assemblée nationale le 20 novembre 2018, p.10375. Réponse publiée au JO le 25 décembre 2018, p. 12127.

      [28] Ministère de l’Economie, Produits alimentaires commercialisés en circuits courts, 17 avril 2020.

      [29] Instruction du gouvernement aux préfets, le 28 juillet 2015.

      [30] Question du député Benoît Potterie n°10057, publiée au JO de l’Assemblée nationale le 19 novembre 2019, p.10057. Réponse JO le 25 février 2020, p. 1485. Question du député Jean-Paul Dupré n°87024 publiée au JO le 11 août 2015 p. 6060. Réponse JO le 7 juin 2016, p. 5066).

      [31] Rapport de la Commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale, sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires, Brigitte Allain, 7 juillet 2015.

      [32] On pourra lire l’article Masques : malgré la production “made in France”, le secteur public s’approvisionne toujours… à l’étranger, France Info, Brice Le Borgne, 26 janvier 2021.

      [33] Gourinchas et al, DG Trésor, AFCE ; jusqu’à 25 % par ex dans le secteur de l’hébergement et de la restauration (Conseil d’analyse économique, note n°051-2020, décembre 2020).

      [34] 42,9 % en 2018, selon les données de l’INSEE du 24 septembre 2020.

      [35] 87,5 milliards d’euros en 2019 (marchés publics et concessions), Baromètre de la commande publique de l’Assemblée des communautés de France et Banque des Territoires, 6 mars 2020. Soit un peu plus de 3,5 % du PIB en 2019 (INSEE).

      [36] Décret n°2008-1356 du 19 décembre 2009.

      [37] CE, 10 février 2010, af. 329100.

      [38] Décret n°2011-1853 du 9 décembre 2011.

      [39] Décret n°2015-1163 du 17 septembre 2015.

      [40] Décret n°2019-1344 du 12 décembre 2019.

      [41] Selon les mots de la ministre déléguée Agnès Pannier-Runacher dans le communiqué de presse du ministère de l’Économie du 13 décembre 2019.

      [42] Art. R2122-8 du Code de la commande publique.

      [43] Décret 2018-1225 du 24 décembre 2018. Pour aller plus loin, on pourra se référer au guide de l’achat public innovant du ministère de l’Economie, publié le 29 mai 2019.

      On pourra lire l’article La possibilité de favoriser légalement des offres innovantes, Jérôme Michon, La Gazette des Communes, 9 décembre 2020.

      [44] Décret n°2020-893 du 22 juillet 2020.

      [45] Loi dite « ASAP », n°2020-1525 du 7 décembre 2020 : jusqu’au 31 décembre 2022.

      [46] Selon les mots du ministre Bruno Le Maire dans le communiqué de presse du ministère de l’Economie et des Finances du 23 juillet 2020.

      [47] Loi dite « ASAP », n°2020-1525 du 7 décembre 2020. Pour plus de détails, on pourra lire « Les conséquences de la loi ASAP sur le droit de la commande publique », Joachim Lebied, Dalloz Actualité, 14 décembre 2020.

      [48] Aux dispositions L.2122-1 et L.2322-1 du Code de la commande publique.

      [49] Décision n°2020-807 DC du 3 décembre 2020.

      [50] Art. 3 de la Constitution du 4 octobre 1958.

      [51] Encore qu’elle soit limitée au contexte Covid-19 et aux marchés publics passés selon une procédure adaptée. Proposition de loi n°592, Commission des Lois, tendant à adapter les règles de passation des marchés publics locaux aux conséquences de la crise sanitaire, Groupe Les Républicains, enregistrée à la présidence du Sénat le 3 juillet 2020.

      [52] Rapport de la Commission des Lois du Sénat, Stéphane Le Rudulier, 10 novembre 2020.

      Publié le 15 mars 2021

      Les élus face au dilemme de l’achat public local

      Auteurs

      Gabriel Arnault
      Juriste, spécialiste en droit immobilier et défenseur de la vitalité des territoires, Gabriel Arnault a fondé La Gazette du Made in France. Il a contribué en tant qu’expert au rapport d’Origine France Garantie, présenté aux candidats à l’élection présidentielle 2022

      « Pourquoi le maire n’a-t-il pas confié les travaux de la salle des fêtes à quelqu’un du coin ? » ; « Quitte à imprimer des tracts pour le marché de Noël, autant soutenir l’imprimeur local… » ; « Comment est-ce possible que la fabrication dordognaise de cartes vitales ait été délocalisée en Inde ? ». Régulièrement, les citoyens reprochent aux élus de ne pas dépenser localement l’argent public. Mais quelles sont vraiment les règles applicables ; ont-ils seulement le droit d’exprimer une telle préférence ?

      Le 27 janvier 1986, la commune de Ventenac-en-Minervois, située dans le département de l’Aube, décide de sélectionner une entreprise pour construire un bâtiment industriel à usage de pelleterie, c’est-à-dire spécialisé dans la préparation de fourrures. Elle indique dans l’avis d’appel d’offre sa préférence pour une entreprise locale, afin de soutenir l’emploi et les finances de la ville. À l’époque, la législation applicable laisse une marge de manœuvre importante aux acheteurs publics et le maire a toutes les raisons de penser qu’il agit dans l’intérêt des habitants de sa commune. Finalement, le marché public est bien attribué à une entreprise implantée à proximité, mais un concurrent évincé saisit le juge administratif, qui sanctionne l’usage du critère de préférence locale[1].

      Cette solution jurisprudentielle n’a pas pris une ride depuis et l’incompréhension demeure car l’impact économique de la commande publique n’est plus à démontrer[2] : pourquoi ne pas s’en servir pour soutenir l’emploi et le dynamisme des communes, départements et régions ?

      L’Institut Rousseau propose un état des lieux et des solutions pour favoriser la commande publique responsable et locale.

       

      1/ Aux origines de l’interdiction de la préférence locale

       

      Pour comprendre les raisons qui poussent le Conseil d’État à sanctionner la commune de Ventenac-en-Minervois en 1994, il faut se rappeler que, dès 1957, le Traité de Rome interdit toute discrimination en raison de la nationalité[3], qu’elle soit ostensible ou dissimulée[4]. Aucune réglementation nationale ne peut donc valablement réserver un pourcentage de marchés publics à des entreprises nationales ou régionales[5]. En 1992, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE), rebaptisée depuis le Traité de Lisbonne, en 2009, Cour de justice de l’Union européenne, pose également le principe d’interdiction de toute préférence locale : il est rigoureusement interdit d’attribuer un marché public sur la base d’un critère d’origine ou d’implantation géographique des candidats[6]. Plutôt que d’intervenir directement dans l’économie – en l’occurrence pour soutenir une entreprise au motif qu’elle est implantée localement – l’État s’efface et revendique sa neutralité.

      Cette solution d’inspiration néolibérale a été reprise dans l’Accord sur les marchés publics (AMP) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont la France est membre : il est interdit de discriminer en accordant une protection à des fournisseurs, marchandises ou services nationaux[7].

      Il existe néanmoins une exception, lorsque l’implantation géographique est nécessaire à la bonne exécution du contrat, par exemple pour intervenir rapidement[8]. Mais, outre le fait que les exemples sont rares, même dans ce cas, le critère géographique ne peut pas préexister à l’attribution du marché, c’est-à-dire qu’un candidat qui s’engage à s’implanter localement devra être considéré au même titre qu’un autre déjà présent sur place[9].

      Plusieurs principes – dits fondamentaux – assurent l’effectivité de la non-préférence locale. À travers la publicité du marché et la mise en concurrence des entreprises, les acheteurs publics assurent l’égalité d’accès. Tout au long de la procédure, ils traitent les candidats de la même manière et de façon transparente, ce qui leur permet, in fine, de choisir l’offre la plus avantageuse[10] en fonction des critères déterminés au départ[11]. Il faut dire, enfin, que l’existence d’une sanction pénale dissuade fortement de braver cette interdiction[12].

      Il est unanimement admis que la publicité, la mise en concurrence et la transparence des procédures ont amélioré l’efficacité de la commande publique et permis de mieux utiliser les deniers publics. Tout au long des dernières années, il faut saluer le travail de ceux qui ont œuvré pour que ces règles se généralisent dans les pratiques des acheteurs publics. Il n’en demeure pas moins que la non-préférence locale est un choix politique, qui pourrait évoluer sans remettre en cause tout ce mouvement de rationalisation.

       

      2/ L’approvisionnement auprès des entreprises de proximité

       

      En réalité, certaines évolutions ont déjà eu lieu ; des moyens existent dans le corpus de règles applicables pour favoriser, indirectement et subtilement, les entreprises de proximité. Réunie en septembre 2020 pour discuter du « retour en force du made in France dans la commande publique », l’Association pour l’achat dans les services publics (APASP), qui réunit plus de deux mille acheteurs, remarquait qu’il est difficile de déterminer ce qu’est un produit fabriqué en France. Il est vrai que la question mérite d’être posée et que l’étiquetage obligatoire des produits apparaît comme un préalable nécessaire au développement d’un véritable achat public local, au même titre – d’ailleurs – que pour tous les consommateurs[13]. Mais, même si cet étiquetage existait, comment concilier le soutien aux entreprises avec la prohibition de toute préférence locale ?

      2.1 – L’introduction de clauses environnementales et sociales

      Le premier élément de réponse a été introduit par une directive européenne de 2004[14], qui prévoit la possibilité de prescrire des caractéristiques environnementales et sociales dans les spécifications techniques des marchés publics.
      Concrètement, les acheteurs peuvent exprimer – avant la publicité – une préférence pour la méthode de production ou les caractéristiques environnementales des produits et des services qu’ils cherchent (limitation des émissions de gaz à effet de serre, qualité, fraîcheur, saisonnalité, par exemple). Ils peuvent aussi prendre en compte le nombre d’emplois créés[15] ou faire usage d’un écolabel, à condition que ces critères soient accessibles et disponibles à tous[16]. Pendant l’exécution, ils ont la faculté de favoriser l’emploi de personnes handicapées ou en difficulté, la formation des chômeurs ou des jeunes, et ce même au-delà de ce qui est exigé par la législation nationale[17].
      En 2012, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a consacré cette pratique, dans le cadre d’un marché public de thés et cafés issus du commerce équitable[18] et, depuis 2018, le développement durable – dans ses dimensions économique, sociale et environnementale – figure parmi les éléments pris en compte au moment de la définition des besoins[19].
      Aujourd’hui, l’acheteur public est donc juridiquement capable de soutenir telle ou telle façon de produire et d’exécuter son marché. En maniant bien ces critères, il peut – indirectement – orienter le choix vers les entreprises locales, sans pour autant faire de préférence locale. Le sourcing lui permet également de rechercher et d’évaluer ce qui existe autour, en amont de la procédure de passation, pour adapter ses demandes à ce qui est produit près de chez lui [20].

      Du moins en théorie, car, en pratique, le prix écrase bien souvent le reste.

      Le mécanisme de la pondération[21], qui consiste à affecter un coefficient à chaque critère, n’est pourtant pas encadré et la personne publique est libre de fixer le poids respectif de chaque élément, ce qui laisse une marge de manœuvre importante. Il n’en demeure pas moins que, dans les faits, « l’offre économiquement la plus avantageuse »[22] est souvent la moins chère, et ce constat amène à relativiser l’importance du mécanisme des clauses environnementales et sociales. Une évolution intéressante serait donc d’aller au-delà de l’incitation, en imposant, par exemple, que ces critères extra-financiers représentent un poids minimum dans la pondération.
      Par ailleurs, favoriser indirectement le local est risqué puisque l’acheteur ne peut pas recourir à des clauses d’exécution qui seraient plus difficilement satisfaites par les entreprises étrangères[23]. Outre la complexité pour définir le besoin, il faut donc avoir une conscience aiguë des règles applicables pour les manier habilement, sans compter la peur d’engager sa responsabilité pénale.
      Quand l’acheteur est suffisamment averti, les élus n’y sont pas forcément sensibles, et inversement. Si bien que l’achat de proximité est loin d’être une évidence, et qu’il est bien plus facile de traiter avec les grandes firmes multinationales. De fait, la part des petites et moyennes structures représente 60 % du nombre de marchés publics, mais seulement 30 % de leur montant total[24].

      Proposition n°1 : Diffuser un guide des bonnes pratiques, faire évoluer les habitudes des administrations et former les élus et les acheteurs publics, pour utiliser mieux et davantage les possibilités offertes par les clauses environnementales et sociales dans les critères de sélection des marchés publics, et ainsi orienter le choix vers les offres des entreprises locales.

      Proposition n°2 : Introduire à l’article L2111-1 du Code de la commande publique un poids minimum obligatoire dédié aux critères environnementaux et sociaux dans la pondération des marchés publics (limitation des émissions de gaz à effet de serre, nombre d’emplois créés, etc).

      2.2 – Restauration collective et circuits courts agricoles

      Une ancienne jurisprudence de la CJUE autorise la vente directe de produits s’il existe dans le périmètre proche de la collectivité une offre diversifiée et significative[25]. Depuis 2011, la France s’est donnée comme objectif de recourir à des produits en circuits courts de distribution pour ses services de restauration collective[26]. Mais attention, cela ne signifie pas que les acheteurs puissent directement solliciter des entreprises de proximité. Comme l’a rappelé récemment le ministère de l’Économie, la préférence locale est toujours strictement interdite et il n’est pas question de la remettre en cause[27].

      Il n’y a pas de définition officielle du circuit court, mais, pour l’administration, c’est un mode de vente, qui limite le nombre d’intermédiaires sans lien avec la proximité physique (c’est-à-dire le kilométrage)[28]. Un fournisseur étranger peut répondre valablement au marché s’il respecte cette exigence. Néanmoins, la mise en place de ce critère est un outil de plus, qui permet aux acheteurs de soutenir les agriculteurs locaux. Il serait intéressant d’étudier son application aux marchés publics de produits industriels et artisanaux.

      Dans le même temps, l’État incite les acheteurs à « favoriser l’ancrage territorial de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles »[29]. En 2016, le ministère de l’Agriculture a publié un guide pour « favoriser l’approvisionnement local » dans la restauration collective. Cette situation ne manque pas de créer un certain flou. D’autant qu’en 2019, le ministère de l’Économie indiquait au député Benoît Potterie que l’accès des entreprises locales aux marchés publics est un enjeu majeur « pour le développement économique des territoires et la croissance de nos petites et moyennes entreprises, qui représentent 99,9 % des entreprises françaises et 48,3 % de l’emploi salarié, et en particulier pour celles qui offrent des prestations de proximité ». L’esprit tranche avec la réponse qui avait été apportée à une question similaire du député PS Jean-Paul Dupré en 2016, preuve que les mentalités évoluent[30].

      Tout se passe, donc, comme si l’État et les collectivités territoriales étaient les premiers pénalisés par une règle qu’ils se sont eux-mêmes imposée.

      Proposition n°3 : Persévérer dans le recours aux circuits courts agricoles pour les marchés publics de restauration collective, qui permettent de soutenir efficacement – dès aujourd’hui – les agriculteurs français. Étudier l’application de la limitation du nombre d’intermédiaires également aux marchés publics de fourniture de produits industriels et artisanaux.

       

      3/ Soutenir le tissu économique local

      Faut-il faire de la pédagogie auprès des acheteurs publics pour qu’ils utilisent mieux les outils à leur disposition ou remettre en cause – même partiellement – l’interdiction de toute préférence locale ? Sans doute les deux.

      Il est certain que la règlementation européenne – et sa transposition dans le droit français – ne favorisent pas l’approvisionnement local, mais ils autorisent l’introduction de certains critères – trop peu connus – qui sont de nature à privilégier les circuits courts, de proximité et de qualité. Par peur du contentieux, les acheteurs définissent souvent leurs besoins trop largement[31]. S’agit-il d’un manque de professionnalisme ? Il faut admettre que les règles sont loin d’être évidentes, et qu’à force de les tordre pour faire dire l’inverse de ce qu’elles énoncent, leur application est difficile.

      Au printemps, alors que la France est ébranlée par une crise sanitaire sans précédent, les entreprises françaises, encouragées par les pouvoirs publics, investissent pour produire des masques sur l’ensemble du pays. Mais au début de l’été, ils déchantent : les commandes s’annulent au fur-et-à-mesure que les cargaisons asiatiques atterrissent et, manifestement, l’État se fournit à l’étranger[32]. Désormais, toutes les simulations existantes prédisent en 2021 une augmentation très forte des défaillances de très petites, petites et moyennes entreprises (TPE/PME) par rapport aux années précédentes[33]. Elles représentent pourtant près de la moitié de la valeur ajoutée[34]. Demain, lorsque le chômage partiel et les prêts bancaires garantis auront disparu, il faudra bien que la France protège son tissu économique local, déjà fragilisé ces dernières années par la concurrence étrangère à bas salaires.

      Alors, certains proposent – enfin – de se servir des milliards dépensés chaque année par les personnes publiques dans le cadre de la commande publique[35], pour soutenir les entreprises locales. D’ailleurs, cette idée n’est pas neuve. Déjà en 2008, le gouvernement avait décidé de rehausser le seuil des marchés passés sans publicité ni mise en concurrence de 4 000 euros à 20 000 euros[36]. On se rappelle que le Conseil d’État avait annulé cette disposition, au motif qu’elle contrevient à l’égalité d’accès des candidats et à la transparence des procédures[37]. Pourtant, le seuil a grimpé à 15 000 euros en 2011[38], puis 25 000 euros en 2015[39] et 40 000 euros en 2020[40]. Cette mesure vise particulièrement les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE/PME), qui ne disposent pas d’un service juridique structuré pour répondre aux lourdes formalités des marchés publics[41]. Les acheteurs doivent simplement veiller à ne pas contractualiser systématiquement avec la même entreprise quand il existe une pluralité d’offres correspondant aux besoins[42].

      La mise en place d’un seuil de 100 000 euros pour les achats publics innovants en 2018 est également une mesure intéressante, qui permet d’instaurer un dialogue avec les entreprises de taille modeste à l’origine d’une idée nouvelle qui va être – ou vient d’être – commercialisée. Le dispositif est en vigueur jusqu’au 25 décembre 2021[43].

      En juillet 2020, le gouvernement a décidé de rehausser exceptionnellement le seuil des marchés publics de travaux (70 000 euros) et des denrées alimentaires (100 000 euros) pour soutenir les entreprises du bâtiment et travaux publics (BTP) et les producteurs agricoles[44], très touchés par la crise de la Covid-19. Depuis, pour dynamiser et accélérer le rythme des commandes, le seuil des premiers a même été temporairement relevé à 100 000 euros[45].

      Il est donc possible aux acheteurs de contracter directement avec des entreprises locales, ce qui permettra de maintenir ou créer des emplois[46].

      Il faut également noter l’introduction récente[47] d’un « motif d’intérêt général » justifiant la passation de marchés sans publicité ni mise en concurrence[48], qui a donné lieu à de vives discussions au sein de l’hémicycle du Palais Bourbon. Certains considèrent que cette dérogation large ouvre la voie à des contrats opaques, conclus de gré à gré. Elle a pourtant été validée par le Conseil Constitutionnel[49] ; ses limites devraient être fixées bientôt par décret en Conseil d’État.


      Rehausser le seuil des marchés publics passés sans publicité ni mise en concurrence était nécessaire, dans la mesure où il n’existe pas – en l’état actuel du droit – de moyen de soutenir directement les entreprises locales. C’est pourtant prendre un risque : celui de voir de vrais délits de favoritisme, comme cela a trop souvent existé avant la mise en place des règles qui encadrent aujourd’hui la commande publique. Faut-il pour autant revenir à une situation de concurrence généralisée, qui paralyse les petites entreprises de proximité ? Certainement pas : il doit être possible de créer les conditions d’une concurrence qui valorise les particularités locales, tout en évitant de gré à gré, qui favorise l’opacité.


      Proposition n°4 : Conduire une action d’influence en faveur d’une modification des textes européens rendant possible – en l’encadrant – la préférence locale dans les marchés publics.
      Cette proposition suppose de remettre en cause l’interprétation constante qui a été faite par la Commission européenne et par la CJUE de l’actuel article 18 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui prohibe toute discrimination en raison de la nationalité (ancien article 7 du Traité de Rome). Elle conditionne l’évolution de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel et des juridictions françaises.

      Proposition n°5 : Conduire une action d’influence en faveur d’une modification de l’Accord sur les marchés publics de l’Organisation mondiale du commerce pour nuancer le principe de non-priorité aux fournisseurs, marchandises et services nationaux.

      Proposition n°6 : Plutôt que de rehausser le seuil des marchés publics sans publicité ni mise en concurrence, modifier l’article L3 du Code de la commande publique, en y indiquant que la liberté d’accès et l’égalité de traitement des candidats peut s’exercer à l’échelon local, national ou international, en tenant compte – pour des raisons à la fois sociales et écologiques – du lieu de fabrication des produits et de l’implantation géographique des candidats.

       

      Conclusion

       

      Consommer localement est toujours un acte militant, mais de plus en plus courant. D’où l’incompréhension croissante de ne pas voir les pouvoirs publics – qui agissent en vertu de la représentation[50] – montrer l’exemple. Une proposition de loi enregistrée en été 2020 au Sénat pourrait ouvrir la porte à une remise en cause plus générale de l’interdiction de la préférence locale[51], mais la Commission qui l’a examinée précise – à juste titre – dans son rapport que « les critères géographiques d’attribution des contrats de la commande publique sont très difficilement conciliables avec les règles tant constitutionnelles qu’européennes »[52]. Cette conciliation devra pourtant avoir lieu. Les règles actuelles permettent certes – si elles sont bien maniées – d’aboutir au même résultat, mais elles ne suffisent pas.

      En réalité, la préférence locale bénéficierait à tous. Les personnes publiques pourraient ainsi dynamiser leurs communes, départements et régions et les élus retrouveraient une certaine marge de manœuvre politique. Les entreprises s’appuieraient financièrement sur la commande publique, et leurs activités pourraient même être orientées indirectement au moyen des clauses environnementales et sociales. Enfin, les citoyens y trouveraient leur compte à la fois en tant qu’employés et en tant qu’habitants de leur collectivité.

      Il faut néanmoins rappeler deux choses :
      – d’une part, il n’a jamais été question dans ces développements de remettre en cause les principes de libre accès, de transparence et de mise en concurrence ; tout est une question d’échelle, de périmètre. Remettre en cause l’interdiction de toute préférence locale, ce n’est pas admettre un choix discrétionnaire, sur la base de la seule préférence locale. C’est, en revanche, pour des raisons à la fois sociales et écologiques, éviter d’acheter ailleurs quand on peut se fournir géographiquement proche.
      – d’autre part, dans un souci de bonne gestion des deniers publics, il est évident que le critère du prix est important. Acheter local ne doit pas se faire à n’importe quelle condition. En 1986, dans l’arrêt présenté en introduction de cette note, la commune de Ventenac-en-Minervois avait prévu un mécanisme intéressant, qui conditionnait l’attribution du marché à une entreprise locale si ses prix n’excédaient pas de 4 % ceux des éventuels concurrents.

      La transparence des procédures a des vertus ; elle est la garantie d’une bonne utilisation des deniers publics, parce qu’elle permet tout simplement d’acheter au meilleur prix et de savoir où l’argent est dépensé. Il est dommageable cependant que cette notion soit interprétée comme un droit de se substituer partout à n’importe quelle entreprise. En faisant disparaître toute référence à l’implantation géographique, l’achat public devient froid, aseptisé. Pour des raisons sociales et écologiques, l’heure de la préférence locale est arrivée et l’achat public deviendra ainsi – du moins partiellement – l’expression d’une politique publique.

       

      ____

      [1] CE, 29 juillet 1994, Commune de Ventenac-en-Minervois, af. 131562.

      [2] 87,5 milliards d’euros en 2019 (marchés publics et concessions), Baromètre de la commande publique de l’Assemblée des communautés de France et Banque des Territoires, 6 mars 2020. Soit un peu plus de 3,5 % du PIB en 2019 (INSEE).

      [3] Traité de Rome, instituant la Communauté économique européenne (CEE), 20 mars 1957 (art. 7).

      [4] C’est-à-dire qu’elle aboutisse, par application d’autres critères de distinction, au même résultat. CJCE, 5 décembre 1988, Commission c/ Italie, af. C-3/88, point n°8, rec. 4035.

      [5] CJCE, 20 mars 1990, Du Pont de Nemours, af. C-21/88, rec. p. I-889. La solution est réaffirmée un an plus tard dans la décision CJCE, 11 juillet 1991, Laboratori Bruneau SRL c/ Unità sanitaria locale RM/24 di Monterotondo, af. C351/88 (fondement art. 59 du Traité de Rome).

      [6] CJCE, 3 juin 1992, Commission c/ République Italienne, af. n°C-360/89.

      [7] Article 4 de l’AMP de l’OMC, signé en avril 1994, révisé en 2012.

      [8] Nécessité de disposer d’une équipe pouvant intervenir rapidement sur le lieu d’exécution du marché afin d’assurer la continuité du service public du réseau routier. CAA Bordeaux, 25 mai 2004, Société Probinord, af. 00BX02265.

      [9] CE, 14 janvier 1998, Société Martin-Fourquin, af. 168688.

      [10] Ces principes ont acquis valeur constitutionnelle : CC, 26 juin 2003, Loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit, af. 2003-473DC, sur le fondement des articles 6 et 14 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789. Ils figurent, depuis 2018, à l’art. L3 du code de la commande publique.

      [11] CJUE, 10 décembre 2009, Commission c/ France, af. C-299/08, rec. p. I-11587.

      [12] Le délit de favoritisme (art. 432-14 code pénal) est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Pour une application concrète, voir Cass. Crim. 22 janvier 2014, af. 13-80.759 : un maire avait, dès l’ouverture du marché, l’intention de favoriser un imprimeur local.

      [13] On pourra lire La schizophrénie de l’étiquetage des produits, publié le 5 décembre 2020 chez Hémisphère Gauche : https://hemispheregauche.fr/la-schizophrenie-de-letiquetage-des-produits

      [14] Directive 2004/18/CE du 31 mars 2004.

      [15] CE, 7ème et 2ème chambres réunies, 20 décembre 2019, af. n°428290.

      [16] Directive 2004/18/CE du 31 mars 2004, point n°29. Ces exigences figurent aujourd’hui aux art. R.2111-14 et R.2111-15 du Code de la commande publique.

      [17] Directive 2004/18/CE du 31 mars 2004, point n°33.

      [18] CJUE, 10 mai 2012, Commission européenne c/ royaume des Pays-Bas, af. C-368/10.

      [19] Art. L.2111-1 du Code de la commande publique, ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015.

      [20] Art. R.2111-1 du Code de la commande publique.

      [21] Obligatoire en procédure formalisée, art. R.2152-12 du Code de la commande publique.

      [22] Art. L.2152-7 du Code de la commande publique.

      [23] CJCE, 20 septembre 1988, Gebroeders Beentjes BV, af. C-31/87.

      [24] Guide de l’Observatoire de la commande publique, pour faciliter l’accès des TPE/PME à la commande publique, 12 août 2019. Pour définir une PME, la recommandation de la Commission européenne du 6 mai 2003 a dégagé trois critères : moins de 250 salariés, un chiffre d’affaire de moins de 50 millions d’euros et une autonomie (les parts détenues par les entreprises extérieures doivent être inférieures à 25 %).

      [25] CJCE, 25 octobre 1977, Metro Saba, af. C-26/76.

      [26] Loi n°2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l’agriculture et de la pêche et décret n°2011-1000 du 25 août 2011.

      [27] Question du député Eric Girardin n°14384, publiée au JO de l’Assemblée nationale le 20 novembre 2018, p.10375. Réponse publiée au JO le 25 décembre 2018, p. 12127.

      [28] Ministère de l’Economie, Produits alimentaires commercialisés en circuits courts, 17 avril 2020.

      [29] Instruction du gouvernement aux préfets, le 28 juillet 2015.

      [30] Question du député Benoît Potterie n°10057, publiée au JO de l’Assemblée nationale le 19 novembre 2019, p.10057. Réponse JO le 25 février 2020, p. 1485. Question du député Jean-Paul Dupré n°87024 publiée au JO le 11 août 2015 p. 6060. Réponse JO le 7 juin 2016, p. 5066).

      [31] Rapport de la Commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale, sur les circuits courts et la relocalisation des filières agricoles et alimentaires, Brigitte Allain, 7 juillet 2015.

      [32] On pourra lire l’article Masques : malgré la production “made in France”, le secteur public s’approvisionne toujours… à l’étranger, France Info, Brice Le Borgne, 26 janvier 2021.

      [33] Gourinchas et al, DG Trésor, AFCE ; jusqu’à 25 % par ex dans le secteur de l’hébergement et de la restauration (Conseil d’analyse économique, note n°051-2020, décembre 2020).

      [34] 42,9 % en 2018, selon les données de l’INSEE du 24 septembre 2020.

      [35] 87,5 milliards d’euros en 2019 (marchés publics et concessions), Baromètre de la commande publique de l’Assemblée des communautés de France et Banque des Territoires, 6 mars 2020. Soit un peu plus de 3,5 % du PIB en 2019 (INSEE).

      [36] Décret n°2008-1356 du 19 décembre 2009.

      [37] CE, 10 février 2010, af. 329100.

      [38] Décret n°2011-1853 du 9 décembre 2011.

      [39] Décret n°2015-1163 du 17 septembre 2015.

      [40] Décret n°2019-1344 du 12 décembre 2019.

      [41] Selon les mots de la ministre déléguée Agnès Pannier-Runacher dans le communiqué de presse du ministère de l’Économie du 13 décembre 2019.

      [42] Art. R2122-8 du Code de la commande publique.

      [43] Décret 2018-1225 du 24 décembre 2018. Pour aller plus loin, on pourra se référer au guide de l’achat public innovant du ministère de l’Economie, publié le 29 mai 2019.

      On pourra lire l’article La possibilité de favoriser légalement des offres innovantes, Jérôme Michon, La Gazette des Communes, 9 décembre 2020.

      [44] Décret n°2020-893 du 22 juillet 2020.

      [45] Loi dite « ASAP », n°2020-1525 du 7 décembre 2020 : jusqu’au 31 décembre 2022.

      [46] Selon les mots du ministre Bruno Le Maire dans le communiqué de presse du ministère de l’Economie et des Finances du 23 juillet 2020.

      [47] Loi dite « ASAP », n°2020-1525 du 7 décembre 2020. Pour plus de détails, on pourra lire « Les conséquences de la loi ASAP sur le droit de la commande publique », Joachim Lebied, Dalloz Actualité, 14 décembre 2020.

      [48] Aux dispositions L.2122-1 et L.2322-1 du Code de la commande publique.

      [49] Décision n°2020-807 DC du 3 décembre 2020.

      [50] Art. 3 de la Constitution du 4 octobre 1958.

      [51] Encore qu’elle soit limitée au contexte Covid-19 et aux marchés publics passés selon une procédure adaptée. Proposition de loi n°592, Commission des Lois, tendant à adapter les règles de passation des marchés publics locaux aux conséquences de la crise sanitaire, Groupe Les Républicains, enregistrée à la présidence du Sénat le 3 juillet 2020.

      [52] Rapport de la Commission des Lois du Sénat, Stéphane Le Rudulier, 10 novembre 2020.

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