fbpx
Le laboratoire d’idées de la reconstruction écologique et républicaine

Comment s’assurer que les entreprises encouragent une consommation plus durable ?

Sommaire

    Accueil > Comment s’assurer que les entreprises encouragent une consommation plus durable ?

    Sommaire

      PDF

      Comment s’assurer que les entreprises encouragent une consommation plus durable ?

      Auteurs

      Au-delà des revendications touchant au pouvoir d’achat, le mouvement des Gilets jaunes a pris racine dans un sentiment d’injustice fiscale face à la transition écologique : les ménages, et notamment les plus modestes, auraient à supporter l’essentiel de l’effort alors que les grandes entreprises, parfois très polluantes pourtant, seraient relativement épargnées. S’il peut sembler plus équitable de concentrer l’effort sur les grandes entreprises, au moyen de taxes et de réglementations, une telle stratégie peut s’avérer finalement pénalisante pour les ménages, via la répercussion des coûts de production sur les prix à la consommation. Alors comment engager les entreprises dans la voie de la transition écologique sans pénaliser d’autant les consommateurs ?

      Face à ce défi, le dispositif dit des Certificats d’économie d’énergie (CEE) montre une voie intéressante. Mis en place en France depuis 2006, et dans un nombre croissant de pays européens, ce dispositif hybride de façon insolite une obligation sur les résultats avec une flexibilité sur les moyens (marché, délégation, sensibilisation, subventions, etc.). Surtout, il engage les vendeurs d’énergie à promouvoir eux-mêmes une consommation plus économe et donc plus durable de l’énergie auprès des millions de consommateurs. Fort des débats et des adaptations dont il fait régulièrement l’objet, le dispositif des CEE offre aujourd’hui un cadre qui pourrait tout à fait être extrapolé à d’autres biens et services de consommation. Cette note propose de décrire les caractéristiques clés d’un tel dispositif et les précautions qu’il est essentiel de prendre pour en assurer l’efficacité et l’acceptabilité.

       

      La transition écologique : un vecteur d’injustice fiscale ?

       

      Si le sentiment d’injustice fiscale s’exprime diversement depuis le début du 20e siècle[1], c’est la hausse de la taxe carbone[2], et donc un instrument de la transition écologique, qui en a cristallisé l’une des dernières manifestations. Dans un contexte marqué par le mouvement des Gilets jaunes, il a en effet été reproché aux pouvoirs publics d’augmenter la fiscalité écologique sans lui associer un projet tangible de transition écologique[3]. Surtout, face à l’urgence environnementale, s’est installé le sentiment que les ménages, et notamment les plus modestes, auraient à fournir l’essentiel de l’effort, comparativement aux grandes entreprises parfois très polluantes. Qu’en est-il ?

       

      D’après les dernières données disponibles, l’ensemble des taxes environnementales – au sens d’Eurostat – représentait 51,2 milliards d’euros de recettes pour l’État, dont près de 30 milliards pour la seule TICPE[4] en 2016. S’il n’est pas aisé de distinguer la contribution des ménages de celle des entreprises, un examen des différentes taxes environnementales[5] conduit à estimer que les ménages contribuent aux deux tiers environ de ces recettes, soit deux fois plus que les entreprises. Le maintien de la non-taxation du kérosène[6] par exemple, alors que l’aviation émet 14 à 40 fois plus de CO2 que le train par kilomètre et personne transportée, a été largement critiqué à cet égard.

       

      Ce sentiment d’iniquité quant à la répartition de l’effort est préjudiciable pour la transition écologique. Après des années de prise de conscience des enjeux environnementaux, il peut en effet entraîner un désengagement, à la fois pratique et moral, des citoyens. Ainsi en 2018 par exemple[7], 62 % des Français souhaitaient que le gouvernement donne la priorité au pouvoir d’achat, quitte à aller moins rapidement sur la transition énergétique. Il apparaît également que les Français sont de plus en plus nombreux à se désintéresser des problématiques liées à l’environnement, voire à exprimer une hostilité (23 % désormais de « rétractés »[8]), tout en étant de moins en moins nombreux à faire confiance aux grandes entreprises (27 % en 2015 contre 57,7 % en 2004). Plus récemment, une enquête du Crédoc (2019[9]) nous apprend que les 18-30 ans ont beau placer l’environnement comme un enjeu crucial, ils ne se comportent pas de façon plus écologique que leurs aînés. Ils sont moins nombreux à trier leurs déchets et à réduire leur consommation d’électricité et beaucoup plus nombreux à voyager régulièrement en avion. Il est donc essentiel de retrouver l’adhésion de tous, en convictions comme en actions.

       

      Exiger plus d’efforts de la part des entreprises peut pénaliser les consommateurs

       

      Pour concilier les impératifs de transition écologique et de justice sociale, il suffirait à première vue d’appliquer le principe de pollueur-payeur, et de répartir l’effort fiscal au prorata des émissions de gaz à effet de serre dont chacun se rend responsable. Ce serait à la fois juste et efficace… Vraiment ?

      Si l’on regarde les chiffres[10], près de 17 % des émissions de CO₂ de la France sont dues aux seules voitures particulières, lorsque nous faisons nos courses, allons au travail ou partons en vacances – contre à peine plus de 1 % pour le trafic aérien intérieur, à titre de comparaison. Le logement résidentiel est quant à lui responsable d’environ 15 % des émissions totales, avec plus de 45 millions de tonnes de CO₂, à cause principalement de nos appareils de chauffage. Les ménages seraient donc approximativement responsables d’un tiers des émissions de CO2 (17 % + 15 %), tandis que les deux tiers restants reviendraient aux industries, à l’agriculture, au tertiaire ou encore à la production même de l’énergie. Avons-nous là notre clé de répartition de l’effort, à savoir un tiers pour les ménages et deux tiers pour les entreprises, soit précisément l’inverse de la répartition actuelle ?

      Non, et cela pour deux raisons principales. La première tient à la pertinence du calcul, très discutable en réalité. L’industrie, l’exploitation agricole, la clinique et la centrale à charbon pourraient rappeler, à raison, qu’elles consomment de l’énergie, non pas pour leur propre confort, mais bien pour produire des tables, des pommes, des soins et de l’électricité que les ménages in fine consomment. En tant que consommateurs « finaux », les ménages seraient en quelque sorte directement et indirectement responsables de 100 % de la consommation énergétique (et de son gaspillage).

      La deuxième raison est d’ordre pratique. Même si les décideurs politiques s’en remettaient directement aux grands consommateurs d’énergie que sont les entreprises de biens et de services, les ménages en seraient finalement affectés, via une répercussion plus ou moins forte des coûts de production sur les prix, mais aussi potentiellement sur l’emploi et les salaires, et donc sur le pouvoir d’achat des ménages[11]. Ainsi par exemple, une taxe sur le kérosène pourrait induire une hausse du prix du billet d’avion ainsi qu’une diminution de l’emploi et des salaires dans le transport aérien et le tourisme. Des règles de construction plus strictes pourraient entraîner une hausse de prix de l’immobilier, une baisse de la demande de construction et donc de l’emploi et des salaires dans ce secteur. Une limitation de la circulation des poids lourds pourrait entraîner la hausse des prix des marchandises transportées, etc. De plus, si de telles taxes ou réglementations sur les entreprises ont l’intérêt de décourager certaines consommations, elles laissent à l’État la charge d’encourager, au moyen de subventions et de campagnes de sensibilisation notamment, l’adoption de modes de consommation plus durables.

      En bout de chaîne, le consommateur final aurait en définitive à supporter l’essentiel du coût de la transition écologique. Tout au plus peut-on répartir plus équitablement l’effort entre consommateurs finaux, via des mesures redistributives comme les actuels chèques énergie, tarifs sociaux ou encore « super primes » à la conversion.

       

      Et si on s’inspirait du dispositif des certificats d’économie d’énergie ?

       

      Comment exiger davantage d’efforts des entreprises, tout en limitant la répercussion des coûts associés sur les prix à la consommation ? On pourrait adopter une logique de marché et stimuler la concurrence entre les entreprises, de façon à tirer les prix à la baisse. Ou adopter une logique réglementaire tout en limitant ses effets sur les prix à travers des prix plafonds, à l’instar des tarifs réglementés sur le gaz et l’électricité. Mais il est également possible de tirer le meilleur de ces deux logiques, en s’inspirant d’un dispositif insolite de maîtrise énergétique : le dispositif des certificats d’économie d’énergie (CEE).

      Créé en 2005 par la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique (POPE) du 13 juillet 2005 (articles 14, 15, 16, et 17), ce dispositif oblige en effet les principaux vendeurs d’énergie (EDF, Engie, Total, etc.) à inciter leurs clients à changer leurs chaudières, à isoler leurs murs, en bref, à consommer moins d’énergie. Au moyen de bons d’achat, de primes et de conseils, il revient ainsi aux vendeurs d’énergie d’encourager les millions de consommateurs clients à moins en consommer.

      Plus précisément, au prorata de leurs parts de marché, les principaux vendeurs d’énergie ont l’obligation réglementaire de faire économiser un certain volume d’énergie, correspondant à un nombre équivalent de CEE. Pour atteindre le nombre de CEE qui leur est assigné sur une certaine période de temps (en principe triennale), et ne pas avoir à payer une pénalité à l’État[12], les « obligés » peuvent réaliser ou faire réaliser les opérations d’économie d’énergie (par exemple isoler la toiture) auprès de leurs clients. Ils peuvent également acheter – sur un marché – des CEE auprès des obligés qui en auraient en surplus, ou auprès d’acteurs non obligés – comme les collectivités – qui peuvent générer des CEE sans y être contraints[13]. En résumé, c’est comme si les principaux vendeurs d’énergie prenaient à leur charge une partie du coût des opérations d’économie d’énergie, ou payaient ceux qui s’en chargeaient à leur place.

      Figure 2 : Le dispositif des CEE[14].

      Source : DREAL Occitanie, ministère de la Transition écologique et solidaire / DR

       

      Ainsi mobilisés, les principaux vendeurs d’énergie constituent une courroie de transmission entre l’État et les millions de consommateurs, tandis que leur connaissance du terrain les aide à atteindre le gisement diffus à moindre coût. Dans la littérature académique, les différents instruments de maîtrise énergétique ont été largement étudiés. D’un côté, les instruments financiers permettent en théorie de contrôler les signaux-prix mais ont tendance à produire des situations inéquitables ou des effets d’aubaine. Les instruments réglementaires ou contractuels ont le mérite de garantir un résultat, mais à un coût potentiellement élevé. Les instruments informationnels, à l’inverse, présentent un coût faible et donc une plus grande acceptabilité sociale, mais ne garantissent pas le résultat. En combinant ces différentes instruments canoniques, le dispositif des CEE est celui qui permet en théorie le mieux à concilier l’efficacité économique avec les exigences de redistributivité et d’acceptabilité sociales[15]. Cet avantage comparatif est également corroboré par la pratique[16] :

       

      • Nominalement, le dispositif des CEE a atteint l’ensemble des objectifs pluriannuels croissants, que l’État fixe de façon ex ante: 54 TWhc pour la période 2006-2009, 447 TWhc pour la période 2011-2014 et 850 TWhc pour la période 2015-2017[17]. Ainsi, en cumulé, le dispositif des CEE aurait depuis 2006 permis d’économiser plus de 20 % de la consommation énergétique annuelle française[18]. Concrètement, sur la seule année 2018 dans le résidentiel, le dispositif a notamment permis[19] l’installation la réalisation de près de 395 000 actions d’isolations ainsi que de 114 000 installations chaudières à haute performance énergétique. Si la littérature[20] prête des effets d’aubaine de 15 % à 60 % aux dispositifs visant la maîtrise énergétique (taxe, subventions, CEE, etc.), 75 % des ménages bénéficiaires des CEE ont estimé que « la prime CEE » a eu un réel effet incitatif dans leurs décisions de rénovation[21]. En d’autres termes, même s’ils sont parfois cumulés avec d’autres dispositifs incitatifs, comme le CITE et l’éco-prêt à taux zéro, les CEE présenteraient en définitive l’intérêt de précipiter les décisions de rénovation ;

       

      • Le dispositif des CEE présente un coût relativement faible pour l’État qui doit seulement assurer le contrôle et la délivrance des certificats ; à ce jour, l’administration en charge (le Pôle National des CEE) dispose d’une quinzaine d’ETP et peut compter sur des outils numériques facilitant de plus en plus ses missions. Le coût du dispositif des CEE est circonscrit pour les obligés également puisque le coût d’obtention d’un CEE vaut en moyenne 0,8 c€/kWh[22]. Et si ce coût augmente depuis 2006[23], à mesure que les gisements les plus accessibles se réduisent, les obligés peuvent compter sur l’augmentation des tarifs réglementés ou celui des prix à la consommation. Ces prix augmentent en effet, mais restent limités pour les ménages : la répercussion des CEE est équivalente à 3 % environ de la facture énergétique moyenne en 2019, soit 100-150€ par an, et soit dix fois moins que la répercussion de la taxe carbone[24]. L’efficience du dispositif peut également être soulignée de manière agrégée : entre 2006 et 2016, le dispositif des CEE a contribué à financer des travaux d’économies d’énergie à hauteur de 24 Md€ et permis ainsi près de 2 Md€ d’économies annuelles pour les consommateurs[25]. En outre, et relativement à des taxes énergétiques, l’effet-prix imputable au dispositif des CEE entraîne une baisse bien plus significative de la consommation énergétique : une augmentation du prix de 1 %, lorsqu’elle est imputable aux CEE, conduit à une baisse de la consommation de 2,5 %, et seulement de 0,30 % lorsqu’elle est imputable à une taxe[26];

       

      • Enfin, le dispositif des CEE offre à la puissance publique un outil de pilotage flexible car l’État peut tout à la fois moduler le niveau des objectifs, la répartition de l’effort entre les obligés ou encore réviser les opérations éligibles à la délivrance de CEE[27]. En particulier, l’État peut développer des modalités spécifiques pour les ménages les plus précaires : en l’occurrence, depuis 2017, le dispositif des CEE distingue désormais les « CEE classiques » et les « CEE précarité énergétique ». Ces derniers ne peuvent être obtenus qu’auprès des ménages les plus modestes, et correspondent à une obligation spécifique (150 TWhc sur la période 2015-2017 et 533 TWhc sur la période 2018-2021). Ainsi, les vendeurs d’énergie sont amenés à mettre en place des incitations adaptées aux ménages les plus modestes, tandis que l’État se garde la possibilité, sous certaines conditions, de doubler le dispositif des CEE de subventions et de bonifications (aides de l’ANAH et de l’Ademe, « Coup de pouce économie d’énergie », etc.). L’aide de l’ANAH (Agence nationale de l’habitat) par exemple peut couvrir jusqu’à 50 % des dépenses de travaux. Au croisement des aides publiques et des aides privées, il est alors apparu, en particulier pour les ménages modestes, des offres à 1€, par exemple pour le remplacement d’une chaudière à énergie fossile par une chaudière utilisant des énergies renouvelables. En 2018, sur les 509 000 actions d’isolation et d’installation de chaudières à haute performance, plus de 62 % ont ainsi été réalisées auprès des ménages en situation de précarité énergétique[28].

       

      En particulier par rapport à une simple taxe qui serait redistribuée, le dispositif des CEE présente un avantage clé : il oblige les producteurs à promouvoir les technologies et les comportements les plus propres, tout en leur laissant une marge pour répercuter ces efforts sur les prix à la consommation. Les producteurs les plus polluants sont ainsi exposés à une double peine : s’ils ne réalisent pas suffisamment d’efforts pour promouvoir les solutions propres, alors ils finissent avec un nombre insuffisant de CEE et s’exposent à une pénalité, et s’ils répercutent trop le coût de leurs efforts sur le prix de leurs biens et services d’origine, alors ils perdent leurs clients et des parts de marché.

      En tant que signal-prix, la répercussion éventuelle du coût d’obtention des CEE sur le prix des énergies va également créer une émulation entre les consommateurs : soit le consommateur se presse pour réaliser une opération subventionnée et ainsi consommer moins d’énergie, soit il ne fait rien et prend le risque de voir sa facture augmenter dans l’éventualité d’une augmentation des prix. Ainsi, l’offre stimule la demande d’opérations d’économie d’énergie, par le jeu des actions incitatives des obligés (primes, conseils, etc.), tandis que la demande stimule l’offre de ces mêmes opérations, sous l’effet des prix des énergies qui augmentent pour l’ensemble des consommateurs. En définitive, ce mécanisme de concurrence entre producteurs d’une part, et d’émulation entre consommateurs d’autre part, permet d’engager conjointement et équitablement la responsabilité et l’effort de l’ensemble des parties prenantes.

       

      Étendre le dispositif des certificats « blancs » à d’autres biens et services de consommation

       

      Le dispositif des CEE fait partie de la famille des « certificats blancs », qui se sont multipliés en Europe, sous l’effet d’une directive européenne[29] : après le Royaume-Uni (depuis 2002), l’Italie (2005), la France (2006), le Danemark (2006) et la Bulgarie (depuis 2008), d’autres pays ont depuis développé leur propre dispositif, comme l’Irlande, le Luxembourg, l’Autriche, la Pologne, la Slovénie ou encore la Grèce. Si quelques modalités diffèrent d’un pays à l’autre (par exemple la nature des obligés), l’ensemble de ces dispositifs se caractérise par l’hybridation d’un mécanisme d’obligation sur les résultats et d’un mécanisme de flexibilité sur les moyens. Alors qu’un dispositif de certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques (CEPP) est en cours d’expérimentation[30], il serait opportun d’envisager des dispositifs équivalents pour rationaliser la consommation de voitures, d’eau, de transport en avion et de tout autre bien et service ayant un impact négatif sur l’environnement.

      Prenons l’exemple des véhicules. Afin d’atteindre l’objectif de zéro véhicule thermique neuf vendu en 2040[31], l’État pourrait extrapoler le dispositif des CEE aux vingt principaux vendeurs en France (qui représentent plus de 90 % des parts de marché) : il imposerait à chaque vendeur, au prorata de son importance, d’encourager l’achat d’un certain nombre (ou d’un pourcentage fixé) de voitures électriques, en échange de certificats. Chaque vendeur aurait alors le choix entre réduire le prix de vente de ses voitures électriques – en rognant sur ses marges ou en innovant sur sa chaîne de production – ou acheter des certificats à d’autres vendeurs qui y seraient parvenus. En résumé, chaque vendeur « obligé » serait amené à faire l’effort de développer des voitures électriques à un prix abordable, sinon à payer ses concurrents qui y parviennent à sa place.

      Selon le même principe, les distributeurs d’eau pourraient être amenés à en promouvoir une consommation plus efficiente, par exemple en versant des primes à l’installation de réducteurs de débit ou de mitigeurs thermostatiques. De même, les grossistes qui vendent des produits en plastique pourraient être tenus de promouvoir l’utilisation de matériaux alternatifs, sinon de plastiques biodégradables ou fabriqués selon des normes plus respectueuses de l’environnement. Ou encore pour le transport aérien, l’État pourrait astreindre les compagnies aériennes à promouvoir des modes de transport plus propres sur les plus petites distances.

      Bien entendu, les dispositifs de certificats blancs ne sont pas exempts de risques. À cet égard, l’expérience du dispositif des CEE permet d’identifier trois principaux points de vigilance :

       

      • Les économies d’énergie déclarées peuvent être surestimées, soit parce que l’opération a été mal faite (voire non faite), soit parce que le ménage décide de consommer davantage que prévu (cf. l’effet rebond), soit parce que la mesure des effets est mal calibrée. Des acteurs peuvent alors se prévaloir, auprès de l’État ou sur le marché, de CEE frauduleux ou ne correspondant pas à de réelles économies d’énergie. Selon l’Ademe (2019), cette surestimation est en moyenne de 25 %[32]. Pour prévenir ces risques, il est essentiel que les pouvoirs publics  s’assurent que les opérations déclarées soient effectivement réalisées, à travers des contrôles plus systématiques sur pièces et sur place, et de façon ex ante comme de façon ex post. Il est essentiel aussi qu’ils révisent régulièrement les opérations éligibles à la délivrance de certificats au regard des économies réelles associées ;

       

      • L’obtention de CEE peut être artificiellement facilitée par un effet d’aubaine, en ce sens que certains ménages prétendument incités à changer leurs chaudières (par exemple) dans le cadre du dispositif, l’auraient de toute façon changée (au regard de la vétusté de la chaudière d’origine, d’un autre dispositif incitatif, etc.). Pour que les obligés jouent véritablement un rôle incitatif auprès des consommateurs, il est important de limiter les redondances entre les différents dispositifs. De plus, les objectifs peuvent être fixés de façon croissante de façon à amener progressivement les obligés à s’adresser aux consommateurs les moins enclins à (spontanément) changer de comportements ou de technologies ;

       

      • Le coût d’obtention des CEE peut être perçu comme trop élevé pour les obligés, au motif que la répercussion du coût d’obtention sur les prix est insuffisante (notamment pour les tarifs réglementés) ou que les opérations présentent des retours sur investissement trop faibles pour leurs potentiels bénéficiaires. À cet égard, il revient aux pouvoirs publics d’être attentifs au niveau global d’obligation et à sa répartition entre les différents acteurs, de limiter toute forme de distorsions de concurrence, de donner une visibilité suffisante au dispositif et de ne rendre éligibles à la délivrance de certificats que les opérations conciliant véritablement une opportunité tant environnementale qu’économique. En particulier, il revient aux pouvoirs publics de limiter la répercussion des coûts (d’obtention des certificats blancs) sur les prix à la consommation supportés par les ménages, à travers la réglementation ou par l’octroi de subventions conséquentes.

       

      Par ailleurs, la gouvernance même du dispositif des CEE offre un exemple intéressant d’implication des parties prenantes : sous la tutelle du ministère de la Transition écologique et solidaire, sont régulièrement réunis les acteurs concernés par le dispositif, à la fois pour répondre aux questions, échanger les bonnes pratiques, relever les difficultés ou défaillances d’application, et concevoir les pistes d’évolution les plus adaptées[33].

       

      Conclusion

      Alors que le dispositif des CEE monte en puissance en France, ainsi que ses équivalents en Europe, de nombreux débats et ajustements ont eu lieu pour en augmenter l’efficacité et l’acceptabilité. S’assurer que les principaux vendeurs encouragent les consommateurs à mieux (et moins) consommer : voilà le pari original des dispositifs de certificats blancs qui hybrident des logiques d’obligation, de sensibilisation, de taxe et de marché, et qui mériteraient d’être généralisés à d’autres biens et services de consommation, à l’instar de l’eau, du plastique ou encore du transport aérien. Pour se prémunir des erreurs, des fraudes ou des distorsions possibles, le dispositif des CEE nous offre quelques enseignements : les pouvoirs publics sont appelés à assurer un contrôle suffisant des actions déclarées, à adapter les actions éligibles à leur réelle opportunité économique et environnementale, et à conférer aux objectifs une progressivité et une visibilité suffisantes.

       

       

      [1] Spire, A. « Résistances à l’impôt, attachement à l’État. Enquête sur les contribuables français », Seuil, Paris, 2018.

      [2] La taxe carbone correspond à la « Contribution Climat Énergie » (CCE).

      [3] Rapport fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2019 (n° 1255).

      [4] Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Énergétiques, qui inclut la taxe carbone.

      [5] Ministère de la Transition écologique et solidaire (2017), « Fiscalité environnementale : Un état des lieux », 2017.

      [6] Le gouvernement a finalement proposé la mise en place d’une éco-taxe sur les billets d’avion (Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, décembre 2020).

      [7] Enquête Ifop (novembre 2018).

      [8] GreenFlex – Ademe (2015), « Consommation durable et Typologie des consommateurs ».

      [9] Crédoc (2019), Consommation & Modes de Vie.

      [10] Chiffres Insee, Ademe, MTES et CITEPA (2016 et 2017).

      [11] Sur l’incidence fiscale de la fiscalité écologique, voir notamment Douenne, T. « Les effets de la fiscalité écologique sur le pouvoir d’achat des ménages : simulation de plusieurs scénarios de redistribution », Focus du CAE, 2019.

      [12] Actuellement, il s’agit d’une pénalité libératoire de 2 centimes d’euros par CEE manquant.

      [13] Pour plus d’informations, voir Baïz, A. « De l’innovation des instruments de politiques publiques », Thèse de doctorat d’État, chapitre 8, 2018, le site de l’Ademe ou encore cette infographie du ministère de la Transition écologique et solidaire.

      [14] DREAL Occitanie, ministère de la Transition écologique et solidaire.

      [15] D’un point de vue micro-économique, le dispositif des CEE est parfois modélisé comme le couplage d’une taxe sur l’énergie et d’une subvention aux technologies les plus propres. Voir notamment Giraudet et al., « Quelle efficacité des dispositifs de certificats blancs dans les politiques de maîtrise de la demande d’énergie ? », Presses des mines, 2010.

      [16] Voir notamment Baïz, A. « De  l’innovation instrumentale : Les  certificats  d’économies  d’énergie »,  Théma, ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer (2016) ainsi que les rapports de la Cour des Comptes (2013 et 2016).

      [17] L’objectif en cours est de 2133 TWhc pour la période 2018-2021, dont 533 TWhc au titre de la lutte contre la précarité énergétique. Pour donner un ordre de grandeur : 100 TWhc sont équivalents à la consommation énergétique résidentielle d’un million de Français pendant 15 ans.

      [18] Pour réaliser ce calcul, nous sommons en TWh les économies d’énergie réalisées via les CEE depuis 2006, et rapportons cette somme à la consommation finale annuelle de 2015 (149,2 Mtep en 2015, avec 1 Mtep = 11,63 TWh). Avec 0,211 kgCO2eq par kWh économisé (DGEC 2017, op. cit), cela correspond à plus de 73 millions de tonnes de CO2eq économisées depuis 2006.

      [19] Source : site du ministère de la Transition écologique et solidaire.

      [20] Voir IGF, CGEDD, CGE (2014), « Les certificats d’économies d’énergie : efficacité énergétique et analyse économique » ; voir aussi Nadel 1990, Joskow & Marron 1992, Wirl 1995 ou encore Le Mouël 1996.

      [21] Ademe (2014), Évaluation qualitative du dispositif CEE : 2e période 2011-2013.

      [22] Sur le marché des CEE, le prix varie entre 0,72 et 0,92 c€/kWh (Source : Emmy, le registre national des CEE cité dans le Rapport d’information sur la rénovation thermique des bâtiments (Assemblée Nationale, février 2021).

      [23] D’après les dernières analyses disponibles pour la troisième période (2015-2017), le coût interne pour les obligés imputable à la recherche de CEE a représenté 241 millions d’euros sur trois années, relativement aux 3,4 milliards d’euros de travaux d’efficacité énergétique correspondants (Ademe, 2019).

      [24] Source : Effy, 2019. D’après les données du SDES (septembre 2019) sur l’année 2018, un ménage a dépensé en moyenne 1 519 € en énergie pour son logement, dont un peu moins d’un tiers de taxes, et 1 386 € en carburants, dont 59 % de taxes.

      [25] Cour des Comptes (2016), « Les certificats d’économies d’énergie : un dispositif amélioré ».

      [26] Pour calculer cette élasticité, nous tenons compte du fait que le dispositif des CEE a permis d’économiser 13,85 Mtep entre 2006 et 2019, rapporté à une consommation finale agrégée d’environ 154 Mtep (Source : Chiffres clés de l’énergie, 2019, MTES). Nous admettons aussi que le dispositif a conduit à une augmentation de 3,5 % des prix de l’énergie. L’élasticité vaut -1,15 si l’on tient compte de l’efficacité réelle (cf. la section suivante) du dispositif, et reste donc meilleure que celle d’une taxe.

      [27] Pour garantir la qualité des opérations d’économie d’énergie et en faciliter le montage, le ministère en charge de l’environnement définit par arrêtés un certain nombre de fiches standardisées. Elles spécifient les exigences techniques des opérations et leur associent un montant forfaitaire d’économies d’énergie sur la période de temps considérée. Il est également possible de réaliser des  économies d’énergie en dehors des opérations standardisées : il s’agit alors d’opérations dites « spécifiques ».

      [28] Les ménages modestes représentent jusqu’à près de 75 % des bénéficiaires si l’on ne considère que l’isolation des combles perdus.

      [29] La directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique impose à chaque État membre de réaliser des économies annuelles représentant 1,5 % des ventes d’énergie aux consommateurs finaux par rapport à la moyenne annuelle 2010-2012.

      [30] Plan Ecophyto 2, ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.

      [31] Loi d’Orientation des Mobilités, promulguée le 24 décembre 2019. Voir aussi la directive européenne établissant des normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et pour les véhicules utilitaires légers neufs (17 avril 2019). Aux États-Unis, un dispositif similaire existe déjà : dans l’État de Californie par exemple, les constructeurs les moins vertueux en matière d’émissions de CO2 qui ne vendent pas assez de véhicules non polluants doivent acheter des crédits auprès de concurrents afin de compenser la différence et d’éviter ainsi une amende.

      [32] Source : Ademe (2019), Évaluation du dispositif des certificats d’économies d’énergie.

      [33] Ainsi par exemple une phase de consultation publique a démarré en mai 2021 autour des évolutions du dispositif des CEE et à l’approche de sa cinquième période d’application (à compter du 1er janvier 2022).

      Publié le 15 septembre 2021

      Comment s’assurer que les entreprises encouragent une consommation plus durable ?

      Auteurs

      Adam Baïz
      Économiste, enseignant à Sciences Po.

      Au-delà des revendications touchant au pouvoir d’achat, le mouvement des Gilets jaunes a pris racine dans un sentiment d’injustice fiscale face à la transition écologique : les ménages, et notamment les plus modestes, auraient à supporter l’essentiel de l’effort alors que les grandes entreprises, parfois très polluantes pourtant, seraient relativement épargnées. S’il peut sembler plus équitable de concentrer l’effort sur les grandes entreprises, au moyen de taxes et de réglementations, une telle stratégie peut s’avérer finalement pénalisante pour les ménages, via la répercussion des coûts de production sur les prix à la consommation. Alors comment engager les entreprises dans la voie de la transition écologique sans pénaliser d’autant les consommateurs ?

      Face à ce défi, le dispositif dit des Certificats d’économie d’énergie (CEE) montre une voie intéressante. Mis en place en France depuis 2006, et dans un nombre croissant de pays européens, ce dispositif hybride de façon insolite une obligation sur les résultats avec une flexibilité sur les moyens (marché, délégation, sensibilisation, subventions, etc.). Surtout, il engage les vendeurs d’énergie à promouvoir eux-mêmes une consommation plus économe et donc plus durable de l’énergie auprès des millions de consommateurs. Fort des débats et des adaptations dont il fait régulièrement l’objet, le dispositif des CEE offre aujourd’hui un cadre qui pourrait tout à fait être extrapolé à d’autres biens et services de consommation. Cette note propose de décrire les caractéristiques clés d’un tel dispositif et les précautions qu’il est essentiel de prendre pour en assurer l’efficacité et l’acceptabilité.

       

      La transition écologique : un vecteur d’injustice fiscale ?

       

      Si le sentiment d’injustice fiscale s’exprime diversement depuis le début du 20e siècle[1], c’est la hausse de la taxe carbone[2], et donc un instrument de la transition écologique, qui en a cristallisé l’une des dernières manifestations. Dans un contexte marqué par le mouvement des Gilets jaunes, il a en effet été reproché aux pouvoirs publics d’augmenter la fiscalité écologique sans lui associer un projet tangible de transition écologique[3]. Surtout, face à l’urgence environnementale, s’est installé le sentiment que les ménages, et notamment les plus modestes, auraient à fournir l’essentiel de l’effort, comparativement aux grandes entreprises parfois très polluantes. Qu’en est-il ?

       

      D’après les dernières données disponibles, l’ensemble des taxes environnementales – au sens d’Eurostat – représentait 51,2 milliards d’euros de recettes pour l’État, dont près de 30 milliards pour la seule TICPE[4] en 2016. S’il n’est pas aisé de distinguer la contribution des ménages de celle des entreprises, un examen des différentes taxes environnementales[5] conduit à estimer que les ménages contribuent aux deux tiers environ de ces recettes, soit deux fois plus que les entreprises. Le maintien de la non-taxation du kérosène[6] par exemple, alors que l’aviation émet 14 à 40 fois plus de CO2 que le train par kilomètre et personne transportée, a été largement critiqué à cet égard.

       

      Ce sentiment d’iniquité quant à la répartition de l’effort est préjudiciable pour la transition écologique. Après des années de prise de conscience des enjeux environnementaux, il peut en effet entraîner un désengagement, à la fois pratique et moral, des citoyens. Ainsi en 2018 par exemple[7], 62 % des Français souhaitaient que le gouvernement donne la priorité au pouvoir d’achat, quitte à aller moins rapidement sur la transition énergétique. Il apparaît également que les Français sont de plus en plus nombreux à se désintéresser des problématiques liées à l’environnement, voire à exprimer une hostilité (23 % désormais de « rétractés »[8]), tout en étant de moins en moins nombreux à faire confiance aux grandes entreprises (27 % en 2015 contre 57,7 % en 2004). Plus récemment, une enquête du Crédoc (2019[9]) nous apprend que les 18-30 ans ont beau placer l’environnement comme un enjeu crucial, ils ne se comportent pas de façon plus écologique que leurs aînés. Ils sont moins nombreux à trier leurs déchets et à réduire leur consommation d’électricité et beaucoup plus nombreux à voyager régulièrement en avion. Il est donc essentiel de retrouver l’adhésion de tous, en convictions comme en actions.

       

      Exiger plus d’efforts de la part des entreprises peut pénaliser les consommateurs

       

      Pour concilier les impératifs de transition écologique et de justice sociale, il suffirait à première vue d’appliquer le principe de pollueur-payeur, et de répartir l’effort fiscal au prorata des émissions de gaz à effet de serre dont chacun se rend responsable. Ce serait à la fois juste et efficace… Vraiment ?

      Si l’on regarde les chiffres[10], près de 17 % des émissions de CO₂ de la France sont dues aux seules voitures particulières, lorsque nous faisons nos courses, allons au travail ou partons en vacances – contre à peine plus de 1 % pour le trafic aérien intérieur, à titre de comparaison. Le logement résidentiel est quant à lui responsable d’environ 15 % des émissions totales, avec plus de 45 millions de tonnes de CO₂, à cause principalement de nos appareils de chauffage. Les ménages seraient donc approximativement responsables d’un tiers des émissions de CO2 (17 % + 15 %), tandis que les deux tiers restants reviendraient aux industries, à l’agriculture, au tertiaire ou encore à la production même de l’énergie. Avons-nous là notre clé de répartition de l’effort, à savoir un tiers pour les ménages et deux tiers pour les entreprises, soit précisément l’inverse de la répartition actuelle ?

      Non, et cela pour deux raisons principales. La première tient à la pertinence du calcul, très discutable en réalité. L’industrie, l’exploitation agricole, la clinique et la centrale à charbon pourraient rappeler, à raison, qu’elles consomment de l’énergie, non pas pour leur propre confort, mais bien pour produire des tables, des pommes, des soins et de l’électricité que les ménages in fine consomment. En tant que consommateurs « finaux », les ménages seraient en quelque sorte directement et indirectement responsables de 100 % de la consommation énergétique (et de son gaspillage).

      La deuxième raison est d’ordre pratique. Même si les décideurs politiques s’en remettaient directement aux grands consommateurs d’énergie que sont les entreprises de biens et de services, les ménages en seraient finalement affectés, via une répercussion plus ou moins forte des coûts de production sur les prix, mais aussi potentiellement sur l’emploi et les salaires, et donc sur le pouvoir d’achat des ménages[11]. Ainsi par exemple, une taxe sur le kérosène pourrait induire une hausse du prix du billet d’avion ainsi qu’une diminution de l’emploi et des salaires dans le transport aérien et le tourisme. Des règles de construction plus strictes pourraient entraîner une hausse de prix de l’immobilier, une baisse de la demande de construction et donc de l’emploi et des salaires dans ce secteur. Une limitation de la circulation des poids lourds pourrait entraîner la hausse des prix des marchandises transportées, etc. De plus, si de telles taxes ou réglementations sur les entreprises ont l’intérêt de décourager certaines consommations, elles laissent à l’État la charge d’encourager, au moyen de subventions et de campagnes de sensibilisation notamment, l’adoption de modes de consommation plus durables.

      En bout de chaîne, le consommateur final aurait en définitive à supporter l’essentiel du coût de la transition écologique. Tout au plus peut-on répartir plus équitablement l’effort entre consommateurs finaux, via des mesures redistributives comme les actuels chèques énergie, tarifs sociaux ou encore « super primes » à la conversion.

       

      Et si on s’inspirait du dispositif des certificats d’économie d’énergie ?

       

      Comment exiger davantage d’efforts des entreprises, tout en limitant la répercussion des coûts associés sur les prix à la consommation ? On pourrait adopter une logique de marché et stimuler la concurrence entre les entreprises, de façon à tirer les prix à la baisse. Ou adopter une logique réglementaire tout en limitant ses effets sur les prix à travers des prix plafonds, à l’instar des tarifs réglementés sur le gaz et l’électricité. Mais il est également possible de tirer le meilleur de ces deux logiques, en s’inspirant d’un dispositif insolite de maîtrise énergétique : le dispositif des certificats d’économie d’énergie (CEE).

      Créé en 2005 par la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique (POPE) du 13 juillet 2005 (articles 14, 15, 16, et 17), ce dispositif oblige en effet les principaux vendeurs d’énergie (EDF, Engie, Total, etc.) à inciter leurs clients à changer leurs chaudières, à isoler leurs murs, en bref, à consommer moins d’énergie. Au moyen de bons d’achat, de primes et de conseils, il revient ainsi aux vendeurs d’énergie d’encourager les millions de consommateurs clients à moins en consommer.

      Plus précisément, au prorata de leurs parts de marché, les principaux vendeurs d’énergie ont l’obligation réglementaire de faire économiser un certain volume d’énergie, correspondant à un nombre équivalent de CEE. Pour atteindre le nombre de CEE qui leur est assigné sur une certaine période de temps (en principe triennale), et ne pas avoir à payer une pénalité à l’État[12], les « obligés » peuvent réaliser ou faire réaliser les opérations d’économie d’énergie (par exemple isoler la toiture) auprès de leurs clients. Ils peuvent également acheter – sur un marché – des CEE auprès des obligés qui en auraient en surplus, ou auprès d’acteurs non obligés – comme les collectivités – qui peuvent générer des CEE sans y être contraints[13]. En résumé, c’est comme si les principaux vendeurs d’énergie prenaient à leur charge une partie du coût des opérations d’économie d’énergie, ou payaient ceux qui s’en chargeaient à leur place.

      Figure 2 : Le dispositif des CEE[14].

      Source : DREAL Occitanie, ministère de la Transition écologique et solidaire / DR

       

      Ainsi mobilisés, les principaux vendeurs d’énergie constituent une courroie de transmission entre l’État et les millions de consommateurs, tandis que leur connaissance du terrain les aide à atteindre le gisement diffus à moindre coût. Dans la littérature académique, les différents instruments de maîtrise énergétique ont été largement étudiés. D’un côté, les instruments financiers permettent en théorie de contrôler les signaux-prix mais ont tendance à produire des situations inéquitables ou des effets d’aubaine. Les instruments réglementaires ou contractuels ont le mérite de garantir un résultat, mais à un coût potentiellement élevé. Les instruments informationnels, à l’inverse, présentent un coût faible et donc une plus grande acceptabilité sociale, mais ne garantissent pas le résultat. En combinant ces différentes instruments canoniques, le dispositif des CEE est celui qui permet en théorie le mieux à concilier l’efficacité économique avec les exigences de redistributivité et d’acceptabilité sociales[15]. Cet avantage comparatif est également corroboré par la pratique[16] :

       

      • Nominalement, le dispositif des CEE a atteint l’ensemble des objectifs pluriannuels croissants, que l’État fixe de façon ex ante: 54 TWhc pour la période 2006-2009, 447 TWhc pour la période 2011-2014 et 850 TWhc pour la période 2015-2017[17]. Ainsi, en cumulé, le dispositif des CEE aurait depuis 2006 permis d’économiser plus de 20 % de la consommation énergétique annuelle française[18]. Concrètement, sur la seule année 2018 dans le résidentiel, le dispositif a notamment permis[19] l’installation la réalisation de près de 395 000 actions d’isolations ainsi que de 114 000 installations chaudières à haute performance énergétique. Si la littérature[20] prête des effets d’aubaine de 15 % à 60 % aux dispositifs visant la maîtrise énergétique (taxe, subventions, CEE, etc.), 75 % des ménages bénéficiaires des CEE ont estimé que « la prime CEE » a eu un réel effet incitatif dans leurs décisions de rénovation[21]. En d’autres termes, même s’ils sont parfois cumulés avec d’autres dispositifs incitatifs, comme le CITE et l’éco-prêt à taux zéro, les CEE présenteraient en définitive l’intérêt de précipiter les décisions de rénovation ;

       

      • Le dispositif des CEE présente un coût relativement faible pour l’État qui doit seulement assurer le contrôle et la délivrance des certificats ; à ce jour, l’administration en charge (le Pôle National des CEE) dispose d’une quinzaine d’ETP et peut compter sur des outils numériques facilitant de plus en plus ses missions. Le coût du dispositif des CEE est circonscrit pour les obligés également puisque le coût d’obtention d’un CEE vaut en moyenne 0,8 c€/kWh[22]. Et si ce coût augmente depuis 2006[23], à mesure que les gisements les plus accessibles se réduisent, les obligés peuvent compter sur l’augmentation des tarifs réglementés ou celui des prix à la consommation. Ces prix augmentent en effet, mais restent limités pour les ménages : la répercussion des CEE est équivalente à 3 % environ de la facture énergétique moyenne en 2019, soit 100-150€ par an, et soit dix fois moins que la répercussion de la taxe carbone[24]. L’efficience du dispositif peut également être soulignée de manière agrégée : entre 2006 et 2016, le dispositif des CEE a contribué à financer des travaux d’économies d’énergie à hauteur de 24 Md€ et permis ainsi près de 2 Md€ d’économies annuelles pour les consommateurs[25]. En outre, et relativement à des taxes énergétiques, l’effet-prix imputable au dispositif des CEE entraîne une baisse bien plus significative de la consommation énergétique : une augmentation du prix de 1 %, lorsqu’elle est imputable aux CEE, conduit à une baisse de la consommation de 2,5 %, et seulement de 0,30 % lorsqu’elle est imputable à une taxe[26];

       

      • Enfin, le dispositif des CEE offre à la puissance publique un outil de pilotage flexible car l’État peut tout à la fois moduler le niveau des objectifs, la répartition de l’effort entre les obligés ou encore réviser les opérations éligibles à la délivrance de CEE[27]. En particulier, l’État peut développer des modalités spécifiques pour les ménages les plus précaires : en l’occurrence, depuis 2017, le dispositif des CEE distingue désormais les « CEE classiques » et les « CEE précarité énergétique ». Ces derniers ne peuvent être obtenus qu’auprès des ménages les plus modestes, et correspondent à une obligation spécifique (150 TWhc sur la période 2015-2017 et 533 TWhc sur la période 2018-2021). Ainsi, les vendeurs d’énergie sont amenés à mettre en place des incitations adaptées aux ménages les plus modestes, tandis que l’État se garde la possibilité, sous certaines conditions, de doubler le dispositif des CEE de subventions et de bonifications (aides de l’ANAH et de l’Ademe, « Coup de pouce économie d’énergie », etc.). L’aide de l’ANAH (Agence nationale de l’habitat) par exemple peut couvrir jusqu’à 50 % des dépenses de travaux. Au croisement des aides publiques et des aides privées, il est alors apparu, en particulier pour les ménages modestes, des offres à 1€, par exemple pour le remplacement d’une chaudière à énergie fossile par une chaudière utilisant des énergies renouvelables. En 2018, sur les 509 000 actions d’isolation et d’installation de chaudières à haute performance, plus de 62 % ont ainsi été réalisées auprès des ménages en situation de précarité énergétique[28].

       

      En particulier par rapport à une simple taxe qui serait redistribuée, le dispositif des CEE présente un avantage clé : il oblige les producteurs à promouvoir les technologies et les comportements les plus propres, tout en leur laissant une marge pour répercuter ces efforts sur les prix à la consommation. Les producteurs les plus polluants sont ainsi exposés à une double peine : s’ils ne réalisent pas suffisamment d’efforts pour promouvoir les solutions propres, alors ils finissent avec un nombre insuffisant de CEE et s’exposent à une pénalité, et s’ils répercutent trop le coût de leurs efforts sur le prix de leurs biens et services d’origine, alors ils perdent leurs clients et des parts de marché.

      En tant que signal-prix, la répercussion éventuelle du coût d’obtention des CEE sur le prix des énergies va également créer une émulation entre les consommateurs : soit le consommateur se presse pour réaliser une opération subventionnée et ainsi consommer moins d’énergie, soit il ne fait rien et prend le risque de voir sa facture augmenter dans l’éventualité d’une augmentation des prix. Ainsi, l’offre stimule la demande d’opérations d’économie d’énergie, par le jeu des actions incitatives des obligés (primes, conseils, etc.), tandis que la demande stimule l’offre de ces mêmes opérations, sous l’effet des prix des énergies qui augmentent pour l’ensemble des consommateurs. En définitive, ce mécanisme de concurrence entre producteurs d’une part, et d’émulation entre consommateurs d’autre part, permet d’engager conjointement et équitablement la responsabilité et l’effort de l’ensemble des parties prenantes.

       

      Étendre le dispositif des certificats « blancs » à d’autres biens et services de consommation

       

      Le dispositif des CEE fait partie de la famille des « certificats blancs », qui se sont multipliés en Europe, sous l’effet d’une directive européenne[29] : après le Royaume-Uni (depuis 2002), l’Italie (2005), la France (2006), le Danemark (2006) et la Bulgarie (depuis 2008), d’autres pays ont depuis développé leur propre dispositif, comme l’Irlande, le Luxembourg, l’Autriche, la Pologne, la Slovénie ou encore la Grèce. Si quelques modalités diffèrent d’un pays à l’autre (par exemple la nature des obligés), l’ensemble de ces dispositifs se caractérise par l’hybridation d’un mécanisme d’obligation sur les résultats et d’un mécanisme de flexibilité sur les moyens. Alors qu’un dispositif de certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques (CEPP) est en cours d’expérimentation[30], il serait opportun d’envisager des dispositifs équivalents pour rationaliser la consommation de voitures, d’eau, de transport en avion et de tout autre bien et service ayant un impact négatif sur l’environnement.

      Prenons l’exemple des véhicules. Afin d’atteindre l’objectif de zéro véhicule thermique neuf vendu en 2040[31], l’État pourrait extrapoler le dispositif des CEE aux vingt principaux vendeurs en France (qui représentent plus de 90 % des parts de marché) : il imposerait à chaque vendeur, au prorata de son importance, d’encourager l’achat d’un certain nombre (ou d’un pourcentage fixé) de voitures électriques, en échange de certificats. Chaque vendeur aurait alors le choix entre réduire le prix de vente de ses voitures électriques – en rognant sur ses marges ou en innovant sur sa chaîne de production – ou acheter des certificats à d’autres vendeurs qui y seraient parvenus. En résumé, chaque vendeur « obligé » serait amené à faire l’effort de développer des voitures électriques à un prix abordable, sinon à payer ses concurrents qui y parviennent à sa place.

      Selon le même principe, les distributeurs d’eau pourraient être amenés à en promouvoir une consommation plus efficiente, par exemple en versant des primes à l’installation de réducteurs de débit ou de mitigeurs thermostatiques. De même, les grossistes qui vendent des produits en plastique pourraient être tenus de promouvoir l’utilisation de matériaux alternatifs, sinon de plastiques biodégradables ou fabriqués selon des normes plus respectueuses de l’environnement. Ou encore pour le transport aérien, l’État pourrait astreindre les compagnies aériennes à promouvoir des modes de transport plus propres sur les plus petites distances.

      Bien entendu, les dispositifs de certificats blancs ne sont pas exempts de risques. À cet égard, l’expérience du dispositif des CEE permet d’identifier trois principaux points de vigilance :

       

      • Les économies d’énergie déclarées peuvent être surestimées, soit parce que l’opération a été mal faite (voire non faite), soit parce que le ménage décide de consommer davantage que prévu (cf. l’effet rebond), soit parce que la mesure des effets est mal calibrée. Des acteurs peuvent alors se prévaloir, auprès de l’État ou sur le marché, de CEE frauduleux ou ne correspondant pas à de réelles économies d’énergie. Selon l’Ademe (2019), cette surestimation est en moyenne de 25 %[32]. Pour prévenir ces risques, il est essentiel que les pouvoirs publics  s’assurent que les opérations déclarées soient effectivement réalisées, à travers des contrôles plus systématiques sur pièces et sur place, et de façon ex ante comme de façon ex post. Il est essentiel aussi qu’ils révisent régulièrement les opérations éligibles à la délivrance de certificats au regard des économies réelles associées ;

       

      • L’obtention de CEE peut être artificiellement facilitée par un effet d’aubaine, en ce sens que certains ménages prétendument incités à changer leurs chaudières (par exemple) dans le cadre du dispositif, l’auraient de toute façon changée (au regard de la vétusté de la chaudière d’origine, d’un autre dispositif incitatif, etc.). Pour que les obligés jouent véritablement un rôle incitatif auprès des consommateurs, il est important de limiter les redondances entre les différents dispositifs. De plus, les objectifs peuvent être fixés de façon croissante de façon à amener progressivement les obligés à s’adresser aux consommateurs les moins enclins à (spontanément) changer de comportements ou de technologies ;

       

      • Le coût d’obtention des CEE peut être perçu comme trop élevé pour les obligés, au motif que la répercussion du coût d’obtention sur les prix est insuffisante (notamment pour les tarifs réglementés) ou que les opérations présentent des retours sur investissement trop faibles pour leurs potentiels bénéficiaires. À cet égard, il revient aux pouvoirs publics d’être attentifs au niveau global d’obligation et à sa répartition entre les différents acteurs, de limiter toute forme de distorsions de concurrence, de donner une visibilité suffisante au dispositif et de ne rendre éligibles à la délivrance de certificats que les opérations conciliant véritablement une opportunité tant environnementale qu’économique. En particulier, il revient aux pouvoirs publics de limiter la répercussion des coûts (d’obtention des certificats blancs) sur les prix à la consommation supportés par les ménages, à travers la réglementation ou par l’octroi de subventions conséquentes.

       

      Par ailleurs, la gouvernance même du dispositif des CEE offre un exemple intéressant d’implication des parties prenantes : sous la tutelle du ministère de la Transition écologique et solidaire, sont régulièrement réunis les acteurs concernés par le dispositif, à la fois pour répondre aux questions, échanger les bonnes pratiques, relever les difficultés ou défaillances d’application, et concevoir les pistes d’évolution les plus adaptées[33].

       

      Conclusion

      Alors que le dispositif des CEE monte en puissance en France, ainsi que ses équivalents en Europe, de nombreux débats et ajustements ont eu lieu pour en augmenter l’efficacité et l’acceptabilité. S’assurer que les principaux vendeurs encouragent les consommateurs à mieux (et moins) consommer : voilà le pari original des dispositifs de certificats blancs qui hybrident des logiques d’obligation, de sensibilisation, de taxe et de marché, et qui mériteraient d’être généralisés à d’autres biens et services de consommation, à l’instar de l’eau, du plastique ou encore du transport aérien. Pour se prémunir des erreurs, des fraudes ou des distorsions possibles, le dispositif des CEE nous offre quelques enseignements : les pouvoirs publics sont appelés à assurer un contrôle suffisant des actions déclarées, à adapter les actions éligibles à leur réelle opportunité économique et environnementale, et à conférer aux objectifs une progressivité et une visibilité suffisantes.

       

       

      [1] Spire, A. « Résistances à l’impôt, attachement à l’État. Enquête sur les contribuables français », Seuil, Paris, 2018.

      [2] La taxe carbone correspond à la « Contribution Climat Énergie » (CCE).

      [3] Rapport fait au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2019 (n° 1255).

      [4] Taxe Intérieure de Consommation sur les Produits Énergétiques, qui inclut la taxe carbone.

      [5] Ministère de la Transition écologique et solidaire (2017), « Fiscalité environnementale : Un état des lieux », 2017.

      [6] Le gouvernement a finalement proposé la mise en place d’une éco-taxe sur les billets d’avion (Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, décembre 2020).

      [7] Enquête Ifop (novembre 2018).

      [8] GreenFlex – Ademe (2015), « Consommation durable et Typologie des consommateurs ».

      [9] Crédoc (2019), Consommation & Modes de Vie.

      [10] Chiffres Insee, Ademe, MTES et CITEPA (2016 et 2017).

      [11] Sur l’incidence fiscale de la fiscalité écologique, voir notamment Douenne, T. « Les effets de la fiscalité écologique sur le pouvoir d’achat des ménages : simulation de plusieurs scénarios de redistribution », Focus du CAE, 2019.

      [12] Actuellement, il s’agit d’une pénalité libératoire de 2 centimes d’euros par CEE manquant.

      [13] Pour plus d’informations, voir Baïz, A. « De l’innovation des instruments de politiques publiques », Thèse de doctorat d’État, chapitre 8, 2018, le site de l’Ademe ou encore cette infographie du ministère de la Transition écologique et solidaire.

      [14] DREAL Occitanie, ministère de la Transition écologique et solidaire.

      [15] D’un point de vue micro-économique, le dispositif des CEE est parfois modélisé comme le couplage d’une taxe sur l’énergie et d’une subvention aux technologies les plus propres. Voir notamment Giraudet et al., « Quelle efficacité des dispositifs de certificats blancs dans les politiques de maîtrise de la demande d’énergie ? », Presses des mines, 2010.

      [16] Voir notamment Baïz, A. « De  l’innovation instrumentale : Les  certificats  d’économies  d’énergie »,  Théma, ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer (2016) ainsi que les rapports de la Cour des Comptes (2013 et 2016).

      [17] L’objectif en cours est de 2133 TWhc pour la période 2018-2021, dont 533 TWhc au titre de la lutte contre la précarité énergétique. Pour donner un ordre de grandeur : 100 TWhc sont équivalents à la consommation énergétique résidentielle d’un million de Français pendant 15 ans.

      [18] Pour réaliser ce calcul, nous sommons en TWh les économies d’énergie réalisées via les CEE depuis 2006, et rapportons cette somme à la consommation finale annuelle de 2015 (149,2 Mtep en 2015, avec 1 Mtep = 11,63 TWh). Avec 0,211 kgCO2eq par kWh économisé (DGEC 2017, op. cit), cela correspond à plus de 73 millions de tonnes de CO2eq économisées depuis 2006.

      [19] Source : site du ministère de la Transition écologique et solidaire.

      [20] Voir IGF, CGEDD, CGE (2014), « Les certificats d’économies d’énergie : efficacité énergétique et analyse économique » ; voir aussi Nadel 1990, Joskow & Marron 1992, Wirl 1995 ou encore Le Mouël 1996.

      [21] Ademe (2014), Évaluation qualitative du dispositif CEE : 2e période 2011-2013.

      [22] Sur le marché des CEE, le prix varie entre 0,72 et 0,92 c€/kWh (Source : Emmy, le registre national des CEE cité dans le Rapport d’information sur la rénovation thermique des bâtiments (Assemblée Nationale, février 2021).

      [23] D’après les dernières analyses disponibles pour la troisième période (2015-2017), le coût interne pour les obligés imputable à la recherche de CEE a représenté 241 millions d’euros sur trois années, relativement aux 3,4 milliards d’euros de travaux d’efficacité énergétique correspondants (Ademe, 2019).

      [24] Source : Effy, 2019. D’après les données du SDES (septembre 2019) sur l’année 2018, un ménage a dépensé en moyenne 1 519 € en énergie pour son logement, dont un peu moins d’un tiers de taxes, et 1 386 € en carburants, dont 59 % de taxes.

      [25] Cour des Comptes (2016), « Les certificats d’économies d’énergie : un dispositif amélioré ».

      [26] Pour calculer cette élasticité, nous tenons compte du fait que le dispositif des CEE a permis d’économiser 13,85 Mtep entre 2006 et 2019, rapporté à une consommation finale agrégée d’environ 154 Mtep (Source : Chiffres clés de l’énergie, 2019, MTES). Nous admettons aussi que le dispositif a conduit à une augmentation de 3,5 % des prix de l’énergie. L’élasticité vaut -1,15 si l’on tient compte de l’efficacité réelle (cf. la section suivante) du dispositif, et reste donc meilleure que celle d’une taxe.

      [27] Pour garantir la qualité des opérations d’économie d’énergie et en faciliter le montage, le ministère en charge de l’environnement définit par arrêtés un certain nombre de fiches standardisées. Elles spécifient les exigences techniques des opérations et leur associent un montant forfaitaire d’économies d’énergie sur la période de temps considérée. Il est également possible de réaliser des  économies d’énergie en dehors des opérations standardisées : il s’agit alors d’opérations dites « spécifiques ».

      [28] Les ménages modestes représentent jusqu’à près de 75 % des bénéficiaires si l’on ne considère que l’isolation des combles perdus.

      [29] La directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique impose à chaque État membre de réaliser des économies annuelles représentant 1,5 % des ventes d’énergie aux consommateurs finaux par rapport à la moyenne annuelle 2010-2012.

      [30] Plan Ecophyto 2, ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.

      [31] Loi d’Orientation des Mobilités, promulguée le 24 décembre 2019. Voir aussi la directive européenne établissant des normes de performance en matière d’émissions de CO2 pour les voitures particulières neuves et pour les véhicules utilitaires légers neufs (17 avril 2019). Aux États-Unis, un dispositif similaire existe déjà : dans l’État de Californie par exemple, les constructeurs les moins vertueux en matière d’émissions de CO2 qui ne vendent pas assez de véhicules non polluants doivent acheter des crédits auprès de concurrents afin de compenser la différence et d’éviter ainsi une amende.

      [32] Source : Ademe (2019), Évaluation du dispositif des certificats d’économies d’énergie.

      [33] Ainsi par exemple une phase de consultation publique a démarré en mai 2021 autour des évolutions du dispositif des CEE et à l’approche de sa cinquième période d’application (à compter du 1er janvier 2022).

        Partager

        EmailFacebookTwitterLinkedInTelegram

        Télécharger en pdf

        Laissez-nous votre email pour télécharger nos travaux

        Télécharger en pdf

        Laissez-nous votre email pour télécharger nos travaux

        Télécharger en pdf

        Laissez-nous votre email pour télécharger nos travaux

        Télécharger en pdf

        Laissez-nous votre email pour télécharger nos travaux