Clair-obscur de la planification écologique française
Le changement climatique est la plus grande défaillance de marché jamais constatée. Et pourtant, les politiques de régulation ont cherché depuis trente ans, sans succès, à en limiter les causes et les conséquences par des mécanismes de marché. Les conséquences, en matière d’action publique, doivent être tirées de cet échec. Il est ainsi urgent de réhabiliter une politique volontariste permettant de faire advenir une société décarbonée : la planification écologique. Certes, depuis vingt ans, les politiques énergétiques et d’aménagement du territoire ont montré un certain attachement à cette forme particulière d’action publique. Pour autant, la juxtaposition d’outils de planification mal articulés et décorrélés des moyens financiers octroyés ont conduit à l’inefficacité de ces politiques. Cette architecture empêche ainsi de parler d’une véritable planification écologique, conforme à son inspiration des Trente glorieuses. Il convient de s’attaquer à ces maux pour instituer une réelle planification écologique, nécessaire à la transition ordonnée de nos sociétés : – une rationalisation : les outils de planification existants doivent être rationalisés et simplifiés, sous l’égide du nouveau secrétariat à la planification écologique ; – une mise en cohérence : les planifications, aux différentes échelles, doivent être mieux contrôlées afin d’assurer une cohérence d’ensemble et le respect des objectifs fixés au niveau européen et national ; – une politique industrielle verte : une véritable planification écologique est indissociable d’un grand plan d’investissements publics et privés en faveur de la transition écologique de nos sociétés. Synthèse des recommandations Axe n°1 : améliorer la lisibilité de l’arsenal planificateur Recommandation n° 1 : évaluer de l’action du Conseil de défense écologique pendant le quinquennat 2017-2022 afin d’éclairer la doctrine d’action du SGPE Recommandation n° 2 : coordonner et organiser l’élaboration de la loi d’objectifs pour le climat, d’ici juillet 2023, dans un objectif d’harmonisation de l’ensemble des documents de planification en découlant Recommandation n° 3 : engager une évaluation à court terme sur les blocages dans l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi des outils de planification écologique à l’échelle nationale Recommandation n° 4 : rationaliser, à moyen terme, les documents de planification énergétique et écologique au niveau national, afin de privilégier un Plan transversal dont découleraient, le cas échéant, des plans sectoriels Recommandation n° 5 : coordonner une révision de l’ensemble des documents de planification à l’échelle territoriale afin de les aligner sur les objectifs contenus dans la future LPEC et SFEC Axe n°2 : améliorer le contrôle des outils de planification pour assurer une cohérence d’ensemble Recommandation n° 6 : renforcer les rapports de hiérarchie normative (envisager un rapport de conformité ; supprimer les rapports de prise en compte) entre la LPEC et les textes en découlant. Envisager une évolution similaire à l’échelle territoriale entre le SRADDET et les textes reliés (PCAET, schémas nationaux, SCoT, PLU, etc.) Recommandation n° 7 : imposer, dans la loi, une révision systématique, coordonnée par le SGPE, des documents de planification régionaux en cas de révision des documents de planification national (SNBC, LPEC, SFEC) Recommandation n° 8 : organiser un organe de concertation et de dialogue des collectivités locales destiné à articuler et élaborer les outils territoriaux de la planification écologique ; cet organe s’inspirerait des CTAP et tiendrait compte des évaluations produites depuis son entrée en vigueur Recommandation n° 9 : systématiser, sous l’égide du SGPE, l’évaluation des outils et documents de planification écologique Recommandation n° 10 : instaurer la saisine obligatoire du Haut Conseil pour le Climat sur les outils de planification ou textes liés à la transition écologique, par le biais du SGPE et doter le HCC d’un pouvoir d’injonction dans son contrôle Recommandation n° 11 : assurer le respect par la législation nationale des obligations européennes, de manière coordonnée entre le SGPE et le SGAE Axe n°3 : donner des armes à la planification écologique Recommandation n° 12 : réhabiliter l’État interventionniste selon les orientations fixées par la planification écologique ; engager un vaste mouvement d’investissements publics et privés cohérent avec la planification Compenser la hausse des dépenses publiques en faveur de la transition par une baisse des dépenses fiscales néfastes à l’environnement Promouvoir, sur le modèle de l’Inflation Reduction Act américain, une conditionnalité environnementale des instruments mis en œuvre (notamment subventions et crédits d’impôts) Recommandation n° 13 : inscrire la planification territoriale économique dans l’impératif écologique, en renforçant l’articulation du SRDEII avec la réglementation environnementale, en particulier en soumettant son élaboration à une évaluation environnementale Recommandation n° 14 : mieux articuler l’articulation entre planification territoriale économique et écologique, en renforçant l’articulation entre le SRDEII et le SRADDET, en imposant une compatibilité entre le SRDEII et le SRADDET (objectifs et règles générales) Table des matières Une planification écologique française illisible, impuissante et inefficace. 1.1. Une planification illisible : la prolifération des outils non coordonnés et juxtaposés. L’inspiration planificatrice de la politique énergétique nationale. Le renforcement de l’échelle territoriale pour la planification énergétique et écologique. Un paysage aujourd’hui illisible. 1.2. Une planification non contraignante. La planification territoriale : le trou noir du contrôle de légalité et des rapports juridiques de prise en compte Une planification énergétique nationale faiblement prise en compte et non-contrôlée La planification écologique européenne : la contrainte sans contrôle L’appel à une planification contraignante par la jurisprudence française 1.3. Une planification désarmée. Une résultante de l’évolution du rôle de l’État : une planification tombée en désuétude. Un État régulateur incapable de prendre en charge une véritable planification. Construire une véritable planification écologique. 2.1. Améliorer la lisibilité de l’arsenal planificateur. Le rôle du SGPE dans la gouvernance de la planification écologique. Mettre en cohérence les outils de planification existant et rationaliser le paysage aujourd’hui illisible. 2.2. Améliorer le contrôle des outils de planification pour assurer une cohérence d’ensemble. Une articulation des outils de planification à revoir pour établir une réelle cohérence d’ensemble. La systématisation de l’évaluation des outils de planification, condition de la cohérence de la planification écologique. Le renforcement du cadre de planification européen. 2.3. Donner des armes à la planification écologique. Le besoin de traduire la planification écologique dans une véritable politique industrielle verte. La nécessaire programmation des financements pour le climat. Alors
Par Heim G.
3 novembre 2022