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Jean-Yves Neveu

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Retraites : une réforme radicalement solidaire et écologique est possible

Le Gouvernement, sous l’impulsion du Président de la République, entend conduire une nouvelle réforme des retraites au plus vite et sans idée de compromis, ce dernier considérant qu’il dispose d’un mandat implicite des Français pour le faire au travers de sa réélection. Selon le Président de la République, la pérennité de notre système de retraites par répartition serait en jeu. Le 6 février 2023, le débat sur le projet de réforme des retraites du gouvernement démarre à l’Assemblée nationale sur fond de forte mobilisation syndicale. La veille de l’ouverture des débats, la Première ministre a annoncé quelques concessions. La principale d’entre elles porte sur l’extension du dispositif applicable aux carrières longues. Une mesure relative à l’index senior (publication par des entreprises du nombre de salariés de plus de 55 ans – et en aucun cas obligation d’embauche -) serait maintenant assortie d’une sanction financière, mais pour défaut de publication de l’index. Le reste ne serait pas négociable. Pourtant, une autre réforme des retraites, radicalement solidaire et écologique, est possible. C’est dans de cette ambition que s’inscrivent cette note et les différentes propositions que celle-ci formule. Après une courte présentation des chiffres clés en matière de retraite nécessaires pour disposer d’une vue d’ensemble, la première partie sera consacrée à une analyse critique des réformes paramétriques qui se sont succédé de 1993 à 2013, de leurs sous-jacents politiques et de leurs impacts en particulier sur l’évolution du taux de remplacement des pensions (rapport entre la pension de retraite calculée au moment de la liquidation des droits et le dernier revenu d’activité perçu). Sous l’effet conjugué des différentes réformes paramétriques menées depuis le début des années 1990, il connaît une baisse continue. Il a perdu 10 points sur la période pour s’établir à 74% aujourd’hui. Pour la génération née en 2000, il serait de 53% ! Nous verrons aussi que les mesures d’allongement de la durée de cotisation et de recul de l’âge légal de départ à la retraite sont relativement inefficaces sur le taux d’emploi des seniors et plus particulièrement des personnes peu qualifiées souvent réduites à l’inactivité et à devoir dépendre des minima sociaux. La seconde partie s’intéressera au projet de réforme en cours et à ses conséquences. À l’appui des principales conclusions du dernier rapport du Comité d’orientation des retraites de septembre 2022, il sera démontré que, contrairement aux discours tenus par les promoteurs de la réforme en cours, la soutenabilité financière à long terme de notre système de retraite n’est pas remise en cause et que le risque de faillite n’est pas avéré. Nous verrons que cette réforme s’inscrit dans la logique des précédentes réformes, propose les mêmes mesures éculées et inégalitaires, remet en cause le principe même d’un système de retraite par répartition et vise en réalité le développement d’un système par capitalisation, fondé quant à lui sur l’épargne retraite, régi par les règles du marché et imposé par l’Union européenne. Elle entraînerait à terme une rupture de notre modèle de retraite par répartition. Dans une dernière séquence, plusieurs pistes de recommandations seront proposées. Elles s’inscrivent dans un cadre repensé en termes d’emploi des seniors et de droits à la retraite. Un « revenu d’engagement senior » offrirait une possibilité de seconde vie professionnelle aux seniors en contrepartie d’un projet à forte utilité sociale notamment dans les domaines de la reconstruction écologique et du « care » (aide à la personne et aux besoins élémentaires du quotidien). Il serait une réponse non marchande à la problématique de l’emploi des seniors. Une autre proposition est fondée sur la reconnaissance d’un droit à la retraite attaché à la personne et non plus à la carrière professionnelle. Enfin, des mesures de financement de notre système sont étudiées, non pour garantir la pérennité de notre système qui n’est pas en cause, mais pour des objectifs de justice sociale et en particulier pour mettre fin à cette baisse continue du taux de remplacement. Un dispositif fondé sur une cotisation retraite appliquée non plus sur la seule masse salariale mais sur l’intégralité de la valeur ajoutée est envisagé. Il assurerait une meilleure répartition des gains de productivité entre la rémunération du capital et du travail. Un prélèvement exceptionnel sur le montant des dividendes versés est proposé. Il viendrait abonder un fonds spécifique retraite. I- Une succession de réformes porteuses de plus d’inégalités Il est d’abord essentiel de rappeler les principales données chiffrées en matière de dépenses et de financement de notre système de retraite ainsi que les principales données « d’environnement » comme le taux d’emploi des seniors, les espérances de vie. Nous présenterons ensuite une rétrospective des réformes paramétriques engagées depuis les années 1980, décennie pivot marquant un véritable tournant en matière de dépenses sociales. Nous mettrons enfin en lumière les principales conséquences de ces réformes en particulier sur le montant des dépenses de retraite et sur l’évolution du taux de remplacement. 1.1 Les dépenses de retraites représentent 14 % du PIB avec un poids des régimes à prestations définies encore prédominant La part dans le PIB français des dépenses de protection sociale a sensiblement augmenté au cours des 60 dernières années. Elle était de 15% en 1960 pour atteindre en 2019 un peu plus de 30% du PIB. Cette proportion est relativement stable depuis les années 2010. Si les années 2020 et 2021 rendent compte d’une augmentation sensible de ces dépenses qui atteignent 33% du PIB, c’est en raison de dépenses exceptionnelles engagées dans le cadre de la crise du COVID. Les comptes de l’année 2020 enregistrent en particulier une charge exceptionnelle de 46 milliards, dont 27 au titre des seules mesures de chômage partiel. Ceux de 2021 sont encore impactés par les dépenses engagées au titre de la vaccination et des campagnes de dépistage. Les deux principaux « risques » couverts par ces dépenses de protection sociale sont, sans surprise, la vieillesse et la maladie à hauteur respectivement de 14% et de 11,3% de ce même PIB[1]. La France compte plus de 16 millions de retraités auxquels 330 milliards d’euros de pensions par an sont versés, ce chiffre incluant

Par Moutenet P., Adrianssens C., Neveu J., Montjotin P.

16 février 2023

Retraites : une réforme radicalement solidaire et écologique est possible

Le Gouvernement, sous l’impulsion du Président de la République, entend conduire une nouvelle réforme des retraites au plus vite et sans idée de compromis, ce dernier considérant qu’il dispose d’un mandat implicite des Français pour le faire au travers de sa réélection. Selon le Président de la République, la pérennité de notre système de retraites par répartition serait en jeu. Le 6 février 2023, le débat sur le projet de réforme des retraites du gouvernement démarre à l’Assemblée nationale sur fond de forte mobilisation syndicale. La veille de l’ouverture des débats, la Première ministre a annoncé quelques concessions. La principale d’entre elles porte sur l’extension du dispositif applicable aux carrières longues. Une mesure relative à l’index senior (publication par des entreprises du nombre de salariés de plus de 55 ans – et en aucun cas obligation d’embauche -) serait maintenant assortie d’une sanction financière, mais pour défaut de publication de l’index. Le reste ne serait pas négociable. Pourtant, une autre réforme des retraites, radicalement solidaire et écologique, est possible. C’est dans de cette ambition que s’inscrivent cette note et les différentes propositions que celle-ci formule. Après une courte présentation des chiffres clés en matière de retraite nécessaires pour disposer d’une vue d’ensemble, la première partie sera consacrée à une analyse critique des réformes paramétriques qui se sont succédé de 1993 à 2013, de leurs sous-jacents politiques et de leurs impacts en particulier sur l’évolution du taux de remplacement des pensions (rapport entre la pension de retraite calculée au moment de la liquidation des droits et le dernier revenu d’activité perçu). Sous l’effet conjugué des différentes réformes paramétriques menées depuis le début des années 1990, il connaît une baisse continue. Il a perdu 10 points sur la période pour s’établir à 74% aujourd’hui. Pour la génération née en 2000, il serait de 53% ! Nous verrons aussi que les mesures d’allongement de la durée de cotisation et de recul de l’âge légal de départ à la retraite sont relativement inefficaces sur le taux d’emploi des seniors et plus particulièrement des personnes peu qualifiées souvent réduites à l’inactivité et à devoir dépendre des minima sociaux. La seconde partie s’intéressera au projet de réforme en cours et à ses conséquences. À l’appui des principales conclusions du dernier rapport du Comité d’orientation des retraites de septembre 2022, il sera démontré que, contrairement aux discours tenus par les promoteurs de la réforme en cours, la soutenabilité financière à long terme de notre système de retraite n’est pas remise en cause et que le risque de faillite n’est pas avéré. Nous verrons que cette réforme s’inscrit dans la logique des précédentes réformes, propose les mêmes mesures éculées et inégalitaires, remet en cause le principe même d’un système de retraite par répartition et vise en réalité le développement d’un système par capitalisation, fondé quant à lui sur l’épargne retraite, régi par les règles du marché et imposé par l’Union européenne. Elle entraînerait à terme une rupture de notre modèle de retraite par répartition. Dans une dernière séquence, plusieurs pistes de recommandations seront proposées. Elles s’inscrivent dans un cadre repensé en termes d’emploi des seniors et de droits à la retraite. Un « revenu d’engagement senior » offrirait une possibilité de seconde vie professionnelle aux seniors en contrepartie d’un projet à forte utilité sociale notamment dans les domaines de la reconstruction écologique et du « care » (aide à la personne et aux besoins élémentaires du quotidien). Il serait une réponse non marchande à la problématique de l’emploi des seniors. Une autre proposition est fondée sur la reconnaissance d’un droit à la retraite attaché à la personne et non plus à la carrière professionnelle. Enfin, des mesures de financement de notre système sont étudiées, non pour garantir la pérennité de notre système qui n’est pas en cause, mais pour des objectifs de justice sociale et en particulier pour mettre fin à cette baisse continue du taux de remplacement. Un dispositif fondé sur une cotisation retraite appliquée non plus sur la seule masse salariale mais sur l’intégralité de la valeur ajoutée est envisagé. Il assurerait une meilleure répartition des gains de productivité entre la rémunération du capital et du travail. Un prélèvement exceptionnel sur le montant des dividendes versés est proposé. Il viendrait abonder un fonds spécifique retraite. I- Une succession de réformes porteuses de plus d’inégalités Il est d’abord essentiel de rappeler les principales données chiffrées en matière de dépenses et de financement de notre système de retraite ainsi que les principales données « d’environnement » comme le taux d’emploi des seniors, les espérances de vie. Nous présenterons ensuite une rétrospective des réformes paramétriques engagées depuis les années 1980, décennie pivot marquant un véritable tournant en matière de dépenses sociales. Nous mettrons enfin en lumière les principales conséquences de ces réformes en particulier sur le montant des dépenses de retraite et sur l’évolution du taux de remplacement. 1.1 Les dépenses de retraites représentent 14 % du PIB avec un poids des régimes à prestations définies encore prédominant La part dans le PIB français des dépenses de protection sociale a sensiblement augmenté au cours des 60 dernières années. Elle était de 15% en 1960 pour atteindre en 2019 un peu plus de 30% du PIB. Cette proportion est relativement stable depuis les années 2010. Si les années 2020 et 2021 rendent compte d’une augmentation sensible de ces dépenses qui atteignent 33% du PIB, c’est en raison de dépenses exceptionnelles engagées dans le cadre de la crise du COVID. Les comptes de l’année 2020 enregistrent en particulier une charge exceptionnelle de 46 milliards, dont 27 au titre des seules mesures de chômage partiel. Ceux de 2021 sont encore impactés par les dépenses engagées au titre de la vaccination et des campagnes de dépistage. Les deux principaux « risques » couverts par ces dépenses de protection sociale sont, sans surprise, la vieillesse et la maladie à hauteur respectivement de 14% et de 11,3% de ce même PIB[1]. La France compte plus de 16 millions de retraités auxquels 330 milliards d’euros de pensions par an sont versés, ce chiffre incluant

Par Moutenet P., Adrianssens C., Neveu J., Montjotin P.

16 février 2023

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